30 mai 2013 4 30 /05 /mai /2013 23:31

 

 


Parce que « La verité n’a aucune importance. Seuls les objectifs sont importants »

par Paul Craig Roberts *

 

Vous êtes-vous jamais demandé comment la désinformation gouvernementale gagne t-elle du terrain ?

Ce que j’ai remarqué c’est que dès qu’un épisode choquant se produit, comme le 11 Septembre ou l’attentat à la bombe du marathon de Boston, presque tout le monde dans le spectre politique de droite et de gauche, avale l’explication du gouvernement, parce qu’ils peuvent rattacher leur agenda (politique) aux basques du gouvernement.

Les gauchistes aiment la version officielle des musulmans créant le chaos et le désordre aux Etats-Unis d’Amérique, car cela prouve leur théorie de l’effet boomerang et les satisfait en cela que les dépossédés et les opprimés peuvent se battre contre l’impérialisme.

La droite patriotique aime la version officielle, car cela prouve que les USA est attaquée à cause de sa bonté, ou parce que les terroristes sont entrés dans le pays à cause des autorités d’immigration et nourris par le système social, ou parce que le gouvernement, qui ne peut jamais rien faire correctement, a ignoré un certain nombre d’alertes.

Quoi que le gouvernement dise, quel que soit le problème, la version officielle gagne en momemtum par sa compatibilité avec des prédispositions existantes et les différents agendas politiques. Dans un tel pays, la vérité n’a aucune importance. Seuls les objectifs sont importants.

On peut voir cela partout. Je pourrai écrire des volumes illustrant comment des écrivains motivés par un agenda spécifique à travers le spectre politique, soutiendront des histoires improbables racontées par le gouvernement et ce malgré l’absence de toute preuve, simplement parce que la ligne du gouvernement peut être exploitée pour soutenir leurs agendas quels qu’ils soient.

Par exemple, un écrivain conservateur dans le numéro de Juin de Chronicles, utilise la théorie du gouvernement au sujet des soi-disant terroristes des attentats de Boston, les frères Tsarnaev, pour argumenter contre l’immigration, l’amnistie contre les illégaux et l’asile politique pour les musulmans. Il écrit : « Même le système de sécurité le plus incroyablement sophistiqué échouera inévitablement alors qu’il sera submergé par un flot d’immigrants hostiles et dangereux. »

L’auteur accepte toutes les déclarations improbables du gouvernement comme preuve de la culpabilité des frères Tsarnaev. Le frère blessé, qui était incapable de répondre au propriétaire du bateau qui l’avait découvert et qui a dû être placé en réanimation avait réussi, bien sûr, à écrire une confession à l’intérieur du bateau.

Dès que les autorités ont eu le frère blessé bouclé dans un hôpital en soins intensifs, des « officiels anonymes » établirent un récit dans les médias pour dire que le suspect était en train de signer des aveux écrits de sa culpabilité tout en étant placé en réanimation ; mais nous savons que ces aveux existent puisque le gouvernement et les médias nous le disent.

L’auteur conservateur sait que Dzokhar Tsarnaev est coupable parce qu’il est musulman et tchétchène. Ainsi, il n’apparaît aucunement à l’auteur de se demander quel pourrait bien être l’agenda des sources anonymes qui sont tant occupées à créer la culpabilité du plus jeune des frères. Cela assure qu’aucun juré n’osera voter un acquittement et qu’il devra expliquer son acte à sa famille et ses amis. Le concept d’innocent jusqu’à preuve du contraire dans une cour de justice, a été jeté par la fenêtre. Cela devrait inquiéter cet auteur conservateur, mais ce n’est pas le cas.

Cet auteur voit le fait d’être tchétchène comme une indication de culpabilité alors même que les deux frères ont grandi aux Etats-Unis comme des Américains normaux, parce que les Tchétchènes sont « engagés dans un djihad anti-russe ». Mais les Tchétchènes n’ont aucune raison d’être hostiles envers les USA. Comme les faits le montrent, Washington soutient les Tchétchènes dans leur conflit contre la Russie. En soutenant le terrorisme tchétchène, Washington viole toutes les lois qu’il applique sans merci à des citoyens usaméricains pleins de compassion qui donnent aux œuvres caritatives palestiniennes que Washington suppute être gérées par le Hamas, déclaré organisation terroriste par ce même Washington.

Il n’apparaît pas à cet auteur conservateur qu’il y a quelque chose qui ne va pas lorsque la loi martiale est appliquée sur une des villes principales américaine et sa zone métropolitaine, que plus de 10 000 hommes sont mis dans les rues avec des véhicules blindés et les citoyens sont ordonnés de sortir de chez eux avec les mains sur la tête, tout cela pour rechercher un seul jeune suspect fugitif de 19 ans, blessé. Au lieu de cela, l’auteur blâme « l’état de surveillance » pour « les conséquences inévitables du libéralisme suicidaire », qui a endossé « le plus vieux pêché du monde : la rébellion contre l’autorité ». L’auteur se délecte tellement de pouvoir utiliser la ligne directrice du gouvernement comme moyen d’excuser la romance conservatrice avec l’autorité et de porter des coups au libéralisme, qu’il ne voit pas qu’il s’est mis sur une ligne opposée à celle des pères fondateurs qui ont signé la Déclaration d’Indépendance et se sont rebellés contre l’autorité.

J’aurai tout aussi bien pu utiliser un écrivain de gauche pour illustrer l’opinion que des explications improbables sont acceptables si elles sont consistantes avec des prédispositions qui peuvent être employées pour satisfaire un agenda particulier.

Pensez-y. Ne pensez-vous pas que c’est extraordinaire que les seules enquêtes réelles qui ont été faites sur des évènements comme le 11 Septembre ou le marathon de Boston, sont des enquêtes privées, comme cette enquête sur les sacs à dos dans WhoWhatWhy

Il n’y a pas eu d’enquête sur le 11 Septembre. En fait, la Maison Blanche a résisté à toute demande d’enquête pendant un an et ce malgré les demandes insistantes faites par les familles des victimes. Le NIST n’a fait aucune enquête. Le NIST a juste construit un modèle informatique qui était en accord avec la théorie du gouvernement. La commission sur le 11 Septembre n’a fait que se réunir et écouter l’explication gouvernementale et l’a transcrite sur papier. Ceci ne constitue en rien des enquêtes.

Les seules recherches et enquêtes sont provenues d’un physicien qui a prouvé que la tour 7 du WTC (NdT : la 3ème tour…) s’est effondrée à la vitesse de la chute libre et que cela était le résultat d’une démolition contrôlée ; et par une équipe de scientifiques qui ont examinés la poussière des tours du WTC et y ont trouvé de la nano-thermite, par une équipe d’architectes et d’ingénieurs du génie civil ayant des décennies d’expérience sur le terrain, et par les équipes de premiers secours et les pompiers qui étaient sur place, dans les tours pour certains et qui ont vus et entendus des explosions partout dans les tours, y compris dans les sous-sols.

Nous avons atteint un point où la preuve n’est plus nécessaire. Les déclarations du gouvernement suffisent. Seuls des abrutis conspirationnistes produisent de vraies preuves.

En Amérique, les déclarations du gouvernement ont une autorité unique. Cette autorité provient du chapeau blanc que portaient les Etats-Unis depuis la seconde guerre mondiale et la guerre froide qui s’en est suivie. Il était très facile de diaboliser l’Allemagne nazie, le communisme soviétique et le maoisme chinois. Même aujourd’hui, lorsque des organes de presse russes me questionnent sur l’état périlleux des libertés civiles aux Etats-Unis et les attaques militaires incessantes de Washington dans des pays étrangers, je reçois parfois des messages de quelques Russes qui croient qu’un imposteur a été interrogé par leurs médias et non pas le véritable Paul Craig Roberts. Il y a des Russes qui croient que c’est le président Reagan qui a amené la liberté en Russie et comme j’ai servi dans le gouvernement Reagan, ces citoyens russes m’associent avec leur vision de l’Amérique comme étant une lumière sur le monde. Certains citoyens russes pensent vraiment que les guerres de Washington sont vraiment des guerres de libération.

Les mêmes illusions règnent au sein des dissidents chinois. Chen Guangchen est le dissident chinois qui chercha refuge dans l’ambassade des Etats-Unis en Chine. Il a été interviewé récemment par le BBC World Service. Il croit sincèrement que les Etats-Unis protègent les droits de l’Homme tandis que la Chine les supprime. Il s’est plaint à la BBC qu’en Chine la police arrête des citoyens et les maintient en détention pendant six mois sans dire qu’elle les détient. Il pensait que les Etats-Unis et le Royaume-Uni devraient publiquement protester contre cette violation des droits légaux, des droits de l’Homme. Apparemment Chen Guangchen n’est pas au courant que les citoyens des Etats-Unis sont soumis à des mesures de détention indéfinie sans recours légal, sans avocat et même sujet à des assassinats extra-judiciaires.

Le gouvernement chinois a permis à Chen Guangchen de passer et de quitter la Chine et de vivre aux Etats-Unis. Chen Guangchen est tellement imbu de ses illusions sur l’Amérique comme le phare des droits de l’Homme dans le monde qu’il ne lui est jamais apparu que le gouvernement chinois si oppresseur et violeur des droits de l’Homme lui a donné un passage libre vers l’extérieur, mais que quelqu’un comme Julian Assange, auquel l’asile politique a été accordé par l’Équateur, est toujours confiné dans l’ambassade de ce pays à Londres, parce que Washington ne permet pas à son état marionnette de Grande-Bretagne de lui donner un passage libre vers l’Équateur.

Peut-être que Chen Guangchen et les dissidents russes et chinois qui sont si amourachés des Etats-Unis, pourraient gagner un peu en perspective s’ils lisaient le livre du soldat Terry Holdbrooks au sujet du traitement donné aux prisonniers de Guantanamo Bay. Holdbrooks était là-bas, il fit partie du processus de détention et voici ce qu’il a dit à la chaîne de télévision russe anglophone Russia Today(RT) : « La torture et les méthodes d’extraction d’information que nous avons utilisées ont certainement créé beaucoup de doute et de questions dans mon esprit quant à savoir si cela était compatible avec mon Amérique. Mais j’ai bien réfléchi à ce que nous faisions là-bas et à la façon dont nous le faisions, cela ne ressemblait pas du tout à l’Amérique que je m’étais assigné de défendre. Cela ne ressemblait pas du tout à l’Amérique dans laquelle j’avais grandi et cela en soi, fut une énorme expérience de désillusion. »

Dans un article du Wall Street Journal du 17 Mai, Peggy Noonan écrivit que le président Obama avait perdu de sa superbe dans la moralité.

Qu’avait donc bien pu faire Obama pour avoir perdu cette superbe ? Est-ce parce qu’il s’assoit dans le bureau ovale pour approuver la liste de citoyens américains qui doivent être assassinés de façon extra-judiciaire ? Est-ce parce qu’il fait détenir des citoyens américains indéfiniment sans recours judiciaire en violation du Habeas Corpus ? Est-ce parce qu’il maintient ouverte la prison goulag de Guantanamo ? Est-ce parce qu’il continue les guerres que les néo-conservateurs ont commencées, malgré leurs promesses de les terminer et d’en avoir commencé de nouvelles ?

Est-ce parce qu’il fait attaquer des gens dans leur maison avec ses drones, ainsi que des centres médicaux et des endroits de la vie de tous les jours dans des pays avec lesquels les Etats-Unis ne sont pas en guerre ? Est-ce parce que son gouvernement corrompu espionne les citoyens américains sans mandats de justice et sans cause probable ?

Non. C’est pour aucune de ces raisons. D’après Noonan, ceci ne constitue pas le pourquoi les présidents, même des présidents démocrates, perdent de leur superbe morale. On ne peut plus avoir confiance en Obama, par que le fisc a harcelé quelques activistes politiques conservateurs.

Noonan est républicaine et ce qu’Obama a fait de mal a été d’utiliser l’agence du fisc (IRS) contre quelques républicains, Apparemment, il ne vient pas à l’esprit de Noonan que si Obama, ou quelque président que ce soit, peut utiliser l’IRS contre son opposition politique, il peut utiliser le Département de la Sécurité de la Patrie (NdT : le Department of Homeland Security ou DHS, la Stasi, Securitate américaine) et la police contre eux. Il peut utiliser la détention indéfinie contre eux. Il peut utiliser des drones contre eux.

Tout ceci sont des mesures bien plus graves. Pourquoi Peggy Noonan ne se sent-elle pas concernée ? Parce qu’elle pense que ces mesures ne seront utilisées que contre des terroristes, juste comme le fisc est supposé n’être utilisé que contre les fraudeurs.

Quand une population et les commentateurs qui sont supposés l’informer acceptent l’effondrement de l’autorité constitutionnelle et la mise au placard de leurs libertés civiles et fondamentales, se plaindre du fisc n’a aucun sens.

Paul Craig Roberts

Article original : Why disinformation works ?

 Traduit de l’anglais par Résistance 71  23 Mai 2013

* Paul Craig Roberts il a été rédacteur en chef du Wall Street Journal et secrétaire adjoint du Secrétaire au Trésor US. Il est l’auteur de «  How the Economy Was Lost : The Lost Economy/ War of the Worlds  », », publié par CounterPunch / AK Press. ISBN 978-1-84935-007-5.
Son dernier livre est «  Economies in Collapse : The Failure of Globalism  », publié en Europe, Juin 2012.
Vous pouvez le contacter via son site internet : http://www.paulcraigroberts.org

 

Source :
Pourquoi la désinformation fonctionne ?Parce que « La verité n’a aucune importance. Seuls les objectifs sont importants » - El Correo

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25 mai 2013 6 25 /05 /mai /2013 13:50

 

Je vous propose  ce texte, c’est le meilleur texte francophone que j’ai lu concernant la démocratie bourgeoise. J’écrivais  hier concernant la vision démocratique d’Obama concernant l’Amérique Latine : « Une démocratie proche de la version originaire athénienne où la politique est le loisir des riches délivrés du travail par le labeur des esclaves et la soumissions de leurs voisins. »

 

Anne, note de lecture

Dans la déclaration des droits de l’homme du 26 août 1789 : l’article 3 pose que « le principe de toute souveraineté réside essentiellement dans la nation; nul corps, nul individu ne peut exercer d’autorité qui n’en émane expressément ».

C’est là que se joue la confiscation du pouvoir dans la différence entre un principe de « peuple souverain » ou de « nation souveraine ». Après on entre dans un débat technique. Mais la différence est essentielle, dans une démocratie participative le peuple est souverain, ce qui implique la création des instances qui lui permette d’exercer en pratique concrètement cette souveraineté, dans la démocratie représentative, c’est la nation, soit les « représentants du peuples » qui concentre tout le pouvoir décisionnel. Une autre paire de manche. 

(Source : L’idiot du village)

Via :
L’Oligarchie a fait un rêve « État du Monde, État d'Être

Guernica800w-150x150.jpgUn biais nécessaire

La démocratie occidentale est-elle le résultat heureux du long malheur des peuples ? Ces peuples ont-ils lutté pour obtenir des droits et jouir de leurs fruits après les avoir courageusement arrachés des mains de leurs maîtres avares de bons sentiments ? Autrement dit, ces peuples ont-ils réussi à faire plier les oligarchies devant la puissance de leurs aspirations démocratiques et les oligarchies ont-elles rendu l’âme en vomissant sur la place publique la liberté, l’égalité et la fraternité universelle comme autant de tribus de leur soumission aux nouveaux maîtres de la terre – les peuples souverains – dont nous serions les héritiers ?

Plutôt que de flatter notre ego citoyen et de nous conférer une puissance que nous nous supposons en attribuant aux peuples – auxquels nous nous identifions – le rôle principal dans le torrent démocratique qui a submergé l’Occident aux cours des deux derniers siècles, exerçons notre mauvais esprit – critique, il va sans dire – sur nous-mêmes et prenons à partie le mythe de nos origines.

Au lieu de voir la démocratie comme le résultat d’une succession de conquêtes glorieuses remportées par le peuple, conscient de sa force, sur l’inertie d’une oligarchie arc-boutée sur ses privilèges, voyons le processus de démocratisation occidentale comme la suite d’adaptations entreprises par l’oligarchie pour consolider sa domination et se préserver des éruptions populaires trop débordantes d’empathie révolutionnaire.

Parions qu’en partant de ce point de vue – méthodologique – nous constaterons, avec trouble et peut-être une certaine amertume, que l’oligarchie n’as pas cédé une once de son pouvoir au peuple en lui offrant généreusement des droits, des institutions, des représentations démocratiques au sein du carcan capitaliste libéral qui a pris forme tout au long de l’évolution moderne des sociétés occidentales.

En adoptant cette perspective, nous ne cherchons pas à désenchanter les luttes politiques et sociales qui n’auraient été, jusqu’à présent, que des instruments aux mains de l’oligarchie occidentale lui permettant de se maintenir au pouvoir. Nous souhaitons simplement souligner que ces luttes, si elles n’ont pas été inutiles pour certains peuples ou certaines portions du peuple, si elles n’ont pas été dépourvues de moments collectifs fraternels et héroïques, si elles ont pu remporter des victoires importantes ici ou là, elles n’ont jamais atteint le cœur même du problème des sociétés occidentales qui se parent de toutes les vertus démocratiques : la domination d’une oligarchie qui règne sans partage – équitable – sur l’ensemble des pouvoirs politiques, économiques et culturels et qui n’octroie à ses ouailles que ce qu’elle croit bon devoir lui concéder, à savoir, les miettes de l’orgie capitaliste.

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À l’origine de la démocratie… l’oligarchie

La démocratie occidentale ne s’est pas construite contre l’oligarchie, mais avec sa complicité. Pire encore, l’oligarchie est à l’origine même de la démocratie moderne. Elle a, par conséquent, façonné la démocratie à son image afin qu’elle serve ses intérêts particuliers. La démocratie occidentale en porte la marque (le système représentatif) ; nos institutions en ont les stigmates (un multipartisme de façade ; des droits et des libertés impuissants contre les fondamentaux libéraux de l’oligarchie ; l’argent comme carburant de la vie politique ; une répartition très inégalitaire des richesses produites, etc.).

