1 septembre 2010 3 01 /09 /septembre /2010 08:56

 

 

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Hugo Chávez, « porte-parole spectaculaire » d’une « théorie du complot » ?

Auteur : Henri Maler, Laurent Dauré - Source : Acrimed


France Info, du lundi au vendredi, diffuse plusieurs fois par jour [1], une chronique de Matthieu Aron (chef du service police-justice-enquêtes) et Franck Cognard (journaliste dans ce même service) intitulée « Le vrai du faux ».

Le site Internet de la radio présente ainsi l’objet de cette chronique : « Vraie manipulation, désinformation volontaire ou accidentelle, complot imaginaire, opération de déstabilisation économique ou simple canular, la chronique "Le vrai et le faux" [sic] décrypte les ressorts d’une rumeur. Comment naît-elle, pourquoi le public y croit-il, à qui profite-t-elle ? »

 

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Quelques titres donnent un aperçu de ce dont il s’agit : « Le faux témoignage de la première guerre du Golfe » (29 juillet), « La "vraie-fausse mort" de Mickael Jackson » (11 août), « Le premier faux pas sur la Lune » (17 août), « Le football et ses rumeurs » (20 août). L’intérêt de ces chroniques est inégal , mais leur présentation est en général précise et rigoureuse.

Lire la suite :



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Filtres et alambics de l’information sur le référendum du 2 décembre au Venezuela.

Publié le 7 décembre 2007 par Henri Maler, Renaud Lambert

 


Qu’ils soient, à des degrés divers, plutôt hostiles ou favorables aux transformations en cours au Venezuela et à la politique suivie par le gouvernement de ce pays, ou même plus ou moins indifférents, les lecteurs-auditeurs-téléspectateurs français sont-ils informés ou désinformés ? Et comment ?

Le traitement médiatique de la victoire du « non » au référendum constitutionnel du 2 décembre au Venezuela est un nouveau révélateur d’une information machinale, partisane et raréfiée, à l’instar de celle qui est filtrée par les dépêches de l’AFP ou distillée dans les alambics de Courrier International.

Lire la suite :

● Filtres et alambics de l’information sur le référendum du 2 décembre au Venezuela. - 7/12/2007

 


 

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28 août 2010 6 28 /08 /août /2010 12:38

 

 

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le 21/3/2010 12:50:16

Libertalia vient de publier Les Mots sont importants, un livre qui va à rebours des discours actuels sur l'identité nationale, le féminisme, le sarkozysme...
On peut se le procurer ici:http://editionslibertalia.com/

En voici l'introduction:

Présentation.
Pourquoi les mots sont importants

Ce livre rassemble trente et un textes issus de dix a nnées de travail au sein du collectif Les mots sont importants . À côté des raisons biographiques ou sociologiques qui expliquent notre intérêt pour le langage et notre goût pour la critique, les raisons politiques qui nous ont poussés à investir le champ de la critique du langage et plus spécifiquement de la langue des dominants, n’ont au fond rien d’original ni de nouveau. George Orwell, dès les années 1940, les expliquait avec force : « À notre époque, les discours et les écrits politiques sont pour l’essentiel une défense de l’indéfendable. Des événements comme la continuation de la domination britannique en Inde, les purges et les déportations en Russie, le lancement de la bombe atomique sur le Japon, peuvent bien sûr être défendus, mais seulement avec des arguments que la plupart des gens ne peuvent pas reprendre à leur compte, et qui ne s’inscrivent pas dans les buts professés par les partis politiques.

 

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Ainsi le langage politique consiste-t-il pour une grande part en euphémismes, pétitions de principe et pure confusion. Des villages sans défense sont bombardés par l’aviation, les habitants sont chassés vers la campagne, le bétail est passé à la mitrailleuse, les maisons sont incendiées : on appelle cela pacification. Des millions de paysans se font voler leur ferme et sont jetés sur les routes avec pour seul viatique ce qu’ils peuvent porter : on appelle cela transfert de population, ou rectification de frontière. Des gens sont emprisonnés pour des années sans jugement, ou abattus d’une balle dans la nuque, ou envoyés mourir du scorbut dans les camps de bûcherons de l’Arctique : on appelle cela élimination des éléments suspects. Une telle phraséologie est nécessaire pour susciter les images qui leur correspondent.

 

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Prenez par exemple un professeur anglais qui vit à l’aise et qui défend le totalitarisme russe. Il ne peut dire d’un trait : “Je crois qu’il faut tuer ses adversaires toutes les fois qu’on peut en tirer un résultat profitable”. Par conséquent, il dira plutôt quelque chose de ce genre : “Tout en concédant volontiers que le régime soviétique affiche certains traits que les humanistes sont enclins à déplorer, nous devons, je pense, reconnaître qu’une certaine restriction du droit de l’opposition politique est un corollaire inévitable des périodes de transition, et que les rigueurs auxquelles le peuple russe a été confronté ont été amplement justifiées dans la sphère des réalisations concrètes .” »

 

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Le fait qu’Orwell ait ciblé son travail critique sur des régimes totalitaires ou coloniaux et que nous nous consacrions pour notre part à des contextes démocratiques et postcoloniaux ne change pas fondamentalement l’enjeu, bien au contraire : plus un régime se dit démocratique et égalitaire, plus il doit légitimer la violence qu’il exerce et l’ordre inégalitaire qu’il instaure.

 

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Quant au rôle politique de plus en plus important que jouent les images du fait de l’essor et de la quasi-hégémonie des médias audiovisuels, s’il appelle en réponse une attention critique spécifique aux choix d’images, à leur cadrage et à leur montage – celle d’un Serge Daney, par exemple – il n’annule pas, loin s’en faut, la centralité du langage dans la sphère du combat culturel et idéologique. Pierre Bourdieu l’a souligné : « En fait, paradoxalement, le monde de l’image est dominé par les mots. La photo n’est rien sans la légende qui dit ce qu’il faut lire – legendum –, c’est-à-dire bien souvent des légendes qui font voir n’importe quoi. Nommer, on le sait, c’est faire voir, c’est créer, porter à l’existence. Et les mots peuvent faire des ravages : islam, islamique, islamiste – le foulard est-il islamique ou islamiste ? Et s’il s’agissait d’un fichu, sans plus ? Il m’arrive d’avoir envie de reprendre chaque mot des présentateurs qui parlent souvent à la légère sans avoir la moindre idée de la difficulté et de la gravité de ce qu’ils évoquent et des responsabilités qu’ils encourent en les évoquant, devant des milliers de téléspectateurs, sans les comprendre et sans comprendre qu’ils ne les comprennent pas. Parce que ces mots font des choses, créent des fantasmes, des peurs, des phobies ou, simplement, des représentations fausses. »

 

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Il est dès lors assez indifférent, du point de vue de notre travail, que les discours critiqués émanent de la presse écrite, de la radio ou de la télévision – cela d’autant plus que c’est la même langue qui s’y exprime… et souvent les mêmes locuteurs : ces fameux éditocrates (Alain Duhamel, Laurent Joffrin, Jacques Attali, Bernard-Henri Lévy, Alexandre Adler, Christophe Barbier, Nicolas Baverez, Caroline Fourest, Jacques Marseille, Jacques Julliard, Philippe Val et une poignée d’autres) qui sont devenus, que nous le voulions ou non, les ténors de l’air du temps.

 

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Il serait bien entendu abusif d’envisager de manière trop massive la langue des grands médias, en méconnaissant son hétérogénéité : même si la soumission à l’ordre établi demeure en tout lieu la règle, et même si l’on peut affirmer que tous les grands médias promeuvent pour l’essentiel une langue normalisée et appauvrie, une certaine hétérogénéité se manifeste toutefois. D’abord entre des médias populistes comme TF1, RTL ou Le Parisien, qui propagent une version pauvre, caricaturale et édulcorée de la culture populaire : la culture de masse – avec son avatar linguistique : une langue de masse – et des médias élitistes comme Le Monde, Le Nouvel Observateur, France Culture ou Arte, qui cultivent davantage la distinction et la cuistrerie.

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Ensuite entre les programmes de divertissement (jeux, reality-shows, talk-shows sans dimension politique affichée), la fiction, les programmes culturels, l’information, le commentaire politique et les « débats de société ». Du point de vue de la critique de la langue, tous ces types d’émissions méritent une lecture politique même si, de fait, nous concentrons pour notre part l’essentiel de notre attention sur l’information, le commentaire et le débat, en pointant deux langues sensiblement différentes, mais passibles des mêmes critiques :

 

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– la langue du journalisme d’information ou d’enquête, dont nous dénonçons la fausse neutralité, la croyance naïve au « fait » et la méconnaissance de sa construction sociale (nous avons par exemple produit plusieurs analyses déconstruisant l’apparente réalité objective du « problème de l’immigration », du « problème des quartiers sensibles », du « problème de l’insécurité » et du « problème du voile à l’école », ou encore la fausse évidence, considérée comme acquise dans la plupart des reportages, d’une augmentation et d’une spécificité banlieusarde et « arabo-musulmane » des violences sexistes) ;
– la langue du commentaire autorisé, désormais rebaptisé « décryptage », dont nous dénonçons la fausse impartialité en mettant à jour leurs partis pris implicites, leurs points aveugles et leurs présupposés idéologiques.

 

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Grands auteurs, grandes questions, gros concepts et grosses bites


Les trente et un textes retenus ont été regroupés en sept thématiques. Un premier chapitre, intitulé « Poupées ventriloques », analyse à partir d’exemples précis la manière dont la parole populaire est confisquée par ceux-là même qui prétendent la recueillir et la relayer : les éditorialistes armés de sondages qui font dire à « l’opinion publique » absolument tout ce qu’ils veulent. Le chapitre suivant, « La France d’en bas vue d’en haut », s’intéresse à la manière dont ces mêmes éditorialistes, populistes lorsque le peuple opine sagement aux « inquiétudes » et aux « réformes » que lui ont concoctés les sondeurs, deviennent tout à coup antipopulistes à chaque fois qu’émerge une expression populaire authentique et autonome : la grève, l’émeute ou cette émeute électorale que fut la victoire du non au référendum européen de 2005. Dans ces moments incontrôlés où les élites ne parviennent plus à « parler le peuple », le commentaire politique autorisé change de registre et parle du peuple – en des termes révélateurs d’un profond mépris de classe.

 

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Ce qui est en question dans ces deux chapitres est en somme la distribution de la parole : qui est sujet du discours autorisé, qui n’est qu’objet ? Qui parle de qui ? On l’oublie trop souvent : les rapports de pouvoir s’expriment sur le plan linguistique autant que sur les plans politique, économique ou social. Le dominant est, entre autres choses, celui qui a la parole tandis que le dominé doit sans cesse la conquérir. Quand le second doit se battre non seulement pour avoir la parole mais aussi et surtout pour être écouté (c’est-à-dire pris au sérieux) et entendu (c’est-à-dire au moins compris, à défaut d’être approuvé), le premier est investi d’une autorité symbolique qui lui donne à peu près toute légitimité à dire à peu près tout ce qu’il veut sur à peu près tous les sujets – et sa parole jouit d’une légitimité, d’un intérêt et d’un crédit quasinaturels.

 

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C’est ainsi par exemple que, parallèlement aux dominations militaire, politique et économique que la France coloniale a exercé et exerce sur une bonne partie de l’Afrique, s’est mis en place un ordre symbolique qui répercute la division sociale du travail sur le terrain linguistique, en instituant les Français blancs dans le rôle de sujet ou d’agent d’énonciation, tandis que les Africains sont relégués soit au rang d’objet soit à celui de destinataire des discours – c’est ce qu’a illustré sous une forme particulièrement brutale l’ahurissant discours de Dakar de Nicolas Sarkozy .

 

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Le troisième chapitre poursuit la réflexion en s’attardant sur le contenu des discours : comment nos maîtres, clercs, éditorialistes et journalistes parlent-ils du peuple et de ses différentes composantes – immigrés, jeunes des quartiers populaires, lesbiennes, femmes émancipées ? Une même réponse se dégage, au-delà des différences et des nuances : mal. Le discours est mal construit, mal fondé logiquement, mal étayé empiriquement, mauvais en somme d’un strict point de vue technique au regard des exigences du bon journalisme, mais aussi malveillant et malfaisant. Stigmatisation des pauvres et des étrangers, légitimation de la violence économique, raciste, sexiste et homophobe : les raisons sont nombreuses d’intituler ce chapitre « Mauvaises langues, mauvais traitements ».

 

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Cette analyse qualitative du contenu des discours est prolongée dans le chapitre suivant par une perspective quantitative : comment, à quelle échelle et à quelle intensité ces discours autorisés sont-ils diffusés ? Quel bruit médiatique font-ils ? Quelle est leur force de frappe politique ? La signification et les effets sociaux d’un discours dépendent en effet autant de ce qui est dit que de qui le dit et des conditions de réception du discours. Nous soulevons en particulier un effet de quantité particulièrement opérant ces dernières années : la figure du deux poids deux mesures, en particulier dans la manière de médiatiser, réprouver et combattre les différentes formes de violence raciste ou sexiste. Toujours au détriment des mêmes…

 

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Le cinquième chapitre resserre encore plus la focale en se concentrant sur des mots. Il porte plus précisément sur ce que Gilles Deleuze appelait les gros concepts : ces grands mots d’apparence savante qui ont en commun d’intimider et de servir à ne pas penser. À la fois vides (de sens) et trop pleins (de présupposés et de moralisme), ils forment l’armature de ce qu’Orwell a nommé la novlangue du pouvoir. Alain Bihr en a répertorié un certain nombre, en particulier dans le domaine des discours socio-économiques ; nous en avons retenu quatre, apparus récemment et vite devenus hégémoniques : la mixité sociale et la diversité (coefficientées positivement), le communautarisme et la honte d’être français (coefficientés négativement).


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Ironiquement intitulé « Grandes questions », le sixième chapitre vient contester le monopole de l’objectivité et du discours vrai que se sont réservé les clercs de l’ordre dominant, qu’ils soient écrivains, éditorialistes, chargés de cours à Sciences-Po ou histrions télévisuels – ou, comme c’est souvent le cas, tout cela à la fois. Nous proposons des analyses approfondies qui ont en commun d’aller à contre-courant des interprétations dominantes de divers phénomènes : le racisme, la nature du sarkozysme et les raisons de son succès, les enjeux de la lutte contre le sexisme en banlieue, mais aussi la construction même de cet objet politique très particulier qu’est la banlieue.

 

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Nous avons réuni, pour finir, plusieurs textes d’intervention sur l’hétérosexisme, et plus précisément sur ses formes machistes et virilistes, telles qu’elles se manifestent dans les hautes sphères de la politique, de la culture et de la communication – ce gotha qu’on nous présente toujours comme policé et courtois par opposition aux maris violents, jeunes violeurs et autres harceleurs supposés tous d’origine populaire, pas très française et pas très catho-laïque. En épinglant entre autres Julien Dray, Ségolène Royal, Xavier Darcos, Éric Zemmour, Alain Soral, Patrick Buisson et Dominique de Villepin, sans oublier notre petite bite sur pattes nationale, Nicolas Sarkozy, ces textes sont autant d’occasions de rappeler que le sexisme, y compris le plus grossier, est loin d’être l’apanage des gueux et des basanés.

