20 décembre 2011 2 20 /12 /décembre /2011 15:24

 

Un texte écrit en mai par un jeune anarchiste madrilène à l'aube du mouvement 15M trouvé sur le blog de l'Organisation Communiste Libertaire que je gardais au chaud, et que celui de Rem Ah-Ah-Ah ! Triple Anar toi-même !!!   m'a incité à publier

 

[Madrid] Des anarchistes et le mouvement du 15-M

Sur le mouvement du 15 Mai

lundi 13 juin 2011, par OCLibertaire

Écrit par des camarades de Madrid au cœur du mouvement d’occupation de la Puerta del Sol, ce texte tente une réflexion et une proposition pour rompre avec l’impasse dans laquelle nous avons été ancrés pendant longtemps, une réflexion pour tenter de clarifier de quelle manière en tant que révolutionnaires, nous pouvons apporter et participer à ce qui se passe autour de nous. (voir notes sur la traduction en P.S.)


Voir en ligne : Collectif Anarchiste de Traduction et de Scannérisation

Les anars et le 15 mai : réflexions et propositions

Ce texte a été écrit à Madrid, beaucoup des descriptions et réflexions peuvent ne pas convenir à d’autres localités, surtout vue l’hétérogénéité du mouvement du 15 mai. Même ainsi, nous pensons qu’il peut résulter utile comme point de départ pour la réflexion, à tous les compagnons qui s’impliquent dans les assemblées, indépendamment de l’endroit. Le texte a été rédigé et corrigé précipitamment pour qu’il soit disponible avant la tenue des assemblées de quartiers et villages du 28 mai,

0. Quelques mots pour commencer...

Soyons clairs. Ceux qui signent ce texte sont anars, communistes libertaires, anticapitalistes ou l’étiquette qui vous plaira. C’est-à-dire que nous sommes pour l’abolition du travail salarié et du capital, la destruction de l’état et sa substitution par de nouvelles formes horizontales et fraternelles de vie en commun.
Nous croyons que les moyens pour y arriver doivent être le plus cohérents possibles avec les fins que nous cherchons, et pour autant, nous sommes contre la participation dans les institutions, contre les partis politiques (parlementaires ou non) et les organisations hiérarchiques. Nous parions sur une politique basée sur l’assembléisme, la solidarité, l’aide mutuelle, l’action directe,... Parce que nous sommes convaincus que ces moyens sont les plus efficaces pour nous conduire jusqu’à la révolution.

Si nous disons cela c’est pour éliminer toute suspicion et tracer les orientations (les grandes lignes) autour desquelles s’appuiera notre contribution. Et maintenant, même si nous sommes pour une révolution sociale qui détruise le capitalisme, et l’État, et qui suppose l’abolition des classes sociales (et de tant d’autres choses), cela ne signifie pas que nous pensons que cela peut arriver à courte échéance, du jour au lendemain. Ce que nous exposons ici sont des fins, c’est-à-dire, des situations auxquelles, avec de la chance, nous arriverons après un long parcours et un développement considérable du mouvement révolutionnaire. Penser le contraire ce n’est pas que ce soit utopique, c’est un exercice de délire et d’illusions de l’immédiateté.

Une proposition révolutionnaire doit se concrétiser dans une stratégie à courte échéance, dans une série de propositions pour intervenir dans la réalité qui se rapprochent de situations dans lesquelles se jouent des questions comme l’abolition du travail salarié, l’instauration du communisme libertaire, la révolution sociale,...questions qui à l’heure actuelle, évidement, ne sont pas, même de loin, sur la table. Cette intervention ne peut se limiter à répéter comme un automate la rageuse nécessité de révolution et d’abolir l’État et le capital. Etre anar ne signifie pas être un flic serinant à qui veut bien l’entendre combien l’État est le mal et que l’anarchie c’est bien. Et cependant, à la racine du mouvement du 15 mai, dans ces derniers jours nous avons pu lire sur internet des textes et commentaires proches de ce délire immédiatiste et, ce qui est pire, nous avons entendu des positions de compagnon-es et ami-es glissant vers l’abîme de l’anarco-chapisme (anarco-dandy, privilégiant l’humour plutôt que le sérieux), qui, avec les meilleurs intentions du monde, rejoignent le maximalisme des consignes grandioses, des propositions à longues échéances, etc. Nous savons bien de quoi nous parlons, nous avons tous été dans cette situation et, ce qui est pire nous avons contribué dans de nombreuses occasions à son extension.

Soyons clair, ce texte concède autant de la critique que de l’autocritique, et qu’il nous serve avant tout, pour essayer de ne pas tomber nous-mêmes dans ces pièges. Pour terminer, il faut prendre en compte que ce texte a été écrit rapidement et à toute vitesse, au même rythme que les événements, avec l’objectif qu’il sorte avant le 28, date à laquelle sont appelées des assemblées populaires dans différents quartiers et villages de Madrid, ainsi que cela ne vous surprenne pas que sur certains points se remarque la précipitation.

En résumé, ce texte prétend être une réflexion et une proposition pour rompre avec l’impasse dans laquelle nous avons été ancrés pendant longtemps, une réflexion pour tenter de clarifier de quelle manière nous pouvons apporter et participer à ce qui se passe autour de nous.

1. Le mouvement du 15-M : coordonnées basiques

Ce qui arrive autour de nous est, évidemment le mouvement 15-M, qui la semaine dernière a fait irruption comme un éléphant dans un magasin de porcelaine dans la politique nationale. Que cela nous plaise ou non, que nous le désirions ou non, le mouvement du 15-M a rompu toutes les perspectives et a surpris tout le monde : police nationale, journalistes, les « convoqueurs », les gens courants, les citoyennistes, les gauchistes et bien sur les anars. Au début tout le monde a été pris de court, et à partir de là, toute une série d’essais a été mené avec plus ou moins de chance pour prendre position face au 15-M ou à l’intérieur. Nous n’allons pas tenter d’analyser ou de lister les différentes théories « conspiranoiaques » ou les intoxications qui sont apparus dans son sillage ; ce n’est pas important par rapport à ce que nous avons à dire.

Nous allons essayer d’expliquer ce que nous entendons par coordonnées basiques dans lesquelles se meuvent ce que nous appelons le mouvement du 15-M, tout du moins les plus importantes pour voir si une participation anar ou anticapitaliste est possible. Il est logique que la description soit fragmentaire, partielle et incomplète, cela nous est égal, les choses vont trop rapidement.
La première chose à dire c’est que le mouvement du 15-M est un réel mouvement social et comme tel il est très hétérogène et contradictoire. Il y a de tout et en différentes doses. C’est-à-dire que tout ce qu’on dit ici ne doit pas être pris comme des caractéristiques définitives absolues, sinon plutôt comme des tendances, nuances,...Expressions d’un mouvement en construction dans lequel il y a des luttes, tensions, et un changement continu.

Ceci dit, par sa composition sociale et par les consignes qui s’écoute le plus dans les assemblées et groupes de travail, ainsi que par les opinions publiées constamment sur internet (twitter), on pourrait dire que ce mouvement est principalement citoyenniste et ouvertement démocrate. Ou autrement dit, ce sont ce genre de revendication de réformes politiques et sociales (réforme électorale, démocratie réelle, plus grande participation, critique des partis politiques majoritaires mais pas du système représentatif ou des partis en général...) qui en général regroupe le plus grand nombre de personnes et de mains levées.
Cependant ce contenu s’exprime sous la forme assembléiste, qui rejette toute représentation classique (comme par exemple se convertir en un énième parti politique) et qui renie toute idéologie, symbole ou forme politique déjà connu (des partis jusqu’aux drapeaux républicains en passant par les a cerclés.) Une consigne circule sur twitter « esto no va de izquierdas o derechas, sino de arriba y abajo » (ceci ne va pas de gauche à droite, mais de haut en bas). Pour le moment, le pari est fait sur l’auto-organisation, l’action directe (non-violente) et la désobéissance civile, bien que ces mots magiques ne soient pas utilisés. La non-violence est de fait, un autre des mots d’ordre fondamentaux du 15-M, quelque chose qui est sans aucun doute assumé collectivement sans discussion. Nous parlerons de ce sujet plus loin.

Tout ceci n’enlève pas le fait qu’en son sein on puisse voir clairement une « lutte de pouvoir » entre différentes « factions », organisées ou non. Membres et militants de partis politiques de gauche, membres des mouvements sociaux, libertaires, gens normaux et courants « indignés » qui vont avec leur propre vision du monde,... Tous se battent à l’intérieur à tous les niveaux, depuis l’orientation idéologique ou pratique du mouvement, au contrôle (et dans de nombreux cas, manipulation) des assemblées, commissions,... Dans de nombreux groupes ou commissions, on voit de tout : pertes occasionnelles de procès-verbaux, personnalismes, des personnes qui s’accrochent au rôle de porte- parole, délégués qui taisent certaines choses dans les assemblées générales, commissions qui ne respectent pas les décisions, des petits groupes qui veulent assurer la buvette, etc. Beaucoup de ces comportements sont, c’est sûr, fruits de l’inexpérience et de l’ego ; d’autres, paraissent directement sortis des vieux manuels de manipulation des assemblées. Autour de cette lutte, il y a aussi tous ceux qui traînent par là. Ceux qui s’approchent pour participer, pour écouter, être écouté, apporter de la nourriture ou du matériel, voir ce qui se passe, ou simplement prendre de photos en mode touriste dans sa propre ville. Sous les tentes de Sol on a l’impression d’être dans un grand souk où rien ne se vend ni ne s’achète.

D’un autre côté, un des grands problèmes des campements réside dans la difficulté à y participer pleinement : tout le monde ne peut aller dans le centre tous les jours, ni rester à dormir, ni participer aux commissions, etc. Cela peut favoriser la création de chefs informels, chambres, choses étranges et tournures bizarres, que les gens pas cons vont finir par remarquer, en discuter et agir en conséquence. De fait une possible conséquence du grand poids portée par un petit nombre (ceux qui sont le plus habitués à proposer des activités) c’est la progressive ghettoïsation dont a souffert le campement en fin de semaine. En comparaison avec l’ambiance de rencontre et de protestation des jours les plus intenses (spécialement le vendredi vue la perspective de l’interdiction par la junte électorale centrale.), en fin de semaine, les choses ont perdu leur souffle et on a commencé à noter une ambiance plus ludique et moins de protestation, malgré le fait que les commissions et sous- commissions et groupes de travail continuent à fonctionner. Par moment, Acampadasol semble reproduire le pire et le plus banal du ghetto squat : atelier, concerts, fanfares, cantines, théâtre, clowns, etc., au détriment de ses aspects initiaux, beaucoup plus marqués de protestation, politique et d’ « indignation » (même si c’était limité).

Sur twitter, qui ne l’oublions pas tiens une grande responsabilité dans l’ascension le mouvement du 15-M et du campement de Sol, on note le mécontentement chez beaucoup de gens qui ne voient pas d’un bon œil cette dérive. Un exemple clair de ce mécontentement a eut lieu en fin de semaine dernière au sujet de l’apéro. Le samedi une des assemblées a du partir de Sol à cause du trop grand nombre de gens fortement alcoolisé-es, et au sujet des fanfares, qui le dimanche ont obligés à repousser des assemblées car on ne s’entendait pas à cause du bruit (même si l’on peut dire que les fanfares ont été très suivies, tout comme l’apéro).