L’oligarchie a su faire siennes toutes les revendications populaires pour les orienter en sa faveur ou pour les vider d’une partie de leur substance corrosive ; elle a pu insuffler les changements démocratiques de manière à ce qu’ils ne remettent en cause ses fondamentaux qu’à la marge. L’oligarchie a réussi à se fondre dans le moule démocratique et à s’en faire un bouclier qui la protège des colères populaires.

Ce point de vue devrait nous permettre de comprendre pourquoi les démocraties occidentales commettent de manière régulière des crimes de masse au nom de leurs peuples et des valeurs démocratiques sans que les opinions publiques ne s’en émeuvent outre mesure ; pourquoi elles peuvent utiliser sans vergogne le chaos et la guerre dans les relations internationales pour maintenir leur prééminence sur les affaires du monde ; pourquoi les États-Unis peuvent massacrer des centaines de milliers de civils innocents sans honte bue en Irak, en Afghanistan ou ailleurs ; pourquoi la France peut se rendre coupable de complicité de génocide au Rwanda sans qu’aucun de ses dirigeants ne soient poursuivis en justice ; pourquoi Israël peut procéder à un lent génocide contre le peuple palestinien avec bonne conscience et la complicité des milieux médiatiques qui ne pipent mot ; pourquoi les Occidentaux s’allient avec l’islamisme radical pour détruire des pays comme la Libye et la Syrie tout en se prétendant les anges gardiens de l’innocence et du bien, etc.

Toutes ces contradictions apparentes entre les principes des Lumières affichés par les sociétés occidentales et leurs actions politiques et géopolitiques concrètes s’expliquent, notamment, parce que l’oligarchie est au cœur même des démocraties occidentales, qu’elle en est l’architecte et le metteur en scène qui écrit le scénario de son évolution. La démocratie représentative occidentale n’entrave ni la puissance de l’oligarchie ni l’expression de ses vices et de ses dérives. Elle en est, au contraire, l’instrument privilégié.

Car, nous le verrons, la démocratie occidentale, à la fois instrument de protection et de domination de l’oligarchie libérale, donne une force légale et morale aux prédations de nos élites. Par le système de la représentation, les peuples offrent leur caution morale aux choix de leurs mandataires qui prétendent agir en leur nom, ce qui n’est d’ailleurs guère contestable d’un point de vue légal. De la sorte, les crimes de l’oligarchie sont aussi les nôtres, puisqu’ils sont l’œuvre de nos représentants et que nos protestations face à leurs actions criminelles se traduisent généralement par leur réélection ! Quelques fois, cependant, il arrive qu’un des mauvais génies de l’oligarchie soit sacrifié par ses pairs et soit mis à l’écart. Mais, dans ce dernier cas, il est généralement prestement remplacé par un autre démocrate aux mains sales qui poursuit allègrement l’œuvre de son prédécesseur.

Enfin, ce point de vue nous aidera peut-être à comprendre l’ampleur de l’effort qu’il reste à accomplir pour tenter l’aventure démocratique contre le principal obstacle à l’abolition des contradictions et des ambiguïtés des sociétés occidentales : le pouvoir inébranlable de l’oligarchie. Cela nous permettra de percevoir l’impasse qu’il y a à jeter toute son énergie combative dans des luttes périphériques sociétales (pour ou contre la peine de mort, l’interdiction du port du voile à l’école, le mariage gay, etc.) qui n’atteignent pas, ni ne cherchent à atteindre, le cœur de ce pouvoir.

 

Un marché de dupes

Remontons, un instant, à aux révolutions française et américaine pour illustrer notre propos.

Au pays des droits de l’homme… on tire sur le peuple…

Dans la France du 18ième siècle finissant, nous voyons une ancienne oligarchie aristocratique, fatiguée, divisée et moribonde qui cède la place à une oligarchie bourgeoise conquérante et sûre d’elle-même. Cette dernière n’a, depuis lors, pas quitté les rênes du pouvoir. Après avoir fait fortune dans le commerce triangulaire, avoir amassé des montagnes d’or en commettant des crimes de masse aux quatre coins du monde (du continent américain à l’océan Pacifique), il fallait que l’oligarchie bourgeoise enrobe ses succès du sceau de valeurs universelles. À l’onction divine de l’ancienne oligarchie, la nouvelle classe dirigeante voulait lui substituer l’onction populaire.

La classe bourgeoise a su habilement jeter le peuple dans la rue pour lui faire accomplir la sale besogne qu’elle n’aurait jamais pu mener à bien elle-même sans tâcher ses nouveaux habits de maître : saigner les corps en décomposition de l’Ancien Régime et anéantir les symboles d’un pouvoir qui avait déjà changé de mains, tout en faisant la démonstration que la démocratie directe est synonyme de terreur, de chaos et de sang. D’une certaine manière, il s’agissait d’avilir le peuple et ses aspirations légitimes, d’entacher ses rêves de démocratie avec le sang de ceux que la nouvelle oligarchie voulait chasser du pouvoir. Il s’agissait, ainsi, d’enterrer toute idée de démocratie directe sous les dépouilles fumantes des anciens ordres faillis. Subtile manœuvre de l’oligarchie bourgeoise qui a feint de donner le pouvoir au peuple pour le lui retirer ; démonstration aussi de son jeu pervers et violent pour asseoir sa légitimité. La tête du Roi ne lui suffisait pas ; il lui fallait celles des révolutionnaires, gueux ou bourgeois, qui avaient épousé trop étroitement la cause du peuple et des misérables.

À partir de la Révolution française, et grâce au système de la démocratie représentative, l’oligarchie pourra réprimer dans le sang toute révolte populaire au nom de la souveraineté du peuple : en juin 1848 c’est au nom du peuple que le républicain Cavaignac ira gaiement massacrer les masses populaires en plein Paris ; en mai 1871, ce sont les hommes de la future Troisième République qui organiseront les battues contre les Communards et s’acharneront sur leurs corps et leur mémoire. Aujourd’hui, en digne héritière de l’ire oligarchique, c’est au nom du droit des peuples à disposer d’eux-mêmes que la France envoie à la mort Libyens et Syriens et procède au dépeçage de leurs pays respectifs avec l’aide de milices terroristes wahhabites.

Le génie de l’oligarchie a été d’octroyer des droits aux peuples quémandeurs. Le droit n’est jamais qu’une promesse que personne n’est tenu d’accomplir. C’est un espoir qui ne coûte pas grand-chose à la nouvelle religion laïque qu’est la démocratie représentative et qui ne menace pas l’ordre oligarchique. Une démocratie juridique, mais pas réelle, voilà le chef d’œuvre de l’oligarchie capitaliste naissante. Le peuple aura des droits, mais pas toute la réalité de la chose. Les droits sont impuissants à rattraper le réel, et tant pis si le peuple continue à lui courir après.

Dans la patrie des braves… il y a des maîtres et des esclaves…

De l’autre côté de l’Atlantique, au commencement de la jeune république américaine, les élites ont passé un marché – à la bourse des valeurs humaines – avec leur peuple, dont la philosophie pourrait se résumer en ces mots : « vous nous laissez massacrer les Indiens pour étendre notre horizon, vous nous permettez d’utiliser le travail gratuit de millions d’esclaves pour cultiver ces vastes territoires et en échange nous vous octroyons des droits politiques et économiques ».

Pour prendre la place de l’oligarchie anglaise sur le territoire nord américain, il fallait que l’élite américaine parvienne à faire passer ce marchandage pour une émancipation du peuple. Il ne s’agissait, cependant, que d’officialiser la substitution d’une oligarchie lointaine par une oligarchie locale (i) qui souhaitait acquérir davantage de terres (notamment au détriment des Indiens qui avaient obtenu de l’Angleterre, en 1763, la fin de l’expansion territoriale des colonies), (ii) qui cherchait à s’acquitter de moins d’impôts et de taxes et (iii) qui voulait se réserver les richesses tirées de l’esclavage. Pour ne pas mettre en avant les revendications matérielles de l’oligarchie américaine, ce qui eut paru égoïste et aurait réduit l’opposition entre l’Angleterre et ses colonies à une querelle de rentiers, il fallait mettre en scène le peuple et prétendre défendre des valeurs universelles et une cause morale allant au-delà de l’esprit de conquête et de rapine d’un petit groupe de privilégiés, grands possédants et propriétaires d’esclaves comme George Washington et Thomas Jefferson. Pour réussir, il fallait à la fois que le peuple se croit opprimé par ses lointains maîtres, qu’il joue le rôle qu’on voulait qu’il tienne, qu’il se contente de droits politiques et économiques qu’il possédait déjà et qu’il consacre la domination de son oligarchie locale. En soulevant le peuple contre les maîtres anglais on lui donnait le sentiment que ses donneurs d’ordre américains partageaient les mêmes intérêts et qu’une fois libéré des chaînes du Roi George (troisième du nom) le peuple serait maître de son propre destin sous la figure tutélaire du Président George Washington.

En 1980, l’historien et essayiste américain Howard Zinn publiait « Une Histoire Populaire des États-Unis »[1], livre fondateur qui devait marquer un tournant dans l’historiographie consacrée au Pays à la Bannière étoilée, terre autoproclamée de la liberté et patrie des braves[2]. Jusque-là, l’histoire des États-Unis avait été principalement écrite du point de vue de ceux qui avaient largement bénéficié des retombées de son capitalisme conquérant. À lire la plupart des historiens américains avant Howard Zinn, il semblait que les États-Unis étaient une nation pleine de héros surhumains ayant achevé d’accomplir la perfection humaine, œuvre laissée en jachère par un Dieu imparfait.

Howard Zinn opère un renversement de perspective et décrit l’Histoire de l’Amérique, puis des États-Unis, du point de vue de ses victimes, depuis l’arrivée des occupants européens jusqu’à nos jours. L’histoire ainsi décrite ressemble moins à une épopée grandiose où les héros succèdent aux héros[3] qu’à une longue série de crimes et de malheurs dont sont victimes les plus nombreux. Ainsi, sont évoqués les massacres des Indiens, leur déportation et la confiscation systématique de leurs terres, le commerce transatlantique avec ses cargaisons d’humanité bafouée, l’esclavage avec le labeur forcé et gratuit de millions d’êtres humains[4], puis les répressions sanglantes des travailleurs des classes laborieuses tout au long des 19ième et 20ième siècles et, enfin, la misère dégradante dans laquelle vivaient – et vivent encore – des dizaines de millions de citoyens américains ou d’immigrés victimes de la réussite des autres, forcés de travailler dès le plus jeune âge et de se tuer à la tâche pour que le puissant accumule richesses et honneurs. Howard Zinn nous fait bien comprendre, que c’est sur ces crimes et malheurs que la puissance du pays s’est bâtie au profit d’une minorité prospère et égoïste.

Les droits n’ont été octroyés que pour moraliser et justifier l’exploitation des plus faibles et donner à cette exploitation le sceau démocratique qui permettra de prétendre qu’elle est le résultat de l’expression de la souveraineté populaire. Ce n’est plus Dieu et son représentant sur terre qui exigent une société de maîtres et d’esclaves, de dominants et de dominés, de bienheureux et de damnés, c’est le peuple lui-même pris au piège de sa propre souveraineté dans un système de démocratie représentative qui offre à ses représentants les clefs de sa propre servitude.

Des droits sur mesure pour le marché

Des deux côtés de l’Atlantique, l’éventail des droits sera, cependant, élargi progressivement au cours des deux siècles qui se sont écoulés depuis les révolutions américaine et française. Une plus grande portion du peuple pourra goûter à l’expression concrète de ses droits dans sa vie quotidienne. Mais il ne s’agira jamais que d’une reconnaissance, par l’oligarchie, des évolutions des besoins du capitalisme occidental, qui repose toujours davantage sur la solvabilité réelle ou artificielle – par l’endettement – d’une base toujours plus large de consommateurs. Au fur et à mesure de l’extension des moyens de production elle étendra son marché en octroyant des droits à des composantes du peuple qui en étaient privées jusque-là  – comme les noirs ou les femmes – non pas en raison d’un amour immodéré pour ces catégories sociales et humaines opprimées, mais pour élargir l’aire de jeu du capitalisme marchand.

Si les peuples occidentaux ont été tant choyés pendant les Trente Glorieuses ce n’est pas parce que les valeurs démocratiques envahissaient l’oligarchie ou que celle-ci avait perdu du terrain, mais (i) parce qu’il fallait reconstruire un monde en ruine, la ruine n’étant pour l’oligarchie dominante qu’une source d’opportunités supplémentaires ; (ii) que le capitalisme de la séduction – dont les mécanismes ont été finement décortiqués par le sociologue Michel Clouscard – avait besoin de libérer l’individu occidental d’un certain nombre de contraintes culturelles (notamment sexuelles) pour étendre l’emprise du marché (et transformer le citoyen bon père de famille en un consommateur pulsionnel) ; et (iii) que l’Occident devait maintenir un avantage comparatif par rapport à l’Union Soviétique et au monde des non-alignés pour promouvoir son modèle de développement.

Après s’être hissée à la tête de l’oligarchie occidentale en 1945, l’élite américaine pouvait bien concéder quelques droits. Après avoir financé tous les belligérants, y compris Hitler et l’industrie de guerre allemande, l’oligarchie américaine pouvait récupérer le sceptre de l’élite mondiale et s’imposer économiquement, culturellement, militairement à ses « semblables » subalternes (autrement dit, aux sous-oligarchies de l’oligarchie dominante).

La livrée de chair du capitalisme

L’oligarchie occidentale fera payer cher aux peuples leurs débordements, leurs revendications, leurs suppliques et leurs quelques succès éphémères. Avant de leur concéder davantage de droits, elle saignera les peuples (notamment, au travers de deux Guerres mondiales), les épuisera dans des luttes mortelles (les mille et une répressions sanglantes des grèves ouvrières aux États-Unis, les massacres de juin 1848 et ceux de mai 1871 en France, etc.), les rendra dépendants de sa miséricorde matérialiste en les endettant outre mesure et leur fera approuver des crimes de masse contre d’autres peuples (d’Hiroshima à Guantanamo, du Guatemala au Nicaragua, de Thiaroye aux charniers rwandais, del’Indonésie à l’Irak, de la Libye à la Syrie, etc.) pour leur offrir les débris de ses exploits sanglants.

Chaque droit acquis – aussi illusoire que ce droit puisse être – sera payé par une livrée de chair, de souffrances, de larmes et de sang. Et à l’occasion d’une crise politique ou économique, l’oligarchie remettra en cause les acquis mal acquis pour que les peuples paient à nouveau le droit de les reprendre et de les récupérer, morceau par morceau, à la sueur de nouvelles souffrances[5].

À aucun moment l’oligarchie ne perdra sa prééminence, ses prérogatives, sa morgue, sa volonté de puissance ; à aucun moment elle ne consentira à répartir équitablement entre le travail et le capital les richesses produites par tous, même pendant les périodes de croissance continue. À aucun moment elle ne cédera sur ses fondamentaux libéraux.

Les Trente Glorieuses font illusion, et semblent contredire un constat nourri par une profusion d’exemples. Mais, 30 ans après la fin de la Seconde Guerre mondiale, l’illusion se dissipe dans la dure réalité de la crise : l’élite trouve les moyens de reprendre une partie des droits octroyés dans un moment d’égarement généreux né des fosses communes de la Seconde Guerre mondiale. Ainsi, le virage néolibéral et la financiarisation de l’économie du début des années 1980, la globalisation marchande, l’ouverture de l’Occident à la concurrence externe, auront raison des droits économiques concédés temporairement par l’oligarchie quelques décennies plus tôt.

Les Trente Piteuses succéderont aux Trente Glorieuses, alors même que les richesses produites n’auront et ne cesseront de croître. Au sein des sociétés occidentales, les élites continueront à s’enrichir à outrance et l’on verra apparaître les « hyper-riches », le nouveau visage des bienheureux et des bien-nés. L’écart entre les plus opulents et les plus pauvres connaîtra des proportions dignes de l’époque où Gavroche arpentait les rues misérables du Paris crasseux et on nous dira qu’il faut nécessairement se serrer la ceinture et recevoir les coups de cravache de la rigueur pour sauver la démocratie et la croissance.

On le voit bien, il s’agit d’un marché de dupes renouvelé de décade en décade : le peuple vend son âme contre des droits ; il accepte les crimes commis en son nom contre des fantasmes et des espoirs ; il recueille les miettes des dîners bourgeois et continue de courber l’échine pour gagner le salaire de sa peur ; il obtient un droit de grève ici contre un massacre plus loin, un droit de vote contre une colonie et une guerre de conquête en plus, la liberté d’opinion contre un salaire misérable, quelques services publics contre le droit d’aller se faire tuer dans les tranchées de Verdun, etc.etc.etc. In finitum ad nauseam.

 

Un instrument de protection

L’oligarchie occidentale se sent plus en sécurité dans un système politique de démocratie représentative qui donne une légitimité à sa position prééminente plutôt que dans une monarchie absolue. Cela est plus cohérent avec les valeurs qu’elle a mises en avant pour prendre le pouvoir aux États-Unis à partir de 1776 et en France à partir de 1789 et lui offre une protection contre le prince sans pouvoir qu’est le peuple souverain.

Déresponsabiliser

Dans un système de démocratie représentative il est difficile d’identifier le responsable ; il s’opère une sorte de dilution des responsabilités dans le marais oligarchique. L’oligarchie peut aisément se distancier du prince élu et offrir au peuple une tête temporairement couronnée sans perdre son pouvoir ni ses privilèges. La colère du peuple trouve ainsi un exutoire non violent ; on passe d’un représentant de l’oligarchie à un autre sans révolution et sans violence populaire. Le pouvoir absolu est toujours entre les mêmes mains, mais le visage de son représentant change, pour que rien ne change.

