21 juin 2019 5 21 /06 /juin /2019 12:39

 

 

Accord signé entre le Secrétaire de Sécurité et des Polices Nationales du Honduras et les Représentants de la Police Préventive et des Groupes d’élite Cobra en grève.

La Conférence de Presse qui précède la signature de l'accord

L’accord nous est présenté par le délégué du Commissionné aux Droits Humains qui a servi de médiateur pour sa rédaction.

 

Premier point de l’accord, le secrétaire d’état de sécurité et des polices nationales s’engage à fournir aux policiers une nourriture suffisante pour leur assurer la santé dont ils ont besoin pour assurer leur (sale ?) boulot.

Deuxième point : il s’engage à fournir aux directions policières des uniforme de qualité pour assurer l’(in-?)dignité de leurs fonctions.

Troisième point, il s’engage à les informer des droits qui leurs sont accordés par la loi, dont la plupart du temps, ils n’avaient pas connaissance jusqu’ici.

Quatrièmement, il s’engage à travailler conjointement avec le haut commissionné aux Droits Humains pour le Honduras afin de mettre en place des conditions de travail décentes.

Cinquièmement, il s’engage à organiser des réunions périodiques avec les différentes directions policières pour les informer de l’évolution des processus qui les concernent et de créer une Table afin qu’ils puissent déposer librement leur requêtes et plaintes.

Six : Il garantit à la population hondurienne le respect des droits humains de toutes les personnes au niveau national, y compris celles qui exercent leur droit à la manifestation publique et pacifique.

Sept, elle s’engage à ne pas mener de processus disciplinaires et sanctions laborales à l’encontre des policiers qui exercent leurs droit constitutionnel de revendication et de grève dans le cadre de ce conflit.

Huit et neuf, les membres de la police qui participent à ce conflit pourront avoir recours au service de ressources humaines pour protéger leurs droits et auront accès direct aux instances supérieures pour transmettre les requêtes qui ne seraient pas transmises par la voie hiérarchique. Tout cela se fera sous contrôle du Commissionné National des Droits Humains.

 

Un peu d’histoire : Après le coup d’état militaire de 2009, le président de facto, Micheletti, choisit comme conseiller militaire Billy Joya Amendola. Joya avait fait ses classes dans le Chili de Pinochet et on le verra, lors du coup d'état, à la télévision du Honduras, présentant un gros dossier : l’élaboration du coup d’état sur le modèle de celui du 11 septembre 73 au Chili, expliquant qu’il fallait éliminer Zelaya pour les mêmes raisons qu’il fallait faire disparaître Allende et la résistance Chilienne. Pendant les années 80, sous le commandement de l’Ambassadeur US Negroponte, leur créateur (il récidivera en Irak), Joya fait partie de l’escadron de la mort B »-16 et des unités Lince (linx) et Cobra. C’est pour célébrer la réactivation de ce « bon vieux temps des dictatures » que seront recrées les unités Cobra après le coup d’état militaire de 2009. En juillet 2013, ce ne sont pas des lynx qui cette fois leur seront adjointes mais les toutes nouvelles unités d’élites Tigre, formées par le FBI et la DEA. (aide au développement fournie par les USA)

Alors oui : que cette nuit, ces jeunes policiers aient introduit le respect de droits humains constitutionnels de la population incluant celui de manifester publiquement et pacifiquement comme condition indispensable de l’accord, alors que son application devra se faire obligatoirement sous-contrôle du Commissionné National de Droits Humains Roberto Herrera Caceres, c’est un accord historique.

L’autre accord historique des dernières 24 heures est celui de développement conjoint signé par les présidents du Salvador et celui des EU du Mexique. Un programme qui devrait s’étendre au Guatemala et au Honduras, mais dont l’application est empêchée par le haut taux de corruption qui règne dans ces pays. Les fonds ne parviendraient pas à leur destinataires. Le Mexique donnera 30 millions de dollars afin de générer 20 000 emplois au Salvador. Une méthode de gestion des flux migratoires qui vise à supprimer leur cause en transformant les conditions de vie qui provoquent la migration forcée.

Voici les premières lignes de la Déclaration de Principe de MORENA (mouvement de régénération nationale du Président et de beaucoup d’autres Mexicains), un mouvement qui a fait raz de marée dans le pays et déborde les frontières internationalement, un mouvement qui propose un modèle pour le monde, un modèle qui fait appel à la bonne volonté, à la bienveillance, au meilleur de chacun  :

 

Il n’y a rien de plus noble et de plus beau que de se préoccuper des autres et de faire quelque chose pour eux. Le bonheur peut aussi s’atteindre en agissant pour le bénéfice d’autrui, voisins, compagnons d’étude ou de travail, quand une action est menée pour le quartier, la collectivité, le peuple où le pays. Ces actions nous définissent comme genre humain, formant une communauté, construisant une citoyenneté et faisant de ce monde un endroit un peu meilleur.

 

Et je souscris, parce que ce bonheur, je le connais. Sinon pourquoi le blog, sinon pour ce plaisir de partager, pour le plaisir de l’acte gratuit, apporter une contribution, si petite soit-elle à la collectivité. Il existe des personnes comme cela pour qui faire du bien aux autres, c’est se rendre soi-même heureux, je le sais j'en suis et j'en connais beaucoup d'autres.. Depuis des décennies, une question résonne en moi et insiste : « Comment les gens gentils pourraient-ils changer le cours de l’histoire ? », et là je vois des millions, des dizaines de millions de contribution à une réponse qui tient la route. De petites gouttes d’eau qui forment un grand courant.

 

Je connais bien à présent le cynisme, la cruauté, l’insensibilité de ceux qui nous ont fait un monde dans lequel les dépenses militaires des nations prennent le pas sur celles consacrées au bien-être des personnes. Comme je connais toute cette bienveillance humaine que j’ai rencontré tout au cours de ma vie, parmi des milliers, des dizaines de milliers de personnes de toutes origines, sociales, nationales, culturelles. Ces gens gentils avec qui j’aimerais que nous puissions contribuer un jour à changer le cours de l’histoire pour qu’enfin advienne l’humanité.

 

Cette nuit, entendre les jeunes des escadrons Cobra et Tigre s’excuser devant le peuple pour le mal qu’ils lui ont fait, voir qu’ils ont introduit les droits du peuple comme condition de leur accord, cela participe, un peu (et peut-être un peu plus, l’avenir nous le dira) à cette transformation du monde, vers un monde où chacun(e) aurait la possibilité de donner le meilleur de soi-même. Que rêver de plus beau ?

 

Anne W

 

Et en prime

1)la troisième manifestation de dizaines de milliers de professeurs au Chili. Pour vous montrer que le fascisme, cela se combat d’abord par la préservation de sa joie de vivre.  Les fascistes ne sont pas marrants, ils traînent comme une condamnation leur haine de l’autre qui traduit leur profond mal-être.

Hier, triste souvenir, la force de répression ont pénétrer dans les Collèges, mais je n'en sais pas plus

Troisième manifestation des professeurs contre la stratégie de destruction de l'enseignement du Gouvernement

 

2)Et un bouleversant cadeau de la joie comme forme de la résistance, un extrait du film « La noche de los Lapices », un groupe de jeunes militants, enlevés par la dictature militaire argentine, chantent dans leur cellule, bravant la torture, la terreur. Une histoire vraie, seul un d’entre eux, Pablo, survivra pour raconter l’horreur, les autres adolescents font partie des disparus… Je ne sais pas s’il existe une version française de ce film, mais s’il y en a une, vraiment je vous la recommande.

 

Plus jamais ça !

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17 mai 2019 5 17 /05 /mai /2019 06:12

 

Extraites de cette vidéo, quelques paroles remarquables du Sieur Obama

 

et pour l'ordre international que nous avons travaillé à construire

et pour l'ordre international que nous avons travaillé à construire

pendant des générations

pendant des générations

les hommes et les femmes du commun et courants

les hommes et les femmes du commun et courants

ont une mentalité trop étriquée pour gouverner leurs propres affaires

ont une mentalité trop étriquée pour gouverner leurs propres affaires

l'ordre et le progrès peuvent seulement venir

l'ordre et le progrès peuvent seulement venir

quand les individus renoncent et délèguent leurs droits

quand les individus renoncent et délèguent leurs droits

à un souverain tout puissant

à un souverain tout puissant

Quelques captures d’écran qui montre une face d’Obama que vous ne connaissez peut-être pas. Des discours d’Obama j’en ai écouté quelques-uns, lus d’autres et je trouvais quelques indices dispersé de cette manière de voir, comme dans cet extrait de son discours devant la NAACP :

 

Obama a clairement dit que les terribles conditions sociales n’étaient pas une justification pour que des jeunes noirs puissent bénéficier de l’assistance gouvernementale. « Même s’il existe des problèmes économiques, » a-t-il dit, « Ce n’est pas une raison pour avoir de mauvaises notes, ce n’est pas une raison pour sécher les cours, ce n’est pas une raison pour abandonner la scolarité et quitter l’école. » « Nous devons apprendre à nos enfants…Votre destin est entre vos mains… Pas d’excuses… toutes ces difficultés vont simplement te rendre plus fort, mieux à même de prendre part à la compétition.

 

C’est une manière de voir les choses qui me préoccupe beaucoup en ce moment de partage du monde entre grandes puissances. J’écoute les analyses des experts de tous bords et je retrouve ce point commun, pour tous il apparaît que dans les équations de ce partage, une donnée est inexistante, considérée comme insignifiante, le désir et la volonté des peuples concernés.

Mais le point de vue d’Obama nous éclaire sur cet élitisme auto-proclamé. Selon quelle loi ? Pour Ordre ? De quel Droit ?

Cela ne me plaît pas. Ma relation au monde n’est pas de compétition et je lutte contre un monde fondé sur la concurrence et le pseudo-élitisme plutôt que sur la coopération sans hiérarchisation.

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29 avril 2014 2 29 /04 /avril /2014 14:03

 

 


Discours de réception du prix Nobel de Littérature, décembre 1982

Gabriel García Márquez (1927-2014)

 

Le 8 décembre 1982, Gabriel Garcia Marquez monte à la tribune de l'Académie suédoise recevoir son prix Nobel de littérature. L'auteur de Cent ans de solitude y livre un discours poignant sur son continent, dévasté par la colonisation puis déchiré par les dictatures, mais prêt à se relever. Vanity Fair vous le propose dans sa version intégrale.

 

 

Antonio Pigafetta, un navigateur florentin qui a accompagné Magellan lors du premier voyage autour du monde, a écrit lors de son passage par notre Amérique du Sud une chronique rigoureuse qui paraît cependant être une aventure de l’imagination. Il raconte qu’il a vu des cochons avec le nombril sur les hanches, des oiseaux sans griffe, dont les femelles couvaient dans le dos des mâles, et d’autres oiseaux, semblables à des pélicans sans langue au bec pareil à des cuillères. Il raconte qu’il a vu une créature animale avec une tête et des oreilles de mule, un corps de chameau, des pattes de cerf et un hennissement de cheval. Il raconte qu'ils ont mis le premier en Patagonie en face d’un miroir, et que ce géant exalté a perdu l’usage de la raison, effrayé par sa propre image.