Il est évident que le mouvement du 15-M n’est pas une révolution.
Le dernier point que nous voulions ajouter c’est que pour nous, le plus important que nous ayons vu avec l’évident caractère assembléiste et horizontal (avec tous ses défauts) : le changement brutal d’attitude que nous avons pu voir aux alentour de Sol durant toute la semaine. Récapitulons. Après la manifestation très suivie du début, le 15 mai, et spécialement après le travail des premiers campeurs, les gens ont pris massivement nuit après nuit la Puerta del Sol d’une manière qu’aucun d’entre nous n’avait vue auparavant. Les mobilisations contre la guerre même si certaines ont été très massives, n’ont pas eut, même de loin, la continuité, participation, l’attitude et l’ambiance que nous avons vu cette semaine à Sol. C’est comme si soudain, la passivité et le chacun vaque à ses occupations s’étaient rompu autour du km zéro. Distribuer des tracts à Sol et dans ses rues adjacentes est jouissif, les gens viennent t’en demander, et ils les prennent avec un sourire, ils te posent des questions et te remercie...
Les premiers jours si tu parlais en petit groupe, les gens s’approchaient pour écouter et intervenir. Il était normal de voir des gens de tous styles et de toutes tendances discutant en petits groupes. Les groupes de travail et les assemblées générales sont les évènements majeurs, rassemblant entre 500, 600 et 2000 personnes (assises, debout, se serrant pour entendre quelque chose,...) A part cela une ambiance de bonne humeur, de « quelque chose de spécial ». La nuit du vendredi au samedi a été cruciale, quand a commencé la journée de réflexion. Écouter plus de 20 000 personnes crier « nous sommes illégaux » et de s’émerveiller comme un enfant, d’enfreindre la loi. Franchement, c’est impressionnant. Il est certain que cette ambiance intense, de participation et de politique réelle a commencé à décroître à partir de cette nuit là. En partie par la montée du vendredi soir, en partie à cause de la décision de « ne pas faire de politique le samedi et le dimanche, la fin de semaine ayant eu un ton beaucoup plus festif que les jours d’avant. Même ainsi, nous ne nous souvenons pas d’une chose pareille.

2. Ce qui n’est pas en jeu. Une vision stratégique

Ceci étant dit, quel rôle y jouent les anarchistes ? Pour n’importe quel libertaire avec un peu de jugeote, heureusement une majorité, il est évident qu’il est nécessaire être présent, ne serait-ce que pour le sujet. Ce qui n’est pas très clair, c’est ce que nous pouvons faire, ce que nous pouvons apporter et ce que nous pouvons espérer du mouvement 15-M. C’est un questionnement logique, compte tenu de l’hétérogénéité et des contradictions de ce mouvement . Dans cette section nous allons essayer d’exprimer comment et dans quel sens nous imaginons qu’il puisse être intéressant de participer au mouvement. Nous parlons alors de « vision stratégique » parce que c’est la vision générale que nous tenterons de commenter avec des propositions concrètes et quelques considérations tactiques.

La majeure partie du processus qui se développe actuellement au sein du mouvement du 15-M consiste à trouver les lignes directrices et les revendications politiques qui vont le définir. Ce qui a lieu dans les groupes de travail comme dans les commissions. Dans les premiers , il y a principalement des débats et des combats idéologiques. Dans quelques commissions, dans celles ou se concrétise et se résume ces débats, se manifestent les ruses, les manipulations, etc. Pas besoin d’être très malin pour comprendre où est le problème : les commissions comme celles de communication, interne, assemblée et politique sont celles où se rencontrent le plus de politiciens par mètre carré, tandis que dans les commissions infrastructure, alimentation ou respect, ils sont mineurs. Nous ne sommes pas en train de dire qu’il n’y a que cela dans les commissions, mais ce sont des choses qui se font. Nous l’avons parfois constaté ou on nous l’a raconté, et cela nous donne du fil à retordre. Comme expliqué auparavant, les revendications avec les plus d’écho à Acampadasol (lit. campement Sol, nom donné au campement militant sur la Plaza del Sol, centre de Madrid) sont celles de réformes politiques et dans une moindre mesure celle d’ordre social, de grand contenu citoyen : réformes de la loi électorale, loi de responsabilité politique, plus grande participation, loi sur les hypothèques, etc. Les membres et militants des partis de gauche (IU,IA, etc.) et de mouvement sociaux essayent d’emmener le bateau vers la gauche pour que soit assumé-es les revendications de la gauche (sur la rente basique, remise sur la dette extérieure, la nationalisation des banques, etc.) et en face ils ont ceux qui préfère que le mouvement soit le plus neutre possible (par exemple, http://twitpic.com/51lyqa) et se concentre sur le consensodeminimos basique (consensus minimum sur quatre revendications : réforme salarial, lutte contre la corruption, séparation des pouvoirs publics, création de mécanisme de contrôle citoyen). Selon notre opinion, nous croyons que le plus probable, que l’objectif final des uns et des autres, certainement sous la forme d’une Initiative législative populaire, ou de la part d’un parti de gauche comme IU, se présente sous la forme d’une proposition au congrès et que soit demandé son approbation par un référendum populaire. Dans ce contexte, les uns et les autres jouent sur le contenu de cette « proposition » et sur la manière de la construire.

Évidement, les anarchistes sont convaincus que s’ils réussissent, à travers cette action réformiste, à changer quelques uns des « défauts » du système qui énervent le plus la population, cela ne va pas changer l’essentiel. Le problème n’est pas la corruption politique, mais la politique comme sphère séparée de la vie. Le problème n’est pas le manque de transparence des gouvernements ni les banques et les banquiers, mais l’exploitation capitaliste, la grande et la petite.

Ceci dit, nous croyons que, nous les anarchistes, nous ne sommes, ni devrions être dans ce combat, celui des revendications grandiloquentes et la politique de haut vol. Nous ne devrions pas rentrer dans ce jeu, mais voulant être dans les assemblées nous devons assumer le fait que nous devrons supporter et affronter ceci. Le mouvement du 15-M n’est pas un mouvement anarchiste ou anticapitaliste, les revendications anarchistes maximalistes ne sont donc pas à leur place. Il n’y a pas de sens à lutter pour que ces assemblées générales assument des choses comme l’autogestion généralisée, l’abolition des prisons ou simplement la grève général illimités, parce qu’il est évident que les gens qui en font partie ou qui suivent le mouvement ne sont pas en faveur de ces choses. Supposant (et c’est beaucoup supposer) que pour une raison étrange, ou par manigance, s’obtient que l’assemblée générale ou les assemblées de quartiers acceptent et assument quelques unes de ces consignes, le plus probable est que le mouvement 15-M se dégonflera rapidement, perdant une bonne partie de ses appuis et de sa sympathie, et ne resterait qu’un étrange cocktail populaire de militants gauchistes, citoyennistes, communistes et anarchistes. Quelque chose où nous n’aurions jamais voulu être. En politique il existe un dicton « voter avec ses pieds », qui signifie que quand tu n’aimes pas la gestion d’un lieu, tu vas de l’autre côté. Quelques chose de similaire se passe dans toutes les assemblées, il y a beaucoup de gens qui quand ils n’aiment pas quelques chose ou se sentent incommodés, se taisent, hochent la tête et arrêtent de s’exprimer, sans refléter son mécontentement.

Nous sommes conscients de la représentativité des commissions face aux personnes qui intègrent la mobilisation. Nous l’avons constaté clairement dans la Commission Politique, qui au moment le plus haut a pu atteindre 350 personnes, avec ses sous-commissions. Et même s’il est clair que les assemblées sont ouvertes et que tous le monde peut y participer, la commissions politique s’est vu séparer en deux avec deux postulats bien différents : « réformiste » et « révolutionnaire », entre ceux qui exigent et légitiment les structures de pouvoir et avec de petites ou grandes réformes et ceux qui veulent marquer une feuille de route en rupture avec le modèle imposé par le capitalisme.
Ceci est une grave erreur parce que les mesures révolutionnaires ou radicales peuvent aussi bien être prises à court ou long terme, seulement il faut tenir compte du contexte actuel et des avancements que nous voulons mener. Pour donner un exemple, dans la Commission à Court Terme se sont posé la question du changement de la constitution espagnole, et dans la Commission à Long Terme des consensus comme l’utilisation de la grève générale (comme outils de lutte). Nous ne croyons pas qu’un changement de la constitution (qui nécessite l’approbation des 3⁄4 des députés du Congrès) soit faisable à court terme tandis qu’une grève générale si.

Nous croyons nécessaire une réflexion sur nos implications dans les commissions pour essayer qu’elles soient efficaces et que le gâchis d’énergie soit mieux canalisé. Il ne sert à rien que 200 personnes avec une idéologie « similaire » se rassemble et empreinte une posture qui à la fois ne peut pas être assumée dans ce mouvement mais aussi qui laissent les mesures à court terme être une plaidoirie en faveur de l’état providence... Dans cette réflexion nous devrions faire une autocritique et poser, de forme immédiate, des propositions à court et long terme, que nous puissions assumer et qui nous fassent avancer, pas à pas vers une vraie révolution sociale, sinon nous allons passer à côté. Nous devons montrer une certaine intelligence et nous ajouter de forme réelle au rêve de changement qui respire ces jours-ci à la Puerta del Sol, et voir si avec tout le monde nous réussissons que ces changement aillent un peu plus loin que quatre arrangements de façades de la démocratie.
Alors quelles autres options avons-nous ?

Certainement que beaucoup se sont demandés, même sans se rendre compte, ce que nous pouvions atténuer de notre discours, c’est-à-dire pour édulcorer nos propositions. Par exemple, jouer une intéressante confusion sémantique qui parle de « démocratie directe » plutôt que d’ « anarchie », ou encore supporter ce que l’on doit supporter pour maintenir l’histoire dans le temps, etc.
Une autre option est simplement abandonner cette « buvette » réformiste. Mais comme nous le voyons, ceci nous paraît absurde. Tout simplement parce que, ni actuellement ni au long de l’histoire, les mouvements révolutionnaires jaillisse du néant ou surgissent seuls, mais que ce sont de les propres révolutionnaires et les événements, qui avec des efforts, dès fois, réussissent a ce que des mouvements sociaux ne soient plus réservés aux partis, aux profiteurs, etc.

Bien que nous parlerons de ceci plus loin, laissons clair que notre idées n’est pas de convertir le mouvement 15-M en un « mouvement révolutionnaire » de masse, une comédie qui laisse présager que l’anarchie viendra demain si nous le souhaitons très fort. Nous ne sommes pas non plus en train de dire que nous devrions y être jusqu’à la fin. Nous avons les idées assez claires, si nous ne faisons pas les choses bien, à un moment donnée nous devrons partir, ou probablement qu’ils nous vireront. Mais il paraît évident que ce moment n’est pas encore arrivé et qu’il y a toujours une opportunité d’apport de notre part dans cette histoire, surtout suite à l’appel d’assemblée populaire dans les quartiers.
Nous ne sommes pas des illuminés, et si certains ont la vue brouillée et ont laissé leur occupations pour « la révolution » (plutôt marketing), nous sommes des anarchistes qui ont vu une opportunité, la première depuis des années, de participer dans un mouvement réelle de taille considérable.