 

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De cet ensemble se dégage, nous l’espérons, un souci qui anime le travail de publication poursuivi depuis dix ans autour du site lmsi.net : contribuer, avec bien d’autres collectifs et médias alternatifs, à promouvoir une contre-culture anticapitaliste, antiraciste et antisexiste. Nous tenons à remercier toutes celles et ceux qui ont participé à cette entreprise en écrivant pour le site, et notamment les précieux contributeurs réguliers que sont Christine Delphy, Nellie Dupont, Laurent Lévy et Faysal Riad. Merci plus particulièrement à Patience Philips et Florence Tissot qui ont coécrit deux des textes repris dans ce recueil.

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C’est à Erwan Le Corre que nous devons l’existence du site : qu’il soit remercié pour sa patience, sa disponibilité et ses conseils. Merci également à Stéphane Deschamps qui a bénévolement reconfiguré le site, et à l’équipe du portail rezo.net qui a grandement contribué à le populariser. Nous remercions enfin nos parents, sœurs, frères et ami-e-s pour leur fidélité et leur soutien. Merci à Claire, Jacques, Marianne et Florence Tissot, Danielle, Guregh, Marion et Marc Tevanian, Abdelouahab Abdoun, Philippe Adam, Teddy Ajolet, Zahra Ali, Isabelle Babin, Djamila Bechoua, Sandrine Bertaux, Emmanuel Blanchard, Yasid Bouaza, Houria Bouteldja, Mohamed Bourokba, Catherine Cauwet, Olivier Cyran, Frédéric de Carlo, Mona Chollet, Ismahane Chouder, Noëlle Dupuy, Sébastien Fontenelle, Frédéric Gies, Abdelaziz Gharbi, Jérome Host, Malika Latrèche, Laurent Lévy, Hanane Mabchour, François Pradal, Elsa Ménard, Cécile Rigaldiès et Fabrice Weissman. Au-delà, ce livre est dédié à toutes celles et ceux qui, loin des radicalités aristocratiques, du communisme mondain et des poses prophétiques, s’engagent en pensée, en paroles et en actes, et s’efforcent jusque dans leur vie professionnelle et affective de faire vivre un minimum les mots émancipation, égalité et amitié.

 

Source :  BARRICATA - BARRICATA

 

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24 juillet 2010 6 24 /07 /juillet /2010 02:22

 

 

Des sites communautaires en général et de Facebook en particulier
Nota Bene: Ce texte, opportunément signé La Boétie, offre un tableau saisissant de la servitude volontaire assistée par ordinateur. Il sera publié en deux parties dans les numéros 6 et 7 de Rodez La Rouge. Le numéro 6 paraîtra en juillet 2010. (Jules Bonnot de la Bande.)

Des sites communautaires en général et de Facebook en particulier: un monde entre marchandisation et représentation.
La désinsertion de la praxis, et la fausse conscience anti-dialectique qui l’accompagne, voilà ce qui est imposé à toute heure de la vie quotidienne soumise au spectacle ; qu’il faut comprendre comme une organisation systématique de la « défaillance de la faculté de rencontre », et comme son remplacement par un fait hallucinatoire social: la fausse conscience de la rencontre, l’«illusion de la rencontre ». Dans une société où personne ne peut plus être reconnu par les autres, chaque individu devient incapable de reconnaître sa propre réalité.
Guy Debord, La Société du spectacle, Thèse n° 217



Prolégomènes
Quand Guy Debord écrit La Société du Spectacle en 1967, son but avoué est de construire une arme théorique à même de décrire le monde moderne afin, une fois les mécanismes de celui-ci dévoilés, de le renverser. Il rappelle d’ailleurs dans son Avertissement pour la troisième édition française de La Société du Spectacle:«Il faut lire ce livre en considérant qu’il a été sciemment écrit dans l’intention de nuire à la société spectaculaire. Il n’a jamais rien dit d’outrancier.»
Bien évidemment, de nombreux contre-feux sont allumés aujourd’hui, de manière à neutraliser cette pensée dont l’actualité fait pressentir aux dominants qu’elle recèle encore un potentiel explosif qu’il importe de déminer. Que l’on pense à l’entreprise sollersienne visant à statufier Debord en la figure d’un commandeur des arts et lettres ou à la volonté étatique de le muséifier en achetant (avec quelles difficultés!) ses archives: personne n’est dupe.
Cependant, pour qui relit La Société du Spectacle, la grille de lecture du monde fournie reste opératoire. Et d’une cruelle actualité. Qu’on en juge:
«Toute la vie des sociétés dans lesquelles règnent les conditions modernes de production s’annonce comme une immense accumulation de spectacles. Tout ce qui était directement vécu s’est éloigné dans la représentation»[i].
Nous pourrions appliquer cette thèse à une multitude de situations de la vie quotidienne mais l’objet de ce texte sera, plus modestement, d’analyser ce que disent du monde moderne les sites communautaires et plus exactement Facebook, car nous considérons que c’est une nouvelle réalité qui s’est faite jour et qui, née de ce monde, en est aussi la continuation par d’autres moyens. C’est pourquoi nous analyserons le site Facebook pour ce qu’il est, c'est-à-dire un medium de communication mis en place par le Spectacle [ii], et qui, à ce titre, ne concerne pas seulement les jeunes ou les citadins, même si c’est le public le plus représenté, mais l’ensemble de la population. Nous traiterons donc de la place occupée par Facebook au sein des sociétés occidentales, mais aussi de la signification que revêt ce phénomène, avant d’en étudier les conséquences sociales. 
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Petit rappel à l’usage des dépassés, des déconnectés et des inadaptés au monde actuel.
Pour ceux qui croiraient encore que la télévision est la source de distraction préférée des Français, il faut rappeler que la donne est en train de changer et que désormais, et pour la première fois depuis son invention, l’écoute de la télévision pour les jeunes de 15 à 24 ans est en régression, dépassée par l’utilisation d’Internet. En revanche le temps passé devant un écran, au sens large, ne cesse de croître [iii]. Et singulièrement en ce qui concerne le temps passé sur les sites dits communautaires, tel que Facebook. Plus qu’une simple activité passagère, ce site est devenu un véritable fait social. En voici la démonstration.
Le site Facebook est né en 2004 à l’initiative de Mark Zuckerberg alors qu’il était étudiant à Harvard. Ce site a d’abord constitué le réseau communautaire fermé des étudiants d'Harvard, avant de devenir accessible aux autres universités américaines puis de s’ouvrir à l’ensemble des internautes le 24 mai 2007.                                                                             
Facebook permet aux personnes inscrites de mettre en ligne leur profil (état civil, études, centres d'intérêt etc…) et d'interagir avec d'autres utilisateurs, notamment par le partage de correspondance et de documents multimédias. Les informations personnelles fournies par les utilisateurs leur permettent de trouver d’autres utilisateurs partageant les mêmes centres d'intérêt, de former des groupes et d’y inviter d'autres personnes.
C’est en cela que l’on qualifie Facebook de site communautaire.
D’un point de vue plus sociologique, voici les caractéristiques idéales-typiques d’un utilisateur de Facebook:
  • L’utilisateur moyen a 130 amis (+10 par rapport à Septembre 2009).
  • Un utilisateur moyen fait 8 demandes d’amis par mois.
  • Temps moyen passé sur Facebook par jour : 55 minutes.
  • 25 commentaires réalisés en moyenne par mois par utilisateur.
  • Un utilisateur devient fan [iv] de 4 ” fan pages /groupe ” par mois.
  • Un utilisateur est invité à 3 évènements par mois [v].
  • Un utilisateur moyen est membre de 13 groupes.
Pour ceux qui contesteraient encore à Facebook son caractère de fait social, au motif qu’il ne concernerait qu’une part congrue de la population, il faut savoir que 15 millions de Français ont une page Facebook (près d’un quart de population), que 70% des utilisateurs de Facebook ne sont pas américains, que 70 langues sont en usage sur le site. De manière plus large, le site comprend 400 millions d’utilisateurs actifs [vi] dans le monde et 50% de ces personnes se connectent chaque jour à Facebook. Plus de 3 milliards de photos ont été mises en ligne sur le site ainsi que plus de 5 milliards d’éléments de contenu (liens, actualités, flux, éditoriaux de blog, notes, albums photos, etc…). Plus d’un million et demi d’entreprises ont une page sur Facebook. Enfin, seuls Google, Microsoft et Yahoo ont plus de visiteurs mensuels que Facebook, mais, si l’on prend en compte le nombre de visites par page, Google est le seul site à surclasser Facebook. [vii]                                          ……………………………………………………………………………
Facebook: un moyen d’adhérer au monde
Facebook est un site traduisant un certain rapport au monde: le deuil de la possibilité de vivre les choses directement, sans la médiation d’un écran, sans la représentation, et cela au moyen de la technique. Nous ne contestons pas que des motifs variés président à la création d’un profil sur Facebook et nous ne saurions mettre sur le même plan l’utilisateur ponctuel qui, pour être informé des prochains évènements culturels susceptibles de l’intéresser, utilise son profil à la manière d’une banale messagerie, ou même celui qui retrouve, par ce canal là, de véritables amis, et ceux dont l’usage est dicté par la fascination technologique, le désir de paraître, l’envie de vivre par procuration. On nous objectera que, au contraire, les sites communautaires permettent de recréer de la sociabilité, que prendre contact voire faire des rencontres est bien plus facile, que l’on est relié à ses amis n’importe où sur la planète. Nous ne le pensons pas. Au mieux, ces sites permettent une prise de contact qui aboutira à une rencontre bien réelle. Mais ce n’est pas toujours le cas car il est malaisé de rencontrer ses 200 amis de Facebook. Cela traduit surtout la difficulté qu’il y a à être ensemble aujourd’hui, à créer une communauté autre que virtuelle, à laisser la dérive et le hasard guider les rencontres. Bien plus, si le monde est à ce point cadenassé que l'inter-subjectivité ne puisse plus advenir sans que la peur de l’inconnu surgisse, les sites comme Facebook ne peuvent que renforcer les difficultés et produire de la séparation. Que l’on songe au sort réservé aux cabines téléphoniques depuis l’apparition du téléphone portable et l’on pourra juger ce que deviendront l’amour et l’amitié [viii] dans les années à venir: hors des sites communautaires, point de salut.
Pourtant, il ne faudrait pas croire que l’adhésion des utilisateurs de Facebook au monde factice que nous venons de décrire est sans effet. Au contraire, c’est cette adhésion à la facticité qui permet de perpétuer le monde tel qu’il va, l’organisation sociale telle quelle est, la domination telle qu’elle s’exerce. En effet, sans préjuger du contenu de l’ensemble des profils, l’écrasante majorité des utilisateurs présente une très vive adhésion aux valeurs culturelles dominantes. L’utilisateur de Facebook est un de ces jeunes gens modernes  [ix], fier de vivre à une époque si riche de virtualités, nous pourrions même dire: béat et persuadé, fût-ce de façon inconsciente, d’être dans le monde quand il s’en éloigne, ce qui est une caractéristique de la schizophrénie (ou de l’aliénation). Mais ce n’est pas tout, comme n’importe quelle mouche du coche, il pense que son implication narcissique sur la toile permet sa participation au monde, voire révèle ce dernier à lui même, quand, en réalité cela ne traduit que le conformisme de l’utilisateur manipulant un outil pensé par d’autres pour renforcer le spectacle de la pseudo communication. Loin d’être marginale ou neutre, cette attitude est extrêmement répandue. Elle était d’ailleurs facilement identifiable au début de Facebook où la cooptation était obligatoire. Ce mécanisme permettait rapidement de distinguer ceux qui en étaient et les autres. La morgue qui se dégageait des élus valait alors toutes les tentatives d’explication. Mais ce qu’il faut bien comprendre c’est que cette supériorité d’alors traduisait non seulement un sentiment d’appartenance à la classe des dominants, détenteur des capitaux traditionnels de la bourgeoisie, mais aussi une fierté de faire le monde, de se projeter en avant, bref: l’illusion d’une émancipation du vulgaire et du trivial incarnés par le réel grâce à la technique. Pour le dire autrement, l’idéologie technicienne s’étant imposée sur les premiers cobayes, ils prenaient cela pour une bénédiction. Ne sachant pas que «le spectacle est l’idéologie par excellence, parce qu’il expose et manifeste dans sa plénitude l’essence de tout système idéologique: l’appauvrissement, l’asservissement et la négation de la vie réelle» [x]
Facebook comme moyen d’être au monde
Nous l’avons dit, l’utilisation de Facebook implique un certain narcissisme. Si l’on en croit la psychanalyse, «Narcisse, c’est d’abord la parole qui non seulement se répète, mais s’articule aussi à seule fin de se commenter, de se mettre en scène, en quelque sorte de jouir d’elle-même [xi]». La définition vaut pour le narcissisme en général, on peut dire qu’elle s’applique en tout cas à Facebook en particulier. Le site agirait comme un miroir où la découverte des profils d’autrui, des groupes de fans, n’aurait pour but final que la contemplation de soi et la constitution d’un profil toujours plus parfait.
La tendance n’est pas nouvelle. Déjà en 1969, C. Lasch [xii] constatait que le narcissisme se développait à grande vitesse dans la société des États-Unis. Elle prenait même l’allure d’un fait social puisque selon lui, on pouvait parler de «narcissisme collectif». La situation s’applique à l’ensemble des pays occidentaux aujourd’hui. Des raisons peuvent expliquer ce phénomène, à commencer par le sentiment d’inutilité au monde doublé de la fin de l’inscription dans une continuité historique. Cette caractéristique nouvelle, aussi délétère pour la construction d’un mouvement social que pour les individus désormais atomisés, produit une sensation d’isolement jusqu’alors inédit. Le repli sur la sphère privée et l’illusion que l’on recrée du lien par écran interposé est alors possible. Cette disparition de la continuité historique pousse l’individu à vivre dans l’instant, comme si son existence se déployait dans un présent perpétuel. De là les rencontres tendent à être de plus en plus fugaces, «zappées», sans consistance, produisant en retour un sentiment d’isolement mais aussi de vide encore plus puissant. Les sens sont comme anesthésiés et la quête de sensations fortes toujours plus importante, sans pour autant que cela passe par l’épreuve du réel, d’où la volonté concomitante de neutralisation du monde, pour le dire comme Anders. On peut comprendre par là que l’individu est aujourd’hui à ce point isolé et éloigné de la réalité, du fait de la représentation, que c’est la fin de l’expérimentation du monde. [xiii] Non seulement cela signifie que la découverte du sensible et du réel ne peuvent plus se faire, sinon par l’illusion de la représentation et du Spectacle mais encore que, déboussolé par cette perte et plongé dans un monde qui lui devient totalement étranger, l’individu perd son individuation en voulant neutraliser le monde. Le narcissisme collectif questionne, et ce n’est paradoxal qu’en apparence, la place qu’il reste pour l’individu. Anders considère que celui-ci n’existe plus car «l’individu a été transformé en un «dividu», il est désormais une pluralité de fonctions» [xiv]. A l’image du travail, c’est donc à des individus en miettes que nous aurions affaire. Cet aspect-là est d’autant plus saisissant sur Facebook où un profil ne se présente pas comme une unité mais au contraire comme une succession de fragments à travers les «groupes de fans» auxquels appartient l’internaute, facilitant en cela les amitiés parcellisées à partir de quelques goûts communs.
Le confusionnisme le plus absolu ne peut donc que s’étendre à partir de ce mode de fonctionnement et son expansion passe par une neutralisation du monde, c'est-à-dire que l’on rend «familière» une marchandise formatée – «dénoyautée» selon Anders- pour que l’utilisateur s’y reconnaisse, puisse s’en saisir, et ne sache plus s’en passer. Les applications multiples associées à Facebook accentuent ce processus.
Cela n’est possible que dans un monde où la distanciation règne car il faut que le vrai et le faux soient devenus des catégories à ce point périmées qu’elles puissent être échangeables sans dommage. Bien sûr que l’utilisateur de Facebook ne prend pas le site pour la réalité mais, par cette utilisation technique, il n’est plus directement au monde. Alors que celui-ci était un donné, voilà qu’il devient «servi» à domicile dans l’une de ses potentialités qui se donne pourtant comme la réalité. Cette forme de marchandisation de l’existence par le morcellement de celle-ci nous permet de recevoir le monde «calibré» pour la satisfaction de nos besoins et, ce faisant, devient «un fantôme de monde [xv]»; le monde réel étant devenu une étrangeté, voire étranger. Anders, pour illustrer son propos sur la distanciation d’avec le monde et des êtres qui le composent, écrivait: «alors que généralement notre voisin de palier, devant la porte duquel nous passons tous les jours à longueur d’année, ne nous connaît pas et ne franchit pas la distance qui le sépare de nous, ces stars de cinéma, ces girls étrangères que nous ne connaîtrons jamais personnellement et que nous ne rencontrerons jamais personnellement,[…] se présentent à nous comme de vieilles connaissances, […] nous les appelons par leurs prénoms, […] lorsque nous parlons d’elles» [xvi]. La réalité a peu changé depuis, si ce n’est qu’avec l’arrivée de Facebook, nos propres voisins de palier nous restent étrangers mais se présentent comme des stars. Le processus de distanciation est alors achevé puisque même la réalité immédiate sur laquelle nous pouvions avoir prise est devenue étrangère dans un premier temps, avant de se transformer en simple image dans un second.
Le «cadre» sur Facebook
Au delà du narcissisme, c’est à une réification complète (c'est-à-dire à une transformation des êtres vivants en choses) de l’individu qu’aboutissent ces sites communautaires. Et, une fois encore, avec le consentement plein et entier de leurs utilisateurs qui adaptent à la modernité la servitude volontaire. Ils désirent transformer la réalité de leur vie en image réelle de leur désir. Ce faisant, ils ne transforment pas la réalité de leur être mais leur apparence, ce qui n’est pas sans conséquences.
En effet, pour Debord «Le spectacle n’est pas un ensemble d’images, mais un rapport social entre des personnes, médiatisé par des images [xvii]».
De ce fait, c’est bien une dimension spectaculaire qui régit ces pratiques et la première chose que l’on remarque sur Facebook, c’est la manière que chacun a de se présenter, de se donner à voir (pour ne pas dire en Spectacle ou en pâture), comme si le devenir-image de l’individu était achevé et que l’on ne pouvait plus rien attendre des rapports sociaux qui en découlent. Cela débute par l’énoncé de son humeur du jour en un mot. Mais, signe d’une réification complète, chaque profil parle de lui à la troisième personne. Sur la page de X nous pouvons donc lire: Aujourd’hui X est enjoué.
Le ton est donné et la mise à distance que ce procédé implique va favoriser l’auto-réification de chacun, qui va pouvoir se présenter comme marchandise valorisable sur un marché [xviii]. C’est ainsi qu’en bon petit cadre [xix], tout le monde a appris à se vendre au moyen de la distinction culturelle. Au chapitre musical, s’il est de bon ton de mépriser Johnny Hallyday, il est vraiment bien vu d’indiquer sa dilection pour le jazz, un ou deux opéras, le groupe de rock indépendant dont on n’a entendu qu’un seul extrait mais qui devrait créer le «buzz» dans les mois à venir. Mais ce n’est pas tout. Un des codes implicites consiste à manier à la perfection la dissonance culturelle. En effet, après avoir cité le meilleur du bon goût pour cadre petit-bourgeois, il est recommandé d’avouer, sur le mode de la confession assumée, son petit faible pour un chanteur que chacun reconnaîtra comme le comble de la ringardise et qui, par un mouvement de balancier, pourra accéder au statut d’icône «vintage» branchée. Le tout est de savoir définir le dosage. Il est en effet trop dangereux de se présenter, lorsque c’est sous son nom et que l’on veut garantir un certain sérieux à son profil, comme un simple adorateur de Joe Dassin.
Il est aussi indispensable de se présenter en connaisseur de l’industrie cinématographique, toujours en adoptant les goûts du cadre petit-bourgeois; en spectateur. Il faut donc montrer patte blanche en indiquant que l’on porte de l’intérêt à la Nouvelle Vague, Dziga Dvertov et Buster Keaton tout en concédant un penchant coupable pour les giallos ou la série Hooker. Une fois encore, c’est sous les apparences de la liberté individuelle que cette présentation de soi s’offre aux regards, alors que cela n’obéit qu’à un jeu de codes dont personne n’est dupe. Les goûts personnels ne sont qu’une moyenne des goûts dominants et puisqu’il faut bien remplir la rubrique des passions au moyen des groupes auxquels on adhère, on trouvera pêle-mêle les sushi, le design, les concerts humanitaires, l’écologie ou la hi-fi; autant de signes confirmant l’adhésion au monde spectaculaire-marchand du cadre. C’est ainsi que, par ses choix stéréotypés, le cadre aliéné renforce le monde qui l’a pourtant créé tout en influençant les fractions dominées du salariat. [xx]
……………………………………………………………………………………………….
Le spectacle, qui est l’effacement des limites du moi et du monde par l’écrasement du moi qu’assiège la présence-absence du monde, est également l’effacement des limites du vrai et du faux par le refoulement de toute vérité vécue sous la présence réelle de la fausseté qu’assure l’organisation de l’apparence. Celui qui subit passivement son sort quotidiennement étranger est donc poussé vers une folie qui réagit illusoirement à ce sort, en recourant à des techniques magiques. La reconnaissance et la consommation des marchandises sont au centre de cette pseudo-réponse à une communication sans réponse. Le besoin d’imitation qu’éprouve le consommateur est précisément le besoin infantile, conditionné par tous les aspects de sa dépossession fondamentale. Selon les termes que Gabel applique à un niveau pathologique tout autre, «le besoin anormal de représentation compense ici un sentiment torturant d’être en marge de l’existence»
Guy Debord, La Société du spectacle, Thèse n° 217

