Les expulsions ont repris ce matin à Notre Dame des Landes qui appelle les soutiens.
Jeudi 17 mai 2018
La seconde vague d’expulsion amorcée depuis ce matin est une nouvelle tentative d’éradiquer une partie de la zad. Elle va faire remonter dramatiquement la tension dans le bocage et laisser plus de personnes encore privées de leur logement et de leurs espaces quotidiens d’activités. Les routes et chemins sont une nouvelle fois envahis par un dispositif militaire inédit en terme d’ampleur et de durée dans l’histoire du maintien de l’ordre en France. Cette démonstration de force est sans doute à la hauteur de l’affront qu’a représenté des années durant cet espace de résistance et d’expérimentation. L’acharnement de l’Etat est significatif de sa vivacité persistante de cette aventure collective. Il est annoncé que plusieurs habitats sont cette fois visés dans le secteur de la forêt de Rohanne.
En s’attaquant aujourd’hui à la Chat-teigne, l’Etat cherche à raser un symbole de l’histoire de la lutte. La chat-teigne c’est ce chantier collectif de 40 000 personnes, ce hameau magique sorti de terre qui a signé la défaite de l’opération César. La construction de la chat-teigne a marqué la montée en puissance d’un mouvement populaire qui allait finir des années plus tard par arracher l’abandon du projet d’aéroport. Après avoir été un espace de convergence vibrant des mois durant pour et par les comités de soutien, les cabanes de la chateigne s’étaient transformées en habitat plus permanent.
Au-delà de la chat-teigne, la zad est emblématique, entre autre, comme espace de réinvention d’une architecture créative et d’une réappropriation des techniques de construction. C’est à cette dimension d’habitat alternatif et collectif que l’Etat continue aujourd’hui à s’attaquer à travers la destruction des autres lieux de vie officiellement visés aujourd’hui : pui-plu, la datchacha, la vosgerie...
Par ailleurs, cette nouvelle offensive se situe en plein coeur de la zone humide et de la forêt qui vont être encore largement dégradées par le passage des blindés et tractopelles, et par les pluies de grenades et de lacrymogènes. La précédente vague d’expulsion avait déjà ravagé nombre de champs et chemins de la zad en plus d’empoisonner les foins, par la contamination des gaz dans l’herbe et les palets dans les roundballers. Nous avons défendu ce bocage pendant des décennies, nous ne pouvons le laisser aujourd’hui continuer à se faire écraser par la gendarmerie.
Comme c’est déjà le cas depuis des semaines, les travaux nécessaires aux projets agricoles que le gouvernement dit paradoxalement accepter de pérenniser vont continuer à être entravés par l’occupation policière prolongée du territoire et ce au coeur de la saison agricole. D’après les estimations, le coût de cette opération absurde aura bientôt atteint les 5 millions d’euros. C’est la somme que le conseil général avait fait payer à L’Etat pour lui vendre l’ensemble des terres et bâtiments qu’il avait acquis sur la zad en vue du projet d’aéroport.
Le gouvernement tente de neutraliser la résistance en cherchant à ancrer l’idée que des personnes qui n’auraient pas pu ou voulu participer au dépôt collectif de projets seraient moins légitimes à rester vivre ici. Il faut bien peu de coeur pour imaginer que quiconque laisse ses voisin.e.s se faire raser leurs maisons sans réagir. Par ailleurs, les diverses interventions des forces de l’ordre depuis l’abandon de l’aéroport visent à affaiblir et mettre la pression sur tout le mouvement. Faute de pouvoir matériellement et politiquement expulser tout le monde, ces opérations cherchent à imposer des conditions drastiques pour le maintien des projets sur la zone et pour en fragiliser la dimension collective. Nous appelons pour notre part à se mobiliser largement sur le terrain et au-delà pour la défense des divers lieux de vie, réalités et activités qui s’entremêlent sur la zad.
Concrètement, nous appelons à :
/// Converger immédiatement sur palce pour ceux et celles qui le peuvent
/// A un rassemblement devant la préfecture à Nantes à 18h suite à une journée d’expulsion
/// A des rassemblements et occupations sur les places des villes et devant les mairies et préfectures. Les comités de soutien peuvent signaler leurs rendez-vous et actions au site zad.nadir afin qu’ils soient relayés
/// A une manifestation le samedi après une semaine d’expulsion à Nantes
/// A une convergence sur la zad le dimanche après une semaine d’expulsion
— Liste de communication de la ZAD de Notre-Dame-Des-Landes. 06.95.06.81.49 zadcontactpresse@riseup.net
Au nom de l’état de droit et du retour à la norme.
Je ne sais pas quand j’ai compris que j’étais non-intégrable, par nature, à leur système de mort. Mais en attendant plus d’info, je vous propose quelques lignes résumées de « La Nouvelle Alliance » de Prigogine et Stengers, qui s’appliquent parfaitement au non-intégrables de Notre Dame des Landes et du monde. Ils veulent que nous soyons scientifiques ? Pas de problème, s’i faut convoquer le prix Nobel Prigogine pour leur montrer qu’ils ont tort, pourquoi se priver.
« La loi des grands nombres
Que des fluctuations puissent jouer un rôle décisif dans l’établissement d’un régime macroscopique signifie une transformation profonde des rapports entre le niveau microscopique et le niveau macroscopique […].