3. Pour une participation anarchiste pratique et concrète

Selon notre opinion, ce qui est en jeu dans le mouvement 15M, c’est réussir a ce qu’il soit un point de départ capable d’activé des luttes quotidiennes avec des aspects concrets et basiques. Une lutte qui s’organise horizontalement, en assemblée, qui pratique l’action directe et la participation directe, la solidarité, etc., ce qui fait partie des bases du mouvement 15-M. Que les assemblées ne soient pas des lieux ou demander (a qui ? comment ?)des lois, réformes er référendums (lesquels ?) mais qu’ils soient des espaces où les gens peuvent débattre sur leurs propre problèmes et y cherchent des solutions et se mettent d’accord sur les moyens d’y parvenir par eux-mêmes. Que les assemblées se convertissent en lieux de rencontres, de communications et participations. Des petits noyaux solidaires de résistances.
Il est clair qu’une partie importante de ce processus est que les problèmes et solutions vont être traités, mais quel contenu va être exprimé dans ces assemblées ? C’est une autre tâche que nous pourrions nous imposer : essayer que les thèmes à traiter en assemblée soient des questions de classe, de genre, etc. Que l’on approfondisse, depuis la pratique, la critique de l’état, du capital et du salariat.

Dans l’état des choses et comme nous le voyons, essayer que les gens adopte notre discours n’est pas notre objectif et ne devrait jamais l’être. Nous n’irons pas rabâcher des consignes anarchistes. Des consignes qui dans ce cas peuvent ne pas être à leur place. Non pas car elles n’ont aucun sens ou parce qu’elles sont fausses, mais parce qu’elles ne sont pas sur la même « onde » que ce qui se déroule en ce moment. C’est comme parler de foot avec quelqu’un et qu’un troisième larron arrive et parle du cinéma iranien. Ceci signifierait qu’on devrait abandonner l’anarchisme et passer à la démocratie ? Logiquement non. Nous devons nous cacher ? Non. Mais a contrario, devons nous exhiber le fait que l’on soit anarchiste ? Pour nous, il n’y a aucun sens à aller plus loin que « être anarchiste ». Appeler quelqu’un anarchiste ne signifie rien en soit, ce n’est ni mauvais ni bon. Pour notre part, il s’agit de ne pas se cacher mais pas non plus de nous exhiber, mais de pratiquer l’anarchisme dans un contexte déterminé. Par exemple, de tous les slogans que quelques copains ont chantés les premiers jours Plaza del Sol, seul quelque uns ont été repris par d’autres personnes hors de notre cercle : « Le peuple uni fonctionne sans parti » et « rrrA, anti, anticapitalista ». Pourquoi ? Non pas parce que ce sont de grands et bons slogans, et non plus parce que ce sont de slogans ingénieux. Mais nous croyons qu’ils le sont en cet endroit à ce moment car une partie des gens se sentait touchée, se reconnaissait. Que cela nous plaise ou non, les gens de Sol n’était pas contre la police, ni contre la destruction de l’Etat... le travail à faire est de fond. Si nous nous limitons à chanter ou à proposer dans les assemblée des consignes décontextualisées, ce que nous faisons, c’est tomber dans la propagande pure et dure, dans le pire sens du mot et donc, nous ne participons plus... Dans beaucoup d’occasions, on est emporté par l’inertie et au lieu de penser ce que l’on peut et veut dire, on finit par brailler des choses simpliste comme « la lutte a tout prix », « du nord au sud et de l’est à l’ouest abattons l’état », « mort à l’état », etc. Un discours un peu hors propos et pour le coup inefficace. Dans la manif du 15M, le bloc libertaire cria des slogans (bon ou mauvais) critiques sur tout les thèmes (démocratie, capitalisme, crise, etc.), et des vrai remix du ghetto (liberté pour Patricia, police assassine), on était retombé dans l’autoréférence, nous nous parlions à nous même... De faite, à part nous, dans la manif, personne ne savait qui était Patricia... Tout a un moment et un lieu, et si nous ne savons pas adapter nos discours, ça ne nous aidera pas. Et nous ne croyons pas qu’adapter le discours c’est le rabaisser, mais il faut le rendre accessible et savoir garder les technicismes pour ses collègues. Il faut accorder le message, le code, au récepteur. Donner son opinion « dans notre langue, dans notre dialecte », plein de termes techniques et de jeux de mots, pratique pour parler entre nous, mais qui génèrent des barrières et des confusions auprès des autres.

4. Quelques objectifs et axes d’actions

Cette proposition de participer depuis la pratique a plusieurs objectifs. Le plus évident étant celui d’améliorer nos conditions de survie dans ce monde capitaliste. Si certains qualifieront ceci de réformisme, pour nous il s’agit simplement d’une nécessité. Un autre objectif est d’être capable de signaler et de déconstruire, durant tout le processus, toutes les contradictions et misères du capitalisme, de la démocratie et des syndicats, etc. Et ceci sans discours élaborés et préfabriqués, mais à travers des débats et des réflexions, quelque chose de beaucoup plus compliqué et laborieux que simplement éditer et distribuer des livres écrits à d’autres moments. Un autre objectif serait d’étendre une culture de lutte dans la population, d’étendre ce sentiment que des choses peuvent s’obtenir collectivement par la lutte, les victimes des problèmes trouvant eux-mêmes des solutions, grâce a la solidarité et l’aide mutuelle, sans faire appel à des professionnels. Un sentiment de « aujourd’hui pour toi, demain pour moi » afin d’effacer le « chacun pour soi » de la société actuelle. Enfin, si quelque chose nous est bien apparu clair ses dernières semaines c’est bien que les anarchistes avons beaucoup à apporter, mais nous avons aussi beaucoup à apprendre, autant des gens que nous rencontrerons en chemin que des situations auquel nous devrons nous confronter. Participer à l’assemblée sera l’occasion parfaite de clarifier notre position, notre posture et la manière de communiquer avec les autres. Et ceci est normal. C’est la meilleure manière de communiquer avec les autres et de nous rendre compte de nos incohérences. Il s’agira de savoir expliquer notre position à ceux qui ne la connaissent/comprennent pas.

Nous croyons sincèrement que cela peut être une bonne manière de sortir du piège d’une intervention uniquement idéologique, qui prétend qu’à long terme devraient s’approuver des principes et objectifs spécifiquement anarchistes. Des choses que nous avons déjà dites, ne pourront pas être à l’ordre du jour, que ce soit aujourd’hui ou demain. Nous croyons que cela peut être une manière de rendre évident et d’éviter les luttes de pouvoirs internes qui auront lieu dans les assemblées sur des questions de haut niveau (lois, etc.) sans pour autant arrêter de participer à ce mouvement qui peut aller encore plus loin. Nous mettre dans une guerre épuisante pour que nos propositions ne soit jamais retenues et pour que nous nous affrontions continuellement et ouvertement avec tous les gauchistes, citoyens et gens normaux qui veulent seulement un peu de changement n’en vaut pas la peine. Nous devons être conscient à tout moment d’où nous sommes et jusqu’où nous pouvons aller. Si nous ne faisons pas ce travail d’analyse et de réflexion continuellement nous allons nous mettre des battons dans les roues et dégager une forte frustration.
Évidement, en participant au mouvement 15-M, nous allons toujours courir le risque de faire le sale boulot de la gauche citoyenne. Nous croyons au jour d’aujourd’hui, du point de vue de notre faible pouvoir de convocation et rassemblement, que ce risque sera toujours présent, dans n’importe laquelle des mobilisations auxquelles nous participons (grève, conflits anti-développement, etc.) C’est un risque qui ne peut pas se prévoir, et surement que c’est quelque chose qui, jusqu’à un certain point, ne peut pas s’éviter. L’unique chose que nous pouvons faire est de rester attentif, ne pas nous laisser emballer par l’émotion et essayer d’évaluer à quel moment notre participation se limite à être main d’œuvre des autres. C’est dans ces moments là qu’il faut abandonner le navire.

A parte : Pour finir cette section les auteurs ont vu nécessaire de donner les grandes lignes thématiques qu’ils estiment prioritaires et comment les traiter. Dans une nécessités d’urgence et aussi parce qu’elles peuvent relever de l’évidence pour beaucoup de militants anarchistes, elles ont été réduites à l’essentiel.

Logement : auto organisation pour résister aux expulsions et lutter contre le lobbying immobilier. Utiliser l’action directe pour mettre la pression aux propriétaires et les succursales bancaires. Rendre visible les conflits urbains en occupant, en mettant des banderoles aux fenêtres des logements concernés.

Travail/chômage : Profiter de l’exemple de l’assemblée de la Plaza del Sol pour vraiment parler des conflits dans le monde du travail, la réalité du chômage. Proposer des aides directes aux salariés concernés (caisse de grèves) et allez collectivement sur les lieux de travail.

Migration : Essayer d’impliquer les immigrants dans cette luttes où ils sont sous représentés alors qu’ils sont les premier concernés des mesures sécuritaires. Sensibiliser les gens sur l’existence des camps de rétentions.

Santé : Essayer d’impliquer les salariés et les « usu-souffrants » de la santé publique dans une lutte contre la dégradation des services de santé et leur accessibilité. Éviter que les uns s’en prennent aux autres (« c’est la faute des travailleur qui travaillent peu et cotisent peu », « c’est la faute des vieux qui nous coûtent cher », etc.)

Genre : Contrer la vague actuelle antiféministe dans la société, et qui est aussi apparue sur les camps. Lutte générale contre la violence machiste.

Organisation : Essayer d’améliorer le fonctionnement des assemblées, lutter pour une véritable horizontalité, éviter la formation de groupes de spécialistes avec leurs représentants perpétuels.

Ces thèmes et propositions sont clairement limités, résultats de l’urgence et de notre propre inexpérience dans ce type de mouvement. Il faut les améliorer, les affiner. Il n’y a pas réellement d’ordre prioritaire, mais il faut faire un peu de tout, peu à peu, partir de peu pour aller jusqu’au bout d’une liste qui sera de toute façon questionné/amélioré au fur et à mesure.

