18 novembre 2019 1 18 /11 /novembre /2019 22:22

Publiée il y a quelques heures, une vidéo d’un des derniers journalistes de la presse internationale encore sur le terrain en Bolivie. Le gouvernement de fait a expulsé par la force et la menace tous les correspondants qui filmaient la réalité de terrain avant de publier un décret qui exempte les forces de l’ordre de toute responsabilité pénale dans leur tâche de répression. Un droit de tuer. Loin des yeux du public. A présent l’armée utilise des balles réelles et les morts se multiplient.

Des heures dramatiques

Comme je le disais hier, Esteban Trebucq journaliste de la chaîne argentine Crónica TV, qui a parcouru le pays et se trouve actuellement à Cochabamba, affirme que la question principale aujourd’hui en Bolivie est une question raciale, la chronique d’un massacre en cours à côté de quoi la question d’Evo devient secondaire. La chronique d’un ethnocide annoncé.

Il va nous montrer les balles qu’utilise l’armée contre le peuple. Dans les images qui accompagnent son témoignage on voit comment les militaires gazent les indigènes lors de l’enterrement collectif de victimes de la répression. Sur d’autres vidéos, nous voyons comment les soldats après avoir regroupé des indigènes les forcent à se mettre à genou.

D’après Esteban, forcer les indigènes à se mettre à genou, en particulier les femmes, est une des méthodes utilisées par l’armée pour intimider et humilier les indigènes, les soumettre par la terreur, les renvoyer au néant de misère dont selon, les racistes minoritaires – et fanatiques religieux diaboliques - qui ont pris le pouvoir, ils n’auraient jamais du sortir. Un des buts de cette terreur est de forcer à l’exil les sympathisants d’Evo Morales et autres militants de la souveraineté populaire, comme le déclare un des membre du gouvernement de fait.

Une discussion avec un intervenant séditieux en studio qui veut absolument attribuer à Evo la culpabilité du massacre actuel perturbe le fil d’info de la vidéo.

Esteban fait remarquer à son interlocuteur qui voudrait faire d’Evo la cause première du massacre, que quand bien même Evo aurait envoyé les troupes réprimer l’opposition, cela ne justifie en rien les massacres actuels. Dans l’aveuglement de la communauté internationale. Et ce qu’oublie de dire cet intervenant, c’est qu’alors que la majorité des marches indigènes sont pacifiques, les groupes dirigés par Camacho auquel devait s’affronter le gouvernement d’Evo, sont des groupes paramilitaires d’extrême-droite qui ont été entraîné pour semer la sédition violente dans le pays. Mais cela j’en parlerai par la suite. Sans écouter ce que dit le journaliste, l’intervenant refuse de comprendre que les manifestations actuelles dépassent de loin la question d’Evo Morales, que parmi ceux qui se lèvent aujourd’hui se retrouvent des opposants de Morales, qui sont les premiers surpris d’avoir été manipulés et utilisés par les groupements d’extrême-droite raciste minoritaires qui ont pris le pouvoir. Qui comprennent qu’ils ont ouvert les portes du palais présidentiel à ceux qui pendant des siècles les avaient maintenus sous le joug de la domination coloniale. Et voudraient les soumettre à nouveau à leur suprémaciste domination.

Il explique aussi, que seule équipe internationale sur le terrain ils ont droit à une ovation populaire. Je vous disais hier que de tout le pays montent les appels désespérés de ceux qui voient leur proches assassinés loin des yeux du « grand public ». Le métier de journaliste est devenu un métier dangereux, j’ai vu comment les équipes de journalistes arrivaient à l’Ambassade d’Argentine dans un état de stress profond après avoir été agressées dans leur travail par des suppôt des nouvelles « autorités » du pays, alors que des militaires gazent volontairement des journalistes sur le terrain. Lors du coup d’état au Honduras, les troupes avaient encerclé l’hôtel qui hébergeaient les journalistes avant de les escorter pour une évacuation hors du pays. Comme c’est le cas aujourd’hui en Bolivie, certains étaient revenus clandestinement dans le pays à leur risque et péril pour continuer leur travail, sans caméras, avec des téléphones cellulaires afin de filmer discrètement. Mais de très loin, le niveau de violence contre les journalistes au Honduras n’atteignaient pas ce qu’on a pu voir ces jours-ci en Bolivie, une violence organisée et encouragée par le gouvernement de fait. Il n’y avait pas non plus l’utilisation des réseaux sociaux faite en Bolivie pour les désigner comme cibles de la violence des partisans du gouvernement putschiste.