Il n’est pas aisé, par exemple, d’identifier un coupable à sa misère lorsque l’on est un citoyen américain pauvre vivant aujourd’hui aux États-Unis, le pays le plus riche et le plus puissant de la planète. Il ne peut accuser personne ; juste un système qui produit sa misère, mais dont personne ne semble responsable. Un Président américain, même s’il accomplit deux mandats, est difficilement rendu coupable de la situation de délabrement social produite par plus de deux cents ans de démocratie représentative ancrée dans ses fondamentaux libéraux. Il n’y a pas un tyran ou un personnage prétendu tel à qui prêter tous les malheurs du monde.

Désarmer

La démocratie représentative est désarmante car la volonté générale est sensée transpirer de toutes ses institutions. La révolte du peuple, quand elle a lieu, perd de sa force morale et peut être présentée comme une révolte contre la volonté populaire incarnée par l’oligarchie élue. L’oligarchie à qui on offre l’onction populaire se croit autorisée moralement et légalement, à tuer, conquérir, assassiner au nom de la démocratie et de ses prétendues valeurs. Le peuple a le droit de vote ; l’oligarchie a le droit de tirer dans la foule.

Toute l’intelligence de l’élite oligarchique a été de vendre au peuple la démocratie représentative comme le modèle indépassable de l’organisation politique moderne, le seul à même de répondre aux besoins des peuples occidentaux. Quel énergumène oserait, dès lors, remettre en cause un système qui semble briller face aux soleils noirs des totalitarismes d’hier et d’aujourd’hui.

Il semble, pour reprendre des propos que nous avons tenus ailleurs, que « les crimes ou les défauts [des démocraties] s’estompent dans la contemplation béate des bienfaits des régimes démocratiques à laquelle nous nous abandonnons mollement. Nous sommes habitués aux dichotomies simples, voire simplistes : soit noir, soit blanc ; soit démocratie, soit dictature ; soit le paradis, soit l’enfer. Or, il est évident que la démocratie peut être un paradis pour beaucoup et un enfer pour d’autres, qu’elle peut avoir un visage souriant et lumineux et une face sombre : en 1789, la jeune démocratie américaine qui venait d’élire son premier Président était sans doute un paradis pour des notables blancs comme George Washington et Thomas Jefferson, mais peut-être un peu moins pour les millions d’esclaves noirs exploités dans des conditions dégradantes et inhumaines ».[6]

La démocratie représentative désarme notre lucidité sur nous-mêmes ; nous ne sommes plus capables de voir le mal en nous, même lorsque nous jetons nos cargaisons de bombes au phosphore sur des irakiens innocents.

Déculpabiliser

En octroyant la démocratie à ses peuples, l’oligarchie occidentale s’est libérée de la contrainte de justifier ses actions. Les régimes occidentaux baignent dans le dogme de l’infaillibilité démocratique, dogme qui transforme leurs actions criminelles en aventures humanitaires, leurs prédations commises pour des intérêts privés en combats moraux et fraternels. Avec ce dogme, l’Occident s’offre une sorte d’innocence perpétuelle et se pare de toutes les vertus. D’une certaine manière, l’aléa moral a disparu au sein des démocraties occidentales : elles ne peuvent mal agir, puisque ce sont des démocraties. L’Occident peut dès lors déshumaniser les « autres », ses ennemis qui ne portent pas les habits de la démocratie ; il peut dès lors les massacrer au nom des droits de l’homme et racheter leurs âmes damnées en les envoyant en enfer. Sur la base de ce principe, les sociétés occidentales assurent l’impunité des crimes perpétrés par leurs démocrates aux mains sales.

L’oligarchie réussit, en outre, ce tour de force qui consiste à faire consentir ses citoyens aux violences qu’elle exerce. Grâce à la démocratie représentative nous partageons les crimes de nos commis. Devenus complices des actions de nos élites à travers le vote, nous n’osons pas les dénoncer avec la force nécessaire à les condamner ou à les détourner de leurs conséquences funestes, de crainte de reconnaître ainsi notre propre complicité. Partageant le crime, nous en partageons le déni et les mécanismes dé-culpabilisateurs qui le perpétuent.

 

Un instrument de domination

Le pouvoir symbolique sans le pouvoir réel

Qu’importe qui a le pouvoir abstrait ou symbolique, ce qui compte est d’exercer le pouvoir réel, même si c’est au nom d’une abstraction lyrique comme le « peuple souverain » que ce pouvoir est mis en œuvre. Le souverain – le peuple – n’exerce pas le pouvoir, il se contente de s’en dessaisir au profit d’une poignée d’élus qui aura carte blanche pour agir à sa guise. Le peuple est un souverain déchu et qui déchoit un peu plus après chaque vote. Le peuple, sorte de Sisyphe qui porte le vote comme son fardeau, consent volontiers à ce dessaisissement, par paresse, crainte, résignation, lassitude ou lâcheté. Car il faut une certaine lâcheté ou immoralité pour offrir son vote à des individus qui commettront immanquablement – l’expérience le prouve – un certain nombre de crimes au cours de leur mandat. Ces crimes, par le jeu de la représentation, sont commis en notre nom, par une oligarchie aux valeurs inébranlables et éternelles.

Le vote est ainsi une sorte d’offrande faite à un Dieu tout puissant qui ne rend compte de ses actes qu’à lui-même. À échéances régulières, le peuple vient sacrifier sa souveraineté sur l’autel de la démocratie représentative.

La Souveraineté ne peut être représentée, par la même raison qu’elle ne peut être aliénée ; elle consiste essentiellement dans la volonté générale, et la volonté ne se représente point : elle est la même, ou elle est autre ; il n’y a point de milieu. Les députés du peuple ne sont donc ni ne peuvent être ses représentants, ils ne sont que ses commissaires ; ils ne peuvent rien conclure définitivement. Toute loi que le Peuple en personne n’a pas ratifiée est nulle ; ce n’est point une loi. Le peuple Anglais pense être libre ; il se trompe fort, il ne l’est que durant l’élection des membres du Parlement ; sitôt qu’ils sont élus, il est esclave, il n’est rien. Dans les courts moments de sa liberté, l’usage qu’il en fait mérite bien qu’il la perde.

- Jean-Jacques Rousseau, « Du Contrat Social », III, 15.

Des droits impuissants

Le mécanisme de la démocratie représentative permet à l’oligarchie d’exercer l’ensemble des fonctions régaliennes, qui fondent la puissance et la gloire des États, en dehors même des mécanismes étatiques. Les États membres de l’Union européenne, par exemple, ont peu à peu été dépouillés (i) de leur souveraineté monétaire au profit des banquiers privés et d’institutions non-démocratiques (comme la BCE), (ii) de leur souveraineté économique au profit de multinationales qui délocalisent leurs profits et leur production et (iii) de leur souveraineté militaire au profit de l’Organisation du Traité de l’Atlantique Nord, autrement dit, des États-Unis.

Le droit de vote et la liberté d’expression ne sont octroyés au peuple que dans la mesure où leur usage ne peut ni ne doit remettre en cause les fondamentaux de l’oligarchie. Ce sont des droits impuissants.

Depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale ces fondamentaux sont ceux de l’oligarchie dominante qui exerce le pouvoir aux États-Unis, après avoir, grâce au plus sanglant et plus grand conflit de l’histoire, pris la place de l’oligarchie anglaise à la tête de l’Occident. On peut schématiquement en faire la liste suivante : (1) le libéralisme économique et la puissance des banques, (2) la domination du dollar dans les échanges internationaux, (3) les guerres de conquête du complexe militaro-industriel – pour, notamment, l’accaparement des ressources naturelles des pays périphérique à ses valeurs - ; (4) l’hégémonisme total des États-Unis dans les domaines militaire, économique et culturel ; (5) l’alliance indéfectible avec l’Arabie saoudite (principal État terroriste islamique au monde) ; (6) le soutien sans faille au sionisme.

Les peuples ont des droits, mais il ne leur est pas donné de remettre en cause les fondamentaux que nous venons d’énoncer.

Prenons un exemple parmi tant d’autres possibles. Qui peut prétendre que les 50 millions d’Américains vivant aujourd’hui sous le seuil de pauvreté vivent en démocratie ? Comment peut-on justifier que dans un pays aussi puissant et riche et qui a connu une croissance quasi-ininterrompue depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale il y ait une telle proportion de personnes vivant dans la misère ? Cette misère n’est-elle pas le produit du système oligarchique ? N’est-elle pas le résultat d’une philosophie libérale contre laquelle le peuple ne peut rien ? Que signifie jouir du droit de vote et de la liberté d’expression lorsque l’exercice de ces droits ne permet pas de survivre décemment, ni de remettre en cause l’un des fondamentaux libéraux de l’oligarchie ? Une personne vivant sous un pont d’une grande ville américaine peut critiquer à loisir les dirigeants politiques de son pays et jouit du droit de vote, mais à quoi cela lui sert-il, s’il ne peut s’arracher à sa misère par ces deux moyens ? Pour lui, le droit de vote et la liberté d’expression sont des jouissances impuissantes.

 

Trois exemples tirés de l’histoire

Appliquons notre « biais nécessaire » à trois événements contemporains qui illustrent, d’après l’esprit dominant de notre belle époque, la victoire des principes sur le cynisme de l’oligarchie.

Aux esclaves la patrie reconnaissante

La guerre civile américaine est présentée par l’historiographie dominante comme une lutte entre esclavagistes et abolitionnistes. Sous cet angle, le Président Abraham Lincoln passe pour un libérateur dont les motivations auraient été principalement humanitaires. Raisonner de la sorte, c’est s’aveugler sur les réels moteurs de l’histoire.

Une vision naïve de l’histoire met au centre de sa matrice le combat des hommes pour leur affranchissement, la lutte pour les droits de l’homme et le progrès de la conscience humaine. La réalité est généralement plus prosaïque et moins glorieuse pour les peuples et pour ses héros.

À travers la guerre civile américaine, il s’agissait pour une partie de l’oligarchie, la plus puissante, de mettre fin, non pas à un système d’exploitation, mais à une économie archaïque et peu rentable, pour la remplacer par une économie où l’esclave s’efface devant l’ouvrier mal payé et où une partie de la masse des manœuvres est abandonnée au profit des machines. L’abolition de l’esclavage était une nécessité économique pour maintenir la suprématie d’une élite qui réclamait des retours sur investissements plus rapides et plus élevés. L’esclavage c’était l’ancien régime économique inadapté à l’ère du capitalisme industriel et du progrès technique triomphant. Au moment précis où Lincoln décida de mettre fin à l’esclavage (pour lui substituer la ségrégation) il s’agissait, également, d’un choix tactique pour déstabiliser les États du Sud dans leur lutte contre les États du Nord.

Mon objectif premier dans cette lutte est de sauver l’Union, ce n’est pas de sauver ou de détruire l’esclavage. Si je pouvais sauver l’Union sans libérer aucun esclave, je le ferais et si je pouvais la sauver en les libérant tous, je le ferais ; et si je pouvais la sauver en en libérant une partie et en laissant les autres à leur sort, je le ferais également.

 - Lettre d’Abraham Lincoln, du 22 août 1862, citée dans ‘Dred Scott’s revenge’ d’Andrew Napolitano, 2009, page 79 – Éditions Thomas Nelson.

« I will say then that I am not, nor ever have been in favor of bringing about in any way the social and political equality of the white and black races, that I am not nor ever have been in favor of making voters or jurors of negroes, nor of qualifying them to hold office, nor to intermarry with white people; and I will say in addition to this that there is a physical difference between the white and black races which I believe will forever forbid the two races living together on terms of social and political equality. And inasmuch as they cannot so live, while they do remain together there must be the position of superior and inferior, and I as much as any other man am in favor of having the superior position assigned to the white race ».

- Abraham Lincoln, 18 septembre 1858, discours public, Illinois. The Collected Works of Abraham Lincoln, ed. Roy P. Basler, vol. 3, p. 14546

Une république versaillaise

La troisième République est née sur les décombres de la Commune comme une mauvaise herbe qui s’est nourrie du sang de ses victimes. Comme le démontre admirablement Henri Guillemin dans les Dossiers de l’Histoire, l’oligarchie a hésité entre monarchie et république au lendemain de la défaite de la France face à la Prusse et a finalement choisi cette dernière forme de domination politique parce qu’elle correspondait mieux aux nouvelles exigences capitalistes permettant de continuer les prédations oligarchiques tout en contenant les forces populaires.

La république – troisième du nom – fut octroyée et non arrachée de haute lutte par des démocrates détachés de tout lien oligarchique. Jules Ferry est l’emblème bien transparent de la mainmise de l’oligarchie sur les destinées démocratiques du peuple : il réussit à faire des droits de l’homme l’instrument de vastes conquêtes territoriales au profit d’un petit groupe de banquiers et d’industriels et à apaiser les colères du peuple en lui faisant « bouffer du curé ». Le peuple avait un os à ronger, tandis que l’oligarchie pouvait se gaver de conquêtes nouvelles et de sang frais.

Mythologie indienne

L’indépendance de l’Inde en 1947 est présentée comme le résultat du combat de la non-violence contre le colonialisme britannique. On voudrait nous faire croire que la non-violence a permis de renverser le joug du principal empire colonial de l’histoire. Et si le grand personnage Gandhi n’était que l’instrument d’une partie de l’oligarchie anglaise qui avait compris que les coûts associés au maintien d’une présence coloniale étaient incompatibles avec les évolutions du capitalisme ?

Gandhi renversant, par son pouvoir spirituel et sa grandeur d’âme, l’empire militaire britannique, est une fable bien risible. Il fut l’instrument de la partie de l’oligarchie britannique, avec l’appui des États-Unis[7], contre la vieille garde de cette même oligarchie, afin de passer à un autre stade du capitalisme de domination : le néo-colonialisme, ou la domination par les groupes industriels et les empires financiers.

L’illusion que la non-violence peut renverser l’ordre des choses est tenace. Les rêves adolescents de la désobéissance civile et de la non-violence se brisent néanmoins un peu plus lorsque les faits bruts et cruels font tomber de son piédestal l’idole placée en haut de la hiérarchie des intouchables. Le Mahatma Gandhi, ce prêcheur de vertu aux comportements sexuels plus qu’ambigus, ce personnage colérique et raciste[8], si détaché de lui-même qu’il entreprit d’écrire son autobiographie pour raconter sa prodigieuse épopée, était l’instrument idéal d’une partie de l’oligarchie anglaise qui avait compris que le néo-colonialisme devait remplacer les vieilles règles du jeu colonial d’antan ; que la domination économique pouvait se passer de conquêtes territoriales coûteuses et dangereuses. Une fois son rôle accompli, il pouvait être assassiné.

« Nous croyons en la pureté raciale. Nous croyons aussi qu’en tant que Blancs, la race Blanche d’Afrique du Sud doit être la race prédominante ». « Notre combat est une lutte pour la préservation de notre race, que les Européens veulent mêler aux Kaffirs rudes et incivilisés. »

- Gandhi. Collected Works, Indian Opinion Archives.

 

Pour ne pas conclure

Nous avons défendu l’idée que les élites occidentales ont octroyé la démocratie représentative à leurs administrés pour pouvoir se maintenir au pouvoir. En échange de quoi les peuples occidentaux ont accepté, ou ont été forcés d’accepter, de ne participer que symboliquement au jeu démocratique et de fermer les yeux sur un certain nombre de crimes humains, politiques, économiques de grande ampleur perpétrés par leurs élites (contre eux-mêmes ou contre d’autres peuples).

L’oligarchie a instrumentalisé la démocratie pour accomplir un rêve qu’elle aurait pu formuler de la manière suivante : « Qu’ils se battent pour des droits impuissants, qu’ils se combattent, se déchirent entre eux sur des questions sociétales… On désarme ainsi la lutte des classes et on lui substitue la lutte au sein des classes. Au sein des classes laborieuses on se bat pour survivre ; au sein de l’oligarchie on se bat pour la première place, les dorures et les honneurs. Que la fête commence… et continue ».

Ce rêve peut-il être aboli ?[9]

 

Guillaume de Rouville

Ce texte a été publié précédemment sur Le Grand SoirAgoravox et Mondialisation.ca



[1] « A People’s History of the United States », Howard Zinn, chez Harper & Row, 1980.

[2] « La Bannière étoilée » est le titre de l’hymne américain (The Star-Spangled Banner). L’hymne mentionne les États-Unis comme « la terre de la liberté et la patrie des braves » (The land of the free and the home of the brave).

[3] La figure du héros et les valeurs de l’héroïsme tiennent une place particulièrement importante dans l’imaginaire américain.

[4] Comme ces centaines d’esclaves employés par Georges Washington et Thomas Jefferson leur vie durant dans des conditions dégradantes et inhumaines. Soit la liberté et le bonheur pour les riches propriétaires, la misère et la vie dure pour leurs serviteurs !

[5] Voir La Stratégie du Choc de Naomi Klein, Leméac Editeur, 2008 et « A People’s History of the United States », Howard Zinn, chez Harper & Row, 1980.

[6] La Démocratie ambiguë, Guillaume de Rouville, Éditions Cheap, deuxième édition, décembre 2012, pages 116-117.

[7] Sous la pression de l’oligarchie américaine dont le nouveau modèle de domination devait s’imposer.

[8] Gandhi : Behind the mask of divinity, de G.B. Singh, 2004, Prometheus.

[9] A suivre.

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23 mai 2013 4 23 /05 /mai /2013 18:11

 

 


 

Le détournement des mots et concepts, pour les utiliser dans des contresens ou des non-sens, l’introduction de nouvelle notions chargées d’idéologie souvent in-définie, c’est ce que je qualifie de confusionnisme ambiant. Il me semble parfois que je devrais joindre à mon blog un lexique pour définir les termes que j’utilise… « en quel sens ».

