2138 personnes détenues, parmi elles 243 enfants et adolescents et 407 femmes. Neufs d’entre elles furent dénudées pendant les procédures policières
Par Página 12 Jeudi 14/11/2019 Source 1
Cela a commencé avec les coups, les humiliations, les menaces, mais au cours des dernières heures, les tortures et viols de femmes se sont convertis en une réalité au Chili. L’état d’exception qu’a implémenté le gouvernement de Sebastián Piñera a ramené les pratiques de la dictature, y compris en qui concerne les disparitions. Beaucoup de femmes qui ont été détenues jusqu’ici ont disparu. En plus, les prisonnières à Santiago du Chili furent dénudées devant le personnel masculin qui leur touchait les parties génitales et « leur mettait la pointe du fusil dans le vagin pendant qu’ils les menaçaient de les violer et de les assassiner », comme il apparaît dans les témoignages recueillis par des compagnes de détention.
La Commission de Droit Humains de l’OEA (CIDH) a exprimé sa préoccupation pour les dénonciations faites auprès de l’Institut National de Droits Humains (INDH) concernant la violence sexuelle, les obligations de se dénuder et les tortures dans le cadre des détentions de manifestantes. « Le Chili doit mener une investigation et sanctionner ces faits avec diligence, de même que les actions policières et militaires dans lesquelles fut fait usage d’une force disproportionnée contre les civils. L’usage de la force doit être régit par les principes de légalité, nécessité, proportionnalité » a exprimé le CIDH.
Selon les chiffres de l’Institut National de Droits Humains (INDH) après les journées de protestation de dimanche, 2138 personnes furent détenues, parmi elles 243 enfants et adolescents et 407 femmes. Neufs d’entre elles furent dénudées pendant les procédures policières, des faits qui ont eu lieu dans les communes de Santiago, Maipú, Iquique, Antofagasta, Coquimbo, Valparaíso, Talca, Concepción, Valdivia, Temuco, Puerto Montt et Punta Arenas. La majorité mettent en cause l’usage disproportionné de la force au moment de la détention, en plus des détentions d’enfants, des mauvais traitements, des coups aux visages et à la poitrine, des tortures et les brimades sexuelles, entre autres outrages.
L’avocate du Réseau Chilien contre la Violence faite aux femmes, Silvana del Valle rapporte à El Desconcierto que la violence politico-sexuelle est une constante dans notre pays et dans toute la région depuis les dernières décennies, parce que les appareils policiers sont éduqués pour devenir des dispositif patriarcaux. Cela apparaît pendant la dictature Chilienne et pendant la période qui suit comme une caractéristique fortement marquée des forces de police ».
D’autre part, un groupe transversal formé d’académiques de différentes idéologies exigent des autorités la fin du couvre-feu et de l’État d’Urgence face aux lésions et morts occasionnées par les forces en uniforme ; ils exigent également que les avocats garantissent le respect des droits des citoyens. Selon des informations de La Tercera, 206 Académiques, doyens et doyennes, des principales facultés de Droit du pays ont signé une lettre concernant « la grave crise politique et sociale que vit le Chili et les violations des Droits Humains qui se sont produits ». Le début de la missive dit « Comme professeurs de droits de différentes facultés du pays et de diverses positions politiques nous ne pouvons garder le silence face à la situation que traverse actuellement notre pays ». Ils poursuivent en condamnant « les graves violations des droits humains qui ont été constatées en différents lieux de notre pays. Nous acons constatés au cours du temps des faits gravissimes qui montrent des schémas communs ».
Ils lancent également un appel aux avocats et avocates de tout le pays afin qu’ils informent les citoyens de leurs droits et des moyens de les exercer, et qu’ils assument la défense gratuite et adéquate de ceux dont les droits ont été violés ». « Nous faisons savoir que dès à présent nous nous engageons à ce que aucun acte constituant une violation au droits humains ne reste impuni » concluent-ils.