Chacun d’entre nous a un sentiment instinctif de ce que sont les fluctuations et des circonstances dans lesquelles on peut les négliger. La loi des grands nombres montre que dans un système formé d’un grand nombre d’individus ou d’atomes, pour des raisons mathématiques, plus le système est grand plus les fluctuations peuvent être considérées comme négligeables.
La loi des grands nombres […] joue un rôle essentiel dans tous les domaines où doit être décrit le comportement d’une population. Nous avons déjà expliqué que c’est la loi des grands nombres […] qui permet la description de systèmes complexe par un nombre restreint de paramètres (variables). […] Aucune prévision physique, sociale ou économique, ne serait possible si, au lieu de garder le caractère négligeable que leur assigne la loi des grands nombres, les fluctuations au sein de populations nombreuses pouvaient à tout moment s’amplifier jusqu’à bouleverser un état qu’il n’y aurait plus alors de sens à appeler moyen.
Et pourtant lors de l’apparition de structures dissipatives, il faut bien d’une manière ou d’une autre que cette loi soit « violée. Les exemples de phénomènes de ce genre abondent, surtout en biologie »
Un système dissipatif (ou structure dissipative) est un système qui évolue dans un environnement avec lequel il échange de l'énergie ou de la matière. C'est donc un système ouvert, loin d'un équilibre thermodynamique.
En fait ce que cela signifie, c’est que le modèle fondé sur la loi des grands nombres comme condition du contrôle des masses, se fondent sur une vision de la science qui suppose la fiction de systèmes fermés en équilibre. Un monde qui ne permet pas aux fluctuations de devenir significatives. Or c’est là le principe de la vie, l’évolution qui est par nature cette invention continuée de nouvelles fluctuations dont certaines restent négligeables alors que d’autres, si petites soient-elles a départ sont destinées à devenir significatives, et à transformer le système dans son ensemble. Parmi les populations, il y a des individus moyens, normaux (contrôlables dans le cas du système), et des marges qui sont des lieux fluctuants. Les lieux du meilleur et du pire, ceux aussi d’où vont surgir les innovations adaptatives, qui répondent aux changements du milieu et au dangers et risques qu’ils peuvent présenter pour la survie des habitants de l’écosystème en cause. Ici c’est carrément de la biosphère dont il est question, la Terre en tant qu’habitat du vivant, et la menace concerne la Vie elle-même. Et la Vie répond, cherche, essaye, invente des solutions à l’œuvre de mort du capitalisme brutal.
Ce qui est très intéressant, c’est de voir que des petits mouvements, microscopiques, apparaissent spontanément, en affinité les uns avec les autres, d’un bout à l’autre de la planète, qu’ils se multiplient, se répandent et tissent des liens entre eux. Ils sont les réponses de la vie, à la fois similaires et diverses à la destruction du milieu ambiant.
Depuis des années, en suivant des mouvements populaires d’Amérique Latine, je voyais l’état de guerre que le système capitaliste destructeur impose à ces mouvements. Le Venezuela présidé par Chavez, faisait barrage contre cette destruction, à laquelle lui aussi est livré aujourd’hui. Actuellement la répression s’intensifie dans toute la région, je n’ai pas trouvé encore le moyen d’en rendre compte, mais c’est un génocide qui s’intensifie. Chaque jour, le nombre de lieux visés, les listes des morts sont plus longues. Cela c’est le système mortifère qui se défend contre la menace de disparition que les non-intégrables constituent pour lui. Et dans les enjeux de l’élection au Venezuela dimanche, il y a cela, comment contrer une guerre programmée qui serait le début d’un massacre systématique des mouvements populaires de la région.
Aujourd’hui à Notre Dame des Landes, je vois une forme de répression militaire contre la vie qui s’invente à travers les expériences des zadistes, et je sais que c’est la même guerre et que si nous n’y prenons pas garde, elle pourrait bientôt faire autant de morts ici aussi. Déjà les moyens utilisés, les blessures subies par les résistants de la Zad, représentent le passage d’un seuil dans la violence de la répression.
Chaque jour sur la Terre confisquée, la jeunesse non-intégrable au besoin du Profit grandit en nombre. Faut-il développer un système à l’étasunienne et construire toujours plus de prisons, conçues comme des usines où des sociétés privées trouvent une main d’œuvre corvéable à merci., emprisonner comme à Pelican Bay des jeunes pour des soupçons d’appartenance à une « mouvance » donnée ? C’est ce modèle qu’on veut nous imposer.
Où faut-il au contraire protéger toutes ces expériences qui permettent à chacun de donner le meilleur de soi-même et de proposer des moyens d’issue à la catastrophe qui fond sur nous depuis l’esprit tordu des sadiques qui dirigent le monde ?
Pour illustrer ce monde de la norme et des grands nombres, voici où cela mène quand il s’agit de « produire du poulet », n’oubliez pas… nous aussi nous sommes du bétail à leurs yeux. Et que les cages dans lesquelles ils enferment les humains du « rêve américain » carcéral ne valent guère mieux.
Le monde a besoin de personnes qui cherchent les formes qui permettent d’avoir une empreinte écologique positive : réparation, préservation et enrichissement des écosystèmes.
Anne W.