Ce livre bref et fascinant, qui contient les germes de nos romans d’aujourd’hui, est peut-être le témoignage le plus stupéfiant de notre perception de cette époque. Les Chroniques des Indes nous en a laissés d’autres tout aussi fascinants. L’Eldorado, notre pays tant désiré et illusoire, a été dessiné sur de nombreuses cartes pendant de longues années, changeant de lieu et de forme selon l’imagination des cartographes. À la recherche de la fontaine de jouvence, le mythique Alvar Núñez Cabeza de Vaca a exploré le nord du Mexique durant huit années dans une expédition illusoire, dont les membres se sont dévorés entre eux, et dont cinq seulement, sur les 600 qui étaient partis, sont revenus. L’un des nombreux mystères qui n’ont jamais été élucidés, est celui des 11.000 mules chargées de cent livres d’or chacune, qui, un jour, sont sorties de Cuzco pour payer le sauvetage d’Atahualpa et qui ne sont jamais arrivées à destination. Plus tard, au temps des colonies, des poules, élevées dans les plaines alluviales, se vendaient à Carthagène. Dans leur gésier se trouvaient des pépites d’or. Cette soif de l’or des fondateurs nous a poursuivis jusqu’il y a peu. Au siècle passé encore, la mission allemande chargée d’étudier la construction d’un chemin de fer interocéanique dans l’isthme de Panama, a conclu que le projet était viable à condition que les rails ne fussent pas faits en fer, qui était un métal peu abondant dans la région, mais d'or.
 
Notre libération de la domination espagnole ne nous a pas mis à l’abri de la démence. Le général Antonio López de Santana, trois fois dictateur du Mexique, a donné des funérailles magnifiques à sa jambe droite, qu’il avait perdue dans ladite Guerres des pâtisseries. Le général Gabriel García Morena a gouverné l’Équateur durant 16 ans en monarque absolu. Son cadavre a été veillé, vêtu de son uniforme et de ses médailles de gala, assis dans le fauteuil présidentiel. Le général Maximiliano Hernández Martínez, le despote théosophe du Salvador qui a fait exterminer 30.000 paysans dans un massacre barbare, avait inventé un pendule pour vérifier si les aliments étaient empoisonnés, et a fait couvrir d’un papier rouge l’éclairage public pour combattre une épidémie de scarlatine. La statue du général Francisco Morazán, érigée sur la place principale de Tegucigalpa, est en fait celle du maréchal Ney, achetée dans un entrepôt de sculptures d'occasion à Paris.
 
Il y a onze ans, le Chilien Pablo Neruda, l’un des plus grands poètes de notre temps, a illuminé cette assemblée de sa parole. Depuis, les Européens de bonne volonté – et parfois de mauvaise – ont été frappés, avec une plus grande force encore, par les nouvelles fantomatiques de l’Amérique latine, ce royaume sans frontière d’hommes hantés et de femmes historiques, dont l’entêtement sans fin se confond avec la légende.
 
Nous n’avons pas eu de moment de repos. Un président prométhéen, retranché dans son palais en flammes, est mort en combattant seul une armée entière. Deux accidents suspects d’avions, toujours non élucidés, ont fauché la vie d’un autre président au grand cœur et celle d’un militaire démocrate qui avait restauré la dignité de son peuple. Cinq guerres et 17 coups d’États ont eu lieu. Un dictateur diabolique a émergé et mène, au nom de Dieu, le premier génocide contemporain de l'Amérique latine. Pendant ce temps, 20 millions d’enfants latino-américains meurent avant d’atteindre l’âge de deux ans, ce qui est plus que tous ceux nés en Europe depuis 1970. Le nombre d’enfants manquant à cause de la répression approche les 120.000 disparus. C’est comme si aujourd’hui on ne savait pas où étaient passés tous les habitants de la ville d’Uppsala. De nombreuses femmes enceintes ont été arrêtées et ont accouché dans des prisons argentines. On ignore encore le destin et l’identité de ces enfants, qui ont été donnés en adoption clandestine ou enfermés dans des orphelinats par les autorités militaires. Parce qu’ils ont voulu changer les choses, presque 200.000 hommes et femmes ont péri sur tout le continent, et plus de 100.000 ont perdu la vie dans trois malheureux petits pays d’Amérique centrale : le Nicaragua, le Salvador et le Guatemala. Si c’était aux États-Unis, le chiffre proportionnel serait d’1,6 millions de morts violentes en quatre ans.
 
Un million de personnes ont fui le Chili, un pays aux traditions pourtant hospitalières, soit 12% de sa population. L’Uruguay, minuscule nation de 2,5 millions d’habitants, qui se considérait comme le pays le plus civilisé du continent, a perdu un citoyen sur cinq dans l’exil. Depuis 1979, la guerre civile au Salvador a provoqué le départ de presque un réfugié toutes les 20 minutes. Le pays qu’on pourrait reproduire avec tous les exilés et émigrés forcés d’Amérique Latine aurait une population plus nombreuse que la Norvège. J’ose penser que c’est cette réalité extraordinaire – et pas seulement dans son expression littéraire – qui, cette année, a mérité l’attention de l’Académie suédoise des Lettres. Une réalité qui n’est pas celle du papier, mais qui vit avec nous et détermine chaque instant de nos innombrables morts quotidiennes, et qui nourrit une source de création insatiable, pleine de douleur et de beauté, de laquelle ce Colombien errant et nostalgique n’est qu’un bénéficaire de plus parmi d’autres, distingué par la chance. Poètes et mendiants, musiciens et prophètes, guerriers et racailles, toutes les créatures de cette réalité effrénée ont eu très peu à demander à l’imagination, parce que le plus grand défi fut pour nous l’insuffisance des moyens conventionnels pour rendre notre vie crédible. C’est cela, mes amis, le nœud de notre solitude. 
 
Si ces difficultés, dont nous partageons l’essence, nous engourdissent, il est compréhensible que les talents rationnels de ce côté du monde, exaltés par la contemplation de leurs propres cultures, sont restés sans méthode valable pour nous définir. Il est naturel qu’ils insistent pour nous définir avec les mêmes critères qu'ils utilisent pour eux-mêmes, omettant que les épreuves de la vie ne sont pas égales pour tous, et que la recherche de l’identité propre est aussi ardue et sanglante pour nous qu’elle le fut pour eux. L’interprétation de notre réalité avec des schémas qui ne sont pas les nôtres contribue seulement à nous rendre de plus en plus méconnus, de moins en moins libres, de plus en plus solitaires. Peut-être l’Europe vénérable serait plus compréhensive si elle essayait de nous voir à travers son propre passé. Si elle se rappelait que Londres a eu besoin de 300 ans pour construire sa première muraille et de 300 autres années pour avoir un évêque ; que Rome s’est débattue dans les ténèbres de l’incertitude pendant 20 siècles avant qu’un roi étrusque ne l’implantât dans l’histoire ; que ces Suisses pacifiques d’aujourd’hui, qui nous régalent de leurs fromages doux et de leurs montres apathiques, ont ensanglanté l’Europe avec leurs mercenaires, pas plus tard qu'au XVIe siècle. Même à l’apogée de la Renaissance, 12.000 lansquenets à la solde des armées impériales pillèrent et dévastèrent Rome, et passèrent au fil de l’épée 8000 de ses habitants.
 
Je ne cherche pas à incarner les illusions de Tonio Kröger, dont les rêves d’union entre un Nord chaste et un Sud passionné exaltaient Thomas Mann il y a 53 ans dans ce même lieu. Mais je crois que les Européens à l’esprit éclairé, qui luttent, ici aussi, pour une grande patrie plus humaine et plus juste, pourraient mieux nous aider s’ils reconsidéraient à fond leur manière de nous voir. La solidarité avec nos rêves ne nous fera pas nous sentir moins seuls tant qu'elle ne se concrétisera pas dans des actes de soutien légitime aux peuples qui assument l’illusion d’avoir une vie à eux dans la répartition du monde.
 
L’Amérique latine ne veut et n’a pas de raison d’être un fou sans volonté propre. Il n’est pas, non plus, chimérique de penser que sa quête d’indépendance et d’originalité devrait devenir une aspiration occidentale. Cependant, les progrès de la navigation, qui ont réduit tant de distances entre nos Amériques et l’Europe, semblent, en revanche, avoir augmenté notre distance culturelle. Pourquoi l’originalité qu’on nous admet sans réserve dans la littérature nous est refusée avec toute sorte de suspicions dans nos si difficiles tentatives de changement social ? Pourquoi penser que la justice sociale, que les Européens progressistes essaient d’imposer dans leurs pays, ne pourrait-il pas être aussi un objectif latino-américain, avec des méthodes distinctes dans des conditions différentes ?
 
Non : la violence et la douleur démesurées de notre histoire sont le résultat d’injustices séculières et d’amertumes innombrables, et non un complot ourdi à 3000 lieues de notre maison. Mais nombre de dirigeants et penseurs européens l’ont cru, avec l’infantilisme des anciens qui ont oublié les folies fructueuses de leur jeunesse, qu'il était impossible de trouver une autre destiné que de vivre à la merci des deux maîtres du monde. Telle est, mes amis, l’ampleur de notre solitude.
 
En dépit de tout ceci, face à l’oppression, au pillage et à l’abandon, notre réponse est la vie. Ni les déluges ni les pestes, ni les famines ni les cataclysmes, ni même les guerres éternelles à travers les siècles et les siècles n’ont réussi à réduire l’avantage tenace de la vie sur la mort. Un avantage qui grandit et s’accélère : chaque année il y a 74 millions de naissances de plus que de décès, un nombre suffisant de nouvelles vies pour multiplier, chaque année, sept fois la population de New York. La majorité de ces naissances ont lieu dans des pays avec moins de ressources, et parmi ceux-ci, bien sûr, ceux d’Amérique latine. En revanche, les pays les plus prospères ont réussi à accumuler assez de pouvoir de destruction pour anéantir cent fois non seulement tous les êtres humains qui ont existé jusqu’à aujourd’hui, mais la totalité des êtres vivants qui sont passés par cette planète de malheur.
 
Un jour comme celui-ci, mon maître William Faulkner a dit dans ce lieu : « Je me refuse à accepter la fin de l’Homme. » Je ne me sentirais pas digne d’occuper cette place qui était la sienne si je n’avais pas pleinement conscience que la tragédie colossale, qu’il se refusait à voir il y a 32 ans, est, pour la première fois depuis les origines de l’humanité, bien plus d’une hypothèse scientifique.
 
Devant cette réalité saisissante qui a dû paraître une utopie durant tout le temps humain, nous, les inventeurs de fables qui croyons tout, nous sentons le droit de croire qu’il n’est pas encore trop tard pour entreprendre la création de l’utopie contraire. Une utopie nouvelle et triomphante de la vie, où personne ne peut décider pour les autres de leur façon de mourir ; où l’amour prouve que la vérité et le bonheur sont possibles ; et où les races condamnées à cent ans de solitude ont, enfin et pour toujours, une deuxième chance sur terre.





Merci à Vanity Fair
Source: http://www.nobelprize.org/nobel_prizes/literature/laureates/1982/marquez-lecture-sp.html
Date de parution de l'article original: 20/04/2000
URL de cette page: http://www.tlaxcala-int.org/article.asp?reference=12095

 
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31 août 2013 6 31 /08 /août /2013 19:46

 

 

 

Un peu d’histoire. Il est indispensable pour comprendre les guerres contemporaines de rétablir la vérité concernant les guerres du 20ème siècle et le soutien apportés par des banquiers et industriels étasuniens à Hitler, à Franco, et dans l’article qui suit, à l’extrême-droite grecque alors que la seconde guerre mondiale se poursuit encore.