Du contrôle social à la marchandisation de la vie privée: la sécurisation des informations sur Facebook.

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Il faut nous arrêter maintenant sur l’aspect le plus décrié de Facebook: la protection des données privées. Si au départ cette question n’intéressait que les contempteurs de ce site, la critique est désormais portée par des associations de consommateurs en Allemagne ou au Canada. Dans sa rubrique consacrée aux technologies, rares sont les semaines où le journal Le Monde n’évoque ce phénomène, à sa manière on s’en doute.
Le problème est cependant sérieux. En effet, le dirigeant de Facebook, Mark Zuckerberg, multimilliardaire multi-aliéné, considère désormais que «l'ère de la vie privée [est] révolue et que nous vivons une époque d'exposition n'inquiétant que ceux qui ont des choses à se reprocher [xxi]». «Les gens sont devenus vraiment à l’aise avec le fait de partager non seulement plus d’informations, mais aussi de manière plus ouverte et avec plus de gens. Cette norme sociale est simplement quelque chose qui évolue au fil du temps» [xxii]. Au moins les choses sont claires mais, alors que l’énormité du propos devrait couvrir de ridicule ce technophile, les citoyens, pour choqués qu’ils soient, continuent d’utiliser ce réseau social. Deux aspects quant à l’utilisation de ces données peuvent être retenus: le contrôle social et la marchandisation des données.
- Le contrôle social.
C’est un des atouts majeurs de Facebook pour ceux qui souffrent de voyeurisme. Ce site permet en effet de connaître en temps réel les agissements des amis précédemment élus [xxiii]. Une modification du «relationship statut» et voilà que l’ensemble des amis peut être informé d’une rupture amoureuse, parfois avant même l’intéressé(e). Pour les jaloux, il est possible de savoir quels nouveaux amis ont fait leur apparition dans le carnet d’une connaissance. A l’ère des caméras de vidéo-surveillance, l’espionnage est devenue une activité quotidienne doublée d’un plaisir [xxiv]. Pour les paranoïaques, il est possible de savoir si une soirée a eu lieu sans vous. Insidieusement, c’est tout un pan de la vie privée qui est découvert et qui, par le jeu des recoupements entre les différents profils, permet de connaître l’évolution dans la vie des proches élus. Une société qui promeut à ce point la transparence est une société totalitaire où règne le contrôle social le plus parfait [xxv]. Avec Facebook, chaque utilisateur peut désormais jouer le rôle de tyran miniature, créant de ce fait une forme de totalitarisme autogéré.
- La marchandisation des données personnelles.
Cela ne surprendra personne, que dans une économie marchande, tous les secteurs privatisables fassent l’objet de convoitises. Nous avons vu comment la marchandisation, pour qu’elle s’intègre à notre vie, doit être rendue familière par une forme de neutralisation. Or la marchandisation produit une distanciation. Les sites communautaires ont rendu familière la tendance à «gérer» ses amours, ses amitiés, sa vie sur Internet. Une fois cet aspect neutralisé [xxvi], il ne restait plus qu’à le transformer en marchandise. C’est ce que Facebook a fait.
On savait déjà que le site convoitait les données privées de ses utilisateurs pour en tirer profit auprès des annonceurs publicitaires sans que cela puisse poser de difficultés puisque la déclaration des droits et responsabilités de Facebook précise que les contenus lui appartiennent : «vous nous accordez une licence non exclusive, transférable, sous licenciable, sans redevance et mondiale pour l'utilisation des contenus de propriété intellectuelle que vous publiez sur Facebook» [xxvii]. Et ceci pour longtemps, sans que la résiliation du profil ne puisse y changer quelque chose. [xxviii] La mort elle-même n’étant pas un obstacle puisque Facebook peut laisser en ligne le profil d’un mort. Ils parlent alors de «comptes de commémoration».
Et pour ceux qui ne seraient pas assez coopératifs, voilà ce que déclarait la direction du site «pour pouvoir vous offrir une expérience sociale utile de Facebook, nous devons occasionnellement fournir des informations générales à propos de vous à des sites Web et à des applications pré-approuvées qui utilisent notre plate-forme avant même que vous ne vous y connectiez formellement» [xxix].
Facebook se positionne donc comme leader mondial de la transmission d’informations rendues anonymes à ses annonceurs. Cela est clairement expliqué dans la politique de confidentialité du site. Le détail serait long et fastidieux mais voici en substance ce que s’autorise le site: «Nous autorisons les annonceurs à choisir les caractéristiques des utilisateurs qui verront leur publicité et nous pouvons être amenés à utiliser tout attribut non personnellement identifiable que nous avons recueilli (notamment les informations que vous avez décidé de ne pas montrer aux autres utilisateurs, telles que votre année de naissance ou d’autres informations ou préférences de nature sensible) pour cibler le public approprié [xxx]». Ne s’arrêtant pas en si bon chemin, on apprend à présent que, par «erreur [sic]», le site Facebook a malencontreusement fourni toutes les données, y compris confidentielles, de ses membres aux annonceurs. Si l’on en croit les dirigeants du site, «l’erreur» a été promptement réparée, une fois que les annonceurs ont pu bénéficier du carnet client le plus vaste du monde.
Et ce n’est pas tout. On sait désormais que «la véritable valeur que Facebook cherche à exploiter et à protéger se situe dans la simple structure du réseau composé par l'ensemble des amis et groupes auxquels on est inscrit. Expliquons cela. Chaque fois que l'on ajoute un ami sur Facebook on crée un lien, chaque fois que l'on s'inscrit à une page ou à un groupe, on crée un autre lien d'appartenance à ce groupe. Si l'on agrège l'ensemble de ces liens pour un ensemble de groupes et de personnes, on obtient un graphe de relations. Ce graphe situe les individus au sein de leur réseau social et l'appartenance à des groupes contextualise ce réseau par les centres d'intérêt des individus. L'analyse de la structure de ce simple graphe permet donc de décrire avec une précision étonnante les positions sociales des individus et leurs préoccupations […]. Il devient alors possible de mesurer et d'analyser ces relations sur la totalité du réseau et de cerner avec précision le profil d'individus qui pourtant ont mis tous leurs curseurs de vie privée au maximum dans Facebook. Car quel que soit le paramétrage de son compte Facebook, l'information, apparemment anodine, de qui est membre de tel ou tel groupe et des relations d'amitié entre ces membres est librement accessible. A partir de ces simples informations, il est possible en réalisant des mesures sur la structure du réseau de statuer sur les orientations sexuelles de chacun, de poser des hypothèses sur des appartenances politiques, de repérer les individus les plus centraux et influents de réseaux d'activistes ou de comprendre quelles personnes cibler en priorité pour démanteler un réseau contestataire. On voit facilement comment ce type d'informations est d'une valeur inestimable pour des marques souhaitant déployer des stratégies de "marketing comportemental" mais aussi pour des organisations cherchant à repérer et à surveiller étroitement des groupes d'individus considérés comme "structurellement" à risque [xxxi]».
Au-delà de l’outil marketing, on sait désormais que Facebook est un outil policier. La DCRI (Direction centrale du renseignement intérieur) avoue d’ailleurs y trouver une source d’informations dont elle n’osait rêver jusqu’à présent. L’affaire déborde bien sûr la responsabilité individuelle des membres de ce réseau social quand toute une organisation, une infrastructure, est tournée vers l’objectif de rentabilité sur le dos de gogos avides de gloriole ou de reconnaissance, perturbés par leur volonté narcissique et leur errements fantomatique dans leurs ersatz d’existence. Et c’est ainsi que la naïveté extrême ne traduit plus seulement la bêtise mais la confiance dans une institution devenue vitale qu’il ne convient même pas de contester tant sa disparition créerait le manque. Un exemple édifiant servira d’exemple à notre propos: l’enquête sur Marc [xxxii], menée par le journal Le Tigre, qui, glanant les informations laissées sur la toile par un internaute imprudent [xxxiii], a pu retranscrire sur papier la vie (loisirs, lieux de vacances, situation matrimoniale, rupture amoureuse, adresse, déménagements, numéro de portable, études poursuivies, métier...) de celui-ci. A ce moment là, l’insouciance a disparu. Les bonnes âmes ont crié au scandale, à la traque sur Internet, tout en défendant un nouveau commandement: «Sur la toile et dans le monde virtuel, tu t’exposeras à la face du monde». Et c’est bien là que réside le paradoxe. Chacun jouit du droit à la célébrité mais dans l’anonymat. L’internaute qui brille sur sa page Facebook et qui y montre l’excellence de son existence prétend que celle ci est digne d’intérêt, voire d’édification [xxxiv], sinon il ne se livrerait pas ainsi. Et chemin faisant, se prenant pour une star, le malheureux oublie qu’il a lui-même livré en pâture ce qu’il appelle désormais sa vie privée, qu’il est le paparazzi bien réel de son être réifié. Il considère alors, par une contorsion intellectuelle rare, qu’il faut avoir un esprit bien dérangé pour accéder à des informations privées, rendues volontairement publiques par son propriétaire, mais qui ne doivent pas être rassemblées par des utilisateurs lambdas. C’est comme si un exhibitionniste portait plainte pour atteinte à la pudeur parce que quelqu’un l’aurait observé durant son numéro.
L’erreur, bien entendu, serait de considérer cette personne comme un cas à part, dont la folie particulière ne saurait traduire un phénomène plus profond, caractéristique du monde moderne. En effet, l’innocence et la candeur ne sont hypertrophiées à ce point sur les sites communautaires, que parce qu’elles traduisent une adhésion complète, bien qu’inconsciente, des utilisateurs des sites communautaires avec le monde capitaliste qui est celui dans lequel ils vivent comme des poissons dans l’eau, sans imaginer qu’il puisse en être autrement. C’est parce qu’ils se sentent en harmonie avec la marche du monde, avec les valeurs de celui-ci, avec la technique et les valeurs du régime spectaculaire marchand qu’ils n’hésitent pas à se répandre, comme on le dit d’un animal négligé, sur ces sites.
Une modification de cet état de fait ne passera donc pas par l’éducation à l’Internet, comme le souhaitent les ministres, ou par une politique de confidentialité des données plus importantes, mais bien par une modification consciente des conditions d’existence, ce qui ne saurait advenir sans que dans le même temps, le monde actuel soit mis à bas.                                                                                  K                                                                                                                                        La Boétie