5. Assemblées de quartier : proximités et espérances

Dans sa majorité ce texte est écrit avec l’idée qu’il soit sorti avant les assemblées populaires des quartiers qui ont été appelées le 28 mai, de là l’urgence, la préci pitation, et les erreurs qu’il y aura.
L’extension aux quartiers est une extension logique parce que le campement de Sol n’est pas durable à longue échéance et parce que par ses caractéristiques induisent une participation beaucoup plus limitée, comme nous l’avons déjà commenté. En parlant avec de nombreux compagnon-es, nous avons vu que certains d’entre eux ont de l’espoir avec ces assemblées de quartier. L’idée est « il n’y a plus rien à faire à Sol, allons dans les quartiers. » Ne nous mentons pas, si le mouvement du 15-M poursuit sa lancée, les quartiers vont être des Sol en plus petits, avec tous ses bons côtés mais aussi avec tous ses défauts, notamment avec les militant s des partis politiques qui iront à la pêche, les citoyennistes, etc. Dans quelques quartiers et village du sud de Madrid, de fait, la proportion de militants peut même être plus importante que celle que nous avons à Sol. Il se peut que le « terrain de jeux » soit plus petit et moins écrasant, mais l’hétérogénéité, les problèmes, contradictions et conflits vont être les mêmes voire pires.
Nous croyons que les militants gauchistes, comme les personnes qui sont en faveur des quatre réformes basiques vont essayer de transformer les assemblées populaires en foyers pour faire la promotion des consignes et revendications pour lesquelles ils se sont battus à Sol. Ils se chargeront de collecter des signatures et de faire la promotion des mobilisations et d’ajouter des soutiens dans les quartiers (associations de voisins, de commerçants,...) pour leur stratégie à moyen terme de mener à bien les changements légaux. Pas beaucoup plus. Il se peut que les citoyennistes essaient de pousser un peu plus sur des problèmes spécifiques des quartiers, en établissant des liens avec les associations de voisins qui peuvent, favorisant leur locaux, centres sociaux et bureaux des droits sociaux où il y en a.
Nous avons dit que nous croyons que cela peut-être une chose intéressante de participer dans ces assemblées, nous ne nous étendrons pas là-dessus. Nous voulons juste préciser que des thèmes et propositions n’auront peut être pas les mêmes portées dans tout les quartiers et villages (par exemples dans certaines zones les arrestations massives d’étrangers sont plus fréquentes que dans d’autres, le système de santé est pire dans certains endroits.) Il faudra voir ce qui est le plus important et nécessaire dans chaque cas concret, il n’y a pas de formule magique.

6. Questions tactiques

Le texte va en s’élargissant et nous voulons le refermer par quelques réflexions. Nous essaierons d’être brefs sur certains aspects que nous avons vus, et que nous continuerons à voir ces prochains jours.

Violence/non-violence : Comme nous l’avons dit en le décrivant, le rejet de la violence est un point basique sur lequel repose le mouvement du 15-M. Les précurseurs (démocratie réelle maintenant) se sont chargés de l’exprimer de la manière la plus dégueulasse possible : se démarquant d’incidents après la manifestation et signalant à qui ils étaient dus. Ce n’est pas non plus très étrange, vu le bombardement médiatique sur ce sujet ces dernières années. A travers la police, et des médias comme la Razon ou Publico qui n’ont guère eu de scrupules à alerter sur les « 400 antisystèmes » qui ont essayé de contrôler et/ou faire éclater le mouvement. Une semaine plus tard, rien de rien. Il semble que la grande majorité des anars, nous ayons assumé (avec plus ou moins de problèmes) qu’il ne se passera rien parce que quelques uns se déclarent non-violent. La violence ou l’auto-défense est une question qui se posera toujours mais qui est totalement secondaire. Si nous arrêtons de la considérer comme quelque chose qui peut être utile ou non, bénéfique ou préjudiciable selon les circonstances et la transformons en quelque chose à laquelle nous ne renonço ns pas, nous entrons dans un cirque ou le 15-M chantera les bienfaits de la violence et sera à l’ouest. Aujourd’hui c’est la non-violence, un autre jour ce sera autre chose.

Assembléarisme : On entend beaucoup que les assemblées ne sont pas de vraies assemblées, qu’il n’y a pas d’horizontalité réelle, que quelques-uns essaient de la manipuler, etc. C’est logique parce que ce sont de vraies assemblées, avec des gens normaux au milieu d’une bataille entre différents secteurs pour « contrôler » (consciemment ou non) la situation. L’horizontalité, l’égalité, l’efficacité des assemblées, la communication des assemblées, ce ne sont pas des choses qui viennent de soit parce que des gens se réunissent sur une place et parlent entre eux. Il faut se battre face aux manipulateurs, aux politiques et intoxicateurs : il faut construire ça après des années de démobilisation, de grégarisme et de délégation quotidienne. Si nous n’avons pas ça en tête, nous sommes aux mains de ceux qui veulent que les assemblées soient les courroies de transmissions se limitant à approuver ou accepter les propositions cuisinées à la maison. Lutter contre des monstres : Participer dans des assemblées où des gens sont disposés à faire le nécessaire (manipuler, mentir, etc.) pour que leurs histoires soit entendue est très compliqué et frustrant. Tous ceux qui sont passés par ces moments savent que c’est difficile à avaler.

Premièrement parce ce qu’on doit le supporter, deuxièmement parce que tout le monde ne peut pas le voir. Et si tu lève pour le dénoncer, c’est sur toi que se portent les suspicions. Troisièmement, on finit par confondre ce qui est de simples erreurs, des essais de manipulations (frôlant la paranoïa). Enfin, parce que quand tu te rends compte de cela, tu finis par, ou tu as l’impression de devoir, faire des choses similaires aux leurs. Ces jours-ci nous avons entendu des choses comme « accaparer les commissions », « prendre les postes de pouvoirs dans les assemblées », « disperser les assemblées, « faire comme si nous ne nous connaissions pas » et on en passe, de la part de compagnons envers lesquels nous n’avons aucun doute ou suspicion, et par conséquent envers qui nous n’émettront pas de jugement. Ces situations sont comme ça, la frustration et la colère contre la manipulation et le fait de te retrouver le couteau sous la gorge te font dire et faire des choses du même style. Contre cela il n’y a pas d’autre remède qu’être constamment attentif, faire de l’autocritique et savoir critiquer et encaisser la critique, sans accusations hystériques ou victimisation stupide. Et aussi assumer que des fois, on va se salir les mains que nous le voulions ou non. Cela se passe dans les meilleurs des familles...

« N’ai pas peur, va seulement de l’avant et joue » Ch. Parker : En lien avec ce qui vient d’être dit, il faut être conscient que participer au 15-M c’est entrer dans un territoire inconnu pour la majeure partie d’entre nous. Nous assumons le fait que nous allons commettre des erreurs. Les anarchistes, ni ne sommes, ni ne voulons être parfait, nous avons tout le droit du monde de nous tromper. Nous résigner d’agir par peur de nous transformer en réformiste, ou pire, que quelqu’un te taxe de réformiste ou d’avant-gardiste et aussi absurde que de renoncer à penser par peur de se tromper.

Avant-gardisme anarchiste : Deux mots qui juxtaposés peuvent paraître contradictoire mais qui ne le sont pourtant pas. Quelques courants marxistes se considèrent et se vantent d’être avant-gardistes même si ce n’est pas pour autant qu’on leur prête attention. En tant qu’anarchistes nous refusons de nous convertir en avant-garde. S’il s’agit d’aller plus vite que le rythme des événements, nous courrons le risque de nous dissocier de plus en plus des autres jusqu’à rester seuls, loin de la réalité. Et ce ci ne t’assure pas d’être « en avance », mais par contre il est possible d’avoir pris un mauvais chemin. Nous ne voulons pas dire aux gens ce qui doit ou qui ne doit pas être fait sur la base d’une meilleure connaissance de quelconque livre sacré, mais cela n’explique pas qu’en certaines occasions nous nous croyons meilleur-es que le reste et que nous pensions qu’ils devraient « suivre notre exemple », et spécialement quand nous participons à ce type de mouvement.
Symbolique et dialectique : Pour que notre participation soit efficace et que nous puissions construire collectivement quelque chose qui en vaille la peine, il est nécessaire que nous mettions de côté toute la symbolique, les codes, les mots fétiches et tout le merchandising propre à notre mouvement-ghetto. Pareil que ce que nous commentions plus haut avec le thème du discours. Ceci ne signifie pas rabaisser notre discours et manipuler les gens, mais plutôt abandonner les mots magiques et les idées fortes que l’on à tendance à utiliser. Des concepts comme l’abstention active, action directe, appui mutuel, révolution, etc., n’ont pas à être compris dès la première fois par des individus non familiarisés à leurs usages.

Il ne sert à rien de s’étiqueter. Il est plus utile d’essayer d’expliquer dans un langage simple, sans intellectualisme ni technicismes anarchistes. Ceci est d’ailleurs aussi valable pour l’esthétique de la propagande, qui a tendance à être tant uniforme qu’elle est éloignée de la majorité de la population. Un exemple clair est le problème que l’on a eu avec le A cerclé à la Puerta del Sol. Comme aucun symbole ni drapeau n’était permis, des gens de l’assemblée, à tort ou à raison, ont évoqué que les A cerclés n’avaient pas non plus leur place ici. En tenant compte que pour les anarchistes le A cerclé n’est pas un signe politique mais son contraire, certains l’ont très mal pris. D’autres, donnant l’exemple que l’horizontalité et le consensus n’étaient souvent respecté que quand cela les arrangeaient, ont continué d’utiliser des pancartes et slogans peints. Dans tous les cas, nous devrions réfléchir si tous ça est notre faute, de ne pas avoir su faire voir durant toutes ses années que nous ne sommes pas les mêmes que tous les autres, bien que, en notre faveur il faut dire que la décision de laisser les A en dehors fut discutée. Le sujet, ici, est que le A cerclé c’est le moins important, l’important sont les messages que nous avons à donner, et si nous devons arrêter de les porter, cela ne nous affecte pas. Au final, comme disais avec raison un copain l’autre jour, « nous n’avons rien à vendre ». Pire que l’affaire des A cerclés, ce qui peut par contre nous faire mal, c’est le cas du féminisme, qui a pu rencontrer certaines oppositions, tant sur les camps que sur twitter, avec des gestes et des paroles hors de propos.

7. La fin, enfin

Nous terminons enfin faisant une dernière réflexion. Le mouvement 15-M a eu un début et aura une fin. En étant réalistes et en tenant compte que nous sommes peu nombreux (les anarchistes) et de notre inexpérience, il est assez probables que nous ne soyons pas déterminants dans le développement de cette mobilisation. Nous avons un peu de marge et de capacité pour agir en son sein, afin qu’il ne se limite pas à un mouvement réformiste. L’idée et d’aller un peu plus loin, même si nous n’avons pas beaucoup d’espoir que ce mouvement change radicalement d’orientation. Si le 15-M réussit ses objectifs, cela se traduira par une réforme du système démocratique ce qui pourrait signifier un renforcement temporaire de l’état démocratique. Ceci est le principal motif pour ne pas rester chez soi. Nous croyons qu’il faut y être car à long terme, notre action peut être bénéfique à l’anticapitalisme et l’anarchisme.

En premier lieu, nous croyons que le système démocratique et le capital sont comme ils ont, et que tous les partis, dans le fond, sont similaires. Si le mouvement 15M prospère et réussit à réformer le système démocratique, en terminant avec le « bipartisme » et la « partitocratie », avec le temps, les partis minoritaires finiront par rester en évidence, à la traine, parce que le système démocratique et le capitalisme sont ainsi.