La première fois que j’ai ressenti ce choc de détournement de sens, je revenais de voyage et me trouvais dans une salle d’attente d’une antenne emploi de Bruxelles. Sur la table git une brochure  pour apprendre à se présenter à un employeur potentiel. Et dans la brochure la liste du vocabulaire à utiliser.

J’aurais dû la copier et la garder précieusement. Il s’agissait tout simplement de se reprogrammer psychologiquement. Il y était question de « gérer sa vie »… j’étais offusquée, je gère mon pognon, et même très bien, pas ma vie. Tout le reste équivalait à une redéfinition de soi en des termes imposant leur structure psychologique.

J’ai eu souvent l’occasion de me trouver face à des gens désemparés pour avoir été soumis à un tel traitement, un peu en décalage avec eux-mêmes, obligés qu’ils avaient été de se redéfinir en termes aliénants par les contrôleurs sociaux, Contraints à un devenir autre pour être recevable sur le « marché de l’emploi ». De telles entrevues utilisent souvent des méthodes dignes de la scientologie… l’a priori est que si vous en êtes arrivé « « « là » » », c’est que vous avez tout faux, qu’il va donc falloir vous corriger, vous rectifier… mais disent les contrôleurs en phase d’approche : « Nous sommes là pour vous aider ». Les menaces, tentatives d’intimidation, la répression viendront plus tard, pour les incorrigibles.

« Demandeur d’emploi » au lieu « d’offreur de sa force de travail, » déjà c’est un contresens relativement aux soi-disant lois naturelles de l’économie de marché, c’est une de ces aberration de la novlangue qui opère un renversement du rapport de force, verbal qui va se cristalliser dans les inconscients collectifs sociaux, dans le vécu, dans l’éprouvé et telles sont aujourd’hui les choses que « quémandeur d’emploi » devient plus approprié.  

Désolée mais d’un emploi je n’en veux pas. Je veux un travail, qui ait du sens, parce qu’il s’intègre dans le cadre d’un projet de monde qui me convienne, dans une bonne convivialité. Je ne vais pas travailler pour les ennemis de l’humanité en fonction de leurs normes, à la construction de leur monde… et quoi encore ! Après, du moment que je puisse y mettre mn cœur, je ne rechigne pas à la besogne, même si elle est pénible. C’est ce genre d’attitude qui est à présent délégitimée, et il faut pouvoir manier les concepts et le idées mieux que les contrôleurs pour échapper soit au reformatage, soit à la déstabilisation psychologique.

Ce que j’appelle « crible social », qui a déterminé au cours des dernières décennies cette division des populations entre intégré ou rebus, est cette opération psychologique de reconditionnement en fonction des nécessités du système-monde imposé par les corporations transnationales. J’affirme que je suis non-intégrable. Et j’assume, avec le sourire. Ben tiens…Il vous plait à vous leur monde ? Moi je refuse de collaborer avec l’ennemi. Purée, il y a plus qu’assez de boulot gratifiant à faire pour le construire ce monde à dimension humaine   que pour ne  pas aller perdre son humanité à jouer les engrenage de leur machine à broyer du vivant !

 

Par contre je perds le sourire et j’ai la rage avec ce fond de douleur qui sourd  quand je vois les dégâts que cela fait dans le monde en général et autour de moi en particulier parce que la plupart n’ont pas le verbe qui leur permet de renverser les rôles et qu’ils se retrouvent déstabilisés psychologiquement  alors les contrôleurs les envoient chez le médecin qui leur prescrit les petites pilules rédemptrices et la plupart du temps cela ne fait qu’aggraver les choses. Je reviendrai sur ce sujet : la sélection sociale et le rôle de la novlangue. Ainsi sur cette dérive « marginal à exclu  à rebut », avec les conceptions du monde qui accompagnent cette progression et les conséquences concrètes dans les inconscients collectifs et dans la perception de soi de ceux qui en ont été sujets. En attendant je vous renvoie à ce texte DSM : quand la psychiatrie fabrique des individus performants et dociles - Médecine - Basta !  trouvé ce matin via Mes coups de coeur    je ne souscris pas totalement, mais si,  le renvoi aux catégories de malades mentaux à ceux qui refusent l’intégration ou la supporte mal, et c’est un phénomène qui prend de l’ampleur et dont le vocabulaire comme il apparait clairement dans ce texte relève aussi de la novlangue qui invente autant de maladies qu’il y a de symptômes au malaise social mais n’a d’autres remèdes que l’anesthésie ou la destruction de la conscience.

Le second choc de rencontre avec la novlangue, après un autre voyage, loin des médias, émission de radio où les informations sont proclamées dans une langue étrange qui me semble décalée de la réalité. Il est question de santé des ménages, surprise je comprends que « santé » se traduit par « pouvoir d’achat ». Ah bon !, Pas trop bonne parait-il, la santé mais, la présentatrice enchaine : « Pas de panique, tout va bien telle grande entreprise a réalisé des bénéfices fabuleux »… Là j’en reste baba, plus tard, j’entendrai Ricardo Petrella dans une conférence reprendre toute les réflexions que je m’étais faites. Je crois que c’est à ce moment que j’ai ressenti cette cassure, la fin du « bon sens populaire » : « Vos portemonnaies sont vides bonnes gens, mais qu’à cela ne tienne vos maitres eux s’en mettent pleins les poches…  Vous ne pouvez plus payer vos factures, qu’à cela ne tienne… les nantis eux vont bien. Et tant que l’électricité ne sera pas coupée, vous pourrez vivre par procuration, en regardant la téloche, la vie des peoples »… que demander de plus… sans parler d’usage du terme de santé dans un sens purement économiste, la vie par procuration et le Lotto. »

A mes yeux encore mal décillés, de telles paroles auraient dû provoquer des rébellions, on se moque de qui ? Mais non… je n’avais pas succombé à « la force de l’habitude », je n’étais pas mithridatisée contre les effets des venins de la propagande. A présent il est trop tard et cette accumulation de mensonges manipulateurs promulgués dans un langage au vocabulaire de contresens me donne toujours la nausée. Les radios, télévision, journaux n’étaient plus ceux que j’avais connus mais bien des outils de propagandes par lesquels des journalistes ineptes véhiculaient les messages destinés aux peuples par une Olympe dégénérée. Platon et sa république au pouvoir… Les crèches, écoles et autres garderies se chargeant de pré-formater les futurs citoyens (et les autres), petit à petit les notions diffusées rendent impossible la conception même d’un autre cadre d’avenir que celui parrainé par TINA  (Il n’y a pas d’alternative).  Aujourd’hui la production d’intelligence collective, qui est une priorité, passe par une réappropriation de notre langue, de nos langages.

 

D’autres termes alors m‘ont interpellée, nous n’avions plus des mandataires mais des « décideurs », terme qui désigne des gens souvent totalement hors de notre portée et des dirigeants, nouvelle appellation de notre personnel politique qui était passé au service de nouveaux employeurs…

Liberté, démocratie, qui déjà étaient devenus à mes yeux des concepts vagues ou flous ont encre perdu  de consistance quand j’ai lu Henri Laborit qui en parle comme des concepts émotionnels et donc par nature propices aux usages manipulatoires en particuliers dans le cadre de cette pensée dichotomique, avec des bons et des méchants… sans nuances. Etc… Savons-nous encore ce que nous disons et comment est perçu ce que nous disons quand les mots destinés à construire notre quotidien politiques reterritorialisés sur le plan économistes disent tout, son contraire ou se contentent de brasser des leurres de néant…

 

 

Combattre la NOVLANGUE néolibérale

(Conférence de Pierre Lévy)

Pierre Lévy, rédacteur en chef du journal« Bastille, République, Nation » était l’invité jeudi dernier de l’association des « Amis du temps des cerises ».

 

Lors de cette conférence, il a axé son propos sur la langue utilisée par les néolibéraux qui est en train de déposséder le peuple de ses propres mots. Il importe absolument de combattre cette opacité volontairement entretenue afin que le peuple se désintéresse de son propre sort faute de pouvoir le comprendre. Et pourtant l’espoir persiste puisqu’il suffit souvent de révéler l’intérieur d’un texte pour en provoquer sa destruction comme le « non » au traité constitutionnel l’a démontré en 2005.

 

Il est actuellement inquiétant d’observer la progression néolibérale au sein de l’espace linguistique, puisque la subversion de nos mots par nos adversaires correspond à leur victoire. Penser avec les concepts des autres est déjà le signe d’une défaite.

 

Pierre Lévy a ainsi montré comment un plan de licenciement est devenu un plan social puis un plan de sauvegarde de l’emploi. Les termes employés correspondent à l’inverse de la réalité. Les emplois d’avenir sont souvent des emplois sans avenir ou au moins d’attente, faute de proposer de véritables emplois durables. Le plan de sauvetage de la Grèce est en fait un plan de sauvetage de ses créanciers, qui place Athènes en situation de mort clinique.

 

Dans le même esprit, le plan de modernisation et de sauvegarde de système de protection social coïncide à son recul pour ne pas dire à son démantèlement. Attalia rendu son rapport de libéralisation de la croissance alors qu’il s’agit avant tout de s’attaquer aux statuts des fonctionnaires ou aux avantages des salariés.

 

Le terme de compétitivité a tendance à s’insérer dangereusement dans de nombreux domaines tels que les hôpitaux, les universités avant les tribunaux ? Les usagers de services publics deviennent des clients...

 

La confrontation patrons-syndicats est également biaisée puisqu’au lieu de la considérer comme un rapport de force c'est-à-dire une lutte des classes, la novlangue néolibérale utilise des termes tels que partenaires sociaux ou dialogue social, qui laissent à penser que les « partenaires » ont les mêmes intérêts. Ces termes placent les responsables syndicaux dans une situation délicate.

Concernant la dette le problème est identique. Les journaux allemands utilisent les mots demontagne de la dette qui ont un côté effrayant. Face à la gestion de la dette, l’utilisation des termes de pays vertueux apparait dangereuse puisque personne ne veut être un pays vicieux. Les pays sont placés dans une situation d’élève vis-à-vis de Bruxelles puisqu’il s’agit parfois de remettre sa copie afin d’éviter d’être classé parmi les mauvais élèves de l'UE.

 

Ce rapport de parents-élèves a également été instauré lors de la victoire du « non » au traité européen, où les tenants du « oui » estimaient avoir manqué de pédagogie renvoyant ainsi le peuple au rôle de « garnement ». L’UE souhaite également mettre en place des campagnes pédagogiques. Le parlement ne représente plus le peuple mais l’éduque.

 

Les réformes structurelles néolibérales sont facilitées par l’utilisation d’euphémismes qui laissent à penser qu’il s’agit de réformes marginales. Ainsi les politiques d’austérité se transforment en maîtrise des finances publiques ou en ajustement budgétaire.

 

Les termes implicites sont également utilisés pour favoriser la mise en place de politiques néolibérales. Ainsi l’utilisation du mot assainissement pour évoquer les finances publiques laisse à penser qu’elles ne sont pas saines. 

 

La mise à la diète des fonctionnaires sous-entend que ces derniers vivent dans l’opulence.

 

La modération salariale renvoie à la même idée concernant les salariés. Dans le même esprit, les politiques de privatisation consistent à faire « respirer » le secteur public et les politiques de démantèlement du code du travail consistent à s’attaquer aux rigidités de ce dernier.

 

Le rapport à l’emploi est également décri d’une manière particulière, puisqu’il s’agit de « décrocher » un emploi comme s’il s’agissait d’une chance exceptionnelle. Pour y parvenir, il est demandé d’être flexible, c'est-à-dire de s’adapter aux contraintes horaires ou géographiques de son employeur, voire agile, en démontrant par exemple sa capacité à prendre un emploi de 2 mois à Riga ou à Lisbonne.

 

Les conflits militaires sont également adoucis par la novlangue néolibérale. Ainsi les bombardements sont remplacés par des frappes chirurgicales et les bombes qui ratent leur cible comme des « bavures ». Les opérations militaires deviennent des opérations de sauvegarde de la paix. Les adversaires deviennent des Etats « voyous » pour lesquels on utilise fréquemment les termes de « dérapage » ou de « provocation ».

 

Enfin le problème de l’anglicisation reste délicat pour différentes raisons. Tout d’abord sa traduction peut parfois poser problème comme pour le mot « people » qui veut aussi bien dire peuple que population et qui sème la confusion en français où le second remplace le premier. Cette évolution a tendance à faire ressurgir l’individualisme en faisant émerger les communautés au détriment du peuple comme une unité indivisible. Autrement dit : diviser pour mieux régner.

 

L’anglais devient également la langue des élites. Le Monde publie ainsi quasiment chaque jour un titre en anglais ce qui signifie implicitement qu’il n’est pas concevable que leurs lecteurs ne puissent pas maîtriser la langue de Shakespeare. Cette progression de l’anglais est donc particulièrement inquiétante. Certains veulent même que cette langue soit enseignée dès la maternelle et que des cursus universitaires en anglais deviennent la règle.

 

A l’arrivée, il semble que l’on veuille déposséder le peuple de ses mots pour que non seulement il ne puisse plus intervenir sur son avenir mais qu’en plus il ne soit plus en capacité de le comprendre. Les néolibéraux semblent s’approcher de plus en plus de leur objectif qui est de faire disparaitre l’idée que le peuple puisse prendre en main son avenir.

 

Les journalistes ont un rôle non négligeable dans la propagation de cette novlangue. De même l’existence de clubs comme « Le Siècle » favorise cette propagation puisque les élites utilisent ces mêmes termes en parlant entre-elles.

 

Le danger est que l’émergence de cette novlangue qui exclut les peuples aboutisse à l’émergence de concepts faux comme celle de peuple européen qui aurait une conscience européenne alors que du fait de son histoire la France est beaucoup plus proche d’un pays comme l’Algérie que d’un pays comme l’Estonie. Tout comme l’Allemagne est plus proche de la Turquie que de l’Irlande.

 

Pierre Lévy décida de conclure son propos par les mots de François Hollande : « Ce qui nous menace aujourd’hui n’est plus la défiance des marchés mais celle des peuples ». Ce n’est pas en créant des structures technocratiques et anti-démocratiques que cette défiance diminuera. Les peuples doivent reprendre leur parole et récupérer leur souveraineté.

 

Theux

  Source : L'ESPOIR 

Via canempehepasnicolas 

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11 mai 2013 6 11 /05 /mai /2013 14:27

 

 

 

 CopyCat. El porqué del Copiar los símbolos del Chavismo. 

 

 

 

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Orlando Romero Harrington 

Artiste,communicateur audiovisuel. Homme de gauche. Universel, local, simultanné, omniprésent. Epoux, père, professeur, et vénézuélien. Révolutionnaire. 

Twitter: @orhpositivoatak

 

La perception est une activité constante, qui englobe de nombreux processus indépendants. Sur le plan qui nous intéresse, la communication est la manière par laquelle l’être humain se met en relation avec la construction sociale à partir de l’usage physiologique du ressenti, comme ouverture pour élaborer relations, idées, concepts et aussi ses actions et sentiments. Pour cela ce champ est devenu vital  pour la société contemporaine, et son investigation ou sa manipulation au service d’intérêts concrets est habituelle dans les domaines publicitaires, institutionnels et par-dessus tout, politiques

Venons-en aux faits. J’appelle CopyCat la stratégie utilisée autour du marché qui consiste à copier les symboles de la concurrence (nous entendons que la publicité est conçue comme une bataille, et l’usager comme un trophée. Enfin, … l’argent de l’usager) obtenant de transférer à son compte propre, quelques connotations gagnées par son antagoniste. Il faut garder en tête le fait suivant : il n’existe pas de références concrètes à cette stratégie, ni dans les annales du marketing, ni en publicité, ni en politique. Le grand laboratoire médiatique qu’est le Venezuela nous offre à nouveau la possibilité de nourrir une réflexion à partir d’une stratégie impériale, de caractère psychologique. 

Mettons les choses dans leur contexte. La méthodologie est claire : Utiliser les symboles du chavisme dans un double but : premièrement s’attribuer la charge symbolique accumulée pendant 14 années par le Gouvernement Bolivarien, qui a développé avec ses qualités et ses défauts, un Système d’Iconographie concret. Etoiles, trois couleurs nationales, Simon Bolivar et ses images, logos, symboles, etc… Il est important d’exposer le formidable travail réalisé par Chavez, pour restaurer la conscience nationale, la tradition, l’histoire. Par son action quotidienne, Chavez était un référent historique, une résonance entre le passé et le présent, qui catalysait la réflexion, l’imagination des spectateurs et la valeur de l’histoire comme plateforme de nationalité. L’enracinement d’un peuple exprimé dans un langage facile à comprendre, concret, émotionnel.

En raison de cette manière singulière de considérer l’importance du passé pour dérouler le futur, le peuple vénézuélien s’est doté d’une immense charge de référence audiovisuelles, qui forment partie de l’imaginaire collectif y qui par lui sont associées, à Hugo Chavez. Les exemples sont innombrables, il suffit de dire que les trois couleurs nationales ont une étoile supplémentaire : Chavez.

Les enquêteurs de l’antichavisme, les représentants de la bourgeoisie  de droite et bourgeoisie transnationale mal-en-point prétendent s’approprier ces symboles selon la méthode du CopyCat. Le premier objectif est clair et transparent. Les dévaloriser. Pour le spectateur moyen, les symboles sont des signes qui ont une vaste signification (laquelle vient de l’usage répété des mêmes en différents espaces sociaux et géographiques). Prenons par exemple l’emblème de la croix rouge. C’est un signe, parce qu’il re-présente l’Institution Croix Rouge. Mais c’est un symbole en tant qu’il re-présente la santé, l’assistance médicale, la sécurité, les médecins, la neutralité, etc. La différence alors avec un de nos symboles, de l’emblème du Bicentenaire avec un Bolivar qui cavalcade sur (et avec) l’Amérique Latine découle que le pouvoir symbolique du signe est expansif. Bataille, union, leadership, indépendance, histoire, hommage, Révolution, ce symbole englobe par sa nature graphique pratiquement toutes les valeurs et concepts dans lesquels se fonde la Révolution Bolivarienne.