[i] Guy Debord, La Société du Spectacle, Paris, Editions Gallimard (coll Folio), 1992, thèse n°1
[ii] Précisions liminaires: Il importe ici de rappeler que nous ne saurions être de ceux qui, volontairement, tentent de réduire le concept de Spectacle, à la seule question des médias. Et si notre analyse porte bien sur un médium, nous renvoyons le lecteur à la lecture du livre de Debord pour éviter ce genre d’amalgame, à dessein fallacieux. C’est donc bien en tant que critique d’un medium, qui représente, en réduction le monde actuel, que nous nous plaçons. Il ne s’agit pas de sauver le bébé de l’eau du bain ou réciproquement.
[iii] De nombreuses statistiques sur ces sujets sont disponibles dans l’ouvrage d’Olivier Donnat: Les pratiques culturelles des français à l’ère numérique; enquête 2008. Paris, La découverte/Ministère de la culture et de la communication, Septembre 2009
[iv] Par ce néologisme propre aux facebookers, il faut comprendre qu’un utilisateur s’inscrit à un forum de discussion, c'est-à-dire adhère à un groupe d’individus qui possède une caractéristique qu’il détient. L’identification est alors immédiate.
[v] Un évènement est une invitation qu’un membre envoie à son réseau pour dépasser la barrière virtuelle. C’est peut-être l’aspect le plus sympathique des fonctionnalités de Facebook même si nous sommes obligé de constater que ces pseudo-événements festifs ne sont en fait qu’une tentative spontanée et inconsciente de neutraliser considérablement la portée d’un rassemblement populaire, en le réduisant à une «soirée», à un «truc cool» où l’on «rencontre du monde» et à la suite de laquelle chacun rentre chez soi. Toutefois, c’est cette possibilité là qui irrite le plus les pouvoirs publics. Les évènements que constituent les apéros géants, lancés à partir de Facebook, commencent à inquiéter les responsables locaux et nationaux, craignant les risques de «débordement». Les interdictions ne sont pas généralisées mais la volonté de contrôler ces évènements au départ spontanés, comme ce fut le cas à Rodez, montrent que l’Etat veille. Nous pouvons raisonnablement penser qu’à terme une loi sera votée pour interdire ce type de rassemblement ou tout du moins pour en restreindre considérablement la portée. Le préfet de Loire-Atlantique a d’ailleurs révélé, avec la plus grande candeur, que ces événements posent un problème car il n’y a aucun interlocuteur pour encadrer la manifestation. Gageons que les syndicats s’en souviendront.
[vi] Source: Toutes les statistiques sont tirées du site:
facebook.com et confirmées par les sites:
generation-nt.com/facebook-france-nombre-utilisateurs-15-millions-actualite-941111.html
seomanager.fr/statistiques-facebook-fevrier-2010.html
[vii] fr.techcrunch.com/2010/04/25/l-ere-facebook/
[viii] Le terme d’ami sur Facebook mériterait à lui seul une analyse. Le relativisme est absolu sur le site puisque, sous le terme d’ami, on intègre aussi bien le proche complice avec lequel on partage une certaine intimité, un membre de sa famille, ou la belle étrangère que l’on n’a jamais rencontrée mais qui est fortement désirée. Il ne faut pas oublier que sur Facebook, on est ce que l’on montre. A ce titre, tout participe de la valorisation de son image. Le nombre d’amis est important. Leur apparence l’est tout autant. Qu’importe donc la force du lien qui unit l’utilisateur à ses amis, pourvu qu’ils apportent un supplément de valeur au profil. Il y a donc là une redéfinition vertigineuse de l’amitié puisque la conception de celle-ci selon Facebook est une négation de la conception traditionnelle de l’amitié. Cela est d’autant plus grave que c’est en faisant disparaître le sens véritable des mots que, peu à peu, l’on fait disparaître aussi ce qu’ils désignaient. On peut donc légitimement se demander ce qu’il resterait d’elle si le monde entier adoptait la définition de Facebook pour désigner l’amitié.
[ix] Détournement de l’expression popularisée par le journal Actuel dans les années 80 pour désigner les groupes pratiquant la cold wave, le post-punk…
[x] Guy Debord, La Société du Spectacle, Paris, Editions Gallimard (coll Folio), 1992, thèse n°215.
[xi] Encyclopaedia universalis, Paris, Editions Encyclopaedia universalis 1989, entrée Narcissisme.
[xii] Christopher Lasch: La culture du narcissisme, Paris, Flammarion (collection Champs essais) rééd 2006.
[xiii] Gunther Anders: L’obsolescence de l’homme. Sous titré Sur l’âme à l’époque de la deuxième révolution industrielle., Paris, EDN/Ivréa, Réed 2002, p134 «Maintenant, puisque le monde vient à lui, qu’il est apporté chez lui en effigie, l’homme n’a plus besoin d’aller vers le monde; ce voyage et cette expérience sont devenus superflus; ainsi, puisque le superflu finit toujours par disparaître, ils sont devenus impossibles.»
[xiv] ibid p164
[xv] ibid
[xvi] ibid, p138-139
[xvii] Guy Debord, La Société du Spectacle, Paris, Editions Gallimard (coll Folio), 1992, thèse n°4
[xviii] Ce marché est d’ailleurs très étendu puisque l’on est passé très vite du marché de l’amitié factice, à celui des amours passagères, pour aboutir au simple marché du travail. En effet, l’époque a réussi à produire le nouveau métier de coach de profil sur Internet. Ce nouvel expert vous propose ses services afin de valoriser votre image de marque sur la toile en faisant disparaître, dans la mesure du possible, les photographies et messages dégradant votre personnalité pour recréer un nouvel avatar de vous-même, afin que vous puissiez présenter une image rentable à votre futur employeur ou à un chasseur de têtes qui fait ses achats en capital humain sur Internet.
[xix] Précisons ici que nous entendons le terme de cadre dans le sens que Debord lui donnait: «Les cadres sont aujourd’hui la métamorphose de la petite bourgeoisie urbaine des producteurs indépendants, devenue salariée. […] Leur fonction économique est essentiellement liée au secteur tertiaire, aux services, et tout particulièrement à la branche proprement spectaculaire de la vente, de l’entretien et de l’éloge des marchandises […]. Le cadre est le consommateur par excellence, c'est-à-dire le spectateur par excellence. […]Le cadre est l’homme du manque: sa drogue est l’idéologie du spectacle pur, du spectacle du rienLa Véritable Scission dans l’Internationale , circulaire publique de l’Internationale Situationniste, Paris, Fayard, 1998, thèse n°36.
[xx] «L’image du genre de vie et des goûts que la société fabrique expressément pour eux, ses fils modèles, influence largement des couches d’employés pauvres ou de petits-bourgeois qui aspirent à leur reconversion en cadres; et n’est pas sans effet sur une partie de la moyenne bourgeoisie actuelle.» ibid
[xxi] Le Monde.fr, 22.04.10, Facebook: de la nécessité de protéger ses données «relationnelles», par Guilhem Fouetillou ,(co-fondateur de linkfluence, institut d'étude spécialisé dans l'analyse et la cartographie du Web social).
[xxii] generation-clash.blogspot.com/2010/05/les-10-raisons-pour-quitter-facebook.html
[xxiii] Dans le jargon Facebook, on emploie le terme «requeste»
[xxiv] Facebook is watching you Miyase Christensen, Facebook is watching you, Manières de voir n°109, février mars 2010
[xxv] Les ouvrages abondent sur le sujet. On renverra bien sûr à 1984 d’Orwell, ou pour une analyse plus historique Surveiller et punir de Foucault avec sa description du panoptique hérité de Bentham.
[xxvi] Il faut comprendre ce mouvement comme un processus auto-entretenu car si la marchandisation produit de la distanciation, c’est bien la distanciation qui produit une familiarisation et, par là, une possibilité de marchandisation.
[xxvii] generation-clash.blogspot.com/2010/05/les-10-raisons-pour-quitter-facebook.html
[xxviii] Politique de confidentialité de Facebook. Section 3: «Même après avoir supprimé des informations de votre profil ou avoir résilié votre compte, des copies de vos informations peuvent rester visibles à certains endroits, dans la mesure où elles ont été partagées avec d’autres utilisateurs, diffusées conformément à vos paramètres de confidentialité ou encore copiées ou enregistrées par d’autres utilisateurs.
- Vous comprendrez que les informations peuvent être partagées à nouveau ou copiées par d’autres utilisateurs.»
[xxix] LeMonde.fr, 9 avril 2010
[xxx] Politique de confidentialité de Facebook, section 5: Utilisations de vos données personnelles. Date de la dernière mise à jour : 22 avril 2010.
[xxxi] G.Fouetillou, ibid
[xxxii] Pour ce qui concerne cette enquête, on se reportera à l’article intitulé: Portrait google, dans la revue Le Tigre n° 28 de novembre-décembre 2008 ou sur Internet le site:le-tigre.net/Numero-28.html#page_37
[xxxiii] Il avait tout de même posté sur Internet plus de 17000 (dix sept mille) photos personnelles!
[xxxiv] Ce processus nouveau est le parachèvement de la tendance commencée dans la presse au début du XXieme siècle qui relatait la vie des têtes couronnées et des grandes fortunes. Bien évidemment ce stratagème de dévoilement avait un triple avantage. D’abord, de ménager à la grande bourgeoisie un espace de repli puisque l’illusion du dévoilement est en fait l’artifice le plus efficace pour orienter les regards vers ce que l’on donne à voir, cacher tout le reste, et cela en donnant l’impression que l’on a tout montré, qu’il n’y a plus rien de secret.
Ensuite, l’imposition stricte du respect du protocole permettait de montrer que la grande bourgeoisie avait aussi des charges.
Enfin, cela permettait de fabriquer du bovarysme qui éloignait les classes dangereuses de la révolution.
Nous pouvons noter que cette presse existe encore aujourd’hui même si elle a été supplantée par ce que l’on nomme désormais tristement la presse people. Le processus est le même mais étendu à des personnes dont la vacuité abyssale n’a même plus le prétexte du sang bleu. En 1968, Warhol prophétisait que «dans le futur, chacun aurait droit à un quart d’heure de célébrité mondiale». Si la réalité de son affirmation est contestable, force est de constater que le désir du quart de célébrité est en tout cas bien présent. Les blogs particuliers qui pullulent sur Internet, donnant une présentation de soi préfabriquée, et le développement exponentiel des réseaux sociaux en sont une illustration. C’est en cela que nous parlons de parachèvement d’une logique initiée au début du XXieme siècle.
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24 juillet 2010 6 24 /07 /juillet /2010 01:37

 

 

1. Gladio: la guerre secrète des Etats-Unis pour subvertir la démocratie italienne (présentation)

L'enquête du journaliste Arthur Rowse, Gladio : la guerre secrète des Etats-Unis pour subvertir la démocratie italienne, publiée en 1994, a fait date. Il s'agissait de la première description détaillée de Gladio, le réseau italien des stay-behind, la structure clandestine de l'OTAN, dans une publication américaine. Cet article de fond n'a jamais été traduit en français. Il nous semblait intéressant de combler cette lacune. Le point de vue de Rowse est celui du progressisme libéral américain. S'il comprend que Gladio a finalement détruit les partis du centre au lieu de les renforcer et renforcé ceux de la gauche au lieu de les détruire, il sous-estime son succès plus profond. La stratégie de la tension a permis, à travers le spectacle du terrorisme manipulé, d'extrême gauche ou d'extrême droite, de mettre un coup d'arrêt au lent glissement de l'Italie vers une révolution sociale, portée par le courant de tous ceux qui échappaient et s'opposaient à l'encadrement bureaucratique, syndical et politique. Toutefois, Rowse, qui possède une bonne connaissance des dessous inavouables de la politique étrangère américaine, a mis en lumière la dimension internationale des années de plomb en Italie, aspect généralement négligé par la critique sociale la plus avancée. Et quand certains auteurs ont évoqué cette dimension, ils se sont parfois égarés sur la fausse piste d'une fantasmatique manipulation de la politique italienne par les services secrets de divers régimes staliniens. Dès 1980, Gianfranco Sanguinetti avait réfuté ce leurre :

« [Certains] penseurs salariés, de Scalfari à Bocca, raisonnent (...) frauduleusement lorsque, tout en admettant comme je l'ai démontré que la stratégie des B.R. vise entre autres à empêcher l'arrivée du P.C.I. au pouvoir, ils font résulter ceci non pas de l'aversion que ce parti suscite dans certains secteurs du capitalisme italien et des services secrets, mais de l'aversion des staliniens soviétiques pour leurs homologues italiens. Nos penseurs à la petite semaine concluent donc que Moro a été enlevé avec l'appui du KGB et des services secrets tchécoslovaques. Les capitalistes italiens, les militaires et les agents du SISDE, du SISMI, du CESIS, de la DIGOS et de l'UCIGOS [Sigles de quelques services secrets officiels d'Italie], ainsi que Carter, seraient heureux de voir le P.C.I. au gouvernement en Italie, mais cela n'est malheureusement pas possible parce que les Russes et le KGB ne le veulent pas : quelle déveine ! Si derrière l'affaire Moro il y a le KGB, qui est donc derrière les couillonnades de Bocca et Scalfari ? Est-il possible qu'ils se soient hissés à de tels sommets par leurs seules forces ?

Quoi qu'il en soit, cette curieuse et stupide théorie, que l'intempestif Pertini [septième président de la République italienne de 1978 à 1985] s'est hâté de faire sienne après coup, sert clairement à rassurer la mauvaise conscience de tous ceux qui veulent croire que cet Etat, puisqu'il est en guerre avec le terrorisme, ne peut le diriger » (Du Terrorisme et de l'Etat).

D'aucuns continuent à soutenir cette « curieuse et stupide théorie » (développée par exemple dans Brigades rouges : L'histoire secrète des BR racontée par leur fondateur, ouvrage apportant par ailleurs d'intéressantes informations). Rowse, au contraire, montre comment le terrorisme manipulé résulte de l'aversion de certains secteurs du capitalisme italien et des services secrets italiens et américains, et plus encore, comment les Etats-Unis et l'Italie ont agi de concert dès la fin de l'après-guerre, pour conjurer un péril rouge obsessionnel. De ce point de vue, les années de plomb sont l'aboutissement d'un long processus contre-insurrectionnel mis en oeuvre avec une constance machiavélique.