En second lieu, il y a eu chose positive dans tout cela, quoi qu’il se passe. Cela fait un mois que le sentiment général est « quel merdier tout ça, mais que pouvons-nous faire ? Nous ne pouvons rien faire, etc. » Aujourd’hui il y a assez de gens qui croient pouvoir changer la loi électorale, et qu’il est légitime de ne pas écouter ce que dit la Junta electoral quand c’est injuste. Il y a donc une avancée. Si le mouvement obtient une quelconque réussite en fonctionnant en assemblée, indépendamment du résultat final, c’est une base à exploiter. En Espagne il ne s’est rien gagné depuis longtemps : L’entrée dans l’OTAN, rien, le PRESTIGE, rien, la guerre en Irak, rien, les luttes universitaires, rien... De fait, l’unique sentiment de victoire que des gens ont assumés est quand le PSOE (PS espagnol) a battu le PP (UMP espagnol et plus à droite encore) après les attentats du 11 mai. Et cela c’est fait en votant ! Ce qui renforça les illusions démocratiques...

En troisième lieu, le mouvement 15M à réussi sortir dans la rue et les pousser à parler collectivement et publiquement de politique, de problèmes sociaux qui les entourent. Cela faisait longtemps qu’on ne l’avait pas vu. Même si la majorité des discussions tourne autour de réformes, de changement minimum, mais comme nous disions auparavant, c’est un début. Cela a ouvert une brèche dans « ne t’occupe pas de la politique », le « désenchantement » et le « on peut rien faire », les trois petits cadeaux que le franquisme et la transition démocratique nous ont laissé. Nous critiquons les gens quand ils restent chez eux, mais quand ils sortent dans la rue nous les critiquons car ils ne demandent pas la révolution sociale. Ceci n’a pas de sens...

Si quelque chose est obtenu, nous croyons qu’à l’avenir il sera plus facile de convaincre les gens de descendre dans la rue. Il sera plus facile de remettre en route des assemblées. Nous pouvons espérer que les grèves soient plus faciles à mettre en place, détruire les plans urbanistiques, etc. Il est donc bien évident que si les seules réussites s’obtiennent exclusivement à travers de manœuvres politiques, de votes et de référendums, etc. (chose improbable s’il n’y a pas la pression de la rue), l’unique chose qui va sortir renforcée, c’est le système démocratique. Là est la question, et c’est la que nous devons être, nous les anarchistes.

Nous verrons comment termine tout cela, mais le mouvement anarchiste sortira renforcé si ses pratiques, sa forme d’affronter la réalité et quelques uns de ses points de vue se développent et prennent racines dans l’idéologie collective. Le mouvement anarchiste sera plus fort si notre participation dans le mouvement 15M se traduit, après critique, autocritique et analyse publique, dans de nouvelles expériences collectives. Il est peu probable que nos objectifs à long terme croissent significativement au niveau social après le 15M, indépendamment des gens que nous convaincrons quant aux processus de lutte. Cette lutte doit prendre d’autres chemins, par le travail constant d’ouvrir des locaux, d’éditer du matériel, d’analyser, d’organiser de journées de rencontres, des débats, etc., qu’en aucun cas nous devrions abandonner seulement pour être dans le 15-M.

P.-S.

Ce texte a été écrit fin mai par des anarchistes madrilènes et a été traduit par anarchistes caennais-es-. Il est important de prendre en compte que ce texte traite uniquement de la situation à Madrid, suite à l’occupation de la Puerta del Sol par le mouvement au nom changeant (democracia real ya, 15-M, AcampadaSol, etc.)

La traduction s’est aussi réalisée dans une relative urgence, au cas où une situation similaire se développerait en France. Donc excusez-nous d’avance s’il reste des coquilles, fautes ou si certaines phrases ont encore une structure trop hispaniste. Cette version est un premier jet et on a essayé de faire de notre mieux.

Dans les respects des auteurs, il convient de préciser que, pour un gain de temps, quelques petites libertés ont été prises. Certains paragraphes, certaines phrases jugées répétitives ou « plus qu’évidentes » ont été sautées. Au total, le texte a été écourté d’environ une page. Il est probable que dans quelques semaines vous trouviez une traduction définitive et peaufiné (sans les suppressions, totalement féminisé, sans fautes, etc.) de ce texte sur le site du CATS caen : http://ablogm.com/cats/

Bonne lecture

Source : Des anars caennais-es [Madrid] Des anarchistes et le mouvement du 15-M - OCL - Organisation Communiste Libertaire

 

 

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20 décembre 2011 2 20 /12 /décembre /2011 10:42

 

La bulle spéculative de la biologisation de la santé mentale
Dans son livre "Mes Philosophes" p141, Edgar Morin écrit qu’on n'a toujours pas pris conscience de l'ampleur du message qu'Ivan Illich nous a adressé dès le début des années 70.
Il insiste particulièrement sur les dégradations psychiques regulièrement imputées à des problématiques privées mais demeurent invisibles à la conscience politique. 
La réponse au mal-être psychique est pour chacun d'ordre médical: somnifères, antidépresseurs, psychothérapies, psychanalyses, gourous, mais n'est toujours pas perçu comme un effet de civilisation.
En 2010, il a fallu 27 suicides et 16 tentatives chez France Télécom pour que les méthodes de management soient incriminées et que la direction consente à revoir l’organisation pathogène qu’elle a patiemment mise en place
Ivan Illich indiquait clairement que le mal-être psychique accompagne les progrès du bien-être matériel, qui finalement produit autant de maux que de bienfaits. Il pointait la dégradation intérieure de nos existences sous les effets de l'hyperspécialisation, de la mécanisation, du mercantilisme généralisé.
Pendant toutes ces années, la psychiatrie biologique a pris un grand ascendant sur le traitement des troubles mentaux. (A titre d'illustration dans le domaine de médecine de ville, 60 à 70 millions de boites d'antidépresseurs sont vendus par an dans les pharmacies françaises ref p.58) or, après des années d’annonces prometteuses, le bilan apparaît limité et pour le moins discutable.
François Gonon, neurobiologiste, directeur de recherche CNRS à l’institut des maladies neuro dégénératives à l’université de Bordeaux revient sur la biologisation de la santé mentale, tant du côté de la prise en charge des patients qu’en ce qui concerne les critiques formulées à l’encontre des autres méthodes psychiatriques. Lire : La psychiatrie biologique: une bulle spéculative?  par François Gonon, (Revue Esprit nov 2011)
Source ; Rhizomes
Petit commentaire personnel : et que dire quand la mécanisation du monde ne s'accompagne plus de bien-être matériel, que l'espace public (et privé) s'apparente toujours d'avantage à l'univers carcéral. Et que, certains le savent d'expérience ou par ouï dire, sans les divers anesthésiants de la conscience, dans les prisons ce serait l'émeute permanente.... et dans nos rues ? Anne

 

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20 décembre 2011 2 20 /12 /décembre /2011 10:05

 

 

 

Petites fourmis de l’information, imperturbablement, nous déplaçons les montagnes de bêtises pierre par pierre, caillou par caillou ; vidons la mer de la désinformation à la petite cuiller. Dérisoires nous faisons face à la tempête qu’annonce les bruits de bottes, pas cadencé, la peste brune est de retour ; nous déversons nos seaux de sables pour ériger des diguettes contre le tsunami de la misère qui vient.

Nous sommes les 1 pour 1000, les 1 pour 10 000.

Sans nous décourager, nous posons les fondations d’un monde plus doux qui n’adviendra peut-être jamais.

Et pourtant à la question : que faire ? , je n’ai qu’une réponse à donner, unique, immédiate et sans conteste : Continuer ! (je laisse le lien malgré la censure sur ce de texte d'un commentaire que j'avais laissé et qui était plutôt anodin, ceci (la censure) explique peut-être cela, (le peu de fréquentation du blog))

Et rire de bon coeur  parfois  :  Le blogueur soulagé

 

Merci Nomind, Les Dernières Nouvelles du Monde pour l'éclat de rire matinal et merci à des pas perdus pour son billet "Que faire ?" qui m'épargne d'avoir à en écrire un similaire sur le même thème

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20 décembre 2011 2 20 /12 /décembre /2011 09:08

 

Rimbaud
Rimbaud par Verlaine dans une lettre à Delahaye, 26 octobre 1875.
Du livre Passion Rimbaud, Claude Jeancolas.

spacePitoyable frère ! Que d'atroces veillées je lui dus ! "Je ne me saisissais pas fervemment de cette entreprise. Je m'étais joué de son infirmité. Par ma faute nous retournerions en exil, en esclavage". Il me supposait un guignon et une innocence très bizarres, et il ajoutait des raisons inquiétantes.

Je répondais en ricanant à ce satanique docteur, et finissais par gagner la fenêtre. Je créais, par delà la campagne traversée par des bandes de musique rare, les fantômes du futur luxe nocturne.

Après cette distraction vaguement hygiénique, je m'étendais sur une paillasse. Et, presque chaque nuit, aussitôt endormi, le pauvre frère se levait, la bouche pourrie, les yeux arrachés, - tel qu'il se rêvait ! - et me tirait dans la salle en hurlant son songe de chagrin idiot.

J'avais en effet, en toute sincérité d'esprit, pris l'engagement de le rendre à son état primitif de fils du soleil, - et nous errions, nourris du vin des cavernes et du biscuit de la route, moi pressé de trouver le lieu et la formule.

 

 

Source : Vagabonds : Arthur Rimbaud - Illuminations

Autres poèmes vagabonds: Poèmes, chansons et ballades de vagabond

 

Vagabonder :aller au hasard, à l'aventure


VAGABONDER : Définition de VAGABONDER

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19 décembre 2011 1 19 /12 /décembre /2011 23:17

 

Réveille-toi petite Europe, le monde de demain, non aligné, multipolaire se construit par-dessus ta tête d'autruche enfoncée dans les sables mouvants de l'Occident. Europe inféodée retrouve ton honneur, les valeurs qui font de toi le berceau abandonné d'un monde de liberté. L'Amérique Latine nous donne l'exemple... Resteras-tu vassale des assassins du monde ou vas-tu enfin t'ouvrir à ce monde nouveau qui se construit en dehors de toi. C'est l'avenir de tes enfants qui est en jeu.

 

Angel GUERRA CABRERA


Le Sommet constitutif de la Communauté des États d’Amérique latine et de la Caraïbe (Celac), célébré à Caracas les 2 et 3 décembre, est un événement d’une indiscutable dimension historique. L’on peut dans un cas pareil utiliser ce qualificatif sans avoir peur d’exagérer. La réunion a dépassé les expectatives les plus optimistes grâce à l’esprit démocratique avec lequel celle-ci a été préparée par les amphitryons vénézuéliens en consultation permanente avec les autres gouvernements, à l’ambiance de fraternité dans laquelle elle s’est développée, à l’importance du contenu des documents fondateurs qui regorgent d’un esprit et d’un lexique émancipateurs, indépendants et latino-américanistes. A partir de maintenant l’Amérique latine et la Caraïbe s’exprimeront avec leur propre voix au sein du concert international et multipolaire des nations, accéléré par la débâcle du capitalisme néolibéral et les guerres d’agression échouées de Washington.

 

Bien qu’au sein de la Celac existent des nations ayant des politiques néolibérales et d’autres qui la questionnent frontalement, le sommet marque la rupture de la région avec le Monroïsme [de la doctrine Monroe, ndt]. Comme le montrent les expériences passées, ces différences ne doivent pas empêcher son fonctionnement. Il convient de rappeler que le chemin à suivre maintenant ne sera pas exempt d’obstacles endogènes et principalement de menaces exogènes. Dans tous les cas, la magnitude de ses objectifs d’intégration économique, culturelle et politique (qui comprend aussi l’inclusion sociale), protection de la nature et participation citoyenne est inhérent à la magnifique démesure du rêve bolivarien et martien. Ainsi le confirment la Déclaration de Caracas, la Procédure pour le fonctionnement de la Celac, le Plan d’Action de Caracas et les 20 autres documents adoptés.