Dans tout le pays, les arrestations se sont multipliées. Comme pour les chiffres des morts : 23, des blessés :700 et quelques,  donnés par l’officialisme usurpateur semblent de loin inférieurs à ceux que laissent présager les témoignages sur le terrain. On ignore également le nombre réel d'arrestations. Aucune raison n’a été donnée par les putschistes pour justifier les détentions et les détenus sont maintenus au secret… je n’ai aucun doute quand à l’existence des mauvais traitements et tortures auxquels doivent être soumis les prisonniers, ni quand au fait que les disparitions forcées figureront au triste bilan de ce coup d’état. J’aimerais me tromper, mais toute l’expérience historique nous indique que c’est sans doute ce qui se passe aujourd’hui en Bolivie, et dans une moindre mesure au Chili où la haine des communistes et des populations natives mapuches est une caractéristique de force de répression marquées par le Pinochétisme. Depuis trop d’années, je vois se rassembler tous les indices d’un racisme blancoïde en Amérique Latine, depuis les commentaires des Sifrinos du Venezuela, qui veulent renvoyer les « crapauds », les indigènes et métisses à la soumission dont ils n’auraient jamais du sortir, aux partisans de Bolsonaro au Brésil et à ceux de Camacho, en Bolivie et quelques émules de Miami qui appellent ouvertement à la « Solution finale de la question indigène », leur élimination physique ou leur intégration forcée.

L’intervenant dans le studio en Argentine essaye de justifier la tuerie en argumentant que si l’armée et la police ne tuent pas, elles se feront agresser… On voit le journaliste atterré, il répond qu’il est témoin de ce qui se passe, que les manifestants arrivent désarmés à l’entrée des villes, qu’ils portent des bannières indigènes et des drapeaux blancs… « Ils n’ont pas d’armes, la majorité sont des femmes. Les femmes, ils les forcent à se mettre à genou. Il les frappent ». On voit des militaires donner des coups de pieds aux manifestants au sol.

C’est une image récurrente que l’ont retrouve dans plusieurs vidéos qui ont filtré : c’est au sens propre du terme que le gouvernement de fait oblige la population indigène à se mettre à genou. Depuis les hélicoptères les militaires tirent sur la foule. Le nouveau ministre Arturo Murillo annonce qu’une chasse aux principaux partisans d’Evo est ouverte dont beaucoup sont déjà emprisonnés ou en arrêt domiciliaire.

La désinformation contre laquelle je veux lutter ici : ce ne sont pas seulement les partisans d’Evo qui manifestent en réclamant la démission du gouvernement de fait, mais l’ensemble des populations indigènes en lutte pour leur droit à une vie digne que leur refuse les nouvelles autorités du pays. Et si je parle d’un fanatisme religieux diabolique, ce n’est pas que je crois au diable de la mythologie chrétienne, mais bien à celui que des hommes font exister quand il massacrent leur prochain au nom du Christ et d’une idéologie obscurantiste de chasse aux sorcières. Qualifier la spiritualité indigène de satanisme comme il le font et pratiquer des rites d’exorcisme pour purifier le pays de la sorcellerie de la Pachamama, encourager le meurtre et la répression féroce des populations natives, cela oui, c’est diabolique et me fait froid dans le dos.

Anne W

Quelques courtes vidéos illustratives depuis Noticias Bolivia.

A Cochabamba l'armée met les indigènes à genou. 17 11 2019

Veillée des morts de la répression à Cochabamba 17 11 2017

Dénonciation du gazage par les forces de l 'Ordre de la marche de deuil à El Chapare

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