Les mémoires de la Passionaria que j'ai lu cet été, aussi, mettent en évidence le fait que la victoire de Franco eut été impossible sans l’aide des pétroliers étasuniens qui ont approvisionné en carburant les insurgés franquistes et les armées fascistes italiennes et allemandes qui les soutenaient et sans aussi bien sûr sans l’abandon par les gouvernements et peuples « alliés » du peuple espagnol à ses bourreaux .

Voici un texte bien documenté qui concerne la Grèce et fait partie d'une série sur ce même thème des manipulations de l'histoire et de sa mise en récit :

 

La guerre secrète en Grèce

 

 

Pour maintenir l’ordre libéral, les États-Unis n’hésitèrent pas à faire renverser le gouvernement légitime et majoritaire en Grèce par une clique militaire très minoritaire, en 1967. Leur objectif n’était pas d’empêcher la Grèce de tomber dans l’orbite soviétique, mais de conserver le contrôle des Balkans. Un coup d’État qui en dit long sur la conception de la démocratie à Washington.


Daniele Ganser
Samedi 24 Août 2013


La guerre secrète en Grèce

 


Sous les ordres du dictateur fasciste Benito Mussolini, les troupes italiennes tentèrent d’envahir la Grèce en 1940, mais elles furent repoussées par une résistance populaire massive. L’année suivante, Hitler, qui ne voyait pas d’un bon œil la défaite du Duce, décida d’envoyer ses soldats qui conquirent le pays et le placèrent sous le contrôle des puissances de l’Axe. Les Grecs n’avaient cependant pas déposé les armes et, pendant toute la durée de la guerre, l’armée allemande, qui devait lutter contre une résistance acharnée, eut beaucoup de mal à garder le contrôle du pays. Comme en Italie et en France, les mouvements de résistance à l’occupation fasciste étaient dominés par la présence des communistes. ELAS, l’Armée Populaire de Libération, avait été fondée à l’initiative du parti communiste grec (KKE) quelques mois après l’invasion allemande. Elle rassemblait des partisans issus de toutes les sensibilités de gauche et des femmes ainsi que des ecclésiastiques, dont même quelques archevêques, combattaient dans ses rangs. L’EAM, l’aile politique d’ELAS était elle aussi dominée par les communistes. Sur les sept millions d’habitants que comptait alors la Grèce, deux millions étaient membres du parti EAM, tandis que 50 000 étaient des combattants actifs d’ELAS.
ELAS était la bête noire des nazis et tentait avant tout de leur reprendre le contrôle du pays. Pour ses opérations, l’Armée de Libération recevait l’appui du SOE britannique dont les officiers apportaient leurs conseils aux résistants grecs sur le terrain et leur fournissaient armes et munitions. De nombreuses amitiés furent tissées entre les combattants d’ELAS et les agents de liaison du SOE. Mais les frères d’armes durent subitement se séparer quand le Premier ministre Winston Churchill décida en mars 1943 de cesser de soutenir ELAS, craignant qu’après la défaite de l’Axe, la Grèce passe sous le contrôle des communistes. Churchill envoya secrètement son ministre des Affaires étrangères Anthony Eden auprès de Staline en octobre 1943 afin de procéder au partage des Balkans. L’accord, scellé à Yalta, laissait aux États-uniens et aux Britanniques le champ libre en Grèce et prévoyait le passage de la Roumanie et de la Bulgarie sous contrôle soviétique.
Dans le but de réduire l’influence des communistes et des socialistes grecs, Londres prévoyait de réinstaller au pouvoir l’ancien roi de Grèce qui dirigerait le pays avec l’aide d’un gouvernement conservateur. La directive du Foreign Office, le ministère des Affaires étrangères britannique, du 20 mars 1943, mentionnant ce revirement précise que « le SOE devrait systématiquement se tourner vers les groupes disposés à soutenir le roi et le gouvernement et faire bien comprendre aux mouvements antimonarchiques que le roi bénéficie du soutien du gouvernement de Sa Majesté ». [1 ] Seulement le souverain n’était pas véritablement populaire dans le pays, à cause notamment de son choix de collaborer avec le dictateur fasciste Metaxas. Inspiré par Hitler et Mussolini, Metaxas avait instauré, vers la fin des années 1930, le salut fasciste, bras droit tendu vers l’avant, ainsi qu’une police secrète particulièrement brutale. Cependant, Londres poursuivait sa politique de soutien aux conservateurs et, en octobre 1943, le Foreign Office alla jusqu’à envisager « une véritable politique visant à attaquer et à affaiblir l’EAM par tous les moyens disponibles », une stratégie qui fut finalement abandonnée car jugée « susceptible de compromettre les chances de prendre l’avantage militairement et de s’avérer contre-productive en renforçant la légitimité politique de l’EAM ». [2 ]

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George Grivas (Γεώργιος Γρίβας)

Le revirement des Britanniques fut un véritable choc pour les membres d’ELAS qui commencèrent à être la cible de chasses à l’homme menées par d’anciens collaborateurs pro-nazis et des unités spéciales d’extrême droite appuyées par les Britanniques comme les groupes X du soldat chypriote George Grivas. Churchill, qui observait la scène à distance, remarqua toutefois que les groupes X, incapables de susciter l’adhésion populaire, ne comptèrent guère plus de 600 membres, et qu’ELAS constituait donc toujours la principale force de guérilla du pays. C’est dans ce contexte que le Premier ministre britannique décida fin 1944 de prendre des mesures supplémentaires pour empêcher les communistes grecs d’accéder au pouvoir. Il donna l’ordre de créer en Grèce une nouvelle armée secrète d’extrême droite. Comme l’écrivit le journaliste Peter Murtagh : une « nouvelle unité fut créée au sein de l’armée grecque, qui fut appelée tour à tour Brigade Montagnarde Grecque, Force d’Intervention Hellénique ou LOK, son acronyme en grec (Lochos Oreinon Katadromon) ». Conçue comme une arme contre les communistes et les socialistes, l’unité était interdite à « tous ceux dont la sensibilité politique oscillait entre le conservatisme modéré et la gauche véritable. Sous la supervision des officiers britanniques appliquant les ordres exprès de Churchill, l’unité fut constituée de royalistes et d’antirépublicains. » [3 ]

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Alexandre Papagos (Αλέξανδρος Παπάγος)

Le maréchal Alexandre Papagos fut choisi pour être le premier directeur de la LOK et, avec le soutien des Britanniques, il entreprit de recruter des militants d’extrême droite et de combattre ELAS. [4 ] Alors que l’Armée de Libération Populaire devait lutter à la fois contre l’occupant nazi et contre la Force d’Intervention Hellénique, Churchill craignit le scandale qui risquerait d’éclater s’il devait être révélé à la population britannique que Londres soutenait secrètement les fascistes en lutte contre les communistes grecs. En août 1944, il ordonna donc à la BBC de ne faire « aucune mention d’aucune sorte » d’ELAS en traitant de la libération de la Grèce. [5 ] Mais quelques semaines plus tard, la résistance grecque parvint finalement à vaincre l’occupant allemand et Hitler fut contraint de retirer ses troupes du pays. Winston Churchill exigea immédiatement que la résistance dépose les armes, ce qu’ELAS était disposée à accepter à condition que son dernier ennemi, la LOK, en fît autant.

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Le massacre de la place Syntagma

La Grande-Bretagne refusant que l’armée secrète rende les armes, l’EAM organisa à Athènes une vaste manifestation démocratique pour dénoncer l’ingérence britannique dans les affaires politiques de la Grèce d’après-guerre. Celle-ci eut lieu le 3 décembre 1944, soit six semaines à peine après le départ des forces d’occupation allemandes. Les organisateurs de la manifestation avaient bien précisé leur intention de s’opposer aux Britanniques par des moyens pacifiques, la marche de protestation devant être le prélude à une grève générale. Peu après 11 h 00 ce matin-là, un groupe de 200 à 600 manifestants investit la place Syntagma, qui donne sous les fenêtres du Parlement. Ce petit groupe, constitué pour partie de femmes et d’enfants rassemblés dans une ambiance festive, devait être rejoint par une foule de 60 000 personnes qui avaient été retardées par des barrages policiers. Tandis que les quelques centaines de personnes s’avançaient sur la place, une rangée d’hommes en armes, constituée de policiers et de miliciens, parmi lesquels figuraient vraisemblablement des membres de la LOK, se dressa sur leur passage. Des soldats britanniques et des policiers équipés de mitraillettes avaient pris position sur les toits alentour. La tension était palpable.
L’ordre fut donné de « tirer sur ces enfoirés » et la manifestation pacifique tourna soudain au bain de sang. Une pluie de balles s’abattit sur les manifestants qui se dispersèrent dans toutes les directions. D’après des témoins, la fusillade dura près d’une heure. 25 manifestants trouvèrent la mort, dont un enfant de 6 ans, et 148 autres furent blessés. Quelques minutes plus tard, le cortège principal arriva sur les lieux. Faisant preuve d’un calme et d’une retenue étonnants, les 60 000 manifestants se rassemblèrent dans la solennité et le recueillement autour des dépouilles de leurs camarades abattus. Sur les bannières souillées du sang des morts, les slogans demandaient la fin de l’ingérence britannique dans les affaires grecques. De nombreux manifestants brandissaient des drapeaux états-uniens et grecs, d’autres le drapeau rouge du socialisme. Très peu arboraient l’Union Jack. À Londres, Churchill dut affronter la colère des Communes qui demandaient des explications sur les atrocités commises à Athènes. Tout en reconnaissant le caractère « choquant » des faits, le Premier ministre britannique qualifia néanmoins de stupide la décision de faire défiler autant d’enfants dans une ville remplie d’hommes en armes. Le rôle de l’armée secrète d’extrême droite dans le massacre de la place Syntagma ne fit l’objet d’aucune enquête. [6 ]
Suite à cette démonstration de force, les Britanniques restaurèrent la monarchie en Grèce et obtinrent d’ELAS que celle-ci rende les armes en échange de la promesse d’élections nationales démocratiques, lesquelles eurent lieu en mars 1946. Le parti communiste grec et le centre gauche ayant pris la décision maladroite de boycotter les urnes pour protester contre l’occupation du pays par les Britanniques, la droite remporta une victoire sans appel. On assista dès lors à une succession de gouvernements fantoches de droite à la botte de Londres. Convaincu que la Grèce ne manquerait pas de tomber sous l’autorité brutale de Staline si la gauche grecque accédait au pouvoir, le gouvernement continua à ordonner l’arrestation des membres d’EAM dont beaucoup furent torturés dans les camps de prisonniers de sinistre mémoire, bâtis sur les îles grecques.
En 1945, la plupart des États célébrèrent la fin de la Seconde Guerre mondiale et, afin d’éviter qu’une telle tragédie ne se reproduise à l’avenir, ils fondèrent l’Organisation des Nations Unies. Mais la Grèce était toujours en proie aux combats et la guerre froide débuta. À force de frustration, une fraction de la gauche grecque résolut de reprendre les armes et le maquis et, à l’automne 1946, elle engagea une guerre civile contre les Britanniques et la droite locale. Exsangue au sortir de la guerre, le Royaume-Uni n’était plus en mesure d’assurer le contrôle du pays, au début de l’année 1947, il demanda donc de l’aide aux États-Unis. Le spécialiste de la CIA William Blum raconte que « les responsables à Washington savaient parfaitement que leur nouveau “gouvernement-client” était si vénal et si négligent en matière de droits de l’Homme que même les anticommunistes états-uniens les plus fervents en étaient outrés ». [7 ] Cependant, comme la Yougoslavie communiste fournissait la gauche grecque en armes et vu que le pays semblait sur le point de basculer dans le communisme, le président Truman parvint en exposant sa fameuse doctrine à convaincre le Congrès de la nécessité d’une intervention officielle en Grèce. La Grèce fut ainsi le premier pays à être envahi par les USA dans le cadre de leur politique de lutte contre le communisme à l’échelle mondiale. Au cours des décennies qui suivirent, Washington se servit de l’exemple grec pour justifier ses invasions ouvertes ou clandestines en Corée, au Guatemala, en Iran, à Cuba, au Cambodge, au Nicaragua, au Panama et dans plusieurs autres pays.