[Pour des facilités de lecture, nous diviserons cette enquête en quinze parties. Remerciements à NOT BORED! qui nous a transmis la version originale de l'article de Rowse complète de ses notes.]
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24 juillet 2010 6 24 /07 /juillet /2010 00:45

 

La manipulation des démocraties européennes
par Ossama Lotfy

Commettre des attentats contre des civils de manière à créer un climat de peur, puis les imputer à ses adversaires politiques pour les discréditer est une vieille recette des services secrets anglo-saxons. Ce procédé de déstabilisation, adapté à la globalisation, est toujours d’actualité. À l’initiative du Réseau Voltaire, cinquante experts issus d’une douzaine de pays se sont réunis à Paris pour étudier les similitudes entre la « stratégie de la tension », initiée durant la Guerre froide, et la « guerre contre le terrorisme », déclenchée dans la foulée des attentats du 11 septembre.

 

Du Gladio aux vols secrets de la CIA. De la « stratégie de la tension » à la « guerre contre le terrorisme ». Un simple survol historique suffit à se convaincre de la continuité, sinon de la correspondance de ces deux opérations, ne serait-ce qu’au regard de ses commanditaires et de sa zone d’application. Et à poser la question de la « réactivation » du réseau stay-behind en Europe occidentale.

Créé après la Seconde Guerre mondiale, le stay-behind (littéralement : les hommes laissés sur le terrain derrière la ligne de front) devait constituer à l’avance un réseau de résistance en cas d’invasion soviétique en Europe occidentale. Indirectement issu des accords de Yalta et de Postdam, ce réseau était dirigé par la CIA états-unienne et le MI6 britannique pour être installé dans toute l’Europe occidentale (c’est-à-dire dans la zone d’influence anglo-saxonne). Il fut bientôt incorporé dans l’OTAN [1].
Cependant, il ne tarda pas à dépasser sa mission originelle pour prévenir toute influence communiste dans les démocraties occidentales. Il se spécialisa alors dans le trucage des élections, l’assassinat politique et les attentats [2]. Cela s’est notamment produit en Italie, où deux de ces exactions ont particulièrement marqué les esprits : l’assassinat du Premier ministre Aldo Moro en mai 1978, ainsi que l’attentat de la gare de Bologne en mai 1980 [3], dans les deux cas, attribués à des groupes extrémistes. Loin de s’arrêter aux frontières italiennes, l’action du stay-behind s’est étendue à tous les États membres de l’OTAN, y compris la France (à l’exception bien sûr des États-Unis, du Canada, et du Royaume-Uni) [4]. Bien souvent, dans l’ignorance des gouvernements des États où il opérait.

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Emblème de la branche italienne du Gladio

Officiellement dissous depuis l’effondrement de l’Union soviétique, le réseau stay behind, dont l’existence n’a été révélée sous le nom de « Gladio » qu’en 1990 par le Premier ministre italien Giulio Andreotti [5], continue aujourd’hui son activité et l’étend à de nouveaux États au fur et à mesure de l’extension de l’OTAN.
Si certains pays, tels que l’Italie et la Belgique, ont mené des enquêtes, voire pour ce dernier, exigé un contrôle parlementaire pour éviter que ce genre de situations ne vienne à se reproduire, la plupart des États européens ont passé cette révélation sous silence [6]. Sans prendre de mesures significatives à l’encontre de cette organisation criminelle. Ils sont restés dans le même état de torpeur lors de l’annonce de la découverte des prisons secrètes de la CIA fin 2005.

La « stratégie de la tension » se serait-elle mutée en « guerre contre le terrorisme » ? C’est en tout cas le point de vue que défend l’historien suisse Daniele Ganser, auteur de Les armées secrètes de l’OTAN et qui a enquêté à travers l’Europe entière pour remonter les filières du Gladio et constituer cet ouvrage unique sur le sujet [7]. Un spécialiste pour qui, la « guerre contre le terrorisme » est aujourd’hui un moyen similaire de manipulation des populations occidentales, en ce sens qu’elle désigne de nouveaux faux responsables d’actes terroristes —les musulmans—, non plus pour contrer la « menace soviétique », mais pour justifier les guerres de ressources des États-Unis.

Ce point de vue, l’ancien colonel de l’armée de terre des États-Unis Oswald LeWinter, qui fut pendant plus d’une décennie le n°2 de la CIA en Europe et le co-président du Comité clandestin de l’OTAN, est venu l’accréditer [8]. Il a confirmé que son service avait infiltré des groupes d’extrême-gauche européens tels que les Brigades rouges en Italie ou Action directe en France ; qu’il avait simultanément recruté des mercenaires anti-communistes à l’extrême droite ; et enfin, qu’il avait organisé divers attentats en les faisant exécuter par l’extrême droite, mais attribuer à l’extrême gauche, voire revendiquer par elle. Il a ainsi déclaré que l’OTAN avait donné l’ordre d’assassiner le général français René Audran, directeur des Affaires internationales du ministère de la Défense (c’est-à-dire chargé des exportations d’armement), après qu’il eut été découvert qu’il était la source des informations divulguées quelques années plus tôt par le journaliste italien Mino Pecorelli [9]. L’assassinat avait été attribué à Action directe, dont cinq de ses membres ont été condamnés à la prison à perpétuité [10].
Continuant sa démonstration, le colonel LeWinter a affirmé avoir participé, au sein de la CIA et aux côtés du MI6, à la création d’Al Qaïda sur le modèle du Gladio. Des groupes islamiques auraient été infiltrés ; des mercenaires auraient été recrutés dans d’autres milieux musulmans ; et des opérations commanditées par les services secrets anglo-saxons seraient attribués aux premiers alors qu’ils seraient exécutés par les seconds. Cependant, à la différence des groupes européens des années 70 et 80, tous les groupes de façade islamiques auraient été regroupés sous un label unique, Al Qaïda.
Le colonel LeWinter a affirmé avoir eu un dernier contact avec Oussama Ben Laden, en 2003 ; un épisode dont la presse portugaise s’était fait l’écho à l’époque.

L’historien états-unien Webster G. Tarpley, qui participait en duplex depuis Washington à cette réunion, est revenu en détail sur l’assassinat du Premier ministre italien Aldo Moro. Un meurtre réalisé par les Brigades rouges, mais commandité à leur insu par l’OTAN, sous l’autorité directe d’Henry Kissinger. M. Tarpley, qui vivait à l’époque à Rome, avait été le premier à révéler les détails du complot atlantique, visant à empêcher la création d’un gouvernement d’union nationale incluant les communistes. Il a observé que les enquêtes ultérieures ont confirmé ses travaux, exceptés quant à la localisation d’une société secrète qu’il avait par erreur liée à l’Ordre de Malte alors qu’elle se trouvait au Grand Orient d’Italie (la fameuse loge Propaganda Due dite « P2 », découverte depuis) [11].

Roumiana Ougartchinska a rendu compte de l’enquête qu’elle poursuit depuis plus de dix ans sur la tentative d’assassinat de Jean-Paul II. La confrontation des éléments disponibles permet d’invalider définitivement la célèbre « piste bulgare », théorie selon laquelle l’attentat aurait été commanditée par l’URSS et exécuté par un turc travaillant pour les services bulgares [12]. Il reste qu’il a été établi qu’Ali Agça était le n°3 du stay-behind en Turquie et qu’il a bénéficié de nombreuses complicités en Europe occidentale. Un intense conflit opposait les États-Unis au Saint-Siège, préoccupé d’éviter que l’Europe centrale ne se transforme en champ de bataille entre les deux grandes puissances, à propos de l’Ostpolitik du cardinal Agostino Casaroli.

Pour l’Italien Giullieto Chiesa, parlementaire européen, philosophe et journaliste, la situation est aujourd’hui beaucoup plus grave qu’elle ne pouvait l’être durant la Guerre froide. En effet, si, dans le contexte de l’affrontement idéologique entre les Anglo-Saxons et l’URSS, les hommes du stay-behind pouvaient croire violer les règles démocratiques pour protéger les démocraties, ils ne peuvent aujourd’hui que servir les intérêts des Anglo-Saxons au détriment de leurs alliés.
Le 5 octobre 2001, soit moins d’un mois après les attentats de New York et Washington, les États-Unis et le Royaume-Uni ont informé le Conseil atlantique de la réactivation du stay-behind contre « l’ennemi terroriste ». Ils ont exigé la collaboration des États membres en vertu de l’assistance mutuelle prévue par l’article 5 de la Charte de l’OTAN en cas d’attaque d’un allié. Par la suite, ils ont négocié avec l’Union européenne les facilités d’action dont ils avaient besoin [13]. Enfin, ils ont négocié bilatéralement des réformes législatives permettant aux agents de la CIA et du MI6 d’agir clandestinement dans chaque État membre [14]. Or, l’OTAN n’est plus une alliance militaire entre égaux, mais uniquement un lieu d’exécution des décisions de Washington. Ainsi, récemment, les États-Unis ont-ils pu négocier avec la Pologne et la République tchèque l’installation de leur nouveau système de missiles sans même en informer le Conseil atlantique, qui n’en a débattu qu’après coup.
La Commission d’enquête du Parlement européen, à laquelle Giulietto Chiesa participait activement, a confirmé le rapport de Dick Marty [15] au Conseil de l’Europe [16]. Elle a montré que la CIA a enlevé, séquestré et torturé des musulmans en Europe au cours des cinq dernières années.

Le député polonais Mateusz Piskorski a souligné, quant à lui, que les enquêtes diligentées dans son pays n’ont pas permis d’en savoir plus à propos des prisons secrètes de la CIA sur le territoire national. Au demeurant, si celles-ci ont existé, elle ne l’ont été que sous la présidence d’Aleksander Kwaśniewski et ont certainement disparues avec le président Lech Kaczynski, quelque soit son tropisme pro-états-unien.

Pour conclure, Thierry Meyssan, le président du Réseau Voltaire qui animait cette séance de travail, a souligné que les agissements des services secrets de l’OTAN bafouaient les principes de la souveraineté nationale. Il a une nouvelle fois mis en garde contre l’évolution impériale des États-Unis et a affirmé que leur ingérence était le premier défi auxquels devaient faire face aujourd’hui les démocraties occidentales. D’autant que le choix délibéré des victimes —toutes musulmanes— visait à implanter en Europe le « clash des civilisations ». Enfin, en cette veille d’élection présidentielle française, il a rappelé que les accords transatlantiques autorisant l’usage des aéroports nationaux par les avions-prisons de la CIA avaient été secrètement négociés par Nicolas Sarkozy et que celui-ci ne s’en était jamais expliqué. Mais il s’est félicité que la CIA ait hésité à en faire usage de crainte de sabotage de leurs opérations par des officiers républicains des services français.



 Ossama Lotfy
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[1] « Stay-behind : les réseaux d’ingérence américains », par Thierry Meyssan, Réseau Voltaire, 20 août 2001.

[2] Le "Field Manual 30-31" de l’armée états-unienne, ainsi que ses appendices FM 30-31 A et FM 30-31B, où l’on trouve les explications sur les opérations "false flag" : "Il peut y avoir des moments où les gouvernements hôtes montrent de la passivité ou de l’indécision en face de subversion communiste et, selon l’interprétation des services secrets américains, ne réagissent pas avec suffisamment d’efficacité (...) Les services secrets de l’armée US doivent avoir les moyens de lancer des opérations spéciales qui convaincront les gouvernements hôtes et l’opinion publique de la réalité du danger insurrectionnel. Afin d’atteindre cet objectif, les services américains doivent chercher à infiltrer les insurgés par le biais d’agents en mission spéciale, qui doivent former des groupes d’action spéciale parmi les éléments les plus radicalisés des insurgés (...) Au cas où il n’a pas été possible d’infiltrer avec succès de tels agents dans le commandement des rebelles, il peut être utile d’instrumentaliser des organisations d’extrême-gauche à ses propres fins afin d’atteindre les buts décrits ci-dessus. (...) Ces opérations spéciales doivent rester strictement secrètes. Seuls les personnes qui agissent contre l’insurrection révolutionnaire sauront l’implication de l’armée américaine dans les affaires intérieures d’un pays allié."

[3] « 1980 : carnage à Bologne, 85 morts », Réseau Voltaire, 12 mars 2004.

[4] Nato’s Secret Armies : Operation Gladio and Terrorism in Western Europe, par Daniele Ganser, Frank Cass Publishers, 2004. Édition française à paraître fin 2007 aux éditions Demi-Lune.

[5] « Rapport Andreotti sur l’Opération Gladio », 26 février 1991.

[6] Voir le documentaire Timewatch : Operation Gladio - Behind False Flag Terrorism, par Alan Francovich, BBC (1992). Disponible en trois parties sur Google Video.

[7] Voir aussi, « Le Terrorisme non-revendiqué de l’OTAN », interview de Daniele Ganser par Silvia Cattori, Réseau Voltaire, 29 décembre 2006.

[8] Desmantelar a America et Democracia e Secretismo par Oswald LeWinter, Publicaçoes Europa-Amarica (Lisbonne), 2001 et 2002.

[9] Mino Pecorelli a révélé en 1978 le fonctionnement de la loge P2. Il a été assassiné en 1979. A son domicile ont été découverts de très nombreux documents sur les sociétés secrètes liées à l’OTAN et au Saint-Siège dont on ignore la provenance. Le général Audran a été asssassiné en 1985. Action directe a été démantelé en 1987.

[10] Les imputations du colonel Oswald LeWinter contredisent à la fois les déclarations des membres d’Action directe et les travaux de la journaliste franco-israélienne Dominique Lorentz, attribuant la manipulation d’Action directe à l’Iran.

[11] Chi ha ucciso Aldo Moro ?, par Webster Tarpley, POE, 1978.

[12] La Vérité sur l’attentat contre Jean-Paul II, par Roumiana Ougartchinska, à paraître aux Presse de la Renaissance.

[13] « L’Euro Patriot Act », « L’Union européenne a autorisé par écrit les prisons secrètes de la CIA dès janvier 2003 », Réseau Voltaire, 17 novembre 2003 et 13 décembre 2005.

[14] « La loi Ashcroft-Perben II », Réseau Voltaire, 18 février 2004.

[15] « Faut-il combattre la tyrannie avec les instruments des tyrans ? », par Dick Marty, Réseau Voltaire, 22 mars 2007.

[16] Le carceri segrete della CIA in Europa, par Giulietto Chiesa, Edizioni Piemme, 2007

 

 

SOURCE ;http://www.voltairenet.org/article147368.html.

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16 mai 2010 7 16 /05 /mai /2010 13:57


Des textes que je publie sans commentaires. Des luttes concrètes, près de chez moi je me sens interpellée et m'interroge  sur la validité des méthodes et l'efficacité des actions. Je vous invite à en faire autant. Là, présentement, j'avoue humblement que je ne sais trop qu'en penser.



Belgique : Les journaflics se lâchent contre les compagnons ("Violents, les nouveaux anars")
(Le 16 janvier 2010)

VIOLENTS, LES NOUVEAUX « ANARS »

Souterraine, organisée et jusqu’ici jamais mise en lumière, l’anarchie belge s’en prend au capital et au monde carcéral. Les incendies et les dégradations se comptent désormais par dizaines. Une stratégie qui s’appuie sur Internet.