Certainement, la valeur la plus importante est la valeur émotionnelle, affective et passionnelle que le peuple chaviste a développée autour de sa présence. Des milliers de banderoles, affiches, pancarte, promotion ont été véhiculées à cet usage. De manière inclusive, lors de la célébration du Bicentenaire de l’Indépendance du Venezuela, il fut utilisé comme logo de début ou de fin  pour toute l’information de l’état. De là, on peut conclure que c’est un symbole qui a des racines dans la population.

Que signifie alors l’usage de ce symbole parla droite ? Habilement, le candidat de l’antichavisme a monté une intrigue avec un secteur de la population, qui s’est autoproclamée comme ex-chavistes, qui appuie sa candidature. Et précisément le symbole de ce « regroupement » est celui du Bicentenaire. Segmenté. Sans l’Amérique Latine.

Cette action n’est pas seulement électorale. On pourrait dire que l’utilisation du symbole à un spectre, un champ d’action qui ne se limite pas aux élections du 14 avril. Et qu’elle veut démontrer, de manière médiatique, qu’il y a un secteur (chaviste) mécontent du Gouvernement Bolivarien.  C’est la perle, le trésor le plus appétissant pour les think thanks de l’antichavisme.  Segmenter la conscience populaire, à partir de campagnes et d’une guerre psychologique destinées à affaiblir la structure de la Révolution Bolivarienne et au moins au niveau électoral, gagner ses votes. Ils s’impliquent à fond dans cette croyance et c’est logique. Avec 16 élections perdues sur 17 réalisées, c’est une honte internationale leur médiocre travail sur ces terres. Ils ne comptent pas pour Bolivar et ses enfants, semble-il.

Ce n’est pas seulement une stratégie électorale, c’est une stratégie de consolidation d’une fracture iconique. La rupture se produit quand le spectateur est confronté de manière répétitive avec un signifié totalement contraire à celui qui est habituel. La réaction espérée est le rejet, l’oubli, la perte de cette valeur symbolique agrégée. Je répète que ce n’est pas une stratégie à court terme. Cette stratégie vise à supprimer ces connotations (révolutionnaires) pour les générations futures, Autrement dit, l’antichavisme vise à supprimer la charge historique de la Révolution Bolivarienne. Dans sa  morphologie (celle du symbole utilisé par l’antichavisme) la visée est fort claire. Segmenter l’Amérique Latine de la composition, niant le caractère internationaliste, la solidarité et le concept de Grande Patrie, piliers des relations internationales du Bolivarisme.  En plus, cette section élimine également (symboliquement) le leadership assimilé par le Venezuela dans la région et la figure de Bolivar libérateur et son homonyme, Hugo Chavez. L’usage de la couleur rouge renvoie définitivement à une situation locale (le prétendu vote chaviste pour Capriles, cherchant l’identification). Mais sans dissimuler l’intention. Fracturer. Introduire  la confusion. Reléguer dans l’oubli.

 

 

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Il y a aussi des exemples concrets. L’usage de la casquette tricolore avec les 8 étoiles, ce fut une initiative du Président Chavez, qui était également un grand sportif. En soi, c’était une démonstration de patriotisme, d’appartenance à une nouvelle patrie née de la révolution. L’antichavisme reprend pour soi l’usage de la casquette comme identification de l’appartenance à une nation et automatiquement évacue le sens originaire de cet objet. Et ceci, nous conduit au second objectif. Isoler le chavisme comme mouvement politique, et attribuer à la droite le caractère patriotique, régional. 

On comprend dès lors le pourquoi du nom donné par l’antichavisme à son commando de campagne, Simon Bolivar. On comprend l’appropriation de symboles dans un contre-usage qui les opposent à la Révolution Bolivarienne. Ils essayent de s’autoposer en tant que partisans de Bolivar,  avec des symboles qui possèdent une connotation précise pour le peuple afin d’attaque le candidat de la Révolution sur le terrain du nationalisme. Et ce nationalisme passe par la délimitation de la figure de l’ennemi, en l’associant à Cuba, en disant que nos ressources sont offerte en cadeau  à des pays étrangers, élaborant un dossier sur de supposés pères colombiens (de Maduro NdT), etc… Dangereusement, l’antichavisme joue avec les plus sinistres phénomènes sociaux ; la xénophobie, le nationalisme exacerbé aux colorations fascistes. Valeurs totalement et absolument opposées à l’exécution et au développement d’une politique solidaire, internationaliste, moteur de l’Union Sud-Américaine, et multipolaire contre l’Empire Nord-Américain.

La même chose se produit avec le brassard tricolore dont use le peuple chaviste en signe de deuil face au décès de Chavez. De re-présenter patriotisme, affect, tristesse et une démonstration publique d’attachement au processus bolivarien, l’antichavisme l’a converti en un simple article d’ornement qui annonce le slogan de campagne de Capriles. Et ainsi, dans cette dynamique de guerre psychologique, nous assisterons alors à un processus imminent de CopyCat,pas seulement des artéfacts ou des émissions audiovisuelles. Contemplerons-nous en silence comment la droite locale, indolente, et ennemie inflexible des politiques publiques révolutionnaires se les attribue comme siennes, promettant de les défendre et de les maintenir ; le discours soigné, pensé et projeté par ses conseillers qui ont déjà trouvé la manière la plus adéquate pour y mettre un terme, s’ils arrivent au pouvoir. 

Conclusion, ce qu’il nous reste à faire est résister, cette résistance passe par la dignification de nos symboles, ne pas tomber dans les provocations et maintenir la vigilance. Je ne suis pas prophète. Mais la vraie tristesse, la dépression viendra le 15 avril 2013 dans différents quartiers de l’est de la capitale. Après la défaite, ils bruleront leurs casquettes, calicots et brassards alors qu’ils ordonneront à leurs employés de faire leurs valises et le billet (de voyage) à la main, chercheront une nouvelle vie dans un contexte moins révolutionnaire, qui ne sente pas tant le peuple et la revendication. Un nouvel espace qui les exploite mais leur fournit les marchandises bariolées des supermarchés. Qui leur apporte la sécurité pour profiter des nuits, parce que les pauvres sont plongés dans la guerre ou envoyés dans les chambres à gaz. Un espace moins métissé. Bref, un espace moins chaviste. Au revoir.[i]

Source espagnole CopyCat. El porqué del Copiar los símbolos del Chavismo. | Guerra Digital para la Resistencia Mental  

(Guerra Digital para la Resistencia Mental)

 


J’ai traduit ce texte qui donne un éclairage intéressant sur une des stratégies de manipulation utilisée dans la guerre psychologique par les déstabilisateurs politiques comme par les publicitaires. En l’occurrence, il est question spécifiquement de l’utilisation de cette stratégie par la droite vénézuélienne lors de la dernière campagne présidentielle. Mais sa portée est universelle. Ecrit avant les élections, je n’ai pu traduire sa conclusion sans un gros serrement de cœur.

Anne Wolff

 



[i]En français dans le texte.

 

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10 mai 2013 5 10 /05 /mai /2013 12:44

 

 

Un des motifs de l’attentat fausse-bannière émerge donc 3 semaines après les faits: le contrôle total d’internet par surveillance étatique renforcée. Le FBI est en phase finale de métamorphose en STASI yankee, qu’il était déjà certes, mais au grand jour cette fois-ci.

Les cypherpunks avaient raison il y a déjà 20 ans quand ils disaient que le cryptage serait la bataille finale de l’internet… Notons également au passage comme le big boss de Google Eric Schmidt inclut les "dissidents" dans la liste des "méchants". Une fois de plus l’escroquerie de cette "guerre contre le terrorisme", dans le plus pur style orwellien, ne vise qu’à toujours plus de contrôle des citoyens, surtout de la "dissidence", composées des personnes refusant de dire amen à la ligne du parti. Retour à la case fascismes brun et rouge, tous deux outils des banquiers et des cartels.

– Résistance 71 –

 

Obama va soutenir un programme d’écoute de l’internet

 

RT

 

8 Mai 2013

 

url de l’article origninal:

http://rt.com/usa/obama-internet-wiretap-surveillance-009/

 

~ Traduit de l’anglais par Résistance 71 ~

 

Le président des Etats-Unis Barack Obama va très certainement endorser un projet du FBI qui s’assurerait que les entreprises internet aux Etats-Unis fourniraient un moyen au gouvernement de pratiquer une surveilance furtive et indétectable des usagers.

Le FBI a envisagé des solutions à son soi-disant problème de “Going Dark” alors que des méthodes sophistiquées de cryptage et de technologie avancée ont rendu de plus en plus difficile au gouvernement l’accès aux communications en ligne faites dans l’ombre de la toile. Si les derniers efforts du FBI sont remplie de succès, toutes les entreprises internet impliquées dans la correspondance de toute sorte seraient lourdement mises à l’amende si elles n’incluaient pas dans leur infrastructure un moyen pour le gouvernement d’écouter et d’espioner tout dialogue en temps réel.

Dans une conférence de presse à Washington D.C en Mars, le conseiller juridique général du FBI Andrew Weissman a dit que le ministère de la justice était déterminé à obtenir les moyens de pouvoir enregistrer les communications en ligne dès 2014 et a appelé ceci “une énorme priorité pour le FBI”. Plus d’information le mois dernier ont révélé que le FBI considérait un modèle finement pensé sous lequel les compagnies internet seraient forcées d’obéir ou prendre le risque de se voir pénaliser financièrement au delà de toute rentabilité.

Mardi, Charlie Savage du New York Times (NdT: la voix de la CIA au pays du goulag levant..) a cité des officiels de l’administration Obama disant que le président “est sur le point de soutenir à fond” ce projet.

Savage a expliqué que bien que les compagnies pourraient être autorisées à opérer sans un système d’espionage intégré, les amendes encourues limiteront certainement le nombre d’entités voulant défier l’injonction. Comme RT l’a rapporté le mois dernier, une entreprise qui n’obéirait pas au FBI se verrait mise à l’amende de 25 000 US$ après 90 jours. Des pénalités additionnelles viendraient se greffer dessus après chaque journée de non obéissance par l’entreprise prestataire de service internet, avec le prix de l’amende doublant chaque jour si l’entreprise n’assiste pas les enquêteurs.

“Alors que la proposition initiale du FBI aurait obligé les services de communication internet à chacun construire une capacité intégrée d’écoute, la proposition révisée, celle qui sera revue par la Maison Blanche, focalise sur les mises à l’amende des entreprises qui n’obéiront pas aux ordres de placement sur écoute”, a écrit Savage. “La différence veut dire que les start-ups avec un petit nombre d’utilisateurs auraient moins de problèmes avec les écoutes à moins que ces compagnies ne deviennent trop populaires et viennent à l’attention du ministère de la justice.”

Savage cita un passage de son article de Weissman dans lequel l’avocat du FBI disait: “Ceci ne crée pas une nouvelle autorité de surveillance, aucune des solutions noires ne feront quoi que ce soit excepté de mettre à jour les moyens de la loi concernant les communications modernes. Ceci demande toujours un ordre de justice.”

De manière coïncidentelle, ceci a eu un développement intattendu cette semaine. Mercredi matin, le journaliste de CNET Declan McCullagh a écrit que le ministère de la justice a fait circuler des notes dans lesquelles il insistait sur le fait qu’obtenir un mandat de mise en surveillance ou sur écoute n’était pas nécessaire pour espionner quelque communication internet que ce soit.

“Le ministère US de la justice et le FBI croient qu’ils n’ont pas besoin de mandat de justice pour visiter et lire les courriels des citoyens américains, les conversations sur Facebook, les messages direct sur Twitter et tout autre fichier privé, révèle un document interne”, a écrit McCullagh, citant un document gouvernemental obtenu par  l’American Civil Liberties Union (ACLU) et fourni à CNET.

D’après McCullagh, ces documents incluent des instructions très spécifiques venant d’officiels haut-placés qui démontrent le manque d’intérêt total du ministère de la justice à appliquer les lois existantes lorsqu’il s’agit de mettre les citoyens américains sur écoute Alors que Weissman a avancé l’argument que le plan du FBI qui serait soutenu par le président ne changerait pas comment le ministère de la justice opère, les mémos obtenus par McCullagh peignent la Maison blanche d’Obama comme celle d’un gouvernement n’ayant aucune volonté de travailler avec les pouvoirs de surveillance existants pourtant déjà très importants.

Dans un des mémos déterré par l’ACLU, McCullagh a dit que le procureur de Manhattan a instruit son bureau qu’un papier légal très facile à obtenir et qui ne demande aucune supervision juridique est tout ce dont les  agents ont besoin pour obtenir toute correspondance personnelle.

“Une citation à comparaître, un bout de papier signé par un procureur, pas un juge, est suffisant pour obtenir pratiquement “toutes les archives d’un prestataire de services internet””, a écrit McCullagh.

Dans un autre exemple, McCullagh a dit que l’avocat général de Houston au Texas a obtenu “le contenu de communications stockées en ligne” d’un ISP sans avoir un juge signer le mandat.

Une loi existante qui limite comment et quand les autorités peuvent obtenir les courriels d’un suspect au cours d’une enquête judiciaire, l’Electronic Communication Privacy Act (ECPA), dit qu’alors qu’un mandat est nécessaire pour des correspondances récentes, une citation est tout ce qui est nécessaire pour obtenir des correspondances de plus de 180 jours. Les prérogatives de l’ECPA ont peu changé depuis sa promulgation au milieu des années 1980, mais le mois dernier, un comité judiciaire sénatorial a approuvé un amendement qui demanderait un mandat dans tous les cas.

Se faisant l’avocat de moins de restrictions pour obtenir des communications stockées, Weissman a dit en Avril qu’une autre loi datant de 1994, la Communications Assistance for Law Enforcement Act, a besoin d’être étendue de façon à ce que les enquêteurs puissent sauter au dessus des obstacles légaux existants qui les empêchent de placer des écoutes et des enregistrements en temps réel sur les discussions en ligne.

“Il y a des lois qui disent que vous devez garder certaines choses pour un laps de temps donné, mais dans le monde cybernétique, vous pouvez avoir des compagnies qui gardent des données pour cinq minutes”, a t’il dit. “On peut concevoir des raisons tout à fait légitimes à cela, mais vous pouvez aussi imaginer ce que cette capacité offre pour certaines personnes qui ont de mauvaises intentions, car la preuve est là puis disparaît.”

A la suite de l’attentat de Boston le 15 Avril, des demandes se sont faites jour pour pouvoir donner aux enquêteurs plus de facilités de conduire une surveillance, sur et hors de la toile. Un sondage récent montre qu’environ les 2/3 des Américains interrogés étaient en faveur de plus de surveillance par caméras dans les endroits publics et maintenant les législateurs de la nation demandent plus de pouvoir d’espionage, pas seulement dans la rue mais aussi sur internet.

Plus tôt ce mois-ci, le président de Google Eric Schmidt a dit dans une discussion à Washington: “Quand vous rencontrez des partisans, pour plus de sécurité d’un côté, ou plus de vie privée de l’autre, ils argumentent souvent depuis une position sans comprendre vraiment que c’est une lame à double tranchant. Par exemple un cryptage très puissant nous permettrait vous et moi d’avoir des communications très sécures que nous soyons des criminels, des dissidents, des martyrs ou juste de petits hommes ou femmes d’affaires. Si vous pouviez penser à un moyen de bannir le cryptage puissant pour les méchants et ne le permettre qu’aux bonnes personnes, alors ceci serait plus facile.”

Source : Attentat de Boston et grille de surveillance: Un des objectifs de l’attentat fausse-bannière commence à émerger… | Resistance71 Blog

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8 mai 2013 3 08 /05 /mai /2013 21:37

 

Le Conseil Législatif de l’Etat de Miranda, dont Capriles est censé être gouverneur, l’a à différentes reprises rappelé à l’ordre, lui demandant de réintégrer les fonctions qu’il avait délaissées pour mener d’abord sa campagne électorale et depuis son échec aux élections, des manœuvres nationales et internationales de déstabilisation du gouvernement légitime du pays. En effet, occupé ailleurs, Capriles, candidat dérouté des élections présidentielles, se manifeste par son absence comme gouverneur. « Nous le voyons à la télévision, nous voyons les messages qu’il diffuse sur Tweeter, mais jamais il n’y est question de ses fonctions de gouverneur.  On le voit à Caracas, à l’étranger, il est en permanence absent de Miranda alors que nous avons de graves problèmes à résoudre, entre inondations, insécurité, mais aussi mise en place des formes effectives d’un gouvernement participatif » se plaignent les mandataires locaux. Le Conseil Législatif de Miranda exige qu’il assume les attributions que lui confère la Constitution.

Hier le parlement de l’état  a approuvé les termes d’une plainte concernant son « absence publique et notoire » qui a été déposée ce matin au siège central du Tribunal Suprême de Justice à Caracas et demandant qu’en vertu de l’application de la Constitution soit déclaré le Manquement Absolu du Gouverneur de l’Etat de Miranda, Henrique Capriles Radonski.