 

Lire la suite : La guerre secrète en Grèce


Cet article constitue le seizième chapitre des Armées secrètes de l’OTAN
© Version française : éditions Demi-lune (2007).

 

Cet article fait partie de la série :
1. « Quand le juge Felice Casson a dévoilé le Gladio…  »
2. « Quand le Gladio fut découvert dans les États européens…  »
3. « Gladio : Pourquoi l’OTAN, la CIA et le MI6 continuent de nier  »
4. « Les égouts de Sa Majesté  »
5. « La guerre secrète, activité centrale de la politique étrangère de Washington  »
6. « La guerre secrète en Italie  »
7. « La guerre secrète en France  »
8. « La guerre secrète en Espagne  »
9. « La guerre secrète au Portugal  »
10. « La guerre secrète en Belgique  »
11. « La guerre secrète aux Pays-Bas  »
12. « La guerre secrète au Luxembourg  »
13. « La guerre secrète au Danemark  »
14. « La guerre secrète en Norvège  »
15. « La guerre secrète en Allemagne  »

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25 janvier 2013 5 25 /01 /janvier /2013 22:12

 

 

Christiane Passevant
Avoir 20 ans dans les Aurès
Sur les écrans le 3 octobre 2012 en copie restaurée.

dimanche 7 octobre 2012

Algérie, les Aurès, 21 avril 1961. Un commando de l’armée française, formé d’appelés bretons qui se déclarent ouvertement contre la guerre, détruit une cache de médicaments de l’ALN (Armée de Libération Nationale algérienne). Bilan, plusieurs morts côté algérien, dont deux femmes, et un soldat français. Un Algérien, Youssef, est fait prisonnier. Robert, instituteur dans le civil, est blessé à la jambe et, en attendant des secours qui n’arrivent pas, il revient sur la manière dont le lieutenant Perrin, militaire de carrière, a repris en main ce commando de Bretons insoumis grâce à une mise en condition pour le transformer en commando de chasse. Tous ont goûté à cette guerre sale, cette guerre coloniale à laquelle ces fils de prolétaires refusaient de participer. Et pourtant, ils tuent et torturent sans état d’âme, pillent et violent sans trop se poser de question, sauf l’un d’eux, Noël, qui refuse de tirer.

Le 22 avril, c’est le putsch des généraux à Alger. Le groupe s’insurge contre le lieutenant qu’ils neutralisent : « la quille bordel ! Y a plus de guerre ! Y a plus d’armée ! » Mais le 25 avril, après l’échec des putschistes, le fameux discours du général de Gaulle appelle au rétablissement de la discipline et de la hiérarchie. La flambée d’autonomie aura duré peu de temps. Retour au camp de base avec le lieutenant libéré qui ordonne l’exécution du prisonnier, Youssef, après l’avoir attaché en plein soleil au puits de manière à ce que les villageois le voient…

Sorti en 1972 et salué au Festival de Cannes, Avoir 20 ans dans les Aurès [1], est un des rares films sur la guerre d’Algérie — sujet tabou — qui n’a rien perdu de sa force aujourd’hui ni de la portée de son engagement. Au-delà de l’intérêt historique, s’y ajoute une réflexion plus large sur la guerre, qui touche à l’universel, sur l’embrigadement psychologique qu’opère l’armée. Ce qui renvoie à un questionnement personnel : que faire en effet lorsqu’on est pris, ou prise, au piège d’une situation similaire à celle du film ? Dans l’enchaînement d’événements extrêmes, les principes, les convictions, les interdits permettent-ils de résister à la manipulation, à la peur et au réflexe de défense qu’elle suscite, et finalement au basculement dans la barbarie ?

Des questions récurrentes tout au long du film de René Vautier qui montre de jeunes hommes — insoumis au départ — englués dans l’engrenage de la peur et de la violence en groupe. Avoir 20 ans dans les Aurès… Dans l’une des scènes du film, un des soldats du commando met en joue un jeune adolescent : « Tu ne vas pas tirer, c’est un gosse ! » lui dit l’un des appelés. Et son copain de tirer sur sa cible — un môme — en lui répondant : « De toute façon, dans 10 ans, c’est un fellouze ! » Le processus de déshumanisation de l’autre a effacé le refus d’une guerre sale contre une population civile. Le jeu de massacre est en place pour le meilleur des mondes prôné par l’armée et les autorités. La chanson de Pierre Tisserand qui accompagne le film est claire : « Fous pas ton pied dans cette merde, c’est une vraie histoire de fou »… [2]

Comment faire basculer les scrupules des jeunes appelés et les pousser peu à peu à la barbarie ? Le lieutenant Perrin, superbement interprété par Philippe Léautard, décrit sa méthode : on mène le groupe dans un traquenard, un copain mort, et la peur, la vengeance prennent le pas sur la détermination de ne pas tuer. La spirale fonctionne : Œil pour œil, dent pour dent, la peur, la vengeance… Et l’analyse, les convictions s’estompent pour faire place à l’envie de tuer du fellagah, de se complaire dans la barbarie. « Au début, on tire n’importe où parce que l’on a la trouille. Après on vise et on y prend goût. »

Évidemment, « Quand ils reviennent en France, il faut les interner [ces jeunes soldats] pour qu’ils redeviennent des civils, mais ça, c’est pas mon boulot, [lance le lieutenant]. C’est une affaire de gouvernement. Moi j’ai à faire la guerre. »

La guerre et ses victimes, la guerre et ses pions, Avoir 20 ans dans les Aurès est certainement l’un des films les plus marquants contre la guerre, son horreur et son absurdité. « Et merde, on a pas demandé à être là ! » dit l’un des appelés, face à la caméra, quand le film se fait documentaire au détour d’un témoignage. Et cet aveu d’impuissance est en résonance aux images de destruction de maisons, de villages rasés, de massacres des populations civiles. Images tournées par Vautier en pleine guerre d’Algérie. La logique du meurtre est banalisée pour « nettoyer le terrain », « pacifier » les populations qui réclament leur indépendance, le respect de leurs droits. Il faut donc tuer, piller, violer pour faire taire la révolte et garantir les privilèges d’une minorité.

Le film de René Vautier est construit sur « un ensemble de situations, toutes basées sur des témoignages concordants. La véracité de chaque épisode relaté peut être confirmée devant un tribunal par un minimum de cinq témoins. » D’après des faits réels… annonce le générique avant les premières images. Si le film avait montré des soldats convaincus du bien fondé de la guerre coloniale, la trame eut été binaire. Mais René Vautier met en scène un groupe de jeunes hommes plutôt politisés, pas des brutes, mais des syndicalistes acquis à l’idée qu’ils sont des prolos et qu’il n’est pas question pour eux de se faire manipuler par la grande muette. Les contradictions de ce jeu de dupes n’en sont que plus effrayantes. La situation est exemplaire, car du groupe, un seul résiste et refuse d’accepter cette dérive vers la tuerie organisée.

Avoir 20 ans dans les Aurès de René Vautier est une réflexion sur la guerre coloniale, tout à fait actuelle si l’on songe à ces jeunes militaires israéliens et israéliennes dans les territoires palestiniens occupés. Trois ans de service militaire pour les hommes, deux ans pour les femmes, à subir une propagande efficace pour déshumaniser l’ennemi-e hypothétique et désigné-e. L’uniforme et le groupe, se conformer aux ordres de la hiérarchie, obéir sans réfléchir. Alors l’inacceptable — tuer des femmes, des enfants, des civils — devient possible. La peur et le dégoût de l’autre, à la base de l’occupation militaire, René Vautier les dépeint parfaitement. Et cela pourrait se résumer au phénomène de l’uniforme et du groupe. Quelles sont, en effet, les conséquences de l’isolement dans un groupe armé avec permis de tuer ?

Avoir 20 ans dans les Aurès montre « comment on [a] pu entraîner des gens sur cette pente qui faisait d’eux des mercenaires assassins. Il ne s’agissait pas de dédouaner ce qui avait été fait […] mais d’expliquer comment on avait entraîné des jeunes sur ce chemin-là. »

Entretien avec René Vautier dans le prochain Divergences 2.

[1]

Avoir 20 ans dans les Aurès de René Vautier

Distribution

Alexandre Arcady : Noël

Hamid Djellouli : Youssef

Philippe Léotard : Le lieutenant Perrin

Jacques Canselier : Coco

Jean-Michel Ribes : Le curé

Alain Scoff : Lomic

Jean-Jacques Moreau : Jacques

Michel Elias : Robert, l’instituteur

Yves Branellec : Youenn

Philippe Brizard : La Marie

Charles Trétout : Charles

Pierre Vautier : Pierrick

Alain Vautier : Lanick

Bernard Ramel : Nanard

Fiche technique

Réalisateur : René Vautier

Scénario : René Vautier

Image : Pierre Clément

Montage : Nedjma Scialom

Durée : 100 minutes

Date de sortie : mai 1972 (Cannes)

Prix de la Critique internationale à Cannes en 1972.

[2] « Fous pas ton pied dans cette merde,

C’est une vraie histoire de fou,

Pas ton pied dans cette merde,

Ou bien t’y passeras jusqu’au cou

On te foutra une veste militaire,

Un bout d’treillis, pour cacher ton derrière,

A c’moment là, plus de machine arrière,

Fous pas ton pied dans cette merde,

C’est une vraie histoire de fou,

Pas ton pied dans cette merde,

Ou bien t’y passeras jusqu’au cou

On te mettra un fusil dans les mains,

On t’apprendra à faire le pantin,

Et même si, tu t’crois le plus malin,

On t’emmènera tuer des copains,

Comme si c’était de vulgaires lapins.

Fous pas ton pied dans cette merde,

C’est une vraie histoire de fou,

Pas ton pied dans cette merde,

Ou bien t’y passeras jusqu’au cou »

 

Source :
Avoir 20 ans dans les Aurès - [Divergences2 ; revue libertaire internationale en ligne]

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16 janvier 2013 3 16 /01 /janvier /2013 20:06

 

 

Pénétrer la complexité du conflit malien je ne le puis. Les stratégies de l’Empire sont tellement récurrentes, prendre des gens qui hier s’entendaient en bons voisins, et même en bons amis, monter les groupes les uns contre les autres, fabriquer des ennemis intérieurs, en importer de l’extérieur. Et forcer « l’opinion publique internationale » à choisir une cause parfois entre deux - ou plus de - causes tout aussi indéfendables les unes que les autres.

Désolée, je suis farouchement opposée à toute intervention de l’empire, parce que j’en connais les motivations, les méthodes et les conséquences désastreuses, et je refuse d’entrer dans ce jeu qui me force à définir des bons et des méchants selon leur règle. Je suis du camp de ceux qui se retrouvent pris entre deux feux d’un combat qu’ils n’ont pas voulu parce qu’ils savent bien que la guerre est toujours la pire réponse à un conflit, et jamais une solution, je suis du camp du juif israélien tabassé et emprisonné par la police de son pays pour s’être uni à la lutte de son frère palestinien.