Athènes, dimanche 27 décembre 2009, 23 heures. Une bombe de forte puissance détruit ou peu s’en faut les bureaux d’une compagnie d’assurances. Berlin, dans la nuit du lundi 28 au mardi 29 décembre. Vingt-trois autobus d’une compagnie sous contrat avec le ministère allemand de la Défense sont ravagés par des casseurs, dans leur entrepôt. En même temps ou presque, rue Herdebeek à Itterbeek (Bruxelles), un incendie criminel ravage les engins d’un chantier ferroviaire d’Infrabel mené par l’entreprise Valens. Quatre grues et d’autres machines sont détruites. Quel rapport entre ces événements ? Dans chaque pays, les autorités estiment que leurs auteurs proviennent d’une frange dure de la mouvance anarchiste de gauche - certes bien plus visible en Grèce et en Allemagne qu’en Belgique. S’il est vrai que l’enquête pour le chantier Valens est toujours en cours, d’autres hypothèses restant ouvertes, ce fait divers s’ajoute à beaucoup d’autres où la piste des anarchistes est visible. Des cas passés largement inaperçus du public jusqu’ici, mais pas de la police fédérale, ni de la Sûreté de l’Etat, ni encore du parquet fédéral, qui ne sont guère loquaces à ce sujet. « Le phénomène est minutieusement suivi par le parquet fédéral, mais nous ne faisons pas de commentaires », déclare sans plus sa porte-parole, Lieve Pellens.

L’ami Internet

En revanche, le vecteur Internet « parle » beaucoup plus. Une nouvelle génération d’ « autonomes » belges se l’est approprié. Appels à la mobilisation, commentaires, listes de méfaits commis ou de cibles potentielles... On trouve de tout sur quelques sites/blogs, de l’anodin à l’essentiel, et plus ou moins ouvertement sous la bannière noire de l’anarchie. Des revendications ? Au moins une reconnaissance, souvent bienveillante pour les auteurs. On trouve un bon exemple de cette reconnaissance avec le chantier Valens/Infrabel dans les « brèves de la guerre sociale » du site/blog « Suie et Cendres ». Après avoir brièvement dépeint le résultat de l’incendie, en s’inspirant d’un article de presse, le site précise, en « note de la rédaction », que « Valens, qui fait partie du groupe Eiffage, participe à la construction du nouveau centre fermé pour clandestins à Steenokkerzeel ». Ce qui est censé tout expliquer, parce que l’anarchie « vandalo-violente » s’est attribué trois grandes campagnes, depuis l’émergence de la nouvelle génération belge, née voilà peut-être deux ans et demi. Elle pose ainsi des actions de soutien aux anarchistes étrangers (notamment grecs, parfois avec leur aide). La deuxième campagne s’attaque de façon plus classique à tout ce qui symbolise la société capitaliste en général. La troisième - et la plus dense - vise enfin les entreprises et les institutions actives dans le monde carcéral, prisons et centres fermés pour illégaux. Pourquoi ? La réponse se trouve entre autres dans la revue anarchiste Tout doit partir : « Reposer la question des camps de l’Etat dans le domaine public, empêcher si possible que celui-ci se munisse d’un nouvel outil de répression. Poser la question des centres ne se limite pas à leurs seuls territoires mais à toute la mécanique sociale qui les fait exister. » L’optique serait donc de bloquer la société. Valens-Eiffage construit un « camp » ? Il faut frapper Valens-Eiffage... Bref, la liste des faits, que l’on peut compiler au départ des sites/blogs de « Suies et Cendres », de « Liste noire » ou « Black List », des « Ennemis des frontières », du « Cemab » (un portail de médias alternatifs), est impressionnante. Elle comporte des dizaines de « coups » qu’on peut effectivement attribuer aux « anars ». Il s’agit de messages peints sur des bâtiments d’entreprises actives dans ce milieu carcéral - avec l’émotion que cela provoque quand il s’agit de petits indépendants -, de dégradations et/ou d’incendies, réussis ou non, de bâtiments de l’Etat, d’agences de banque, de véhicules de police et de diplomates (grecs) ainsi que de distributeurs de billets. Bloquer les serrures de salles d’audience du palais de justice de Bruxelles « en soutien aux camarades grecs » est aussi de mise.

Des dizaines de (mé)faits

« Il n’y a pas de suite logique », commente un acteur de terrain qui admet que les auteurs, pas si bêtes, restent à ce stade imprévisibles et imprenables. Voilà pourquoi la liste des « incidents » s’allonge depuis près de deux ans. Quelques exemples. « Freedom for the Anarchist », peint-on dans la nuit du 9 avril 2008 sur la résidence de l’ambassadeur de Grèce. Le 12 mai suivant, un distributeur de billets prend feu à Saint-Gilles. Il appartient à la Banque de La Poste et sera suivi par trois autres. Cette banque, rappellent des messages laissés par les vandales, gère les comptes de cantine des détenus. Puis, le 17 juin, un premier incendie touche un véhicule d’ISS Cleaning, qui entretient des centres fermés. Il y en aura d’autres. Comme la plupart des précédents, ces faits sont annoncés sur Internet. Et, parfois, dans Tout doit partir. On passe sur des faits du même ordre commis en 2009 pour retenir l’occupation, le 29 avril dernier, de la faculté de criminologie de Gand par une vingtaine de personnes masquées. La crimino, parce qu’elle « est liée de près avec les institutions pénitentiaires, la justice, la police et parce que ceux qui ont condamné chaque jour des personnes à des années de prison ou à la déportation ont débuté leur scandaleuse carrière dans cette faculté », selon un message laissé sur place. En septembre 2009, la Stib est visée parce qu’elle a durci le ton à l’égard des SDF. Une trentaine de distributeurs de tickets sont mis hors service avec les moyens du bord : cure-dents et glu, mousse expansive ou soudure à froid. Le bâtiment Sodexho d’Auderghem y passe le 29 novembre suivant : 20 vitres brisées et un tag « Sodexo = collabo avec centres fermés ». Mais d’autres entreprises ou institutions pourraient être menacées. Ainsi, le 20 décembre dernier, « Liste noire/Black List » a édité sur la Toile une liste de celles « qui collaborent avec les prisons, les centres fermés et la répression », notamment en construisant le centre fermé de Steenokkerzeel. En tête et parmi les plus importantes de ces entreprises : Besix et Valens (lire page 20).

De petites cellules indépendantes Mais qui sont ces nouveaux venus sur la scène anarchiste ? Les données sont rares. Ils fonctionneraient, peut-être avec des sympathies « concrètes », à la manière des activistes de la cause animale, du genre « ALF » (Animal Liberation Front). « De petites cellules indépendantes les unes des autres, mais capables de se reconnaître, voire d’interagir », estime un interlocuteur du monde du renseignement. « Pour nous, c’est un cas de figure difficile : détecter l’une d’elles et la pénétrer ne nous apporte pas grand-chose, car les autres nous restent fermées. » Toujours est-il qu’on estime ces anarchistes violents à une centaine, sans doute basés à Gand et à Bruxelles (Saint-Gilles ? Molenbeek ?). L’un de leurs points de chute pourrait être un local anarchiste bruxellois ouvert en 2008, la « Bibliothèque Acrata » (lire p. 24). Elle semble en tout cas en forte convergence avec les revendications des vandales. Mais, selon certains observateurs du côté du maintien de l’ordre, ces anarchistes pourraient aussi être liés au monde des squats. C’est toutefois incertain : « Les squats se heurtent par essence, avec ou sans revendication, à la propriété privée. Donc au fondement idéologique du système », explique José Garcia, secrétaire général du Syndicat des locataires de logements sociaux, en contact fréquent avec des squatters. « Il est dès lors naturel qu’y apparaissent des gens qui ont d’autres valeurs, comme des anarchistes. J’en ai observé qui ne semblent d’ailleurs pas squatter par obligation et ne le font pas tout le temps. » Mais des anarchistes violents ? « Ça me surprendrait, même si, le cas échéant, ils se garderaient bien de nous le dire. Cette violence est en rupture avec l’anarchie belge classique. Moi-même proche de cette sensibilité, je n’agirais jamais ainsi. » Même incompréhension à la suite de la publication récente, sur Internet, du nom et de l’adresse de membres d’institutions ou d’entreprises ainsi offerts à une vindicte éventuelle. « L’anarchie s’en prend volontiers aux structures, pas aux personnes. Pour moi, ceux qui visent les personnes sont les fascistes. » Nouvelle génération et autres m£urs ? Ou dérapage d’anars post-industriels non encore aguerris ? En tout cas, ce réseau - qui n’affiche aucun nom à Bruxelles, la discrétion étant gage de liberté en anarchie - pourrait voir venir des temps plus difficiles. Ce n’est sans doute pas un hasard si, début décembre 2009, la ministre de l’Intérieur, Annemie Turtelboom (Open VLD), annonçait avoir obtenu mandat du Conseil des ministres pour dresser un nouveau plan « antiradicalisme » se fondant sur un rapport de l’Ocam (Organe de coordination pour l’analyse de la menace) « qui établit le danger des groupuscules d’extrême gauche ou d’extrême droite » dans notre pays. Or, souterraine et violente, l’anarchie entre dans ce champ...

Roland Planchar

Incendie criminel sur un chantier d’Infrabel à Itterbeek (Bruxelles) : « Un article n’est pas nécessaire. » Manif de soutien au criminel Nordin Benallal, en 2006, devant le palais de justice de Bruxelles. Le drapeau américain, cible anarchiste...


Le Vif/L’Express - 15-01-2010

BREVE VISITE CHEZ LES « ANARS »

L’un des ports d’attache des anarchistes vandalo-violents pourrait être la « Bibliothèque anarchiste Acrata », comme sa vitrine de la petite rue de la Grande Ile la dénomme, dans le bas de Bruxelles. En fait, il s’agit plutôt d’un local, d’une salle de réunion. Pour ses créateurs : « (...) un instrument destiné à aiguiser nos connaissances et à trouver des bases solides pour affronter la domination », l’« oppression » et l’« exploitation ». Ouvert le 17 mai 2008, l’endroit - qui fut visité par la police dès le mois d’août suivant - n’est pas anodin. Internet en donne de nombreuses traces, même loin à l’étranger. Des réunions très militantes s’y déroulent assez régulièrement, parfois avec un caractère international. Quant à sa vitrine, elle est flanquée d’affiches reprenant des thèmes de campagne actuels, comme « Sabotons la machine à expulser », ce qui vise singulièrement l’édification du centre fermé de Steenokkerzeel. On y voit également le dernier numéro de la revue anarchiste Tout doit partir, où Acrata et la lutte contre ledit centre sont cités d’abondance. Mais la « bibliothèque » est-elle vraiment liée aux « événements » ? On peut toujours le demander à ceux qui s’y réunissent, même si la visite risque d’être courte, car l’anarchie moderne n’aime pas la presse (à ses yeux, elle est associée au capital abhorré et au pouvoir exécré). Bref, on ouvre la porte d’Acrata le premier jeudi de 2010, soir de permanence, à 18 h 16. Grande table basse de récup’ et sièges d’un âge incertain au centre, étagères, livres et revues révolutionnaires appuyées aux murs, l’endroit a été mis au régime du strict nécessaire, lumière comprise. Une douzaine de jeunes gens, filles et (surtout) garçons entre 18 et 25 ans, devisent. D’un abord a priori accueillant, ils semblent typés « bonne éducation », voire d’allure bourgeoise. Mais se présenter comme journaliste suscite d’abord de petits rires nerveux et moqueurs, avant que celui qui n’est pas le chef (on est en anarchie, quand même...) quitte des yeux l’ordinateur de service et, d’un même élan, jaillisse de sa chaise en faisant mouvement pour expulser l’intrus. « Putain, si c’est pas clair qu’on ne veut pas de journaliste ici ! » résume-t-il. Dix pas plus loin et une porte plus tard, la visite est terminée. Il est toujours 18 h 16. Alors, connectés aux « combattants », ceux d’Acrata (« anarchiste », en espagnol) ? Ou « simples » sympathisants ? Mystère. R.P. Acrata, port d’attache bruxellois.

Le Vif/L’Express - 15-01-2010


DES ENTREPRISES ENNUYEES

Victimes des dégradations et des incendies, les entreprises réagissent différemment. Avec émotion, pour ce petit entrepreneur flamand qui avait vu ses murs tagués et était affligé d’être dénoncé comme « collabo » auprès du voisinage, ce qu’il ressentait comme une injustice. Avec le plus grand silence, comme chez Valens-Eiffage où on refuse tout commentaire sur l’incendie du 29 décembre 2009 au chantier Infrabel d’Itterbeek. « Le juriste estime qu’un article n’est pas nécessaire », nous y a-t-on répondu en tout et pour tout. D’autres se veulent plus transparents, comme le géant de la construction Besix, cible comme les autres des anarchistes pour participer à la construction ou à l’entretien de prisons et centres fermés. A la mi-octobre 2009, ses bureaux de Gand avaient été ravagés par une vingtaine de personnes cagoulées, au grand dam des quelques employés déjà présents, qui avaient été véritablement choqués. Alors, que dit son porte-parole, Bart Wuyts ? « Besix ne fait pas de politique, Steenokkerzeel est pour nous un chantier comme un autre », explique-t-il. « Mais il est vrai que la police fédérale nous a indiqué qu’il s’agissait d’une action d’anarchistes. Nous prenons cela très au sérieux car, pour nous, la priorité, c’est la sécurité du personnel, le nôtre et celui de nos sous-traitants. » R.P.

Le Vif/L’Express - 15-01-2010

 

SOURCE : Brèves du désordre - http://cettesemaine.free.fr/spip

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13 mai 2010 4 13 /05 /mai /2010 09:43





Les puissants utilisent cette méthode depuis longtemps : fabriquer la dissidence pour gagner coûte que coûte. Les deux conférences qui se sont tenues en parallèle à la fin avril, le Sommet du millénaire de Montréal et la Conférence des peuples sur le changement climatique de Cochabamba, en sont un exemple. L’obsession climatique basée sur un soi-disant consensus est manipulée en haut lieu et la dissidence que l’on nous présente n’en est pas vraiment une.

Les changements climatiques s’approprient le Sommet du Millénaire

 

La journée de clôture du Sommet du millénaire de Montréal qui se tenait du 20 au 22 avril s’est terminée par une conférence grand public, où se sont succédé des élites des milieux politique, économique, social et artistique, dont « l’Honorable » Al Gore. Malgré la qualité de certaines présentations, le principal objectif du Sommet, soit de réduire de moitié la pauvreté extrême entre 2000 et 2015, a à peine fait l’objet de discussion et les solutions proposées relèvent toutes ou presque de l’action citoyenne. En ce Jour de la Terre, on a préféré mettre l’accent sur le réchauffement planétaire et/ou les changements climatiques, qui, selon M. Gore, sont inextricablement liés à la pauvreté extrême. Une tactique voilée pour détourner le débat à des fins pécuniaires.



 

MorAl Gore prêche pour sa paroisse

 

Le réchauffement planétaire est d’abord et avant tout une question morale, affirme haut et fort M. Gore. Aussi, pour combattre la pauvreté extrême, il faut nécessairement s’attaquer au réchauffement planétaire. Et quelle est la première étape de ce combat « moral » selon le célèbre défenseur du climat? La « stabilisation de la population ».

 

D’abord, le fait d’associer la moralité aux changements climatiques ressemble étrangement à la technique rhétorique peu subtile qu’ont employé les défenseurs du Patriot Act : quiconque questionnera le « consensus » sur le climat sera accusé d’être amoral tout comme les critiques du Patriot Act étaient accusés d’être antipatriotiques.