 

Lorsque Bolivar a énoncé cet idéal, ensuite actualisé par Marti, certains ne l’ont pas cru viable, même s’ils l’ont qualifié de noble et splendide ; d’autres n’y ont guère prêté d’attention ; d’autres encore –les empires et les oligarchies– se sont dressés en tant qu’ennemis jurés et ont fait tout ce qui était en leur pouvoir pour le tuer dans l’œuf quand il s’est transformé en projet politique. Mais toujours, même dans les circonstances les plus adverses, il y a eu des personnes qui ont défendu cet idéal et qui lui furent fidèles, comme nous avons pu l’apprécier dans l’intéressant face à face qu’ont eu Cristina Fernández et Hugo Chavez au sujet de l’histoire latino-américaine quelques jours avant le sommet [de la Celac] en direct à la télévision vénézuélienne (www.cubadebate.cu/noticias/2011/12/03/cristina-y-chavez-un-d...).


Bien que l’espace ne me permette pas ici mentionner des noms, la création de la Celac oblige à rappeler les militants sociaux, révolutionnaires et intellectuels qui ont maintenu vivant ce rêve et l’ont enrichi le long des ans, plusieurs d’entre eux associés à l’Université Nationale Autonome de Mexico. Mais si l’on me demandait de ne citer qu’une seule personne qui durant le XXème et le XXIème siècle a cru, prêché et agit abondamment en faveur de la nécessité d’unir l’Amérique latine et la Caraïbe, ce serait Fidel Castro. Pour citer seulement un fait peu connu, le leader de la révolution cubaine est la seule personne qui, alors qu’elle n’appartient pas à la Communauté des Etats de la Caraïbe (Caricom), par décision de tous ses leaders a reçu l’Ordre Honoraire de celle-ci, hommage à la ferveur et au sacrifice qui ont accompagné Fidel durant toute une vie de service « dédiée à son pays, à sa région et au reste du monde en développement ».

 

Il est bien sur impossible d’expliquer la Celac sans le travail du groupe de Rio, premier mécanisme de concertation politique nettement latino américain, et les sommets de l’Amérique latine et la Caraïbe pour le Développement qui ont eu lieu au Brésil et au Mexique. Ils font parti de son corpus, comme le proclament les documents fondateurs. Il est aussi nécessaire de souligner que durant l’étape comprise entre les années 90 et l’actualité, c’est Hugo Chavez qui a été le plus important moteur et instigateur des alliances, des grands accords et consensus, un des principaux artisans des institutions et des contenus solidaires dans les relations latino-caribéennes qui ont rendu possible le fait que la création de la Celac soit une réussite. On compte parmi ses succès la très importante restauration des relations entre le gouvernement de Colombie et celui du Venezuela grâce à une louable volonté mutuelle.


Il y a 17 ans -4 ans avant de se faire élire comme président-, Hugo Chavez a affirmé à l’Université de la Havane : Le siècle qui vient, pour nous, ce sera le siècle de l’espoir ; c’est notre siècle, celui de la résurrection du rêve bolivarien, du rêve de Marti, du rêve latino-américain. L’histoire est en train de lui donner raison.

Ángel Guerra Cabrera

LA JORNADA (Mexique)

http://www.jornada.unam.mx/2011/12/08/index.php?section=opin...

Traduction par JARC

EN COMPLEMENT

http://www.celac.gob.ve/

CI-DESSOUS, TOUS LES DOCUMENTS (EN ESPAGNOL) APPROUVES DURANT LE SOMMET

DOCUMENTS
Declaración de Caracas “En el Bicentenario de la Lucha por la Independencia Hacia el Camino de Nuestros Libertadores”
 
Plan de Acción de Caracas 2012
 
Comunidad de Estados Latinoamericanos y Caribeños (CELAC) Procedimientos para el funcionamiento orgánico de la CELAC
 
Declaración Especial sobre la Defensa de la Democracia y el Orden Constitucional en la Comunidad de Estados Latinoamericanos y Caribeños (CELAC)
 
Proyecto de Comunicado Especial sobre Las Islas Malvinas
 
Proyecto de Comunicado Especial sobre la necesidad de poner fin al Bloqueo Económico, Comercial y Financiero de los Estados Unidos contra Cuba
 
Proyecto de Comunicado Especial sobre Compromiso para la Inclusión Social en la CELAC
 
Proyecto de Comunicado Especial sobre Seguridad Alimentaria y Nutricional
 
Proyecto de Comunicado Especial contra la Especulación Financiera y la Excesiva Volatilidad de Precios de los Alimentos
 
Proyecto de Comunicado Especial sobre la Situación de los Derechos Humanos de las Personas Migrantes
 
Desarrollo Sostenible de los Estados Miembros de la Comunidad de Estados Caribeños (CARICOM)
 
Proyecto de Comunicado Especial de Solidaridad Con Haití
 
Proyecto de Comunicado Especial sobre Paraguay - País en Desarrollo sin litoral marítimo
 
Comunicado Especial sobre la Coca Originaria y Ancestral, Patrimonio Natural de Bolivia y Perú
 
Proyecto de Comunicado Especial sobre la “Iniciativa Yasuní ITT” Cumbre CALC-CELAC
 
Proyecto de Comunicado Especial sobre la situación de Emergencia Centroamericana debido a las depresiones tropicales
 
Proyecto de Comunicado Especial sobre la Declaración del 2013 como el Año Internacional de la Quinua
 
Proyecto de Comunicado Especial sobre el respaldo a la estrategia de seguridad de Centroamérica
 
Proyecto de Comunicado Especial sobre la Eliminación Total de las Armas Nucleares
 
Comunicado Especial sobre el Vigésimo Aniversario de la Agencia Brasileño-Argentina de Contabilidad y Control de Materiales Nucleares (ABACC)
 
Comunicado Especial de apoyo a la lucha contra el terrorismo en todas sus formas y manifestaciones
 
Comunicado Especial sobre el Problema Mundial de las Drogas
 
URL de cet article 15352
http://www.legrandsoir.info/la-celac-et-la-demesure-du-reve-bolivarien-la-jornada.html

 

(de même que la Chine...)


Amérique latine: Moscou prêt à coopérer avec la CELAC
22:16 13/12/2011
MOSCOU, 13 décembre - RIA Novosti

La Russie est prête à coopérer avec les organisations internationales d'Amérique latine, notamment avec la Communauté d'États latino-américains et des Caraïbes (CELAC), a déclaré mardi le ministère russe des Affaires étrangères à l'issue d'une visite du chef adjoint de la diplomatie russe Sergueï Riabkov au Mexique.

"M.Riabkov a confirmé l'intérêt de Moscou pour l'intensification de la coopération avec les institutions d'intégration d'Amérique latine, notamment avec la Communauté d'Etat latino-américain et des Caraïbes nouvellement créée" qui regroupe les 33 États d'Amérique latine, a indiqué le ministère sur son site internet.

M.Riabkov a mené des entretiens avec ses collègues au Mexique les 12 et 13 décembre. Les discussions ont porté sur le renforcement du rôle central de l'ONU et de son Conseil de sécurité dans le maintien de la paix, le règlement des conflits, la non-prolifération des armes nucléaires, le désarmement, ainsi que la lutte contre le changement climatique, le crime organisé, le trafic de drogue et le terrorisme, selon le ministère. Les entretiens russo-mexicains ont en outre été consacrés à la coopération économique, scientifique et culturelle entre les deux pays.

Le diplomate russe a également participé à la réunion de la commission intergouvernementale russo-mexicaine pour la coopération économique, commerciale, scientifique, technique et la navigation maritime, qui s'est déroulée les 12 et 13 décembre à Mexico.

Source : Amérique latine: Moscou prêt à coopérer avec la CELAC | International | RIA Novosti

 

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19 décembre 2011 1 19 /12 /décembre /2011 18:56

 

« Il n’est pas humain d’autoriser l’usage contre les personnes de munitions interdites pour la chasse au gros gibier et susceptibles de causer des blessures particulièrement affreuses. »

Parole de flic

Le fusil à pompe dans la police : une longue histoire


À défaut de renforts, les policiers vont obtenir des fusils à pompe. Quelle que soit la tristesse de perdre l’un de leur collègue, plusieurs syndicats ont manifesté leurs réserves devant cette décision prise sous le coup de l’émotion. La ficelle est un peu grosse, mais le procédé n’est pas nouveau. Au début des  années 80, alors que les attentats terroristes se multipliaient en France et que plusieurs policiers avaient trouvé la mort, Gaston Defferre, alors ministre de l’Intérieur, s’était engagé dans la même direction. Ou du moins, avait-il décidé de lancer une table ronde, à laquelle j’avais participé, pour réfléchir à l’utilisation du fusil à pompe par les forces de l’ordre, voire pour remplacer le pistolet-mitrailleur, la fameuse MAT 49. Cela avait donné lieu à une étude et à des essais très poussés en présence de policiers de tous les grades et de représentants syndicaux.

 

 

La suite; qu'est-ce qu'un fusils à pompe ! Ses effets et ses risques et inconvénients !

A lire sur Le fusil à pompe dans la police : une longue histoire | POLICEtcetera

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19 décembre 2011 1 19 /12 /décembre /2011 16:47

 

 

 

Jean Ziegler : « Les spéculateurs devraient être jugés pour crime contre l’humanité »

Par Elodie Bécu (19 décembre 2011)

Les ressources de la planète peuvent nourrir 12 milliards d’humains, mais la spéculation et la mainmise des multinationales sur les matières premières créent une pénurie. Conséquence : chaque être humain qui meurt de faim est assassiné, affirme Jean Ziegler, ancien rapporteur spécial de l’ONU pour le droit à l’alimentation. Il dénonce cette « destruction massive » par les marchés financiers. Des mécanismes construits par l’homme, et que l’homme peut renverser. Entretien.

Basta ! : Craignez-vous que la crise financière amplifie celle de la faim dans le monde ?

Jean Ziegler : Tous les cinq secondes, un enfant de moins de 10 ans meurt de faim. Près d’un milliard d’humains sur les 7 milliards que compte la planète souffrent de sous-alimentation. La pyramide des martyrs augmente. À cette faim structurelle, s’ajoute un phénomène conjoncturel : les brusques famines provoquées par une catastrophe climatique – comme en Afrique orientale, où 12 millions de personnes sont au bord de la destruction – ou par la guerre comme au Darfour. En raison de la crise financière, les ressources du Programme alimentaire mondial (PAM), chargé de l’aide d’urgence, ont diminué de moitié, passant de 6 milliards de dollars à 2,8 milliards. Les pays industrialisés ne paient plus leurs cotisations car il faut sauver la Grèce, l’Italie et les banques françaises. Une coupe budgétaire qui a un impact direct sur les plus démunis. Dans la corne de l’Afrique, le PAM est contraint de refuser l’entrée de ses centres de nutrition thérapeutique à des centaines de familles affamées qui retournent dans la savane vers une mort presque certaine.