Je suis du camp des Lubumba qui se lèvent pour libérer la parole d’un peuple. Qui ne peuvent accepter que Baudouin roi des Belge accordant au Congo une indépendance de façade parle d’œuvre de civilisation là où il est question de meurtres, d’esclavagisme, de mains coupées, de viol et de pillages. Quand se lève l’homme noir pour dire à l’homme blanc qu’il se trompe et qu’il ment la punition ne se fait pas attendre, ils ont tué Patrice Lubumba. Ils ont dissous son corps dans l’acide.


Je suis du camp des Sankara, l’auteur de ces paroles auxquelles il n’a pas survécu.


« De cette façon nous pourrions dire aux autres qu’en refusant de payer la dette nous ne rentrons pas dans une démarche belliqueuse, au contraire, mais dans une démarche fraternelle pour dire ce qui est. Du reste les masses populaires en Europe ne sont pas opposées aux masses populaires en Afrique, mais ceux qui veulent exploiter l’Afrique ce sont les mêmes qui exploitent l’Europe, nous avons un ennemi commun. » 

.

En lisant ces paroles de Thomas Sankara, nous ne pouvons que constater l’échec du projet de gauche, comme il se concevait à l’époque. S’il avait réussi jamais nous n’aurions été sommés de choisir entre nos amis ou nos alliés par notre ennemi commun. Ce projet de gauche était celui d’une grande alliance des Peuples qui aurait depuis longtemps du faire barrage aux avancées néolibérales et les renvoyer aux oubliettes de l’histoire dès qu’elles ont pointé le bout du nez.

J’ai été de cette gauche qui parlait de fraternité des Peuples, je ne suis pas de ceux qui collabore avec les pilleurs de l’Afrique et les assassins de ses espoirs.

 

http://journal-audible.org/wp-content/uploads/2012/06/TS-470x260.jpg

 

Thomas Sankara

Bien qu’une dizaine de livres en français lui aient été consacrés, Thomas Sankara reste méconnu du grand public. Il fait pourtant partie des rares révolutionnaires intègres du XXème siècle et, à ce titre, mérite d’être connu et reconnu. Cet homme a donné son nom au Burkina Faso, soit « le pays des hommes intègres ». Durant les quatre ans où il fut Président, de 1983 à 1987, Sankara mit en place une politique sociale unique en Afrique qui augmenta significativement le niveau de vie de ses concitoyens.

 Le 29 septembre 1987 Sankara prononça un discours historique sur la dette, qui fait étrangement écho à ce que pourrait prononcer un dirigeant grec, espagnol ou portugais aujourd’hui. Lors de ce discours dans lequel il exhorte les pays africains à former un front uni contre la dette, Sankara affirme que :

 « La dette sous sa forme actuelle contrôlée et dominée par l’impérialisme orchestre une reconquête savamment organisée pour que l’Afrique, sa croissance, son développement, obéissent à des paliers et des normes qui nous sont étrangères de sorte que chacun d’entre nous devienne esclave financier, c’est-à-dire esclave tout court. »

Puis, il précise le principe du front uni qu’il appelle de ses vœux : « De cette façon nous pourrions dire aux autres qu’en refusant de payer la dette nous ne rentrons pas dans une démarche belliqueuse, au contraire, mais dans une démarche fraternelle pour dire ce qui est. Du reste les masses populaires en Europe ne sont pas opposées aux masses populaires en Afrique, mais ceux qui veulent exploiter l’Afrique ce sont les mêmes qui exploitent l’Europe, nous avons un ennemi commun. »

Nous devons reconnaître le caractère visionnaire de Sankara, ce dernier expliquant enfin que  « si le Burkana Faso seul refuse de rembourser la dette je ne serai pas là à la prochaine réunion »

L’homme avait vu juste ; il fut assassiné deux semaines plus tard lors d’un coup d’Etat portant au pouvoir Blaise Campaoré. Ce denier mit immédiatement en place une politique dite de « rectification de la révolution » entendons une table rase de ce qu’avait bâti Sankara pendant 4 ans. Depuis le Burkina est redevenu un maillon docile de ce que l’on nomme le réseau Françafrique. François-Xavier Verschave définit ce réseau[1] :

«  La Françafrique désigne une nébuleuse d’acteurs économiques, politiques et militaires, en France et en Afrique, organisée en réseaux et lobbies, et polarisée sur l’accaparement de deux rentes : les matières premières et l’aide publique au développement. La logique de cette ponction est d’interdire l’initiative hors du cercle des initiés. Le système, autodégradant, se recycle dans la criminalisation. »

L’un des personnages centraux de la Françafrique se nomme Pierre Messmer. Nous le mettons en avant car il a co-fondé, l’Observatoire Européen pour la Démocratie et le Développement (OEDD). Cet organisme est le seul à avoir envoyé des observateurs lors de la dernière élection au Burkina Faso en 2010. Campaoré y fut réélu avec 80% des suffrages au 1er tour. Les observateurs de l’OEDD déclarèrent que ces élections s’étaient « tenues selon les règles de l’art ».

Effectivement pour qui connaît les méthodes de la Françafrique, une élection au 1er tour avec 80% des suffrages est une élection respectant les règles de l’art….et comprend surtout qu’un Homme comme Thomas Sankara ait une durée de vie limitée en tant que chef d’État.

[1] François-Xavier Verschave, Françafrique : Le plus long scandale de la République

 

Source : Thomas Sankara

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10 janvier 2013 4 10 /01 /janvier /2013 16:49

 

 

 

 

Pour situer l’évolution de l’homme dans son contexte, il apparaît important de présenter d’abord l’échelle du temps par rapport à celle de la Terre.

Stephen Jay Gould a écrit que si l'on comparait l'histoire de la terre à la Tour Eiffel, la petite couche de peinture tout en haut du troisième étage représenterait la présence de l'homme...

Nous devons donc rester humbles !


Chronologie simple de l'évolution :

  • - 4 600 millions d'années : formation de la planète Terre,
  • - 4 000 millions d'années : apparition des cellules procaryotes,
  • - 3 000 millions d'années : apparition de la photosynthèse,
  • - 2 000 millions d'années : apparition des cellules eucaryotes,
  • - 1 000 millions d'années : apparition d'une vie multicellulaire,
  • - 600 millions d'années : apparition d'animaux simples,
  • - 570 millions d'années : apparition des arthropodes,
  • - 550 millions d'années : apparition d'animaux complexes
  • - 500 millions d'années : apparition des poissons et des proto-amphibiens,
  • - 475 millions d'années : apparition des plantes terrestres,
  • - 400 millions d'années : apparition des insectes et des graines,
  • - 360 millions d'années : apparition des amphibiens,
  • - 300 millions d'années : apparition des reptiles,
  • - 200 millions d'années : apparition des mammifères,
  • - 150 millions d'années : apparition des oiseaux,
  • - 100 millions d'années : apparition des fleurs
  • - 65 millions d'années : disparition des dinosaures non-aviaires
Le Big Bang
Big Bang Schéma du Big-bang

Tout commence il y a 14 milliards d'années avec le Big Bang, une énorme explosion, puis environ quelques 10 milliards d'années plus tard se forme le système solaire et notre planete, la Terre.

Il y a 4.6 milliards d'années, La terre est encore en ébullition, c'est une masse de magma, bien entendu pas de vie. Il va falloir attendre encore quelques millions d'années afin quelle se solidifie.

Il y règne une intense activité sismique et volcanique et la terre n'est toujours pas très... accueillante !

La vie...

La "vie" apparaît vers -3.8 milliards d'années (Précambrien) : de simples cellules d'organismes procaryotiques, les bactéries. Leurs descendantes sont toujours parmis nous... et on peut dire qu'elles sont vraiment les plus vieilles habitantes de notre planète !

De cette époque jusqu'à -2 milliards d'années... il n'y a pas de trace d'évolution. Puis apparaît la cellule eucaryote avec un noyau.

La vie... grouillante

Vers -555 millions d'années (Paléozoïque) la taille des organismes augmente. D'une cellule on passe à plusieurs...

On assiste à une véritable explosion de diversité : méduses, algues, éponges... 

Le rythme s'accélère

20 millions d'années plus tard certains organismes fabriquent déjà des coquilles et on commence à trouver des invertébrés marins... La vie prend des formes dignes de films fantastiques.

La faune de Burgess (arthropodes du Cambrien) est l'exemple le plus représentatif.

Euryptérides géants L'euryptéride
La vie... sort de l'eau

Les premiers restes de plantes et d'animaux terrestres remontent à environ -410 millions d'années (Silurien). Pour les plantes on fait dans la simplicité (pas de racine) et on reste proche de l'eau.

Pour les animaux... acariens, insectes et les ancêtres des scorpions sont les maîtres sur terre...

Catastrophes en série
Dimétrodons, reptiles mammaliens Reptiles mammaliens

Vers -250 millions d'années au Permien, une baisse du niveau des eaux et une énorme explosion volcanique vont provoquer une extinction en masse de nombreuses espèces.

Les océans se vident, et seuls quelques reptiles mammaliens survivent...

Les premiers mammifères

C'est à partir des reptiles qu'émerge la branche des mammifères, vers -200 millions d'années (Trias). Les caractéristiques principales sont le sang chaud et les poils (on est peu de choses !)...

Les sauropsides

Eh oui.. voilà enfin le temps des dinosaures... qui vont dominer la Terre jusqu'à -65 millions d'années...

Il occupent le terrain avec les crocodiles, les serpents et les lézards...

Mais une intense activité volcanique et une météorite qui heurte la Terre vont avoir raison des dinosaures géants et d'un grand nombres d'espèces...

Le retour des mammifères

Profitant de ce vide écologique (Cénozoïque), les mammifères vont prendre possession du terrain en 10 millions d'années...

C'est vers -55 millions d'années que nous allons retrouvrer les premières traces de primates..

Et l'homme dans tout ça ???

les premiers hominidés ne datent que de -6 millions d'années...


Le calendrier cosmique selon André BRAHIC *

  • 1er janvier : Début de l’expansion de l’univers, le Big bang.
  • 1er avril : Notre galaxie est formée.
  • 9 septembre : Naissance de notre système solaire.
  • 14 septembre : La Terre est formée.
  • 1er octobre : La vie apparaît.
  • 9 octobre : Les bactéries apparaissent.
  • 1er novembre : Invention du sexe pas les micro-organismes.
  • 12 novembre : Apparition des plantes fossiles et de la photosynthèse.
  • 15 novembre : Les premières celles à noyaux commencent à prospérer.
  • 1er décembre : L’atmosphère se charge en oxygène.
  • 16 décembre : Les premiers vers émergent.
  • 17 décembre : Les invertébrés apparaissent.
  • 18 décembre : Le plancton océanique est en place.
  • 19 décembre : Apparition des premiers poissons et premiers vertébrés.
  • 20 décembre : Les plantes colonisent les terres émergées.
  • 21 décembre : Les premiers insectes.
  • 22 décembre : Les premiers amphibies.
  • 23 décembre : Les premiers reptiles.
  • 24 décembre : Les premiers dinosaures.
  • 26 décembre : Les premiers mammifères.
  • 27 décembre : Les premiers oiseaux.
  • 28 décembre : Extinction des dinosaures.
  • 29 décembre : Les premiers cétacés et les premiers primates apparaissent.
  • 30 décembre : Les grands mammifères sont sur Terre.
  • 31 décembre :
    • 22h30 : Apparition des premiers hommes.
    • 23h46 : Les humains domestiquent le feu.
    • 23h59 : Ils ont besoin de communiquer et peignent sur les parois des grottes.
    • 23h59mm20s : Invention de l’agriculture.
    • 23h59mm50s : L’astronomie, la plus ancienne des sciences se développe, les premières dynasties s’installent.
    • 23h59mm51s : Invention de l’alphabet.
    • 23h59mm54s : Invention de la métallurgie du fer, l’empire Assyrien et la fondation de Carthage.
    • 23h59mm56s : L’empire romain, la géométrie d’Euclide, la physique d’Archimède, l’astronomie de Ptolémée.
    • 23h59mm58s : La civilisation Maya, l’empire Byzantin, les invasions mongoles et les croisades.
    • 23h59mm59s : Renaissance en Europe.