Des Infiltrés aux ordres
Les provocations violentes commises par des carabiniers infiltrés incluent l’incendie et le pillage de supermarchés. Plusieurs dénonciations de montages effectués par les carabiniers sont devenus virales, avec des images pour les illustrer, comme cette vidéo dans laquelle on voit des effectifs de police qui font descendre de leur véhicule un civil qui va mettre le feu à une succursale de la Banque de Crédit et Inversion (BCI).
« De même que pendant la dictature, il y a des mères désespérées qui cherchent leurs enfants dans les tribunaux. De nombreux mineurs d’âges ont été arrêtés » raconte Patricia, une psychologue interviewée par Ancap. Patricia raconte que dans le Chili de Piñera des gens sont séquestrés, qu’ils sont transférés dans des camions et leur proches ignorent où ils se trouvent. Déjà circulent des images d’incendie dans lesquelles on peut voir des cadavres, de ceux que les cercles médiatiques veulent faire passer pour des pilleurs », alors que nous avons vu dans des vidéos la manières dont ils jettent les corps [dans les incendies] Nous pensons tous que ce sont des victimes qui sont jetées dans le feu pour faire disparaître tout indice. »
L’Institut National de Droits Humains du Chili a tenté d’intégrer hier le poste [de santé] central de Santiago, un des lieux les plus vaste qui existe en ce qui fait référence à la santé publique et qu’ils se sont heurtés à une porte fermée par des chaînes, empêchant qu’ils entrent. « Nous ne savons pas ce qui ce passe mais ils sont entrain de bloquer le système de santé. Les installations portuaires sont également fermées. Nous sommes comme en guerre » ajoute Patricia dans un sens opposé à celui donné par le président chilien. La chronique de Ancap (Agence de Nouvelles de Communication Alternative) affirme que « ceux qui ont vécu la dictature de Pinochet sont plongés dans la terreur et ont peur de sortir dans les rues, mais leur enfants et leurs petits-enfants le font pour eux ». Dans la commune de San Bernardo, située au Sud de Santiago, ils sont entrés dans les écoles et on séquestré des petites filles et des adolescentes. Plus tard, dans les centre de santé des lésions pour viols ont été constatées chez beaucoup d’entre elles » révèle ce média.
La suite est le récit de Pamela Maldonado, qui a donné plusieurs interviews complémentaires que je vais rassembler ici Source 2 et Source 3. Les faits ont eu lieu le 19 octobre, ils sont illustratifs de ce qui se produit chaque jour au Chili depuis.
Capture de la vidéo d'arrestation de Pamela et son papa à voir ici : https://radiolaclave.cl/politica/mujer-denuncia-torturas-a-su-papa-diabetico-lo-patearon-y-recibio-combos-en-la-cara/
« Nous étions avec mon papa dans la rue San Isidro, près du métro Santa Lucia, aux environs de sa maison, il habite là, nous regardions ce qui se passait, lorsque une cinquantaine de carabiniers des Forces Spéciales sont arrivés en courant », raconte Pamela Maldonado, qui dénonce les tortures subies par son père le samedi 19 octobre, au cours des intenses manifestations qui se déroulaient dans tout le pays. « Mon papa, Miguel Maldonado a 53 ans et sans que leur importe que nous soyons là seulement en passant et en regardant, ils l’ont empoigné et jeté au sol. Je leur demandais de ne pas le frapper parce que c’est une personne âgée et diabétique, mais au moins 30 carabiniers l’ont encerclé, ils ont fait un barrage de leurs boucliers et entre tous ont commencé à le frapper ».
Pamela relate qu’elle criait aux carabiniers d’arrêter de le frapper, mais la réponse qu’elle a obtenu fut une forte poussée dans le dos qui l’a jetée contre un mur que sa tête a cogné, elle est tombée.