Et les financiers continuent de spéculer sur les marchés alimentaires. Les prix des trois aliments de base, maïs, blé et riz – qui couvrent 75 % de la consommation mondiale – ont littéralement explosé. La hausse des prix étrangle les 1,7 milliard d’humains extrêmement pauvres vivant dans les bidonvilles de la planète, qui doivent assurer le minimum vital avec moins de 1,25 dollar par jour. Les spéculateurs boursiers qui ont ruiné les économies occidentales par appât du gain et avidité folle devraient être traduits devant un tribunal de Nuremberg pour crime contre l’humanité.

Les ressources de la planète suffisent à nourrir l’humanité. La malnutrition est-elle seulement une question de répartition ?

Le rapport annuel de la FAO (Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture) estime que l’agriculture mondiale pourrait aujourd’hui nourrir normalement [1] 12 milliards d’humains, presque le double de l’humanité. Au seuil de ce nouveau millénaire, il n’y a plus aucune fatalité, aucun manque objectif. La planète croule sous la richesse. Un enfant qui meurt de faim est assassiné. Il n’est pas la victime d’une « loi de la nature » !

Au-delà de la spéculation, quelles sont les autres causes de la faim dans le monde ?

Tous les mécanismes qui tuent sont faits de main d’homme. La fabrication d’agrocarburants brûle des millions de tonnes de maïs aux États-Unis. L’océan vert de la canne à sucre au Brésil mange des millions d’hectares de terres arables. Pour remplir un réservoir de 50 litres de bioéthanol, vous devez brûler 352 kg de maïs. Au Mexique ou au Mali, où c’est l’aliment de base, un enfant vit une année avec cette quantité de maïs. Il faut agir face au réchauffement climatique, mais la solution ne passe pas par les agrocarburants ! Il faut faire des économies d’énergies, utiliser l’éolien, le solaire, encourager les transports publics.

Autre élément : le dumping agricole biaise les marchés alimentaires dans les pays africains. L’Union européenne subventionne l’exportation de la production européenne. En Afrique, vous pouvez acheter sur n’importe quel étal des fruits, des légumes, du poulet venant d’Europe à quasiment la moitié du prix du produit africain équivalent. Et quelques kilomètres plus loin, le paysan et sa famille travaillent dix heures par jour sous un soleil brûlant sans avoir la moindre chance de réunir le minimum vital.

Et la dette extérieure des pays les plus pauvres les pénalise. Aucun gouvernement ne peut dégager le minimum de capital à investir dans l’agriculture, alors que ces États ont un besoin crucial d’améliorer leur productivité. En Afrique, il y a peu d’animaux de traction, pas d’engrais, pas de semences sélectionnées, pas assez d’irrigation.

Enfin, le marché agricole mondial est dominé par une dizaine de sociétés transcontinentales extrêmement puissantes, qui décident chaque jour de qui va vivre et mourir. La stratégie de libéralisation et de privatisation du Fonds monétaire international (FMI), de la Banque mondiale et de l’Organisation mondiale du commerce (OMC) a ouvert la porte des pays du Sud aux multinationales. La multinationale Cargill a contrôlé l’an dernier 26,8 % de tout le blé commercialisé dans le monde, Louis Dreyfus gère 31 % de tout le commerce du riz. Ils contrôlent les prix. La situation est la même pour les intrants : Monsanto et Syngenta dominent le marché mondial – donc la productivité des paysans.

Que faire face à cette situation ?

Ces mécanismes, faits de main d’homme, peuvent être changés par les hommes. Mon livre, Destruction massive, Géopolitique de la faim, malgré son titre alarmant, est un message d’espoir. La France est une grande et puissante démocratie, comme la plupart des États dominateurs d’Europe et d’Occident. Il n’y a pas d’impuissance en démocratie. Nous avons toutes les armes constitutionnelles en main – mobilisation populaire, vote, grève générale – pour forcer le ministre de l’Agriculture à voter pour l’abolition du dumping agricole à Bruxelles. Le ministre des Finances peut se prononcer au FMI pour le désendettement total et immédiat des pays les plus pauvres de la planète.

La crise de la dette européenne rend cette position plus difficile à envisager…

Elle complique la situation. Mais la taxe Tobin, quand elle a été proposée par Attac il y a quinze ans, était qualifiée d’irréaliste. Aujourd’hui, elle est discutée par le G20 ! Les organisations internationales sont obligées de constater la misère explosive créée par la hausse des prix des matières premières. Un chemin se dessine. Nous avons un impératif catégorique moral – au-delà des partis, des idéologies, des institutions, des syndicats : l’éveil des consciences. Nous ne pouvons pas vivre dans un monde où des enfants meurent de faim alors que la planète croule sous les richesses. Nous ne voulons plus du banditisme bancaire. Nous voulons que l’État à nouveau exprime la volonté du citoyen, et ne soit pas un simple auxiliaire des entreprises multinationales. Ces revendications créent des mouvements dans la société civile.

La crise ne risque-t-elle pas de provoquer une montée du populisme en Europe, plutôt qu’un nécessaire sursaut des consciences ?

La lutte est incertaine. Le chômage et la peur du lendemain sont les terreaux du fascisme. Mais il y a une formidable espérance à la « périphérie », comme le montrent les insurrections paysannes pour la récupération des terres que les multinationales se sont appropriées au nord du Brésil et du Sénégal, au Honduras ou en Indonésie. Si nous arrivions à faire la jonction, à créer un front de solidarité entre ceux qui luttent à l’intérieur du cerveau de ces monstres froids et ceux qui souffrent à la périphérie, alors l’ordre cannibale du monde serait abattu. J’ai d’autant plus d’espoir que l’écart entre Sud et Nord se réduit, parce que la jungle avance. La violence nue du capital était jusqu’ici amortie au Nord, par les lois, une certaine décence, la négociation entre syndicats et représentants patronaux. Aujourd’hui, elle frappe ici les populations humbles. Il faut montrer la voie de l’insurrection et de la révolte.

Propos recueillis par Élodie Bécu

À lire : Jean Ziegler, Destruction massive : Géopolitique de la faim, 2011, Éditions du Seuil, 352 pages, 20 euros.

Notes

[1] Selon les critères de l’Organisation mondiale de la santé : 2 200 calories par individu et par jour.

 

Source : Jean Ziegler : « Les spéculateurs devraient être jugés pour crime contre l'humanité » - Alimentation - Basta !

 

 

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19 décembre 2011 1 19 /12 /décembre /2011 12:26

 

J’ai eu la chance de pouvoir voyager, vivre dans d’autres lieux, d’autres pays celui où je suis née. J’ai la chance aussi de ne pas fréquenter le web au quotidien. Parfois je me tiens à l’abri de l’actualité pendant des périodes plus ou moins longues. D’ailleurs j’ai bien rigolé,  ce week-end : il est clair que du coup il m’arrive de passer à côté d’informations de première importance, ainsi c’est samedi que j’ai appris que Laurent, fils de notre roi était marié depuis…une dizaine d’années parait-il…première nouvelle

Non je ne regarde pas la télévision, sinon parce que je suis en compagnie de gens qui la regardent et non je ne lis pas la presse officielle, si ce n’est au hasard de recherches ou parce que dans un transport en commun un journal abandonné me permet de passer le temps.

Certainement je dois passer à côté d’informations essentielles mais en contrepartie cela m’évite de tomber dans des routines, de jouer la grenouille échaudée, de m’habituer petit à petit à l’horreur imposée. Une petite anecdote que j’ai déjà raconté bien des fois mais qui est significative, je vivais alors une de mes période hors actualité dans un petit village de montagne. A deux reprises, à six semaine d’intervalle, je me suis rendue magasin-bar du village afin d’y faire quelques emplettes… comme toujours la télévision était allumée, et quelques voisins à boire une bière.

En attendant d’être servie, j’ai jeté un coup d’œil à la télé. Les deux fois coïncidences, j’ai pu voir des images de personnes torturées en Irak. Cela m’a fait froid dans le dos, j’étais choquée… il m’a fallu un moment pour me remettre. Mes voisins, eux n’étaient troublés en rien, ils buvaient leur bière tranquillement sans paraître affectés. Ils étaient habitués, pour eux c’était devenu normal à force… il y a une banalisation de la violence qui se fait surtout par l’image et par la création d’inconscients collectifs d’acceptation de l’horreur au quotidien.

Alors peut-être que m’échappent des informations « essentielles » comme le mariage de Laurent, c’est le prix à payer pour continuer d’être sensible et  affectée par l’horreur, la reconnaître pour ce qu’elle est, inacceptable.  

De même, les campagnes changent moins vite que les villes. Encore que… mais c’est une autre histoire. Ainsi à chaque retour en ville, je reçois les changements qui s’y sont produits comme un choc. Durant des décennies, cela me faisait rire de retrouver comme des piliers immuables les mêmes habitués au coin des mêmes bars à raconter les mêmes histoires, ils étaient mes garants de la permanence d’un certain monde. Cela non plus n’est plus vrai. La misère fait des ravages, mais là aussi chacun à force s’habitue. Que ce soit à vivre dans une cave sans lumière avec un loyer plus cher que celui d’un bel appartement pas si longtemps auparavant. Que ce soit à se retrouver devant le choix… bistrot et convivialité ou nourriture et solitude, car comment recevoir des amis dans un espace où seul on peut à peine bouger. A payer toujours plus chers les produits de base. A voir l’environnement se dégrader. Et les relations s’en ressentent, l’agressivité monte, la tristesse aussi de ne plus pouvoir dépanner le copain dans la mouise parce qu’on y est tout autant que lui.

Et puis il y a les lois qui défont les solidarités, alors que l’habitat groupé seraient pour beaucoup une solution, non seulement en matière de budget mais aussi de bonne convivialité et le moyen pour certains non pas de chercher un emploi mais de se créer un travail au sein d’un collectif où jouent les complémentarités. Un travail qui réponde à de vrais besoins et non une occupation rémunérée interchangeable… tout est fait, du moins en Belgique pour décourager de telles entreprises. Sinon sur le papier du moins en pratique. Je le sais, j’en ai fait l’expérience, et d’autres comme moi l’on faite.

Forte de mes connaissances, en matière de lois, de recommandations aux politiques, d’appels à projet faits par les pouvoirs publics, forte de mes capacités en gestion, intendance, organisation et celle de quelques amis doués de savoir-faire pratiques et créatifs, j’ai tenté le coup. J’ai rencontré une fin de non-recevoir. Il faut être intégré dans les réseaux politiques pour qu’on vous prête attention. J’ai reçu un grand soutien de la part des travailleurs sociaux de première ligne qui trouvait que mon projet répondait à des besoins et pouvaient y apporter une solution concrète.