* André Brahic: Enfants du Soleil. Histoire de nos origines (1999)

Via : Les Dernières Nouvelles du Monde   et Chronologie et évolution de la planète Terre - Du big bang à nos jours

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9 juillet 2012 1 09 /07 /juillet /2012 05:35

 

Je remercie Elsie Le Monde du Sud /Elsie News qui m'a donné envie d'en savoir plus au sujet de Lovinsky Pierre Antoine. Je publie ici l'intervew qu'il a donné peu avant sa disparition, pour que l'homme disparu ses paroles continues d'être vivantes, pour que ceux qui l'ont enlevé aprennent qu'il ne suffit pas de faire disparaître un homme pour que sa voix s'éteigne. Pour aussi qu'un jour on en finisse avec ce monde du pire qui crée tant de souffrances là au devrait régner la joie.

Saura-t-on jamais où est passé Lovinsky Pierre Antoine ?
Par:Haïti Liberté
...

Le 12 août 2007, Lovinsky Pierre-Antoine dirigeant de l’organisation 30 septembre, revenait d’un séjour en province. Il laissa précipitamment son domicile après avoir reçu un appel téléphonique lui fi xant un rendez-vous. Depuis, il n’a plus été revu. La disparition a été rapportée à toutes les instances concernées du pays : des bureaux de la Présidence à la Police Nationale d’Haïti en passant par la Primature, le Parlement et le Ministère de la Justice. Les proches de Pierre-Antoine n’oublièrent pas de mettre au courant deux organisations supposées concernées par les droits humains, l’ONU et l’OEA. Un an plus tard, soit le 12 août 2008, il n’y a eu aucune enquête de faite, aucune tentative de mener une enquête, voire de disposer d’informations utiles, satisfaisantes à fournir à la famille de Lovinsky Pierre-Antoine. 

Ce jeudi 12 août 2010, sauf miracle, Mme Michèle Pierre-Antoine, ses deux garçons et la famille du disparu resteront encore sans nouvelles de Lovinsky. Il y a eu pourtant des pistes et des indices qui auraient pu être exploités à des fi ns d’enquête, ainsi les empreintes digitales trouvées dans le véhicule utilisé par Pierre-Antoine. Mais à toute règle il y a exception. En effet dans le cas de Lovinsky Pierre-Antoine, la Police nationale n’a même pas pu se targuer de dire que «l’enquête se poursuit», n’ayant jamais pu dire qu’elle avait même commencé.

Le plus tragique, c’est le mutisme de la pierre, persistant, contre lequel se sont brisées la douleur et l’agonie mentale d’une épouse meurtrie et de deux adolescents psychologiquement broyés par la disparition sans explication de leur père. Il faut croire que Lovinsky faisait peur, politiquement, à bien des gens qui pouvaient avoir pris ombrage de sa verticalité, de «sa militance, son sérieux, son respect de la parole donnée, son esprit d’équipe, et surtout son amour pour Haïti», pour reprendre les mots justes de son épouse, sans oublier que dans un contexte électoral éventuel, il pouvait être un «rival dangereux».

Haïti Liberté n’a pas oublié cette disparition qui enlève encore le sommeil. Les membres du journal s’associent à la douleur encore vive des proches de ce patriote progressiste, authentique défenseur des droits humains et de la cause du peuple pour leur dire qu’eux non plus ils n’ont pas oublié leur cher Lovinsky. Les ravisseurs courent encore les rues, à Port-au-Prince ou à l’extérieur. C’est sûr. Saura-t-on jamais où est passé Lovinsky Pierre Antoine ?


 

Posted on:8/13/2010

Source : Haiti Liberte: Hebdomadaire Haitien / Haitian weekly

 

Entrevue: Souveraineté et justice en Haïti. Entrevue de Lovinsky Pierre-Antoine

Trant Septanm (30 Septembre) > Entrevue: Souveraineté et justice en Haïti.

Entrevue: Souveraineté et justice en Haïti.

Entrevue de Lovinsky Pierre-Antoine

accordée au Journaliste Darren Ell


Souveraineté et justice en Haïti.

Première partie d’une entrevue menée par Darren Ell le 15 février 2007. Photos par Wadne Pierre

Lovinsky Pierre-Antoine est coordonateur de la Fondazyon Trant Septanm (Fondation trente septembre) qui œuvre auprès des victimes des coups d’état de 1991 et 2004. Dans sa jeunesse, M. Pierre-Antoine a travaillé sur des projets d’alphabétisation avec des enfants de la rue dans sa ville natale de Port de Paix. Après avoir déménagé à Port-au-Prince et terminé sa formation comme psychologue, il s’est mis à fonder des organisations : La Fondsayon Kore Timoun Yo (Fondation de soutien aux enfants) pour les enfants de la rue à Port-au-Prince ; FAM (Foyer pour Adolescentes Mère) ; MAP Vivre (« Je vis »), un programme d’aide psycho-médical pour les victimes du premier coup d’état contre Jean-Bertrand Aristide en 1991. À ce point-là dans son évolution, M. Pierre-Antoine s’est aperçu que pour pleinement cicatriser les plaies du coup d’état, il fallait aussi traiter les éléments sociaux, économiques, politiques et juridiques du coup d’état. Il fonde alors la Fondazyon Trant Septanm. Il commence alors à travailler avec le Bureau des avocats internationaux (BAI), dont les membres mènent la lutte légale pour la justice en Haïti.

Darren Ell (DE) : Pourquoi avez-vous choisi le nom « Fondation 30 septembre » ?

Lovinsky Pierre-Antoine (LPA) : C’est une question de travailler au niveau de la mémoire, question de conserver dans la mémoire de la population de façon très vivante les cicatrices, les horreurs que la population a vécues pendant ce premier coup. Nous avons senti comme un devoir de travailler à conserver cet aspect dans la mémoire des gens. On a pris le nom « 30 septembre » parce que le premier coup d’état contre le Président Aristide a eu lieu le 30 septembre 1991.

DE : Vous avez quitté Haïti en 2004. Pourquoi ?

LPA : J’ai quitté Haïti parce que mon organisation non seulement était très engagée, mais j’ai aussi mené une campagne sans merci contre le retour des anciennes forces armées d’Haïti avec une exposition de 200 photos, une exposition itinérante que j’ai promené à travers le pays pour montrer aux gens les horreurs commises par les anciens militaires haïtiens, et pour montrer qu’on était contre le retour de l’armée. Étant donné que le gouvernement des Etats-Unis par, l’entremise de la CIA, s’est beaucoup servi des anciens militaires pour mener des actions meurtrières contre la population haïtienne en l’année 2003, quand ils ont fait le coup d’état du 29 février 2004, ils me cherchaient. J’ai été obligé de me cacher pendant quelques jours.

DE : À Port-au-Prince même ?

LPA : À Port-au-Prince même. Finalement, j’ai pu quitter le pays, ironiquement avec l’aide de l’ambassade américaine. J’ai une résidence permanente aux Etats-Unis, mais je n’y ai jamais vécu. J’y vais seulement de temps en temps. Quand je suis sauvé, j’ai su qu’il y avait un avion qui partait, un vol organisé par le gouvernement des Etats-Unis pour les ressortissants américains et les résidents permanents des Etats-Unis. Il y avait une connexion qui avait été faite par ma belle-sœur qui vit aux Etats-Unis et qui travaille dans les agences de voyage, et on m’a dit que j’ai pu partir. Mais ils m’ont arrêté. Les marines américains m’ont arrêté.

DE : En Haïti ou aux Etats-Unis ?

LPA : En Haïti.

DE : Ils vous attendaient à l’aéroport ?

LPA : Non. Ils m’avaient donné rendez-vous tout près de la résidence de l’ambassadeur américain dans un endroit qui s’appelle Le Pétionville Club, pour toutes les personnes qui allaient partir ce jour-là. Quand ils m’ont repéré, ils m’ont fait arrêter et m’ont conduit à l’ambassade des Etats-Unis. Ils m’ont menacé. C’était vraiment une séance de torture psychologique mené par Luis Moreno. C’est lui-même qui s’est présenté à la résidence du Président Aristide pour le menacer et le kidnapper. Quand ils ont finalement décidé de me laisser partir de l’ambassade, ils ont donné des informations à Radio Kiskeya qui a donné l’informations sur les ondes que j’allais partir et que les militaires qui étaient dans les rues à Port-au-Prince devaient se rendre à l’aéroport pour m’intercepter. Mais il y avait heureusement les militaires canadiens qui veillaient à l’aéroport et c’est eux qui ont empêché aux anciens militaires haïtiens de me prendre. Et ainsi j’ai pu monter l’avion et partir.

DE : Je suis canadien et on critique souvent la présence militaire canadienne en Haïti au moment du coup d’état parce qu’ils ont aidé dans le départ de Jean-Bertrand Aristide. Mais ils vous ont aidé à partir.

LPA : Effectivement. Je l’ai su après que c’est eux qui ont empêché aux hommes de Guy Philippe, qui était là avec Buteur Métayer et d’autres civils armés et anciens militaires qui se sont rendu dans plusieurs voitures à l’aéroport pour m’intercepter. Et d’après ce que j’ai su après, les militaires canadiens ont dit que c’est une zone stérile et qu’ils ne peuvent pas pénétrer sur la piste avec des armes. C’est ainsi que j’ai pu partir.

DE : Comment voyez-vous la présence des troupes canadiennes sur le terrain au moment, pas avant, mais au moment du coup. Ils n’étaient pas là pour empêcher un coup d’état ou pour donner un appui au gouvernement démocratique, mais ils étaient là au moment du coup d’état et après. Comment voyez-vous cette présence ?

LPA : Il faut comprendre que la présence des militaires canadiens aussi bien qu’américains et français qui étaient arrivés à ce moment-là, ils sont arrivés parce que les hommes de Guy Philippe, qui étaient payés pour faire le coup, ne pouvaient pas faire le coup. La population était debout pour défendre le processus démocratique qui était en cours, qui avait ses faiblesses, mais qui était en cours avec le Président Aristide. Cette force multinationale qui est venue et dont les forces canadiennes en font partie, c’est une force d’occupation. Ils sont venus réaliser un coup que d’autres ne pouvaient pas réaliser à leur place. Donc, je dirais que je suis très critique vis-à-vis de la présence des marines américains, les forces spéciales des Etats-Unis qui étaient là, et aussi les forces canadiennes et françaises.