 

Ensuite, la stabilisation de la population que prône M. Gore, prétendument pour enrayer la pauvreté, n’est rien d’autre qu’une nouvelle formulation du plan de contrôle de la population de Henry Kissinger, un plan eugéniste visant à réduire la croissance de la population mondiale, spécifiquement dans les pays les plus pauvres, et ce pour des raisons économiques et de sécurité nationale. Bien sûr, afin de donner à son plan douteux un aura de moralité, M. Gore le drape dans des idéaux inattaquables : éduquer les jeunes filles, leur donner accès à des méthodes contraceptives, etc.

 

Or, la pauvreté extrême existait bien avant que l’on ne parle de changements climatiques et celle-ci est la cause de la « surpopulation » dans les pays sous-développés et non l’inverse comme tente de nous le faire croire M. Gore. S’attaquer à la surpopulation pour contrer la pauvreté c’est s’attaquer au résultat plutôt qu’à la cause.

 

Sans grande surprise, l’éminent lauréat du prix Nobel de la paix ne remet jamais en cause les systèmes économiques et politiques ainsi que les pratiques commerciales injustes à la base des inégalités Nord-Sud. Pourtant, si les progrès des pays sous-développés réalisés depuis les années 1960 ont été freinés c’est davantage en raison de politiques économiques provenant des institutions internationales, principalement des tristement célèbres plans d’ajustement structurels du Fonds monétaire international, servant avant tout les intérêts économiques des grandes puissances : à bas la nationalisation, vivement la privatisation et un marché de libre-concurrence, c’est-à-dire un marché où les plus démunis demeurent au bas de l’échelle puisqu’ils ne peuvent concurrencer les puissants, un marché où ces derniers sont libres de faire du dumping social chez-eux et du dumping et des économies sur les salaires dans leur pays d’accueil.

 

Jamais M. Gore ne parle des guerres, à l’exception évidemment de celles qui sont liées à la surpopulation : les guerres pour l’appropriation des ressources naturelles, sujet à peine effleuré par le conférencier vedette. Pourtant, son pays d’origine est non seulement le plus gros pollueur, mais il est également le plus armé et le plus guerrier de la planète. Les bombes à l’uranium appauvri que l’armée étasunienne fait exploser un peu partout sont un véritable désastre écologique et humanitaire.

 

Or, demander aux citoyens d’acheter des produits écologiques, de réduire leur consommation d’énergie et aux gouvernements de participer à un marché du carbone s’avère la solution de M. Gore pour sauver l’environnement, alors qu’en Irak ces bombes sales ont des effets catastrophiques sur l’environnement et la population, particulièrement sur les naissances, à savoir d’innombrables malformations, au point où les femmes iraquiennes ne souhaitent plus enfanter. M. Gore ignore-t-il ce phénomène parce qu’il contribue au plan de dépopulation? Allons savoir.

 

Jamais M. Gore ne s’attaque non plus aux gros pollueurs : les entreprises privées. N’est-il pas indécent de demander aux petits citoyens d’adopter un nouveau style de vie, de faire des sacrifices, alors qu’on ne demande pas aux plus gros pollueurs de faire de même? La principale demande faite aux grandes entreprises responsables à la fois de la pollution et de la pauvreté extrême, dont ils profitent largement, est de participer au marché du carbone, la nouvelle manne financière qui permettra aux plus riches de polluer davantage sur le dos des pays en développement. Et à M. Gore, qui investit massivement dans l’économie « verte », de s’enrichir une fois de plus sous le couvert de l’activisme écologique.

 

Bref, la « solution » de M. Gore, « en voie de devenir le premier milliardaire du carbone », se résume à pousser les citoyens et les entreprises vers un nouveau marché « vert » dans le but ultime de se remplir les poches et ne contribue en rien à réduire la pollution, ni à enrayer la pauvreté. Malgré tout, le discours du gourou de l’environnement est reçu par les foules avec un enthousiasme aveugle.

 

Conférence des peuples : qui se cache derrière les ONG?

 

 

La Conférence des peuples sur le changement climatique de Cochabamba, qui avait lieu du 19 au 23 avril, se veut une alternative au Sommet de Copenhague. Peut-elle vraiment être considérée comme telle? D’une part oui. On y a dénoncé, entre autres, les dangers d’un marché du carbone et le caractère destructeur du système capitaliste, et, en passant, les guerres et la responsabilité des entreprises privées en ce qui a trait à la pollution.

 

On a aussi proposé des solutions différentes de celles de Copenhague et davantage égalitaires. Mais ces solutions sont non seulement toutes basées sur un consensus douteux cautionné par des entités qui tirent avantage du scénario apocalyptique du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC), elles sont également des solutions qui, encore une fois, ont pour source de revenu les contribuables. Les contribuables du monde entier, où qu’ils se trouvent.

 

À ce stade-ci, il convient de noter que la plupart des grandes organisations non gouvernementales (ONG) participant à ce genre de sommet et prétendant représenter la dissidence et être les porte-paroles des sans-voix, sont en grande partie financées et/ou dirigées par ceux-là même qu’elles critiquent, en prenant soin de ne pas les nommer.

 

Greenpeace, Friends of the Earth, la Fondation David Suzuki, le Sierra Club, le World Wild Life Fund ainsi que de nombreuses autres ONG sont financées par le Rockefeller Brothers Fund. On retrouve les mêmes ONG, à quelques exceptions près dans la liste des subventions du Rockefeller Family Fund, et de Rockefeller Philanthropy Advisors. La Rockefeller Foundation, elle aussi, finance Greenpeace et le WWF. Or, on sait que la famille Rockefeller doit sa fortune en grande partie à l’industrie pétrolière, à savoir, la « défunte » Standard Oil. Démantelée au début du 20e siècle, elle est à l’origine d’une trentaine de compagnies pétrolières, dont la famille détient toujours des parts.

 

Par ailleurs, ce clan richissime est omniprésent sur la scène politique, économique et financière et fait partie des plus puissantes organisations internationales, dont le Council on Foreign Relations, le Groupe Bilderberg, le Forum économique mondial et la Commission Trilatérale, « un des engins les plus cruciaux de la mondialisation », fondé par David Rockefeller, patriarche de la famille.

 

« Comment la Commission Trilatérale a-t-elle contribué à leur objectif de créer un nouvel ordre mondial ou un nouvel ordre économique international? Ils ont placé leurs propres membres à la tête des institutions mondiales relatives au commerce, aux banques et à la politique étrangère. »  (The August Review)


Pour ne citer qu’un exemple, tous les présidents de la Banque mondiale sauf un ont été des membres de la Commission Trilatérale. Lorsque les architectes du nouvel ordre économique mondial financent des organisations qui disent combattre ce système, il y a de quoi douter des intentions réelles de ces dernières.


Des descendants de John D. Rockefeller ont récemment proposé que la compagnie Exxon Mobil, dont ils détiennent des parts, « prenne la menace du réchauffement climatique au sérieux ». À voir la quantité de groupes environnementalistes qu’ils financent, on n’a pas à se demander pourquoi ils préconisent une telle approche. Il est clair que ce financement sert des intérêts économiques et qu’il ne s’agit pas de pure philanthropie.

 

En effet, en 2009, le Sunday Times publiait une liste des 100 « barons écolo » les plus riches. Outre Warren Buffett, Bill Gates et les fondateurs de Google, dont M. Gore est conseiller, on trouve la famille Rockefeller. Et le fondateur de CNN Ted Turner.

 

Sa fondation, la Turner Foundation, a été entre 1996 et 2001 le plus grand donateur de Greenpeace. Sur la liste des groupes activistes ayant reçu du financement de cette fondation, on trouve les mêmes noms que ceux qui figurent sur la liste des fondations des Rockefeller : Sierra Club, David Suzuki Foundation, Friends of the Earth, WWF et d’autres figurant également sur la liste des partenaires de l’événement de Cochabamba, dont Rainforest Action Network, Global Exchange, etc. Qui peut être mieux placé qu’un ancien magna de la presse pour contrôler un message?

 

Mais encore. La Ford Foundation  finance elle aussi le WWF, Rainforest Alliance Friends of the Earth, etc. Étrange non? Que les groupes qui se disent dissidents, progressistes ou peu importe quel qualificatif qui sonne de gauche, soient toutes ou presque financés par les puissants contre lesquels ils prétendent lutter? Cela ressemble étrangement aux premiers jours de la Réserve fédérale des États-Unis, époque où les Rockefeller, entre autres, se battaient pour une banque privée, bataille très peu populaire. Une opposition a été fabriquée par les partisans d’une banque centrale privée dans le but de faire passer une proposition semblable, mais plus acceptable car elle donnait l’impression de s’opposer au projet original. « Sois proche de tes amis, et encore plus proche de tes ennemis », dit-on dans L’Art de la guerre.

 

Tout ce qui précède est un exemple éloquent de cette philosophie. Une opposition est créée dans le but de faire accepter une réalité fort probablement fabriquée et qui éclipse les problèmes réels, entre autres, celui de la guerre et la destruction qu’elle cause. La guerre, qui, comme l’a si bien exprimé le major-général de la marine Smedley Butler dans War is a Racket, n’est au fond que l’expression de rivalités économiques.

 

D’une part, il faut être naïf pour penser que ces ONG iraient mordre la main qui les nourrit. Lorsqu’elles évitent tout débat sur les changements climatiques en disant que ceux qui n’adhèrent pas au consensus sont payés par les pétrolières, il ne s’agit que d’une tentative de diversion qui n’a aucune validité puisqu’elles aussi sont, d’une manière détournée, financées par ces mêmes industries.

 

D’autre part, il faut également faire preuve de naïveté pour penser que les intérêts des groupes environnementalistes ne sont pas à la base des intérêts financiers. Cela ne signifie pas que tous les membres de ces groupes recherchent tous des gains potentiels. Bien des gens impliqués dans de telles organisations sont profondément désintéressés, croient réellement œuvrer au bien de l’humanité et ne réalisent pas que ceux qui les financent sont motivés la plupart du temps par l’appât du gain.

 

Enfin, il ne faut pas oublier que l’eugénisme est à la base de l’environnementalisme. Pour ne citer qu’un exemple, le WWF a été fondé par Sir Julian Huxley, eugéniste notoire, et le prince Philippe de Grande-Bretagne. Le premier président du WWF et fondateur du Groupe Bilderberg, le prince Bernard des Pays-Bas, avait des affiliations nazies. Nazi et eugénisme vont de pair, on le sait.

 

Or, Betsy Hartmann, directrice du Population and Development Program au Hampshire College de Amherst, explique que l’eugénisme, contrairement à la croyance populaire, n’a pas disparu avec les atrocités nazies. En réalité, « la dimension démographique n’a guère disparu ». Le programme de « stabilisation de la population » de M. Gore en est un exemple flagrant. Tout est dans la formulation : y a-t-il une différence entre dépopulation et stabilisation de la population? Les mots sont différents, mais le concept demeure le même.

 

À la lumière de ce qui précède, il convient de se questionner sur les réelles intentions de ceux qui disent vouloir nous protéger d’une catastrophe annoncée. Tous ces liens avec l’industrie pétrolière, les banques et les médias ne sont certes pas fortuits. Pas moins que tous ces noms qui reviennent constamment en des endroits clés. Il s’agit sans aucun doute d’une propagande orchestrée sur tous les fronts. Bref, méfions-nous de ceux par qui le scandale arrive.



Julie Lévesque est journaliste et chercheure au Centre de recherche sur la mondialisation (CRM).


SOURCE / Changements climatiques : la « dissidence fabriquée »



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13 mai 2010 4 13 /05 /mai /2010 09:24

11 avril par Éric Toussaint


 


Le présent texte est une version actualisée par l’auteur d’une interview donnée à Jean-François Pollet du magazine Imagine. La version originale de cette interview a été publiée par Imagine dans son numéro de janvier-février 2010. Dans cette interview, Eric Toussaint commente une carte du monde où la surface des pays a été modifiée afin de refléter le poids dont chacun dispose en termes de droits de vote au sein du FMI : http://www.worldmapper.org/display.php?selected=365 On distingue clairement que la Belgique (10 millions d’habitants) occupe une surface supérieure à celle de pays comme le Brésil (qui a pourtant une population 18 fois plus importante et un territoire 279 fois plus étendu), le Mexique, l’Indonésie ou la République démocratique du Congo (6 fois plus d’habitants que la Belgique et un territoire 77 fois plus étendu).

Creative Commons License © Copyright 2006 SASI Group (University of Sheffield) and Mark Newman (University of Michigan).

Qu’est-ce que la carte ne montre pas ?

Avec la crise qui s’est aggravée au Nord en septembre 2008, le FMI est revenu sur le devant de la scène après des années très difficiles. Profondément délégitimé par ses graves échecs au cours des décennies 1980 et 1990, il connaît aussi une sévère crise interne puisque ses deux derniers directeurs généraux ont démissionné avant la fin de leur mandat. Malgré cela, le G20 réuni à Londres en avril 2009 a voulu le remettre au centre du jeu politique car il est un outil essentiel de la domination des grandes puissances. Prêteur en dernier ressort, les pays du Sud préfèrent souvent éviter autant que possible de se plier aux conditions qui accompagnent toute signature d’un accord avec le FMI. Le Mexique, l’Argentine et la Pologne, qui ont obtenu la promesse de crédits possibles pour un total de 52 milliards, attendent le dernier moment pour effectivement accepter ces prêts. Ils veulent explorer toutes les alternatives possibles et éviter autant que faire se peut les diktats du FMI.

Les conditions du FMI sont tellement contraignantes ?

Oui. Elles se basent sur le Consensus de Washington, en vigueur depuis une trentaine d’années, qui préconise de comprimer les dépenses publiques et les budgets sociaux, de privatiser à tout va, d’ouvrir les marchés pour permettre les profits des sociétés transnationales et d’abandonner toutes les protections dont bénéficiaient les producteurs locaux et les populations pauvres. Officiellement, ce consensus n’a plus cours mais en réalité, les conditions qu’impose le FMI aux pays qui font appel à lui n’ont pas changé et leur logique est toujours la même. La Hongrie, qui fut le premier pays à solliciter un prêt après la crise financière, a dû supprimer le treizième mois de ses fonctionnaires. L’Ukraine a été sommée de reculer l’âge de la retraite. Le FMI dicte ses volontés aux gouvernements et leur impose des mesures très impopulaires. Il se permet de réécrire les codes nationaux du travail en contraignant les parlementaires à revoir les législations en vigueur dans un sens favorable aux grands créanciers et défavorables aux populations du pays.

L’Ukraine et la Hongrie sont des pays européens. Le FMI intervenait jusqu’ici au Sud ?

Ce n’est pourtant pas une première. On l’a oublié, mais au début des années 1970, le Royaume-Unis a fait appel à lui pour enrayer la chute de la livre sterling. L’année passée, c’était au tour de l’Europe centrale et orientale, sans oublier l’Islande, touchée de plein fouet par la crise financière. Aujourd’hui, c’est la Grèce qui est soumise aux exigences du FMI. Si ses tentacules se développent au Nord sans relâcher la pression sur le Sud, il faut combattre l’action du FMI de manière urgente.

Le pouvoir de décision au FMI est distribué en fonction de la quote-part versée par les pays membres au moment de leur adhésion. Pourquoi les pays qui s’estiment sous-représentés n’augmentent-ils tout simplement pas leur contribution ?