L’idée était de conjuguer habitat groupé, production à partir de matériaux de récupération et animation de la vie de quartier. Toutes les énergies étaient là, de même qu’une grande sympathie du public local (et autre), mais pour que nous puissions démarrer et il fallait que soit appliquée la loi de 1993 qui dit que les pouvoirs publics ont à mettre à disposition des plus démunis leur bâtiments vide et nous avions besoin d’un petit prêt de maximum 2000 euros remboursable au plus tard en un an pour faire face aux premières dépenses. J’ai vu autour de moi des gens plein d’espoir à l’idée qu’un tel projet puisse prendre forme, je me suis sentie cruelle d’avoir réveillé cet espoir quand j’ai échoué et qu’ils sont retombés plus bas qu’ils ne l’étaient auparavant. Pas seulement de l’échec du projet, aussi parce que entre-temps les conditions de vie c’étaient encore durcies et que ceux qui vivent dans la précarité sont directement affectés par la dégradation de la qualité de vie dans l’essentiel, le logement, les frais d’énergie, la nourriture, les possibilités de convivialité, la dégradation de l’espace public…

Je n’ai pas renoncé, ce projet existe toujours sous d’autres formes pour d’autres lieux mais aussi la tristesse, il aurait fallu si peu. L’image que j’ai est celle d’une personne au bord du gouffre et de la différence que peuvent faire une main tendue pour reprendre l’équilibre ou la petite poussée qui vous précipite au fond… j’ai vu des gens pour qui j’ai de l’affection et qui sont de bonnes personnes sombrer faute de petit coup de pouce au bon moment. Mais s’il me restait des doutes, j’ai définitivement compris qu’il ne faut rien attendre des "Pouvoirs vraiment pas très publics » malgré leurs belles paroles, malgré tous ces textes qui prêchent exactement ce que je proposais mais ne rencontrent aucune application pratique. Que ce que nous voulons nous devons le conquérir de haute lutte, point par point, par nos activités. Ne jamais renoncer. Continuer non seulement à chercher à comprendre le ùonde pour nous inscrire dans le paysage en connaissance de cause, mais aussi à produire les moyens d’une autre vie par nos actions, par notre travail même si parfois cela semble dérisoire.

Le monde ne nous est pas donné, c’est à nous de le construire. Nous sommes les 1 pour mille, les 1pour 1O OOO, et alors ?  Nous existons avec nos doutes, nos blessures pas toujours cicatrisées mais aussi avec notre volonté de ne pas en démordre et chaque fois que possible de poser une pierre de plus à l’édifice d’un monde plus doux.

Anne

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19 décembre 2011 1 19 /12 /décembre /2011 10:48

 

Publié par Marc Lafontan |

 

Je suppose que vous ne m'avez pas proposé à ce poste pour que je vous mente à mon tour.

Notre pays ne fleurit pas. Le grand potentiel créateur et spirituel de nos nations n'est pas utilisé comme il se doit. Des branches entières de l'industrie produisent des choses qui n'intéressent personne, tandis que ce dont nous avons besoin nous manque toujours.

L'Etat, qui s'appelle «Etat des ouvriers», humilie et exploite les ouvriers. Notre économie arriérée gaspille une énergie rare. Le pays qui pouvait être fier autrefois de l'érudition de son peuple dépense tellement peu pour l'enseignement qu'il se trouve aujourd'hui à le 72è place mondiale dans ce domaine.

Nous avons pollué la terre, les rivières et les forêts que nous avaient laissées nos ancêtres, au point que nous avons aujourd'hui le plus mauvais environnement de toute l'Europe; les adultes chez nous meurent plus tôt que dans la majorité des pays européens.





Permettez-moi d'exprimer une petite impression personnelle: récemment, alors que je me rendais à Bratislava en avion, j'ai trouvé un peu de temps, entre diverses discussions, pour jeter un coup d'œil par le hublot. J'ai vu le complexe de l'entreprise Slovnaft et, tout à côté, la grande agglomération de Petrzalka. Ce coup d'œil m'a suffi pour comprendre que pendant des dizaines d'années, nos hommes d'Etat et nos personnalités politiques n'ont pas regardé ou n'ont pas voulu regarder par les hublots de leurs avions. Aucune statistique dont nous disposons n'aurait permis de comprendre plus vite et plus facilement la situation dans laquelle nous nous trouvons.
Mais tout cela n'est pas encore l'essentiel. Le pire est que nous vivons dans un milieu moral pourri. Nous sommes malades moralement parce que nous sommes habitués à dire blanc et à penser noir, à ne pas prêter attention l'un à l'autre, à ne nous occuper que de nous-mêmes. Des expressions comme l'amour, l'amitié, la pitié, l'humilité ou le pardon ont perdu leur profondeur et leur dimension et ne signifient pour nombre d'entre nous qu'une sorte de particularité psychologique aussi désuète que des salutations oubliées du temps passé, un peu risibles à l'heure des ordinateurs et des fusées cosmiques.
Peu d'entre nous ont été capables d'exprimer à haute voix que les puissants ne devraient pas être omnipuissants et que les fermes spéciales qui leur fournissent des produits écologiquement purs et de qualité devraient plutôt envoyer ces produits dans les écoles, les maisons d'enfants et les hôpitaux, dans la mesure où notre agriculture n'est pas capable de les offrir à tous.
Le régime au pouvoir jusqu'ici - armé de son idéologie fière et intolérante- a rabaissé l'homme au niveau d'une force de production et la nature à celui de moyen de production. Il a sapé ainsi leur principe et leur rapport mutuel. Il a transformé des personnes douées et jouissant de leurs droits, travaillant intelligemment dans leur pays, en boulons d'une machine monstrueusement grande, grondante et puante, dont personne ne sait quel est le sens véritable. Elle ne sait rien faire d'autre que s'user elle-même, et avec elle tous ses boulons, lentement mais irrésistiblement.
Si je parle de climat pourri, je ne parle pas seulement de messieurs qui mangent des légumes écologiquement purs et qui ne regardent pas par les hublots de leurs avions. Je parle de nous. Nous qui nous sommes tous habitués au système totalitaire, nous qui l'avons accepté comme un fait immuable, donc entretenu par nos soins. Autrement dit: nous tous -bien qu'à des degrés différents- nous sommes responsables de la dérive de la machine totalitaire. Nous ne sommes pas seulement ses victimes, mais nous sommes tous en même temps ses co-créateurs.
Pourquoi parler ainsi? Parce qu'il ne serait pas raisonnable de considérer le triste héritage des dernières quarante années comme quelque chose d'étranger, légué par un parent lointain. Nous devons au contraire accepter cet héritage comme quelque chose que nous avons nous-mêmes commis contre nous. Si nous le prenons ainsi, nous comprendrons qu'il dépend de nous tous d'en faire quelque chose. Nous ne pouvons pas faire porter la responsabilité de tout cela sur les gouvernants précédents, non seulement parce que cela ne répondrait pas à la vérité, mais encore parce que cela affaiblirait le devoir qui se pose aujourd'hui à chacun de nous, le devoir d'agir indépendamment, librement, raisonnablement et vite.
Détrompons-nous, le meilleur gouvernement, le meilleur parlement et le meilleur président ne peuvent pas à eux seuls faire grand chose. Et ce serait très injuste d'attendre la solution d'eux seulement. La liberté et la démocratie, cela signifie la participation et la responsabilité de tous.
Si nous nous en rendons compte, toutes les horreurs dont hérite la nouvelle démocratie tchécoslovaque ne nous sembleront pas aussi épouvantables. Si nous nous en rendons compte, l'espoir reviendra dans nos cœurs.»

1er janvier 1990 - Vaclav Havel
Ce discours est reproduit dans un livre passionnant de Christian Duplan et Vincent Giret, «La Vie en rouge, ils ont fait tomber le communisme 1944-1989», réédité aux Editions du Seuil en 2009.
Merci à Marc Lafontan pour ce texte vrai : Au bout de la route: Quand un dirigeant dit simplement la vérité
Egalement sur "Au bout de la route" pour les trois derniers jours... et bien d'autres thèmes qui valent le détour chaque jour
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18 décembre 2011 7 18 /12 /décembre /2011 23:15

 

 

Ce n'est pas de l'actu, c'est de l'info. Qu'un républicain traite les participants à Occupy de voyous quoi de plus normal, mais qu'Obama ne voit dans ce mouvement que des irresponsables interpelle d'avantage. Quelques autres billets sur le site source qui montre à l'oeuvre la répression par les  forces de l'ordre des USA d'un mouvement pacifique. Totalement écoeurant. Mais nous avons pu voir que pour le président petit-blanc des USA, la population travailleuse dont le rêve est de pouvoir élever ses enfants, accéder à la propriété, et mettre un peu d'argent de côté pour la retraite est l'incarnation du rêve américain. Un Peu limité le bonhomme,forcément ce que veut Occupy qui ne va pourtant pas très loin dans ses aspirations , dépasse ces capacités d'entendement... Tristounet 


États-Unis : les mobilisations contre le monde de la finance touchent plus de 800 villes, un chef républicain les traitent de « voyous »


 

(Source : AlterInfo + Cyberpresse)

États-Unis : expansion des manifestations populaires, 847 villes touchées

Les protestations populaires, aux Etats-Unis, partis initialement de « Wall Street » à New York, ont gagné, déjà, 847 villes de ce pays. Selon le rapport de samedi de Press TV, citant le rapport de vendredi du site «Occupons ensemble», 847 villes américaines sont le théâtre de rassemblements en soutien au mouvement de « Wall Street », qui se poursuit depuis 4 semaines à New York. Les manifestants protestent contre la corruption, le chômage, la pauvreté et l’injustice sociale aux Etats-Unis. Ils considèrent les activités de « Wall Street » et l’influence des grandes entreprises économiques sur les politiques de la Maison Blanche comme étant à l’origine de l’expansion de la crise économique aux Etats-Unis. Alors que le taux de chômage élevé et le déficit budgétaire américains pèsent de tout leur poids sur le dos du peuple, les relations entre les compagnies privées et les législateurs américains ont provoqué la colère des Américains.

 

Les «anti-Wall Street» qualifiés de «voyous» par un chef républicain américain

Le chef de la majorité républicaine de la Chambre des représentants des États-Unis, Eric Cantor. PHOTO: AFP

 

Un haut responsable du parti républicain américain a estimé vendredi que les manifestants anti-Wall Street étaient des «voyous», alors que le mouvement prend de l’ampleur à travers les États-Unis.

«Je suis de plus en plus inquiet du nombre croissant de voyous qui occupent Wall Street et les autres villes à travers le pays», a estimé le numéro deux républicain de la Chambre des représentants Eric Cantor.

«Que vous le croyiez ou non, certaines personnes dans cette ville s’appliquent à monter les Américains les uns contre les autres», a-t-il affirmé lors d’une rencontre à Washington avec des chrétiens évangéliques.

Ces manifestations qui ont commencé mi-septembre dans le quartier de Wall Street à New York, pour dénoncer le monde de la finance, «révèlent un mécontentement plus vaste quant au fonctionnement du système financier», a estimé pour sa part Barack Obama.

«Nous avons traversé la crise financière la plus grave depuis la Grande dépression (des années 1930), avec d’énormes dégâts collatéraux dans tout le pays, dans l’économie réelle, et on voit pourtant toujours certains irresponsables combattre les efforts engagés pour mettre fin aux abus qui nous ont amené là», avait dénoncé M. Obama lors d’une conférence de presse jeudi à la Maison-Blanche.

La contestation s’est étendue depuis plusieurs jours à d’autres grandes villes américaines, dont la capitale Washington.

 

Source : État du Monde, État d'Être

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