D’autant plus que cette intervention est arrivé à un moment où nous autres en Haïti nous célébrons le 200ème anniversaire de notre indépendance. C’était une véritable gifle à la nation Haïtienne. D’autant plus qu’au moment où on célébrait le premier centenaire de notre indépendance sous le Président Nord Alexis en 1904, c’était la même situation. Les puissances néocolonialistes avaient organisé le même complot pour saboter la première commémoration du centenaire de l’indépendance d’Haïti. Pour le bicentenaire de l’indépendance, c’est le même complot. C’était comme s’ils voulaient minimiser le geste de 1804, comme s’ils voulaient présenter au monde l’exemple d’Haïti qui avait pris son indépendance trop tôt. Ils voulaient la montrer comme un échec, et ils ont contribué par tous les moyens qui étaient en leur pouvoir à cet échec. C’est pourquoi je suis très critique vis-à-vis de cette intervention de l’armée canadienne et de leur présence à côté des Etats-Unis et la France.

DE : Parlons de la notion d’occupation. Votre organisation a fait des parallèles entre les stratégies de répression du régime de Gérard Latortue, le Premier Ministre installé par les forces étrangères au moment du départ de Jean-Bertrand Aristide, et la brutalité de l’occupation américaine de 1915 à 1934. Notamment, vous avez parlé du traitement de Charlemagne Péralte. Pouvez-vous parler de Charlemagne Péralte et des parallèles que vous avez établis entre la façon dont on a traité cet homme-là et comment le régime de Latortue a traité la population d’Haïti entre 2004 et 2006.

LPA : D’abord if faut dire que Charlemagne Péralte est un héro national. Il a pris les armes pour défendre le territoire national, pour défendre le pays contre l’occupation militaire américaine de 1915. Il avait son armée, ce qu’on appelait à l’époque « les Cacos ». Les Cacos étaient constitués de gens issus des milieux défavorisés. C’étaient des gens pauvres, alors qu’une partie de la classe intellectuelle était cooptée avec l’occupant et l’élite bourgeoise, mais les pauvres étaient debout pour défendre la souveraineté nationale avec Charlemagne Péralte.

Le parallèle avec 2004, c’est qu’après le coup d’état de 2004 et l’occupation du territoire national par la force multinationale, qui deviendra plus tard MINUSTAH, il y avait un groupe de la population, les gens des quartiers défavorisés, qui ont pris aussi les armes pour défendre la souveraineté nationale. C’est eux qui ont empêché les hommes de Guy Philippe et de Buteur Métayer, les hommes payés par le CIA, c’est eux qui les ont empêchés de faire le coup d’état. Après que le gouvernement des Etats-Unis, les armées américaine, canadienne et française ont fait l’intervention pour consommer le coup d’état, pour kidnapper le Président Aristide et l’amener en exil, les camarades des quartiers populaires de Cité Soleil, de Bel Air et autres quartiers populaires ont continué à militer pour défendre la souveraineté nationale, pour continuer à lutter contre l’occupation. Le régime de Gérard Latortue et la presse aussi, la presse putschiste et les médias qui ont collaboré avec les occupants et qui continuent à collaborer avec les occupants, ils ont taxé les gens des quartiers populaires comme étant des « chimères », comme étant des « bandits », comme étant des « criminels ». Ils voulaient ainsi salir la réputation de Fanmi Lavalas parce que les gens de Fanmi Lavalas militent contre l’occupation parce que ce sont eux les victimes du coup d’état du 29 février 2004.

C’est cette même catégorie de la population qui était avec Jean-Jacques Dessalines au moment de l’indépendance, ce qu’on appelait l’armée des « va-nu-pieds », l’armée des indigènes. L’armée indigène n’avait pas de costumes. C’étaient des esclaves. Donc, en Haïti en 1915, c’était la même chose. C’étaient les pauvres des quartiers populaires qui accompagnaient Charlemagne Péralte. On les appelait l’armée des Cacos. Pendant les deux années du régime de Latortue, c’était la même situation. C’est toujours les pauvres qui se mettent debout pour défendre la souveraineté nationale.

Voilà pourquoi aux yeux de la bourgeoisie, aux yeux de l’élite intellectuelle, ces gens sont considérés comme des « va-nu-pieds », comme des criminels alors qu’à mon humble avis ces gens-là sont les garants de la souveraineté. C’est des gens qui mènent une lutte politique, une lutte révolutionnaire. Ils ne sont pas des criminels. Ils ne sont pas des assassins. Ils ne sont pas des kidnappeurs. Mais on leur attribue cette image. On crée ce chapeau pour le mettre au-dessus de leurs têtes, mais en fait ce sont des combattants.

DE : Et Charlemagne Péralte, ce qu’on a fait avec lui, c’est ce qu’on a fait avec des milliers de personnes pendant deux ans à Port-au-Prince.

LPA : Tout à fait !

DE : C’était une campagne de terreur. Y a-t-il des parallèles entre la façon dont on a traité cet homme-là et la façon dont on a traité des milliers de personnes entre 2004 et 2006 ? C’est la même stratégie ? Traîner les corps devant tout le monde ?

LPA : C’est la même stratégie. Il ne faut pas oublier que Charlemagne Péralte a été trahi comme aujourd’hui nos intellectuels Haïtiens trahissent le peuple en se faisant collabo des occupants. Charlemagne Péralte a été trahi. Il a été arrêté par les marines américains, tué et mis sur une porte et exposé aux yeux de la population.

Dans les quartiers populaires à Port-au-Prince et dans d’autres régions du pays c’est la même situation. C’est le même sort que les occupants actuels - ce qu’ils appellent les troupes de la MINUSTAH - font aux compatriotes des quartiers populaires. On peut prendre l’exemple de Dread Wilme. On peut prendre l’exemple de Dread Mackenzie. Ce sont des leaders des quartiers populaires et aujourd’hui encore dans Cité Soleil les forces d’occupation continue le massacre de la population pauvre. Ils prétextent l’insécurité. Ils prétextent le phénomène kidnapping pour mener des agressions meurtrières au niveau des quartiers populaires. Mais c’est toute une population qui est prise en otage et qui est prise pour cible. Des gens meurent chaque jour à Cité Soleil de la même façon qu’on avait assassiné Charlemagne Péralte.

Fin première partie

Lire la deuxième partie en cliquant sur le lien suivant:
http://www.hayti.net/tribune/i ndex.php?mod=articles&ac=comme ntaires&id=534

Source: SERUM VERITE: Entrevue: Souveraineté et justice en Haïti. Entrevue de Lovinsky Pierre-Antoine

 

 

Lovinsky Pierre-Antoine : Souveraineté et justice en Haïti.

Deuxième partie d’une entrevue menée par Darren Ell le 15 février 2007.  

Des dizaines de milliers de victimes traumatisées sans aucun recours juridique, un gouvernement peu intéressé à les aider, impunité pour le régime de Latortue et une accusation choque : 12 000 morts attribuables aux forces de l’ONU: le coup d’état de 2004 continue.

DE : Remontons un peu dans le temps. Votre organisation lutte pour les gens qui ont été victimes des deux coups d’état de 1991 et 2004. Qui sont ces victimes-là et qu’est-ce qui leur est arrivé ?

LPA : D’abord, il faut comprendre que le coup d’état de 2004 continue le coup d’état de septembre 1991, en ce sens que le coup d’état de 1991 a été orchestré par George Bush père et le coup d’état de 2004 a été orchestré par George Bush fils encore contre le Président Aristide. Mais quand on regarde au niveau des victimes, c’est toujours la même population pauvre qui est victime. C’est toujours les gens des quartiers populaires qui en paient les frais. Ce sont toujours eux que la répression vise parce que l’organisation politique du Président Aristide, Fanmi Lavalas, a une assise populaire très considérable au niveau des quartiers populaires. C’est l’organisation politique qui regroupe la majorité de la population. Voilà pourquoi la répression de 1991 a beaucoup visé les quartiers populaires. Et la répression pendant les deux années du régime de facto de Gérard Latortue a visé encore les gens de Cité Soleil, de Bel Air. Je pèse mes mots quand je le dis : 15 000 morts en deux années.

DE : Pas pendant les deux coups d’états, mais seulement le coup de 2004 ?

LPA : Entre 2004 et 2006. 15 000 morts.

DE : L’étude du Lancet a parlé de 8 000 morts, mais à seulement à Port-au-Prince.

LPA : Exactement.

DE : Et vous parlez de 15 000 morts à travers le pays.

LPA : Exact, et il faut en attribuer au moins 12 000 aux militaires de la MINUSTAH, la force des Nations Unis qui occupent illégalement le territoire national. C’est eux qui ont tué le plus de gens.

DE : En deux ans, c’est la MINUSTAH qui a tué le plus de monde ?

LPA : Oui. Les autres, c’est les anciens militaires et la Police nationale et les groupes paramilitaires.

DE : C’est la première fois qu’on entend parler de 12 000 meurtres perpétrés par les forces de l’ONU. L’étude du Lancet n’a pas mentionné ce chiffre du tout. Mais vous dites que c’est la MINUSTAH qui a tué le plus de monde à travers le pays.

LPA : Oui. Les membres de la Fondazyon Trant Septan menaient des recherches dans les quartiers populaires pendant la période du régime de Latortue, pendant que j’étais en exil, et on estime à 12 000 le nombre de victimes de la MINUSTAH. On assume ce chiffre.

DE : Parlons des victimes de ces crimes. Un journaliste britannique de renommée, Robert Fisk, était récemment de passage à Montréal. En parlant des Palestiniens, il a dit que chaque fois qu’un Palestinien se lève le matin, c’est encore 1948 ou 1967 ou 2000. Il vit encore des conséquences de ces années-là. C’est encore une période de répression dans sa tête. Les traumatismes du passé sont présents en lui. Pour nous – au Canada, aux Etats-Unis, en France – le passé d’autres coins du monde, c’est fini. On l’a oublié. Mais pour les gens d’ici, c’est encore 2004. Le coup d’état de 2004 dans lequel mon pays, le Canada, a participé, est encore dans leur mémoire tandis que pour nous c’est une nouvelle parmi d’autres que nous avons relégué au passé. Pourriez-vous nous parler de cette cicatrice ? Connaissez-vous les victimes ? Qu’est-ce qu’ils vivent maintenant ?

LPA : Je suis en contact permanent avec les victimes du coup d’état de février 2004. Ce sont des gens qui traînent encore le traumatisme qu’ils ont vécu pendant le coup d’état, pendant les séances de torture et pendant les scènes où des enfants voient leur mère ou leur père assassiné, pendant des situations horribles où les enfants en bas âge meurent par balles provenant des fusils des forces d’occupation. Les gens n’ont pas encore réussi à intégrer ce traumatisme pour pouvoir le laisser derrière et continuer à regarder vers l’avenir.

J’ai étudié au Canada, et je sais que vous avez tout un arsenal de structures, d’institutions qui encadrent des gens au moment où une personne vit un choc ou un traumatisme. En Haïti, nous n’avons pas cela. Nous avons une quantité très minime de psychologues et psychiatres pour aider les gens. Encore que la très faible quantité de professionnels de la santé mentale est concentrée à Port-au-Prince. Il n’y a pas moyen pour permettre aux gens d’intégrer leur traumatisme et de pouvoir continuer à vivre.