Parce qu’on les en empêche. La Chine dispose de plus de 2 200 milliards de dollars de réserves de change. Elle demande à avoir plus de poids au FMI, mais les contributions ne sont pas volontaires, elles dépendent des alliances géostratégiques. Le FMI a été imaginé, au sortir de la seconde guerre mondiale, par les pays industrialisés qui y disposent de la majorité des voix alors qu’ils représentent moins de 20 % de la population mondiale. Ils rechignent à redistribuer les cartes aujourd’hui. Ils ont construit un FMI à leur service et veulent le maintenir tel quel.

Sur la carte, l’Afrique ne semble pas trop mal lotie…

Soyons sérieux : l’Afrique subsaharienne occupe une place égale à la France alors qu’elle compte 10 fois plus d’habitants. L’Afrique au Sud du Sahara ne dispose que de deux membres au sein du Conseil d’administration du FMI et ces deux membres doivent exprimer le point de vue de 48 pays. La France dispose à elle seule d’un administrateur. Les pays de l’Union européenne ont 8 représentants au sein du Conseil d’administration sur un total de 24 membres, soit un tiers d’entre eux. Vous imaginez la difficulté des 48 pays africains à se faire entendre si seuls 2 administrateurs les représentent. Le FMI est parfaitement verrouillé par les pays européens et nord-américains. L’Afrique a demandé que l’on porte de 24 à 26 le nombre d’administrateurs afin de dégager deux sièges supplémentaires en sa faveur. Ils se sont heurtés à un refus net des États-Unis. C’est donc l’immobilisme qui prévaut, mais pendant ce temps, les dégâts sociaux au Nord et au Sud s’aggravent.

Le FMI est donc irréformable ?

Oui car ses statuts sont foncièrement antidémocratiques. Le G20 réuni à Pittsburgh en 2009 a décidé de transférer 5% des voix des pays surreprésentés vers certains pays sous-représentés comme la Chine, l’Espagne et la Pologne. Ce transfert, qui se fera probablement au détriment des pays comme la Suisse et la Belgique, ne transformera pas pour autant le FMI en une institution démocratique, car il concernera quelques dixièmes de pourcent mais ne modifiera pas les rapports de force en profondeur. En conclusion, il faut créer une nouvelle institution mondiale garantissant la stabilité monétaire, notamment en luttant contre la spéculation, et fondamentalement centrée sur le respect des droits humains fondamentaux, ce qui n’est pas du tout le cas actuellement. Il est très important de faire sauter le verrou du FMI pour espérer jeter les bases d’un autre monde.


SOURCE / CADTM - Le FMI : une institution antidémocratique qui impose des politiques antisociales

A lire aussi : RISAL.info - Banque du Sud contre Banque mondiale

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27 août 2009 4 27 /08 /août /2009 13:00
L'histoire continue, ne croyez pas qu'Obama change quoi autre chose qu'une belle façade qui détourne le regard des véritables processus mis en jeu par ceux qui prétendent instaurer un nouvel ordre mondial...Ne vous laissez pas pièger, regarder ce qu'il a réellemnt fait depuis son arrivée au pouvoir. Un article qui annonce la couleur et un lien vers mécanopolis où vous trouverez 2 excellents reportages de France 2 qui vous permettront de mieux comprendre ce qui se passe en coulisse et constitue la réalité politique, économique et militaire. C'est un peu long, mais le contenu vaut la peine. Comprendre à la lumière de l'histoire ce qui se joue à présent en Amérique Latine, les enjeux de l'argent de la grogue qui est aussi une arme de destruction massive et les enjeux de mains mise sur les matières premières des pays de la région. Une excellente leçon d'histoire réelle.

Nous finançons la croissance avec l’argent de la drogue

samedi 7 mai 2005 par admin

Catherine Austin Fitts était directrice du Dillon Read, une banque d’investissement au Wall Street. Elle dévoila lors d’un congrès les rouages du blanchiment de 500 à 1000 milliards de dollars d’argent de la drogue aux USA.
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Nous finançons la croissance avec l’argent de la drogue

Officiellement le directeur de la CIA n’a pas de compte à rendre à la brigade des stupéfiants US. S’il est prouvé que des agents de la CIA ont revendu de la drogue, ils sont couverts par le secret défense. Ainsi dans cette économie souterraine, on ne distingue plus les agents d’état, des mafias installées sur les places financières ou ayant leur propre banque. On ne distingue plus l’intérêt de l’état de l’intérêt des mafias, on ne distingue plus le pouvoir des états, des syndicats du crime. La "Congress Woman" Cynthia Mac Kinney considère qu’aujourd’hui le peuple américain a probablement un syndicat du crime aux commandes du gouvernement.

Tous les services occidentaux fonctionnent à peu près de la même manière en acheminant des armes vers les pays qui leur fournissent de la drogue. Ainsi, ils se constituent des cagnottes en vue d’opérations dont les coûts ne figurent pas dans le budget de l’Etat. Ce qui étonne aux USA c’est que ce système s’est institutionnalisé rendant toute l’économie dépendante de l’argent de la drogue. Sans ces centaines de milliards qui gonflent artificiellement l’économie américaine, les USA subiraient une crise plus dure que celle de 1929 ...

" Une manière de financer la croissance des multinationales, des banques et du Dow Jones est de vendre de la drogue à nos enfants. C’est le business le plus lucratif des Etats-Unis".

Il y a deux ans à Philadelphia, j’ai donné une conférence concernant le blanchiment d’argent du crime organisé. Lors de cette conférence, j’ai décrit sans complaisance comment fonctionne le crime organisé et comment les narco-profits alimentent massivement notre économie. C’est certainement un des plus puissants vecteurs économique de notre nation. Notre département de la Justice estime aujourd’hui que notre pays blanchit tous les ans, entre 500 et 1000 milliards de dollars issus du trafic de drogue. Cet argent remis sur les places financières sert en partie d’argent frais au complexe militaro-industriel, soutient la croissance du Dow Jones et des multinationales ... Pendant ce temps nos enfants sont confrontés à la vente de drogues en tout genre organisée par des officines de l’Etat ...

A la fin de mon intervention, j’ai expliqué que si nous arrêtions ces blanchiments de fonds, nos mutuelles et nos caisses privées de retraite feraient faillite, nous serions de plus dans l’impossibilité de financer le déficit du gouvernement ... Le crash serait assuré. En somme, c’est parce que nos enfants et petits enfants se droguent que l’économie de notre pays se maintient.

J’ai ensuite demandé à l’assemblée : Qui parmi vous est prêt à stopper tout cela, au prix de sa retraite, de sa mutuelle, de ses chèques qu’il reçoit du gouvernement ?

En fait, sur cent personnes présentes, une seule a levé la main. J’ai terminé le colloque en leur disant que finalement, ils acceptaient qu’une armada de dealer vende de la drogue à leurs enfants et petits enfants afin de ne pas sacrifier leur train de vie.

Ils ont alors répondu : OUI.

Cet épisode en dit long sur le niveau de dépendance de l’économie américaine vis à vis de la drogue. Une chose est certaine, avant même d’imaginer un autre projet de société, le peuple américain doit être conscient de l’ignominie des fondements de notre système économique. Ensuite, peut-être pourrons nous repenser l’ensemble de notre économie. "

Catherine Austin, vidéo Truth and Lie of the 9/11, Crossing The Rubicon of Michaël Ruppert, http://www.fromthewilderness.com Source et Traduction : site www.morpheus.fr Morphéus N°9 de Avril Mai 2005. F. Morin Morphéus Sarl morpheus.fr

Mecanopolis » À qui profite la cocaïne ?

Article rédigé le 07 août 2009, par Régis Mex

Par Régis Mex

Depuis la chute du Mur de Berlin, la cocaïne a remplacé le communisme. C’est au nom de la santé du monde que les États-Unis interviennent désormais en Amérique latine pour y protéger leurs intérêts économiques et stratégiques. La militarisation de la guerre à la drogue n’a eu aucun effet sur le trafic ; elle permet essentiellement de recycler le matériel du Pentagone et de rentabiliser 40 ans d’investissements en agences, services secrets et haute technologie militaire dans le cadre de la Guerre Froide.

L’ouverture des frontières est à l’Europe ce que la Chute du Mur est aux États-Unis : la lutte contre la drogue permettra d’assigner de nouvelles fonctions à des services devenus inutiles. Là encore, la lutte contre le trafic est bien secondaire face aux intérêts bureaucratiques.

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À qui profite la cocaïne ? [Partie 1/2]

 

À qui profite la cocaïne ? [Partie 2/2]

SOURCE / Mecanopolis » À qui profite la cocaïne ?

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27 août 2009 4 27 /08 /août /2009 10:37


Karzai, la CIA et le trafic de la drogue

Article rédigé le 19 août 2009, par Frédéric Courvoisier

Tous en chœur, les médias américains accusent le défunt régime islamique, sans même mentionner que les Talibans – en collaboration avec les Nations unies – avaient imposé avec succès l’interdiction de la culture du pavot en 2000. La production d’opium avait ensuite décliné de 90 % en 2001. En fait, l’augmentation de la culture d’opium a coïncidé avec le déclenchement des opérations militaires sous commandement américain et la chute du régime taliban. Entre les mois d’octobre et décembre 2001, les fermiers ont recommencé à planter du pavot à grande échelle. Le succès du programme d’éradication de la drogue en Afghanistan en l’an 2000 sous les Talibans avait été souligné à la session d’octobre 2001 de l’Assemblée générale des Nations unies. Aucun autre pays membre de l’ONU n’avait pu mettre en oeuvre un programme semblable.

opium

Sous les Talibans, la prohibition avait en effet causé « le début d’une pénurie d’héroïne en Europe vers la fin de 2001 », comme l’admet l’ONU.

L’héroïne est un commerce de plusieurs milliards de dollars supporté par des intérêts puissants, qui requiert un flux régulier et sécuritaire de la marchandise. Un des objectifs « cachés » de la guerre était justement de restaurer le trafic de la drogue, parrainé par la CIA, à ses niveaux historiques et d’exercer un contrôle direct sur les routes de la drogue.

En 2001, sous les Talibans, la production d’opiacés s’élevait à 185 tonnes, pour ensuite grimper à 3400 tonnes en 2002 sous le régime du président Hamid Karzai, marionnette des États-Unis.

Les Talibans avaient éliminé la culture du pavot

Tout en soulignant la lutte patriotique de Karzai contre les Talibans, les médias omettent de mentionner qu’il a déjà collaboré avec ces derniers. Il a aussi déjà été à l’emploi d’une pétrolière des États-Unis, UNOCAL. En fait, depuis le milieu des années 1990, Hamid Karzai agissait comme consultant et lobbyiste pour UNOCAL dans ses négociations avec les Talibans.

Selon le journal saoudien Al-Watan, « Karzai était un agent en sous-main de la Central Intelligence Agency à partir des années 1980. Il collaborait avec la CIA en acheminant de l’aide américaine aux Talibans à partir de 1994, quand les Américains, secrètement et à travers les Pakistanais, supportaient les visées de pouvoir des Talibans. »

Il est pertinent de rappeler l’histoire du trafic de drogue dans le Croissant d’or, qui est intimement lié aux opérations clandestines de la CIA dans la région.

L’histoire du trafic de la drogue dans le Croissant d’or

Avant la guerre soviético-afghane (1979-1989), la production d’opium en Afghanistan et au Pakistan était pratiquement inexistante. Selon Alfred McCoy, il n’y avait aucune production locale d’héroïne.

L’économie afghane de la drogue fut un projet minutieusement conçu par la CIA, avec l’assistance de la politique étrangère américaine.

Comme il a été révélé par les scandales Iran-Contras et de la Banque de Commerce et de Crédit international (BCCI), les opérations clandestines de la CIA en support aux moujahidins avaient été financées à travers le blanchiment de l’argent de la drogue.

L’hebdomadaire Time révélait en 1991 que « parce que les États-Unis voulaient fournir aux rebelles moujaheddins en Afghanistan des missiles Stinger et d’autres équipements militaires, ils avaient besoin de l’entière coopération du Pakistan. » À partir du milieu des années 1980, la présence de la CIA à Islamabad était une des plus importantes dans le monde. Un officier du renseignement américain avait confié au Time que les États-Unis fermaient alors volontairement les yeux sur le trafic de l’héroïne en Afghanistan.

L’étude d’Alfred McCoy confirme qu’en l’espace de deux ans après le déclenchement des opérations clandestines de la CIA en Afghanistan, en 1979, « les régions frontalières entre le Pakistan et l’Afghanistan devinrent la première source mondiale d’héroïne, fournissant 60 % de la demande américaine. »

Selon McCoy, ce trafic de drogue était contrôlé en sous-main par la CIA. Au fur et à mesure que les moujahidins gagnaient du terrain en Afghanistan, ils ordonnaient aux paysans de planter de l’opium comme une taxe révolutionnaire.

À cette époque, les autorités américaines refusèrent d’enquêter sur plusieurs cas de trafic de drogue par leurs alliés afghans. En 1995, l’ancien directeur des opérations de la CIA en Afghanistan, Charles Cogan, a admis que la CIA avait en effet sacrifié la guerre à la drogue à la Guerre froide.

En troisième position après le pétrole et la vente d’armes

Le recyclage de l’argent de la drogue par la CIA était utilisé pour financer les insurrections post-Guerre froide en Asie centrale et dans les Balkans, y compris Al Qaeda.

Les revenus générés par le trafic de la drogue afghane commandité par la CIA sont considérables. Le commerce afghan des opiacés constitue une grande part des revenus annuels à l’échelle mondiale des narcotiques, estimés par les Nations unies à un montant de l’ordre de 400 ou 500 milliards.

Au moment où ces chiffres de l’ONU furent rendus publics (1994), le commerce mondial estimé de la drogue était dans le même ordre de grosseur que celui du pétrole.

Selon des chiffres de 2003 publiés par The Independent, le trafic de la drogue constitue le troisième commerce le plus important en argent après le pétrole et la vente d’armes.

Il existe de puissants intérêts commerciaux et financiers derrière la drogue. De ce point de vue, le contrôle géopolitique et militaire des routes de la drogue est aussi stratégique que celui du pétrole et des oléoducs.

Cependant, ce qui distingue la drogue des commerces légaux est que les narcotiques constituent une source majeure de richesse non seulement pour le crime organisé, mais aussi pour l’appareil de renseignement américain, qui constitue de plus en plus un acteur puissant dans les sphères bancaires et de la finance.

En d’autres mots, les agences de renseignements et de puissants groupes d’affaires alliés au crime organisé se livrent une concurrence pour le contrôle stratégique des routes de l’héroïne. Les revenus de plusieurs dizaines de milliards de dollars provenant du commerce de la drogue sont déposés dans le système bancaire occidental.

Le commerce de la drogue fait partie des plans de guerre

Ce commerce peut seulement prospérer si les principaux acteurs impliqués dans la drogue ont des « amis politiques aux plus hauts niveaux ». Les entreprises légales et illégales sont de plus en plus imbriquées, la ligne de démarcation entre « gens d’affaires » et criminels est de plus en plus floue. En retour, les relations entre les criminels, les politiciens et des acteurs du milieu du renseignement ont teinté les structures de l’État et le rôle de ses institutions.

L’économie de la drogue en Afghanistan est « protégée ». Le commerce de l’héroïne faisait partie des plans de guerre. Ce que cette guerre aura accompli, c’est le rétablissement d’un narco-régime dirigé par un gouvernement fantoche soutenu par des États-Unis.

Source : Forums Mecanopolis

Mecanopolis » Karzai, la CIA et le trafic de la drogue

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