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4 mai 2013 6 04 /05 /mai /2013 02:22

 

 

 

 

Introduction

Récemment se sont produites deux importantes attaques terroristes quasi simultanées. A Boston des Tchétchènes ont fait exploser des bombes pendant le marathon annuel de la ville, tuant trois personnes et blessant 170. Au Venezuela, des partisans du candidat de l’opposition présidentielle dérouté, Henrique Capriles, ont assassinés 8 (10 NdT) et ont blessés 70  (environs 150 NdT) supporters du candidat du Parti Socialiste, Nicolas Maduro, pendant le lancement de bombes incendiaires contre des établissements sanitaires et diverses officines et résidences du parti. Dans le cas de Boston, l’orgie terroriste a provoqué une autre mort postérieure, celle d’un des auteurs, au Venezuela, quelques-uns des terroristes ont été placés en détention mais leurs mentors politiques restent actifs dans la rue (et à présent les moyens de communication étasuniens les présentent comme « victimes de la répression »)

Si nous examinons le contexte, les politiques, les réponses gouvernementales et le traitement que reçoivent dans les médias ces actes nous pouvons parvenir à une meilleure connaissance de la signification générale du terrorisme et comment elle reflète non seulement l’hypocrisie du gouvernement et des médias étasuniens, sinon les politiques implicites qui la stimulent.

Le contexte du terrorisme : un jeu dangereux de Tchétchénie à Boston. 

La Tchétchénie a été pendant plus de vingt ans un champ de bataille entre l’Etat russe laïque et les séparatistes musulmans fondamentalistes. Quand Washington eu finit  d’armer les djihadistes musulmans dans sa guerre triomphante contre le régime laïque afghan appuyé par les soviétiques dans la décade des 80, il étendit son programme d’appui aux régions musulmanes du Caucase et d’Asie Centrale de l’ancienne URSS.

Sans doute, l’armée russe dérouta les seigneurs de guerre tchétchènes, mais beaucoup de leurs adeptes armés fuirent vers d’autres pays pour s’unir à des groupes extrémistes de combat en Irak, au Pakistan, en Afghanistan et postérieurement en Egypte, en Lybie et actuellement en Syrie. Malgré qu’ils aient accepté les armes occidentales, en particulier étasuniennes pour lutter contre les adversaires laïques de l’empire nord-américain, l’objectif final des djihadistes a toujours été d’implanter un régime clérical (islamiste). Washington et les européens ont pratiqué un jeu dangereux en utilisant les fondamentalistes islamistes comme troupes d’assaut contre des nationalistes laïques, alors qu’ils prétendront postérieurement appuyer les néolibéraux « modérés » ou les régimes clients.

Cette politique cynique a échoué de toutes parts, y compris aux EU. Quand les soviétiques ont abandonné l’Afghanistan, les fondamentalistes afghans se sont emparés de l’état. Se confrontant aux EU qui envahirent le pays après les attentats du 11 septembre 2001, ils ont réussi à soutenir une guerre d’usure contre Washington et l’OTAN durant douze ans, engendrant de puissants alliés au Pakistan et dans de nombreux autres lieux.  Les régions d’Afghanistan contrôlées par les talibans servent comme bases d’entraînement et comme « point focal » pour les terroristes du monde entier.

L’invasion étasunienne de l’Irak et le renversement du président Saddam Hussein a ouvert la porte à dix ans de terrorisme d’Al-Qaeda et autres groupes religieux en Irak, détruisant entièrement toute une société séculaire. Dans le cas de la Lybie et de la Syrie, l’OTAN et les armes proportionnées par les états du Golfe ont augmenté énormément l’arsenal terroriste fondamentaliste dans le nord de l’Afrique, l’Afrique subsaharienne et le Proche Orient. Les terroristes fondamentalistes appuyés par l’Occident étaient derrière les attentats de New-York et Washington du 11-S et il subsiste peu de doutes  que les attentats Tchétchènes de Boston ne soient l’œuvre de cette nouvelle avancée du fondamentalisme appuyée par l’OTAN dans le Nord de l’Afrique et au Proche Orient.

Pourtant, contre toute évidence, les terroristes tchétchènes sont considérés par la Maison Blanche comme des “lutteurs pour la liberté” qui veulent délivrer leur pays des russes laïcs… Peut-être les attentats de Boston vont-ils changer cette appréciation.

Venezuela : le terrorisme comme “dissidence pacifique” 

Le candidat de l’opposition appuyé et financé par les EU, Henrique Capriles a été à la hauteur de sa réputation de violence politique. Durant la campagne électorale de sa candidature échouée aux élections présidentielles du 15 avril, ses partisans ont saboté des lignes électriques provoquants de fréquentes coupures. Ses sympathisants parmi l’élite ont accaparé les articles de première nécessité créant des pénuries et ont de manière répétitive proféré des menaces de violence au cas où ils perdraient les élections. En présence de plus de 100 observateurs internationaux appartenant à l’ONU, à la Commission Européenne, au Centre Jimmy Carter, qui étaient venus pour valider les élections vénézuéliennes, Capriles et ses cercles les plus proches lâchèrent les rênes à leurs bandes, qui descendirent dans la rue attaquants les électeurs socialistes, les travailleurs de la campagne chavistes, les centres de santé, les habitations protégées à loyer modéré récemment construites ainsi que les médecins et infirmières cubains.

La “terreur blanche” a provoqué 8 morts et 70 blessés. Plus de 135 casseurs de droites furent arrêtés et 90 parmi eux furent accusés de délits majeurs, conspiration pour assassiner et destruction de la propriété publique. Les crédits politiques violents de Capriles remontent pour le moins à la décennie antérieure, quand il joua un rôle important dans le coup d’état sanglant qui renversa le président Hugo Chavez en 2002. En   tête d’une bande de malfaiteurs armés, il donna l’assaut à l’Ambassade Cubaine, « détenant » des ministres du gouvernement légitime qui y avaient trouvé refuge. Après que la réaction de l’armée et des masses populaires aient rétabli le président, Capriles fut arrêté, accusé de violence et de trahison. Le vaillant procureur général,  de l’état, Daniel Anderson, était en charge de son procès et de celui de centaines de ses disciples terroristes quand il fut assassiné dans un attentat à la voiture piégée  que firent exploser des participants du coup d’état manqué.

Quoique la propagande électorale lui ait fait un ravalement de façade (le même se définit comme le candidat de « centre–gauche et prétend appuyer certaines « missions sociales » de Chavez) son appel à l’action violente aussitôt connue sa déroute a révélé ses liens étroits avec des agents terroristes. C’est seulement quand le gouvernement a ordonné à la Garde Nationale et aux Forces Armées de rester en état d’alerte maximale, qu’il fit marche arrière dans sa menace effrontée d’organiser une « marche massive » pour s’emparer des sièges des officines électorales. Il est évident que les tactiques de terreur de Capriles ne sont démontées  que face à une force plus grande. Quand l’ordre légal décida de défendre la démocratie et de ne pas céder au chantage terroriste, Capriles suspendit temporairement ses actions violentes et regroupa ses forces, permettant à la face légale-électorale de son mouvement d’entrer en action.

Réponse à la terreur : Boston et Venezuela.

En réponse à l’incident terroriste de Boston, furent mobilisées les polices locales, de l’état et fédérales qui ont littéralement fermé toute la ville et ses réseaux de transports et se sont dédiées à une « chasse à l’homme » globale et absolue ; les médias et la population au complet furent transformés en instruments de l’enquête policière. Des blocs et des quartiers furent passé au crible de haut en bas, avec des milliers de policiers et de forces de sécurité fortement armées entrant dans une maison après l’autre, fouillant dans chaque conteneur d’ordures, à la recherche d’un étudiant de 19 ans blessé.

L’état d’alerte terroriste fut déclaré dans tout le pays et les réseaux de police et les services de renseignements de pays étrangers participèrent à la traque des assassins. Les médias et le gouvernement montrèrent continuellement des photos des victimes, mettant l’accent sur les horribles blessures et la brutalité de l’acte, jusqu’à rendre impensable le débat au sujet de la moindre dimension politique de cet acte : il fut présenté, purement et simplement, comme un acte de terreur destiné à « plonger  dans la crainte le peuple américain et son gouvernement élu ». Chaque représentant du gouvernement exigea que quiconque pouvant être relié de près ou de loin au crime et aux criminels soient confrontés à tout le poids de la loi.

Cependant, simultanément avec l’attentat de Boston, les opposants terroristes vénézuéliens reçurent l’appui inconditionnel du régime Obama, qui affirma que les assassins étaient en réalité des « démocrates qui réclamaient la célébration d’élections libres ». Le secrétaire d’état John Kerry refusa de reconnaitre la victoire électorale de Maduro. Malgré la boucherie, le gouvernement du Venezuela ne proclama pas la loi martiale ; la Garde Nationale et la police loyales au régime firent respecter la loi et mirent en détention quelques douzaines de manifestants et terroristes. Beaucoup parmi les premiers, ceux qui n’étaient pas impliqués directement dans la violence, furent rapidement libérés. Malgré tout cela et malgré que la transparence des élections dûment certifiée par plus de cent observateurs internationaux, le gouvernement de Maduro accepta la principale demande des terroristes et accepta un recompte, avec l’espérance de contenir les effusions de sang.

 

Réaction dans les médias étasuniens

Toutes les principales agences de presses occidentales et la presse écrite ‘(en principe) « respectables » - Financial Times, New York Times et Washington Post- convertirent les assassins politiques vénézuéliens en « manifestants pacifiques » qui prétendaient seulement extérioriser leur désapprobation.  Autrement dit, Washington et les médias appuyèrent de toutes leurs forces la terreur politique perpétrée contre un gouvernement démocratique considéré comme ennemi en même temps qu’ils recourraient à une situation de quasi loi martiale face à un attentat terroriste aux EU, brutal mais limité. A ce qu’il semble Washington est incapable de faire le lien entre son soutien au terrorisme à l’extérieur et sa diffusion aux EU.

Les médias étasuniens ont bloqué le débat sur les liens entre groupes terroristes tchétchènes avec un siège aux EU et au Royaume Uni et les néoconservateurs et sionistes étasuniens, parmi lesquels on retrouve Rudolph Guliani, Richard Perle, Kenneth Adelman, Elliot Abrams, Midge Dector, Frank Gaffney et R. James Woolsey (tous membres affichés du singulier « Comité étasuniens pour la Paix en Tchétchénie », dont le nom fut changé en « Comité pour la paix dans le Caucase  après la terrible tuerie de l’école de Beslan).

Toutes ces éminences de Washington sont participants acharnés de la “guerre contre la terreur” quoique, peut-être nous devrions dire partisans de la « terreur et la guerre.1 Le quartier général et centre névralgique de nombreux dirigeants tchétchènes « exilés », réclamés depuis longtemps par les autorités russes pour leur implication dans des activités terroristes, est Boston, Massachussetts. Pourtant, jusqu’ici le FBI et le Département de Justice ont ignoré cette donnée importante, peut-être pour conserver les anciennes et toujours en vigueur relations de travail qui ont pour objectif d’organiser des incidents terroristes pour déstabiliser la Russie.

L’ancien candidat présidentiel et maire de New York, Rudolph Guliani déclara après l’attentat que les Tchétchènes “n’agissent qu’en Russie” (sic) et pas aux EU. (leurs tchétchènes sans doute). Autant Interpol que les organismes de l’intelligence étasunienne sont conscients de ce que quelques militants tchétchènes ont fait partie de différents groupes terroristes en relation avec Al-Qaeda dans le sud et le centre de l’Asie comme au Proche Orient. Les enquêtes spécifiques du gouvernement russe en relation avec un certain nombre de terroristes ou de cellule tchétchènes suspectes – qui apparemment inclues les activités du récemment décédé Tamerlan Tsarnaev – ont été mises hors-jeu.

 (Comme détail marginal – quoique en relation- nous dirons que la section du FBI qui a son siège à Boston fut connue depuis les années 60 jusqu’au 90 pour protéger comme informateur privilégié un brutal tueur à gage appelé James « Whitey » Bulger qui commit des dizaines d’assassinats dans la région de New England).

La vraie signification de la guerre contre la terreur

L’appui des EU aux terroristes vénézuéliens et à leur leader politique Henrique Capriles, fait partie d’une stratégie diversifiée qui combine l’usage des processus électoraux et le financement clandestins de « groupes de bases » qui promeuvent l’agitation pour des problèmes locaux, en appui à « l’action directe » qui inclus « essais » de violence politique contre les symboles et les institutions de la démocratie sociale. Le versatile Capriles est le candidat idoine pour concourir dans les élections pendant qu’il organise la terreur. Des expériences étasuniennes antérieures  de terreur politique en Amérique Latine eurent un effet boomerang, comme on peut le vérifier avec la participation du terrorisme cubain, qui a sa base à Miami, dans de nombreux attentats à la bombe et trafics d’armes et de drogues à l’intérieur des EU, et en particulier dans l’attentat à la voiture piégée à Washington en  1976,  qui a couter la vie du  ministre chilien en exil, Orlando Letelier et son assistant étasunien. Cet acte ne fut jamais qualifié de « terrorisme » à cause des liens officiels du gouvernement avec ces auteurs.

Malgré les liens financiers, politiques et militaires entre Washingtn et le terrorisme, en particulier le fondamentalisme, ce dernier maintien sn autonomie organisationnelle et poursuit son propre agenda politico-culturel, souvent hostile aux EU. Pour les Tchétchènes, les Afghans et les Syriens d’Al-Qaeda, les EU sont un allié tactique duquel il faudra se défaire dans le processus d’instauration d’états fondamentalistes indépendants. Les victimes de Boston devraient être additionnées  aux autres milliers d’étasuniens assassinés ou blessés à New-York, Washington, en Lybie, en Afghanistan et autres lieux par des fondamentalistes anciens alliés des EU.

A se placer du côté des terroristes et de leurs porte-paroles et refuser de reconnaitre la validité des élections au Venezuela, le gouvernement Obama s’est gagné l’antipathie de l’Amérique Latine et des Caraïbes. A appuyer des attaques violentes contre des institutions démocratiques au Venezuela, la Maison Blanche indique à ses clients de l’opposition aux gouvernements d’Argentine, Bolivie et Equateur que les attaques violentes contre les gouvernements démocratiques indépendants sont une manière acceptable de restaurer l’ordre néolibéral et « l’intégration régionale » centrée sur les EU.

Conclusion

Washington a démontré l’absence de consistance de son opposition au terrorisme qui dépende des objectifs politiques des terroristes et des cibles des attaques. Dans un de ces cas récents, le gouvernement déclare pratiquement la loi martiale à Boston pour tuer ou capturer deux terroristes qui ont attaqué des citoyens étasuniens dans une seule localité. Dans le cas du Venezuela, pourtant, le régime Obama a proportionné son appui politique et matériel aux terroristes afin de subvertir l’ordre constitutionnel et le régime électoral.

Comme conséquences des liens prolongés et profond du Département d’Etat, d’éminents leaders néocons et de notables sionistes avec des terroristes tchétchènes, nous ne pouvons espérer une enquête exhaustive qui mettrait en difficulté ou menacerait les carrières politiques d’importantes autorités étasuniennes qui maintiennent depuis longtemps des relations de travail avec ces criminels.

La Maison Blanche augmentera et étendra son appui aux mêmes terroristes Vénézuéliens qui ont saboté les réseaux électriques, les rapprovisionnements alimentaires et le processus électoral constitutionnel de ce pays. Dans ce contexte, la Terreur sert comme plateforme de lancement d’un assaut à grande échelle contre les avancées sociale de la dernière décennie sous le président décédé Hugo  Chavez.

Mientras tanto y con el fin de preservar la alianza de trabajo Washington-Chechenia, el atentado del maratón de Boston se considerará como el acto aislado de dos jóvenes desorientados, pervertidos por un sitio web fundamentalista anónimo, y sus acciones serán etiquetadas como "fundamentalismo religioso". Y a pesar de la crisis económica, se destinarán decenas de miles de millones de dólares más para ampliar el estado policial interno, aludiendo a su eficacia y eficiencia en el desenlace del atentado, mientras se continúan enviando en secreto más millones para provocar el terror "democrático" en Venezuela.

Pendant ce temps,  afin de préserver l’alliance de travail Washington-Tchétchénie, l’attentat du marathon de Boston sera considéré comme un acte isolé de deux jeunes désorientés, pervertis par un site web fondamentaliste anonyme, et leur action seront étiquetée comme « fondamentalisme religieux ». Et malgré la crise économique, des milliers de millions de dollars seront destinés à renforcer l’état policier interne, se référant à son efficacité et son efficience dans le dénouement de l’attentat, pendant que continueront à être envoyés en secret plus de millions pur provoquer la terreur « démocratique » au Venezuela.

-----------

1 Véase el artículo del antiguo oficial del FBI, Coleen Rowley, sobre estas conexiones, "Chechen Terrorists and the Neocons",19 de abril del 2013.

Source espagnole Rebelion. Boston y Venezuela: el terrorismo de aquí y el de allí

Traduction  Anne Wolff

 

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3 mai 2013 5 03 /05 /mai /2013 16:41

Voilà qui est fort intéressant, il s’agit du « recrutement sous fausse bannière », Combien de gens dans ce système ne travaillent-ils pas et n’agissent-ils pas à contresens de ce qu’ils pensent et veulent faire ? Et combien s’ils prenaient conscience du sens perverti du projet de monde que réalise leur action (au sens d’H. Arendt, en tant que participation collective à l’édification d’un monde commun, le politique in  « Condition de l’homme moderne ») auraient le courage de ne pas fermer les yeux et de dénoncer cette manipulation comme le fait Rony Brauman 

 

« La routine du travail humanitaire

 

en venait à dissimuler la participation

 

à des violences de masse »

 

02

MAI

Avec sincérité et rigueur, l’ex-président de Médecins sans frontières revient sur

les manipulations qu’ont subi les ONG de la part des autorités locales durant la

famine en Éthiopie au milieu des années 1980 et explique en quoi la mondialisation

et la massification portent en elles des risques majeurs de violences.

 

Après des études de médecine, Rony Brauman devient président de Médecins sans

frontières. Il est l’un des premiers à réfléchir, souvent de manière critique, sur

les emballements de l’opinion et les limites de l’action humanitaire. Il raconte son

parcours dans 

Penser dans l’urgence. Parcours critique d’un humanitaire

 

 (Seuil, 2006, Entretiens avec Catherine Portevin). Après sa découverte de la notion de « banalité du mal » de Hannah Arendt, il coréalise un documentaire sur le procès d’Adolf Eichmann, Un spécialiste (1999).

