Pour ceux qui l’on oublié, pour ceux qui ne le savent pas, le 1er mai est une fête politique, elle sanctionne la victoire des ouvriers étasuniens qui en 1886 obtiennent la journée de 8 heures et devient la journée traditionnelle de lutte, pendant laquelle les travailleurs du monde manifestent pour exprimer leurs revendications. Les droits dont les travailleurs ont jouit pendant quelques décennies sont le fruit de batailles enragées, des gens ont payé de leur vie l’obtention de ses droits qui sont aujourd’hui niés, confisqués, menacés.
Hier je suis donc allée place Rouppe à la fête qu’organise tous les ans le syndicat socialiste. Je remonte fendant une foule dense la rue du Midi. Sur les côtés quelques stands de propagande voisinent avec ceux qui proposent bouffe, boisson et divertissements. Période électorale oblige des militants distribuent leurs tracts et brochures : écolo-bobo, et gauche « traditionnelle » et fatiguée qui en est encore à revendiquer des emplois, du pouvoir d’achat et le retour de l’état providence. « On peut rêver », je suis la première à l’affirmer comme un des droits inaliénable de l’humain, mais tout de même…D’abord, ce n’est pas un si beau rêve que de vouloir être vissé pendant 8 heures par jour à donner son temps, son énergie, sa vie ; soumis au lien de subordination, pour le bénéfice de lointains actionnaires qui n’ont pour vous que du mépris ! Ensuite, il faut être un peu zozo pour ne pas voir ce que de telles revendications ont d’anachroniques aujourd’hui. Ces militants sont restés calés dans une autre époque à jamais révolue et n’ont aucune conscience de la réalité contemporaine. Ils seront malheureusement le seul rappel du caractère politique de cette fête !
Je me retrouve sur la Place, bondée, jamais vu autant de monde à cette fête, normal, le temps est superbe, les gens sont venus se réchauffer au premier soleil de mai. Je me trouve un petit coin où m’assoir pour prendre la température de la foule, et malgré quelques sourires et bonjours échangés avec des inconnu(e)s au regard présent et éveillé, je ne tarde pas à être prise d’un malaise. Drôle d’ambiance, faite d’inertie, d’accablement et de résignation pas de traces ici, fusse infinitésimale de la résistance en action.
Je décide donc d’aller voir ailleurs si j’y suis et de revenir plus tard quand la foule sera moins dense. Je passe un moment avec les canards des étangs d’Ixelles, puis avec quelques copains étalés sur une pelouse au soleil. Retour place Rouppe. Bus 71 jusqu’à la place Royale, je descends les marches de l’Albertine, musique, musique qui me parvient aux oreilles. Un petit groupe est réuni là, ils jouent bien, je me sens prise dans le rythme et poursuit mon chemin en dansant.
Cette fois c’est à contre courant que je vais remonter la rue du Midi, le dernier concert terminé, la foule se tire. Punaise, quand je vois tout ce monde qui s’en va et tous ceux qui restent encore sur la place, je me félicite d’être partie de là. Etre serrée comme dans une boite à sardine, très peu pour mon goût de l’ivresse. Bonne surprise, le bistrot du coin diffuse du reggae, quelques rastas colorés comme des perroquets et autres joyeux lurons dansent. Chouette, peut-être la fête va commencer. Je fais le tour de la place. Le sol est jonché de canettes écrasées, de vieux papiers, de déchets reliquats colorés de la masse en inaction. Au reggae a succéder –horreur- de la techno, cela casse le début d’ambiance. Et personne n’a pris la peine d’amener ses instruments pour que la fête se poursuive. Je fais quelques rencontres sympathiques de personnes comme moi en mal de luttes festives et de simplicité volontaire, puis décide de rentrer : c’est terminé il n’y a rien à voir ! Flop !
Anne