« Quand je me relevai je vis qu’ils avaient mis mon papa dans un fourgon carcéral et je commençai à filmer. Je demandai avec insistance de me dire où ils l’emmenaient et ils ne me répondaient pas. Finalement l’un d’eux m’a dit qu’ils l’emmenaient à la Troisième Division des Commissariats. Quand je lui demandai où il se situait, il me répondit de chercher sur Google. » raconte-t-elle.
« Puis il s’est énervé, m’a insultée et saisie par le cou et m’a dit que j’étais prisonnière, ils ont pris mon téléphone cellulaire pendant qu’il me faisaient monter dans le fourgon. A l’intérieur, j’ai vu mon papa avec le visage plein de sang. Avant qu’il le fasse monter dans le véhicule, il n’était pas comme ça, ils avaient continué à le frapper à l’intérieur » dénonce-t-elle.
« Je voudrais dénoncer un carabinier en particulier, Danilo Muñoz, qui s’est comporté comme un forcené » ajoute la plaignante. « Il a dit qu’il aimerait descendre pour tuer des gens, tous les enculés de communistes et il se vantait qu’il pouvait faire ce que bon lui semblait grâce à nos impôts » détaille-t-elle.
La jeune femme raconte que pendant tout ce temps ils maintenaient les menottes, volontairement serrée à outrance, à son papa dont le visage saignait. « Je lui offris de l’eau, mais un Carabinier me poussa, je m’assis et ils commencèrent à jeter de l’eau au visage de mon père avec une bouteille qu’ils avaient. Ils serraient les menottes toujours d’avantage et je les priai d’arrêter, parce qu’il est diabétique et qu’il est dangereux pour lui de saigner comme cela, pendant tout ce temps, mais eux les serraient toujours plus, et le frappaient à la poitrine. » affirme-t-elle. Arrivé à ce point elle ne pouvait croire à ce qui se passait, elle a serré son papa dans ses bras pour le protéger des coups.
Maldonado raconte qu’ils furent arrêtés aux environs de 16h30 et maintenus dans le fourgon au moins jusqu’à 20h. « Pendant que nous étions dans le véhicule, ils ont fait monter un homme, appelé Sergio dont le nez n’arrêtait pas de saigner. Il criait de douleur et disait qu’il était un malade chronique, quand je lui demandai ce dont il souffrait, il me répondit qu’il était séropositif »
Selon Pamela, quand les carabiniers ont appris se dont il souffrait, ils ont commencé à se moquer de lui avant de l’isoler et de continuer à le frapper.
La jeune femme dénonce un autre carabinier nommé Gallardo. Quand le véhicule s’est approché du commissariat les coups contre les détenus ont redoublé. Gallardo a proféré à Pamela des menaces sexuelles :« On va voir si cela te plaît de te faire enculer ! » et il a proféré des menaces contre les enculés de communistes et de mapuche [nation native à l’avant-garde des luttes contre le néolibéralisme et son corollaire extractiviste.]. Au commissariat ils furent enfermés dans des cellules glaciales, improvisées, avec des toilettes bouchées débordant d’excréments. Ils ont encore été battus.
« Après un long moment, est arrivé un avocat des Droits Humains qui a pris notre déclaration et des photos. Les carabiniers l’ont menacé et il nous dit qu’il avait peur de ce qu’ils pourraient nous faire à l’intérieur. Après ils ont emmené mon papa pour constater les lésions et puis ce fut mon tour, ensuite nous avons signé des papiers et ils nous ont relâches » Il était minuit passée.
La jeune femme assure qu’elle portera plainte contre le carabinier Daniel Muñoz pour tortures et menaces.
« Il me fait peur ce type, en vérité c’est une bête, un psychopathe qui clame qu’il aimerait tuer des gens et changer son second nom de famille mapuche, parce qu’il veut tuer tous ces enculés »
La jeune femme et son papa sont cités à comparaître devant un juge pour désordres légers qu’ils n’ont jamais commis.
Voilà ce qui se reproduit chaque jour au Chili en 2019, dans la Suisse d’Amérique Latine, modèle de démocratie selon les USA. Basta !
Traduction et compilation Anne Wolff
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