 

Au milieu des années 1980, l’Éthiopie traverse une grave famine. Les équipes de Médecins sans frontières sont présentes sur place pour porter secours aux populations. Comment en êtes-vous venu à considérer votre action comme une manifestation de la banalité du mal ?

 

Rony Brauman : Nous nous sommes peu à peu aperçus que les camps de secours dans lesquels nous travaillions étaient des pièges à population, dont nous étions l’appât : il fallait plutôt fuir ces camps qu’y venir ! L’État éthiopien organisait en effet, sous couvert d’urgence humanitaire et au prétexte d’un rééquilibrage démographique du pays, des transferts forcés de populations. Certains jours, au petit matin, des miliciens en armes encerclaient une partie du camp pour prélever un quota de population destiné à aller peupler les nouvelles zones économiques du sud du pays.

 

 

À d’autres moments, la distribution de l’aide (vivres, couvertures) par des fonctionnaires du Parti était soumise à l’inscription pour un départ « volontaire » dans ces zones. La routine du travail humanitaire en venait à dissimuler la participation à des violences de masse devenues la première cause de mortalité dans le pays. Imaginons : je me lève, je vérifie mon matériel médical, je vais faire ma consultation au dispensaire, je participe à une réunion avec le comité de coordination de la région, je passe une commande de médicaments à mon siège, je fais une visite à l’hôpital.

 

Cette activité quotidienne, motivée par la conviction de participer à une opération de sauvetage, peut voir son sens totalement inversé, inscrit au contraire dans une stratégie d’oppression, retournée contre les intentions qu’elle poursuivait, sans rupture de sa routine. Je présidais MSF à l’époque. Je me rendais occasionnellement sur le terrain et, sur place comme au retour, je partageais la perplexité des équipes. Un ami avec qui j’en parlais m’a conseillé de lire le livre de Hannah Arendt sur le procès Eichmann.

 

J’ai alors fait le lien entre l’action que nous menions en Ethiopie – ou plus exactement la manière dont nous étions menés par un régime qui poursuivait sa politique en la masquant grâce à la présence d’organisations humanitaires – et l’écho des violences qui nous parvenait. Mais cela n’a pas suffi cependant, et ce n’est que plus tard, en expliquant le dilemme de notre situation à une journaliste qui m’interrogeait sur les difficultés de l’action que j’ai compris que refuser de se situer face à ces choix en Éthiopie, c’était y consentir en y prenant notre part.

 

Ces questions du consentement et de la responsabilité me trottaient dans la tête mais ce n’est qu’en les rendant intelligibles à d’autres, qu’elles se sont éclaircies à mes yeux. Du refus de la considération de sa propre responsabilité dans un tel environnement à ce qu’Arendt appelle la banalité du mal, la participation à un crime de masse, il n’y a qu’un pas, et on le franchit d’autant plus facilement que l’on n’est pas amené à verser le sang ni même à commettre des gestes ou à prendre des décisions extraordinaires.

 

Nous nous étions peu à peu retrouvés dans un « processus eichmannien » de suspension de l’esprit critique, déléguant en quelque sorte notre responsabilité aux instances supérieures (le gouvernement, l’ONU, la « communauté internationale »), en accomplissant des geste routiniers anoblis par l’intention secourable qui les sous-tendait…

Mais votre action n’était-elle pas moins grave que celle des organisateurs des placements forcés ?

 

Au début, quand nous ne savions rien du projet politique dans lequel nous étions engagés, certainement. Et puis nous nous sommes longtemps demandé, comme tous les intervenants humanitaires, si les exactions et le chantage à l’assistance n’étaient « que » des excès de zèle individuels, comme nous le disaient les autorités, ou bien une politique. Nous étions dans le brouillard et le travail était exigeant.

 

Mais lorsqu’il est devenu clair que nous étions embarqués dans une entreprise stalinienne de remodelage chirurgical de la société éthiopienne, il ne s’agissait plus de brouillard mais d’aveuglement volontaire.

 

Dans ces conditions, la responsabilité morale des ONG me semble plus lourde que celles des fonctionnaires éthiopiens chargés de la mise en œuvre des déplacements de population. Eux, en effet, risquaient leur vie s’ils désobéissaient. Pas nous. Nous ne voulions que le bien des gens auprès de qui nous nous étions portés, mais nous coorganisions de fait leur déportation en acceptant de poursuivre le travail.

 

Qu’est-ce qui vous a le plus frappé lorsque vous avez visionné toutes les archives du procès Eichmann en vue de la réalisation du Spécialiste ?

 

Beaucoup de choses ! Mais si je ne devais retenir qu’un moment, ce serait celui où Eichmann dit à peu près : « Après tout, c’était l’intérêt commun des Juifs et des Allemands que les trains arrivent rapidement à Auschwitz. » Il se défend, bien sûr, mais justement : l’imparable abomination de cet énoncé factuel est l’essence même de la banalité du mal, telle que je comprends cette idée.

 

Cette logique se manifeste-t-elle encore aujourd’hui ?

 

On trouvera sans peine des équivalents de comportements mais je n’en ferais pas un cadre d’analyse ; ne serait-ce qu’en raison du caractère obscur de cette formule. Davantage que la banalité du mal, c’est le processus de massification, autre notion dont Arendt a fait grand cas, c’est-à-dire d’atomisation individuelle, d’éclatement de la société en des entités séparées, qui me semble être la question brûlante de notre temps. Le chômage de masse, l’insolence de l’extrême richesse rapportée à la pauvreté croissante, tout ceci constitue une violence potentiellement intenable.

 

L’accélération du temps que nous sommes en train de vivre vous paraît-elle participer de ce processus ?

 

L’urgence est le moment où il est légitime et nécessaire de suspendre la pensée pour agir selon des procédures fixées à l’avance. C’est en cela qu’un service d’urgence est efficace. Mais chacun des gestes faits procède d’une pensée préalable. Ce ne sont pas des robots qui prennent en charge une hémorragie grave ou un accident.

 

L’enjeu n’est donc pas de décider que l’urgence va être désormais traitée sur le mode de la délibération. Ce n’est pas ce qu’on veut quand on est soi-même le sujet de cette urgence. L’enjeu est de savoir ce qui est urgent et ce qui ne l’est pas. On peut constater au quotidien l’abus de la notion d’urgence pour couper court aux questions, à la réflexion critique. Faire toujours plus de choses en toujours moins de temps nous met dans une constante sensation de course par rapport au temps.

 

Plus nous nous dotons de ces instruments qui nous servent à gagner nous temps, plus nous nous installons dans la sensation accablante d’être toujours en retard. La capacité à maîtriser un nombre toujours plus grand d’informations, qui est censée nous mettre dans une situation d’observateur surplombant, nous écrase. D’une manière ou d’une autre, il va bien falloir ralentir !

Propos recueillis par Michel Eltchaninoff

Rédacteur en chef adjoint

 

Source : canempehepasnicolas

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1 mai 2013 3 01 /05 /mai /2013 22:57

 

 

 

 

 


   
Santiago Alba Rico

Traduit par Ataulfo Riera

 

 

Aucun être humain n’a vécu ce lent processus géologique de bouillonnement marin, d’émergence de la terre du plus profond des abîmes, de division et de formation des continents, d’éruption de volcans et de solidification des montagnes qui a peu à peu transformé la Terre en un lieu apte à la vie.

Mais cela n’est pas vrai. Nous avons tous assisté dans la dernière décennie à une sorte d’accélération géologique imprévue ; nous avons tous vu une montagne surgir, les vagues reculer, un continent se former. Personne n’aurait pu prévoir que cela aurait lieu au Venezuela ni que cette danse terrestre serait activée par le jeune et obscur officier qui, en 1992, se cassa les dents dans l’échec d’une aventure donquichottesque.
En réalité, s’il y a quelque chose que tout le monde doit bien admettre y compris ses ennemis –qui l’ont pour cela furieusement combattu–, c’est qu'Hugo Chavez et le peuple vénézuélien ont changé en vingt ans la destinée géologique de l’Amérique latine et l’inertie de la défaite de la gauche mondiale. Alors que la « pédagogie de la terreur » appliquée dans le sous-continent américain pendant la Guerre Froide semblait avoir atteint ses objectifs, de sorte qu’on pouvait permettre aux Latino-américains de voter avec l’assurance qu’ils allaient choisir le « candidat correct », la révolution démocratique de 1998 au Venezuela renversa tous les rapports de force, contaminant de son courage – une contagion salutaire – toute la région.
Hugo Chávez fut la victoire collective sur des décennies, voir des siècles, de peur, tout comme les forêts furent une victoire sur le froid mésozoïque et l’Himalaya une victoire sur le déluge de Thétis.
 

 

Ceux qui comme moi ont régulièrement visité le Venezuela ces dernières années savent que ce saut géologique inattendu a à voir avec un concept cardinal prolongé des années plus tard par les peuples arabes : la dignité. Ce n’est pas quelque chose qu’on peut obtenir à force de méditation ou par l’intervention d’un psychologue, ni par la rhétoriques de flatteries populistes. La dignité est une force matérielle démiurgique, sidérurgique, qui change ainsi le relief même du terrain et qui surgit du sol en enracinant et en embellissant les corps : le droit de vote, le droit aux lettres, le droit à la santé et au logement, la découverte socratique – lorsque l’on sort de sa poche la Constitution, et non un revolver, pour discuter avec chaleur dans la queue au marché – de sa propre capacité à intervenir dans la formation matérielle de l’existence et dans le destin politique de la nation.
Ce changement géologique, dont l’importance est parfois difficile à mesurer depuis l’Europe, une femme du « 23 de Enero », l’un des quartiers les plus pauvres et les plus chavistes de Caracas, le résumait très bien : « Des citoyens ? Mais on ne savait même pas qu'on était des êtres humains ! ».
Ces derniers jours, des dizaines d’articles soulignent les conquêtes sociales de Chavez et je ne vais pas les répéter ici. Je ne vais pas non plus insister sur les limites et les erreurs de sa politique qui démontrent, en tous les cas, à quel point on peut faire des gaffes quand on n’obéit pas aux marchés et aux USaméricains (quelle erreur concrète pourrions critiquer chez Rajoy ?). Je ne vais pas non plus passer en revue les mensonges de notre presse, la désinformation systématique de nos médias, les manipulations classistes et racistes accumulées contre le Venezuela, puisqu'ils constituent aussi une autre manière de mesurer la hauteur de l'Himalaya. Mais j’aimerais en revanche rappeler ce qu’une Europe sans cesse moins démocratique tente d’occulter à tout prix : que le processus constituant du Venezuela, avec ses métastases équatorienne et bolivienne, avec ses institutions continentales, ne configure pas seulement un projet de souveraineté régionale sans précédent mais qu’il prend aussi pour la première fois au sérieux, y compris « formellement », cette démocratie que les Occidentaux promeuvent à l’extérieur à coups de missiles et de bombes tandis qu’ils la rognent sans cesse plus pour leurs propres citoyens.
Certains diront que Chavez meurt au pire moment, quand les dangers sont les plus grands, quand on a le plus besoin de lui. Mais quel aurait été le « bon » moment ? Nous pouvons tous mourir à n’importe quel moment et ce moment sera toujours celui d’une lutte inachevée. Chavez – il faut l’accepter – n’aurait jamais pu vivre autant que les peuples dont il est issu et qui continueront à avoir besoin de lui. Ce qu’il faut dire, c’est que Chavez a surgi au moment adéquat, depuis les fonds marins, pour configurer un nouveau continent, pour détourner la « Patria Grande » de sa fatalité historique et réordonner, en à peine 14 ans, un destin géologique qui, dans tous les cas, aura encore besoin de beaucoup d' années pour fertiliser les forêts et élever les montagnes.
Dans ce sens, Hugo Chávez n’a pas de remplaçant possible. Il ne peut être substitué que par le peuple du Venezuela, dont la responsabilité acquiert soudain des dimensions planétaires.
Depuis ce monde arabe qu’il n’a pas su bien comprendre, mais qui ne peut plus se regarder dans le miroir d’une Europe coloniale en faillite et qui, immergé dans la bataille, doit pour cette raison s’« hugochaviser » et se « latinoaméricaniser » ; depuis cette Europe échouée et coloniale au bord de son propre « caracazo », droguée de narcissisme et frappée à mort ; depuis tous les recoins d’une planète en danger de mort, avec douleur, avec solidarité, avec espoir, nous nous appuyons aujourd’hui sur le peuple du Venezuela, le successeur du président Chavez, qui est parti trop tôt en nous laissant incertains et tristes mais qui est arrivé à temps pour nous laisser plus nombreux et forts.
Chávez est aujourd’hui un autre nom du versant sur lequel nous nous tenons debout.

 





Merci à Avanti4.be
Source: http://www.lajiribilla.cu/articulo/3833/el-sucesor-de-chavez
Date de parution de l'article original: 07/03/2013
URL de cette page: http://www.tlaxcala-int.org/article.asp?reference=9375

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1 mai 2013 3 01 /05 /mai /2013 22:35

 

 

 


Luc Michel

Mardi 16 avril 2013

PCN-SPO / Focus / 2013 04 16 /

Focus : Le fait du jour décrypté par Luc MICHEL
pour le Service de Presse du PCN / PCN-SPO

Lu dans LIBERATION (Paris)
Ce 16 avril 2013 :
« Alors que les sondages lui donnaient 10 points d’avance, le socialiste n’a obtenu que 300 000 voix de plus que son adversaire, Henrique Capriles, lequel a décidé de ne pas reconnaître les résultats du scrutin. Recensant «plus de 3 200 incidents électoraux», le candidat de la droite a affirmé que le nouveau président était «illégitime» (…) Dans les quartiers riches de Caracas acquis à l’opposition, les premiers «cacerolazos», ces gens qui tapent sur des casseroles, se sont rapidement fait entendre » ...

# Moins de 24h plus tard et sous les commentaires jubilatoires des médias de l’OTAN, le pouvoir et l'opposition se renvoyent la responsabilité des violences au Venezuela, après des manifestations insurrectionnelles contre l'élection de Nicolas Maduro, qui ont fait au moins sept morts et une soixantaine de blessés, selon les autorités, « plongeant le pays dans une de ses plus graves crises politiques depuis une décennie ».

Derrière ces manifestations soutenues par Washington, en embuscade, une myriade d’organismes US spécialisés : NDO, USAid, Réseaux Söros, Réseaux OTPOR/CANVAS et sa branche vénézuelienne. Une « révolution de couleur », c’est-à-dire un coup d’état insurrectionnel encadré par des spécialistes est en cours au Venezuela !

I : LE COUP D’ETAT RAMPANT LANCE AU VENEZUELA CE LUNDI

"Main de fer face au fascisme et l'intolérance. S'ils veulent me renverser, qu'ils viennent me chercher. Je suis là avec un peuple et une armée"
- N. Maduro

CAPRILES ET SES NERVIS A LA MANOEUVRE

A l'appel du gouverneur de l'Etat de Miranda (nord), Henrique Capriles, « qui refuse de reconnaître sa défaite à la présidentielle et réclame un nouveau comptage des votes », des milliers de personnes sont descendues dans la rue, provoquant des échauffourées.
Ces manifestations ont fait sept morts, « dont un fonctionnaire de police de l'Etat de Tachira » (ouest), ont annoncé les autorités, ajoutant que « 135 personnes avaient été interpellées ».

"Ils ont été tués par des hordes fascistes", a réagi M. Maduro, reprochant à son adversaire d'orchestrer "un coup d'Etat", 11 ans après celui qui avait écarté brièvement du pouvoir son mentor et successeur, le dirigeant socialiste charismatique Hugo Chavez.
"Main de fer face au fascisme et l'intolérance. S'ils veulent me renverser, qu'ils viennent me chercher. Je suis là avec un peuple et une armée", a-t-il lancé, au cours d'une cérémonie à Caracas, annonçant qu'il interdirait un rassemblement de l'opposition prévu mercredi dans la capitale.

"Aujourd'hui les forces de sécurité sont en alerte" et "nous avons incité les forces politiques à la mobilisation démocratique pour célébrer et officialiser la victoire" à la présidentielle, a déclaré Elias Jaua, le ministre des Affaires étrangères, au cours d'une réunion avec le personnel diplomatique accrédité.
"L'extrême droite a pris en otage l'opposition et sème la violence", a affirmé le vice-président Jorge Arreaza, dans un message sur Twitter.

Capriles a appelé à des rassemblements ce mardi devant tous les centres régionaux du Conseil national électoral (CNE), qui a officialisé la victoire de M. Maduro, l'héritier d'Hugo Chavez, obtenue d'une courte tête (50,75% contre 48,97%).
Cet avocat de 40 ans, « auteur du meilleur score jamais réalisé par l'opposition », a attribué au gouvernement la responsabilité de la crise. "L'illégitime (Maduro) et son gouvernement ont ordonné la violence pour éviter le comptage des votes ! Ce sont eux les responsables", a-t-il écrit sans vergogne sur Twitter.

Qu’attendre d’autre de Capriles ?
Dont aucun média de l’OTAN ne rappelle ce soir le vrai parcours. Héritier d’une grande dynastie bourgeoise, immensément riche, candidat chéri de Washington. Et surtout l’une des figures clés du putch made in USA de 2002 organisé par les USA – avec déjà les réseaux de la CIA et les nervis de l’extrême-droite néofasciste – et des officiers félons : c’est Capriles qui avait notamment organisé les émeutes devant l’ambassade de Cuba et avait lui-même avec ses hommes de main violé l’extra-territorialité de l’ambassade ! C’est çà le candidat démocratique de l’opposition !!!

UNE VAGUE DE VIOLENCE ORGANISEE DANS TOUT LE PAYS

"Fraude" ou encore "Maduro, tu m'as volé mon vote" pouvait-on lire sur les murs à Caracas, où des abribus ont également été détruits lors d'incidents avec la police qui a fait usage de gaz lacrymogène. "Nous avons le droit de demander un nouveau comptage des votes pour connaître la vérité", a déclaré mardi à l'AFP Yoni Pares, une étudiante de 24 ans, dans le quartier d'affaires de Chacao. Des mots d’ordre parfaitement diffusés. Une technique mise au point il y a 13 ans déjà à Belgrade contre Milosevic …

Les partisans de Capriles, encadrés par les réseaux US, ont immédiatement commencé à se rassembler dans les états de Barquisimeto et de Maracaibo, tandis que des groupes de fidèles "chavistes", portant des chemises rouges, ont défilé en réaction d’auto-défense dans ceux de Zulia, de Monagas, d'Anzoategui, de Carabobo et d'Apure, selon des images diffusées par la télévision.

La veille, des véhicules ont été incendiés dans l'Etat de Barinas, dont est originaire M. Chavez, et le siège du parti socialiste (au pouvoir), le PSUV, partiellement détruit dans l'Etat de Tachira (ouest), selon les images diffusées par les chaînes de télévision publiques.

Des membres du gouvernement ont aussi accusé des manifestants d'avoir attaqué le domicile de la présidente du CNE, Tibisay Lucena, ainsi que plusieurs bureaux du Parti socialiste unifié du Venezuela (PSUV), dont l'un a été incendié. Cible de la colère de l'opposition, Mme Lucena a assuré que le système de vote électronique était infaillible et a suggéré à M. Capriles d'utiliser les "voies légales" en déposant un recours au lieu de brandir des "menaces".

Un scénario déjà vu à Belgrade contre Milosevic en octobre 2000 – son banc d’essai -, puis ensuite à Tbilissi ou encore à Bichkek…

Plusieurs médecins cubains travaillant dans des quartiers pauvres, dans le cadre de la coopération avec le Venezuela, ont aussi été agressés, selon les autorités.
La chaîne de télévision officielle VTV et la chaîne internationale Telesur, financée par le Venezuela, ont affirmé que des groupes d'opposants à moto – technique déjà vue elle aussi en Géorgie - s'en étaient pris à leurs sièges à Caracas.

LE BRAS DE FER EST ENGAGE

Le président Maduro appelle lui le peuple "à combattre dans la paix".
Face aux nouvelles manifestations convoquées par Capriles ces mardi et mercredi devant les bureaux régionaux du Conseil national électoral (CNE), Maduro a réagi fermement en appelant à la mobilisation "à travers tout le pays".
"J'appelle le peuple à combattre dans la paix", a-t-il annoncé, depuis le palais présidentiel de Miraflores, qualifiant de "caprices de bourgeois" la demande du chef de l'opposition.

Maduro, 50 ans, dauphin du défunt président Hugo Chavez a été officiellement crédité de 50,75% des voix, contre 48,97% pour Capriles lors du scrutin, organisé à la suite de la mort du charismatique dirigeant socialiste, emporté par un cancer le 5 mars dernier.
Proclamé président ce lundi, le chef d'Etat élu a promis, la main sur le coeur, de "poursuivre pleinement son héritage pour la défense des pauvres et la défense de l'indépendance" lors d'une cérémonie solennelle au siège de l'autorité électorale à Caracas.
"Nous avons un président !" ou encore "Chavez vit, la lutte continue", a scandé l'assistance.

La présidente du CNE Tibisay Lucena a rappelé à l'opposition qu'elle devait "utiliser la voie légale", citant le cas du duel serré entre Georges W. Bush et Al Gore, lors de la présidentielle américaine de 2000, dont l'issue s'était décidée devant la Cour suprême.

Gouverneur de l'Etat de Miranda (nord), où il fut élu précisément suite à une déacision de la même CNE, M. Capriles, qui qualifie le président élu d'"illégitime", a lui choisi la violence du putch rampant.
Ces manifestation de l'opposition sont qualifiées fort justement de coup d'Etat déguisé par le camp gouvernemental. "Ce qui se cache derrière les paroles d'aujourd'hui, M. Capriles, c'est une convocation à un putsch contre l'Etat, les institutions", a lancé Jorge Rodriguez, le chef de campagne de M. Maduro, un terme repris par le président élu qui a promis une "main dure contre les putchistes".

WASHINGTON APPUYE UNE INSURRECTION QU’ELLE A BALISEE

La demande d'un nouveau comptage par l'opposition a été soutenue ce lundi par la Maison Blanche, dont le porte-parole a estimé qu'il s'agirait d'une étape "importante, prudente et nécessaire" (sic). Idem pour José Miguel Insulza, secrétaire général de l'Organisation des Etats américains (OEA), aux mains des pro-US, qui s'est prononcé en faveur d'un "dialogue national" (resic).

On notera avec intérêt – situation déjà vue en Russie en décembre 2012 et mars 2013 – que le système électoral vénézuelien a été contesté dès avant l’élection, comme le rappelle le ministre PSUV Ernesto Villegas Poljak : « L’opposition est inféodée à Washington et en suit les directives. Cela est aisé à démontrer. Mme Roberta Jacobson du Département d’Etat, dans une interview au quotidien espagnol  El País, a remis en cause le système électoral vénézuélien, alors que toutes les institutions internationales en saluent la transparence. Absolument toutes, sauf le Département d’Etat des Etats-Unis. Immédiatement, les médias privés antichavistes et l’opposition se sont mis à questionner notre système électoral, qu’ils ont toujours considéré comme légitime en participant aux élections régionales de décembre 2012 et en acceptant les résultats des scrutins. Ce même système leur a permis de gagner les élections dans certains Etats, même si la marge était infime, comme c’était le cas de l’Etat du Miranda actuellement dirigé par le candidat de l’opposition Henrique Capriles. Les scrutins ont été respectés partout, y compris lorsque l’opposition été majoritaire. »

Le ministre ajoute : « Ce même Conseil national électoral que l’opposition vilipende tant, que Capriles accuse de tous les maux est celui qui a déclaré vainqueur le candidat de l’opposition dans l’Etat du Miranda, c’est-à-dire Capriles. En réalité, l’opposition suit scrupuleusement les directives de Mme Jacobson et c’est ce qui explique les campagnes actuelles de discrédit à l’encontre du Conseil national électoral. »

Avant l’élection, l’opposition songeait « même à retirer son candidat pour discréditer le processus électoral ». Certains bruits couraient à ce sujet.

Washington et ses porteurs de valise locaux utilisent une situation politique que le pouvoir socialiste n’a pas voulu voir venir.
"C'est une situation très délicate. La marge est tellement étroite dans un pays qui est extrêmement divisé que cela va être difficile à digérer politiquement. Il est clairement divisé en deux", a dit à l'AFP le politologue Ignacio Avalos.
Dans ce contexte, le nouveau président peut aussi redouter la convocation d'un référendum révocatoire dans les trois ans. Il suffit à ses détracteurs de réunir 20% de l'électorat sur une motion de défiance pour pouvoir organiser ce vote.

UN SCRUTIN SERRE MAIS POURTANT INCONTESTABLE

"Je n'ai aucun doute sur le résultat du CNE, mais je crois qu'il est important de de rassurer les gens" qui se posent des questions, a déclaré à l'AFP Vincente Diaz, l'un des membres du CNE, pourtant « réputé proche de l'opposition » selon l’AFP.

La mission d'observateurs envoyés par l'Union de nations sud-américaines (Unasur) au Venezuela a, quant à elle, demandé que soient "respectés les résultats" émanant du CNE, "unique autorité compétente" en matière électorale.

"Il va y avoir des manifestations, qui vont devoir cesser à un moment" mais "Maduro doit aussi commencer à gouverner et à faire des gestes", a estimé le politologue Inacio Avalos, interrogé par l'AFP.

On notera encore que le score de Maduro, accepté sans aucun problème lors d’une présidentielle à Washington ou Paris, fait l’objet d’une délégitimisation  dans tous les médias de l’OTAN.

TROP SUR DE LUI, LE PSUV N’A PAS SU MOBILISER

"Beaucoup de personnes ont retourné leur veste, des sales types sans aucune reconnaissance. Ils disent qu'ils sont dans la révolution, mais ce sont des mensonges", pestait lundi Elisabeth Torres, 48 ans, dans le quartier du "23 de enero", un bastion "chaviste".

Pour de nombreux fidèles, l'élection de M. Maduro est garante du maintien des "missions" créées par le défunt dirigeant socialiste, des programmes sociaux financés par la manne pétrolière du Venezuela, détenteur des plus grandes réserves de brut du monde.

Dans le sillage des alliés traditionnels du Venezuela, le Brésil a félicité M. Maduro, après Cuba, dont le régime bénéficie de l'envoi de barils de pétrole, l'Argentine, l'Equateur, la Bolivie, ainsi que le Chili pourtant dirigé par un gouvernement conservateur.
D'autres dirigeants aux relations conflictuelles avec les Etats-Unis, le président russe Vladimir Poutine et celui du Belarus Alexandre Loukachenko, ont exprimé leur félicitations.

II : LE VRAI VISAGE DE L’OPPOSITION PUTCHISTE

"L'extrême droite a pris en otage l'opposition et sème la violence",
- le vice-président Jorge Arreaza,

LE MUD, BLOC ANTI-CHAVISTE, C’EST QUOI ?

Dès ce 10 mars 2013, je décrivais le visage de cette « opposition putchiste », version 2012-2013 …
Le MUD est un bloc anti-chaviste regroupant des partis du centre, de la gauche et de la droite, allant de certains trotskistes à l’extrême-gauche à des groupuscules d’extrême-droite. Sa base sociale est la bourgeoisie chassée du pouvoir par la Révolution bolivarienne.

Le chef de file du MUD Henrique Capriles, déjà l’un des putchiste de 2002, avait déjà accusé le pouvoir de gauche bolivarien "d'abus de pouvoir", qualifiant de "fraude constitutionnelle" la prise de fonction de M. Maduro.
Capriles, candidat du MUD en octobre 2012, avait remporté le plus haut score jamais enregistré par un opposant (44%) face à Chavez (55%).

LA HAINE COMME FERMENT DE L’OPPOSITION

Mais écoutons Ernesto Villegas Poljak, Ministre du Pouvoir Populaire pour la Communication et l’Information de la République Bolivarienne du Venezuela depuis octobre 2012, décrire ce qui unit cette opposition (dans une interview au journaliste Salim Lamrani) : « L’opposition est une fédération d’ambitions et d’intérêts hétérogènes, unie seulement par la haine de Chávez et du peuple bolivarien. Elle est incapable de comprendre que nous vivons une époque différente et qu’il n’y aura pas de retour aux temps passés. Elle est issue des vieux partis politiques, des élites économiques et de l’oligarchie et n’admet pas avoir perdu le pouvoir politique qu’elle considérait comme étant sa propriété exclusive. L’opposition est également marquée un facteur racial et raciste. Elle n’admet toujours pas qu’un noir pauvre se trouve au centre du pouvoir. La haine de Chávez résume toutes les misères morales de la condition humaine : le racisme et la haine de classe, la haine des pauvres. »

LA TENTATION PUTCHISTE

Derrière l’exploitation de cette haine il y a une tentation putchiste permanente, soutenue par Washington et ses réseaux d’action : « C’est la même opposition qui a organisé le coup d’Etat d’avril 2002 et qui a imposé une junte putschiste dont le « Président » [Pedro Carmona Estanga] a prêté serment non pas sur la Constitution mais sur une feuille blanche, car il rejetait notre nouvelle Constitution, et qui a dissous tout les pouvoirs publics. Cette opposition qui a réprimé le peuple suite au coup d’Etat du 11 avril 2002 prétend dicter des conférences sur le concept de la démocratie. »

Le Temps rappelait il y a quelques jours ce putch de 2002 : « En avril 2002, appuyée par les milieux d’affaires et par un fort mouvement de protestation politique » - déjà bien organisé comme celui actuel par les mêmes réseaux spécialisés -, « une coalition de hauts gradés fait un coup d’Etat, s’empare de Chavez, annule la Constitution, proclame un nouveau président. Toutefois, une partie des militaires anti-chavistes refuse de suivre. Les pro-chavistes réussissent à redresser la situation et en 48 heures, avec le soutien massif du mouvement chaviste des bas quartiers, le président élu est rétabli dans ses fonctions. »

LES MERCENAIRES DE LA CIA EN ACTION :
REVOILA OTPOR/CANVAS !

Le coup d’état rampant en cours au Vénézuela, comme celui de 2007, suit les méthodes bien connues des « révolutions de couleur » made in USA (1). Le Vénézuela est depuis dix ans la cible permanente des opérations de déstabilisation organisées depuis les USA, la principale tentative ayant eu lieu lors de la présidentielle de 2007. Sur un schéma similaire à celui des « révolutions de couleur » en Europe de l’Est ou des débuts du « printemps arabe » au Proche-Orient.

On notera que le réseau international OTPOR/CANVAS, financé par les Américains, a une trés active section au Venezuela. OTPOR encadre aussi divers groupuscules vénezueliens, à l’extrême-droite mais aussi à l’extrême-gauche trotskiste – il s’agit d’occuper tout le terrain oppositionnel des mécontents - , comme « the People Liberation Army of Venezuela ». Au sigle anglais PLAV (2), destiné aux medias US…

LE PREMIER COUP DE 2007 A CARACAS

Hugo Chavez est la première cible de l’exportation des « révolutions de couleur » en Amérique Latine. Où un logo clone de celui d’OTPOR a fait son apparition, un « mouvement estudiantin formant la pointe de lance de l’opposition devant l’échec des partis politiques » pro américains.

« Freedom House est au Vénézuéla depuis 2005 (…) Freedom House est une fondation conservatrice étasunienne, qui agit en outre comme « think tank » de la pensée de droite radicale. Il est financé par le gouvernement américain et dit qu’il cherche « fortifier la démocratie » (sic) en étant établi dans des pays avec des gouvernements socialistes. Noam Chomski a dénoncé ses liens avec la CIA ». « LES ÉTATS-UNIS A LA CONQUETE DE L'EST », le documentaire choc de la reporter française Manon Loizeau a fait l’objet d’une diffusion à la TV d’Etat vénéazuelienne.

LES « REVOLUTIONS DE COULEUR » EN DEUX TEMPS :
DES MANIFESTATIONS AU COUP DE FORCE VIOLENT

On oublie souvent le deuxième stade des « révolutions de couleur », lorsque la « révolution non violente » se transforme en coup d’état insurrectionnel. Un des médiamensonges de l’OTAN a été de faire croire largement et durablement au caractère pacifique (sic) de ces insurrections.

La pseudo « encyclopédie » WIKIPEDIA – outil de désinformation des services de l’OTAN – écrit ainsi sans rire : « Les partisans à ces révolutions ont pour la plupart usé d'une résistance non-violente pour protester contre des gouvernements vus comme corrompus et autoritaires et pour promouvoir la démocratie et l'indépendance nationale principalement vis-à-vis de Moscou. Ces mouvements ont adopté une couleur ou une fleur comme symbole de leur mouvement. Ces révolutions sont caractérisées par le rôle important d'organisations non gouvernementales et particulièrement d'activistes étudiants dans l'organisation d'une résistance non violente. »

Dans la réalité, le second stade c’est à l’Est - ou au Venezuela aujourd’hui - l’assaut insurrectionnel violent, l’occupation des bâtiments publics et des parlements. Et en Orient, le transformation en coup d’état puis en guerre civile. Alors arrivent les hooligangs et les skins néofascistes (Géorgie, Ukraine, Belarus, Russie, Venezuela) ou les djihadistes et les forces spéciales de l’OTAN (Libye, Syrie) …

En outre, le modèle de ces coups d’état, Belgrade en 2000, a été précédé d’une vague d’assassinats des cadres du régime de Milosevic. Principalement dans les ministères de force. Il s’agissait de dégager la rue de toute force organisée pour contrer les groupes de choc de l’OTAN. En particulier l’assassinat de Zelino Rajnatovic, le célèbre Arkan, le 15 janvier 2000, avait supprimé celui qui aurait été le plus susceptible de nettoyer la rue de Belgrade pour le gouvernement Milosevic. Avec ses anciens « Tigres », des commandos de choc, et la masse du noyau dur des supporters du club de football « L’Etoile rouge » de Belgrade, dont Arkan était le leader.

Curieusement ce mode opératif en deux stades, que l’on rencontre partout où le coup d’état passe à la phase active réussi, n’a jamais été analysé avant moi.

Voilà le Venezuela et sa Révolution bolivarienne confronté à nouveau  à ces spécialistes du changement de régime made in USA. Le PSUV porte sa part de responsabilité, n’ayant pas su anticiper et trop confiant dans l’ « effet Chavez ».

Luc MICHEL

http://www.lucmichel.net/2013/04/16/luc-michel-focus-venezuela-une-nouvelle-revolution-de-couleur-made-in-usa-est-organisee/

(1) Cfr. Luc MICHEL, PSEUDO REVOLUTIONS DE COULEUR ET SOI-DISANT PRINTEMPS ARABE : LES COUPS D’ETAT DES USA A L’EST ET EN ORIENT DECRYPTES
Sur :
http://www.elac-committees.org/2012/09/28/pcn-info-pseudo-revolutions-de-couleur-et-soi-disant-printemps-arabe-les-coups-d%e2%80%99etat-des-usa-a-l%e2%80%99est-et-en-orient-decryptes/

(2) Cfr. Luc MICHEL, EODE / International Elections Monitoring / VENEZUELA: MADURO CONVOQUE UNE PRESIDENTIELLE APRES LES OBSEQUES DE CHAVEZ
Sur :
http://www.eode.org/eode-international-elections-monitoring-venezuela-maduro-convoque-une-presidentielle-apres-les-obseques-de-chavez/

 Source : Venezuela : une nouvelle révolution de couleur made in USA est organisée !

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Gilles Deleuze, février 1977.

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