Le passé est toujours présent dans leur tête. Je regarde une séance de dessein dernièrement organisée par l’ambassade du Canada avec des enfants de Cité Soleil. On sent le traumatisme à travers les desseins réalisés par les enfants. La violence est omniprésente dans la tête des enfants. Cela a des conséquences graves au niveau des relations, au niveau de la performance scolaire des enfants. Il est dommage qu’au niveau des autorités haïtiennes actuelles qu’on n’ait pas pensé à mettre en place des structures qui puissent aider les enfants à pouvoir passer ce cap difficile.

DE : Et au niveau des adultes, combien est-ce ça affecte leur vie actuelle ? Combien est-ce que ça se manifeste dans la vie quotidienne d’une personne qui a passé par ces épreuves-là ?

LPA : Ce sont les gens qui se réveillent la nuit avec des cauchemars, et en sursaut. Ce sont des gens qui au niveau des relations interpersonnelles manifestent beaucoup de méfiance. Le premier impact négatif de ce genre de situation c’est que le tissu social est brisé. Les liens qui unissaient les gens sont coupés. On se retrouve avec des personnes qui ont de la difficulté à pouvoir se remettre de ce qu’ils ont vécu.

Cela crée une situation de dépendance. Prenez l’exemple d’une personne qui était autrefois économiquement indépendant, qui avait une petite boutique, qui faisait un petit commerce. Tout ça a été détruit par les deux ans du coup d’état. On retrouve des gens qui sont devenus totalement dépendants et d’autres personnes qui leur font la charité. J’ai essayé avec certaines personnes de trouver des fonds pour pouvoir permettre à cette personne de refaire son commerce, mais le mois d’après on retrouve la même personne dans la même situation de mendicité.

DE : On était choqué par un fait soulevé par l’étude mené par The Lancet, c’est-à-dire les cas d’agressions sexuelles perpétrées contre les femmes. On a vu ça dans d’autres pays aussi. On peut penser aux troupes russes au moment de la libération d’Allemagne ou dans l’ancienne Yougoslavie. Ces femmes victimes en Haïti, est-ce qu’on parle d’elles, est-ce qu-elles ont des services ? Comment ont-elles été affectées par tout cela ? On parle de 35 000 viols en l’espace de deux ans. C’est quasiment inconcevable.

LPA : Comme vous l’avez mentionnée, cette situation s’est produite en Haïti comme dans d’autres pays. Pendant le premier coup d’état comme pendant le régime de facto, le viol était utilisé par les anciens militaires, par les gens qui ont fait le coup, comme arme de répression contre les femmes dans les quartiers populaires et particulièrement contre les femmes qui étaient identifiées comme étant compagnes ou épouses de militants politiques : Lavalas.

DE : Donc, c’était une arme politique.

LPA : C’était une arme politique. Et il faut dire qu’en Haïti, le sujet est quelque peu tabou. Donc, beaucoup de femmes qui ont vécu la même situation n’en parlent pas.

DE : Donc, le nombre est peut-être plus élevé.

LPA : Le nombre est probablement plus élevé parce que quand une femme est victime de viol, elle est carrément mise en quarantaine. Elle est pointée du doigt. Et en termes de structures d’encadrement pour ces femmes victimes de viol, il n’en existe pas. Il y a une autre difficulté. J’ai travaillé avec des femmes qui étaient victimes de viol pendant le premier coup d’état. Il y avait des cas où certaines femmes ont pu trouver de l’aide, mais on ne peut pas mener ce dossier devant un tribunal parce que le certificat médical doit être délivré par un hôpital publique. Actuellement, il a été voté ou est en train d’être voté une loi pour permettre à des médecins privés dans des cliniques privés de délivrer un certificat médical qui atteste du viol. Mais avant ce n’était pas possible.

DE : Et pendant le coup ce n’était pas possible.

LPA : Ce n’était pas possible et maintenant c’est trop tard. On ne peut plus rien faire parce que la loi n’est pas rétroactive.

DE : Il n’y a aucun recours pour ces femmes-là ?

LPA : Il n’y a aucun recours. Certaines femmes ont pu trouver un petit encadrement vis-à-vis de certaines ONGs, mais la quantité est minime. Je connais le cas de femmes qui ont été victimes de viol pendant le premier coup d’état qui vivent actuellement aux Etats-Unis et qui sont aidées par une organisation à San Francisco qui s’appelle le CJA (Center for Justice and Accountability) qui a mené le cas devant un tribunal de New York contre Toto Emmanuel Constant, qui était le chef du FRAPH, un groupe paramilitaire qui a fonctionné pendant le premier coup d’état de 1991. C’est un dossier à suivre.

DE : Très important comme précédent.

LPA : Tout à fait.

DE : Justement, je voulais vous poser la question sur l’impunité. En Haïti en parle de 15,000 meurtres, de dizaines de milliers de viols, de deux coups d’état, de l’implication des forces étrangères, des forces de l’ONU, de l’ancien militaire haïtien. Jusqu’à maintenant, combien ont payé le prix – à part le peuple – pour tous ces crimes-là ?

LPA : Il faut le reconnaître, qu’en Haïti nous avons une culture d’impunité. Les crimes ne sont pas punis. Cette réalité est d’autant plus vraie pour les crimes qui ont été commis pendant les deux coups d’état. Et le gouvernement du Président Préval ne semble pas trop intéressé à ce dossier.

DE : Pourquoi ? Je pose la question parce que j’étais ici juste avant les élections de 2006 et ce moment-là je me suis dit : voilà un peuple qui est soumis à deux ans de terreur et qui par la suite vote pour la même mouvance politique qu’on a essayée d’écraser par la terreur. Alors, ils ont voté pour Préval en dépit de deux ans de terreur dont le message était « Ne votez pas pour la même mouvance politique! » Et maintenant René Préval ne semble pas trop s’intéresser au dossier de l’impunité. Pourquoi ?

LPA : L’explication, c’est que le coup d’état continue. Le coup d’état continue aujourd’hui, pas dans la même ampleur, mais on doit considérer la répression contre Cité Soleil comme étant une poursuite du coup d’état du 29 février 2004. Le fait que la majorité des fonctionnaires qui étaient en poste pendant le régime de facto sont toujours en place à l’heure actuelle, c’est une façon de continuer le coup d’état. Donc, l’impunité se renforce parce ce sont les mêmes personnes qui sont en place. Les juges aussi qui ont été nommés par le régime de facto sont toujours en place. Donc, les victimes ne peuvent pas espérer pour le moment qu’elles vont avoir droit à la justice dans la mesure où ce gouvernement qui est issu quand même de la mouvance Lavalas, qui a été voté par le peuple, n’y est pas intéressé.

DE : Donc, étant donné que des éléments très importants du régime de Latortue sont toujours au pouvoir, pas question d’impliquer qui que ce soit dans des crimes parce que ce serait dénoncer ses amis.

LPA : Tout à fait ! Si on prend l’exemple de la police. Je le dis depuis longtemps, et même le sénateur Youri Latortue, neveu de Gérard Latortue, membre actif du dernier coup d’état de février l’a répété dernièrement : il y a 800 anciens militaires haïtiens qui ont intégré la Police nationale d’Haïti pendant les deux ans du régime de facto. C’est ce groupe dans la Police nationale qui a fait le plus de crimes contre les habitants des quartiers populaires. Et l’appareil judiciaire en place aujourd’hui que ce soit au niveau de la Cour d’appel ou la Cour de cassation, ce sont les gens qui ont été nommés pas le pouvoir de facto.

Ce qui pourrait faire changer les choses, et je crois que Maître Mario Joseph a écrit une lettre ouverte au Président Préval, qui n’a malheureusement pas encore de réponse, proposant la mise en place d’une commission nationale de vérité qui puisse aider à faire la lumière sur les crimes qui ont été commis et aussi de pouvoir donner justice et réparations aux victimes.

DE : Est-ce que c’est une des voies de l’avenir pour la justice en Haïti ?

LPA : C’est l’une des voies. Il faut aussi penser à une certaine réforme de l’appareil judiciaire, un appareil gangrené par la corruption. On y trouve des juges qui travaillent dans des conditions qu’il faut changer. La constitution a prévu une procédure pour la nomination des juges, mais jusqu’à présent cette procédure n’est pas respectée.

DE : Depuis quelques années, on voit des changements au niveau du traitement des chefs d’état responsable de crimes contre leurs peuples. Les gens comme Augusto Pinochet, Slobodan Milosevic et d’autres ont été poursuivis par la justice, parfois très longtemps après leur mandat, parfois peu de temps après. Mais l’homme qui a dirigé le régime du coup d’état de 2004 responsable des dizaines de milliers de crimes horribles, Gérard Latortue, où est-il ? Qu’est-ce qu’il fait ?

LPA : Gérard Latortue est arrivé au pouvoir de façon illégale en dehors des normes constitutionnelles. Il a été parachuté par le gouvernement des Etats-Unis en tant que Premier Ministre en Haïti. Aussitôt après l’entrée en fonction du Président Préval, il s’est échappé du pays avec la bonne grâce de l’ambassadeur américain qui l’a personnellement accompagné à l’aéroport. Il est parti sans avoir à rendre compte de ses actions pendant qu’il a été à la tête du gouvernement.

DE : Et on l’a vu avant son départ d’Haïti, on l’a vu en réunion avec le Premier Ministre du Québec et du Canada.

LPA : Oui. Et maintenant il vit en Floride où il était auparavant. Même il s’était octroyé avec un décret avant son départ, un salaire de 15,000$ US avec honneurs et voitures aux frais de l’état. Le gouvernement actuel a coupé ces choses. Mais il vit en toute impunité aux Etats-Unis, protégé par le gouvernement qu’il a servi.

DE : Est-ce qu’il sera poursuivi ou est-ce que c’est trop à demander du gouvernement actuel ?

LPA : Je doute fort que le gouvernement actuel ait la volonté ou la capacité pour entreprendre les poursuites contre Gérard Latortue. Ce sont des initiatives qui devraient être prises par les ONGs comme l’organisation du Trente Septembre, le Bureau des avocats internationaux, et les organisations travaillant dans le domaine des droits de l’homme. Ils pourraient monter des dossiers et les présenter devant des juridictions locales pour ensuite éventuellement pouvoir les présenter devant les juridictions régionales comme la Commission interaméricaine des droits de l’homme ou d’autres instances internationales.

DE : Est-ce qu’il y aura d’ici deux ans un autre coup d’état en Haïti. Sinon, qu’est-ce qui fera qu’il n’y aura pas de coup d’état ? Comment empêcher un autre coup d’état ?

LPA : Il y aura un autre coup d’état en Haïti dans 10 ans ou dans moins de 10 ans si le gouvernement du Président Préval et du Premier Ministre Jacques Edouard Alexis abonde dans le sens de mettre en place une force de police parallèle à la police. C’est une façon de revenir avec les anciennes forces armées.

La proposition est venue du sénateur Youri Latortue et d’autres parlementaires et groupements politiques traditionnels qui sont favorables au retour de l’armée et qui travaillent en connexion avec l’ambassade des États-Unis à Port-au-Prince. Ils proposent de prendre les 800 anciens militaires qui sont déjà dans la Police nationale et de constituer une force parallèle. Ils sont déjà payés, donc pas de nouvelles dépenses nécessaires. L’entraînement sera fourni par le gouvernement américain, donc aussi le contrôle.

Il faut se rappeler que les anciens officiers des forces armées d’Haïti étaient payés par le CIA. Ce n’est un secret pour personne. C’étaient des agents doubles. L’absence des anciennes forces armées en Haïti a empêché la réalisation du coup d’état de 2004 et a obligé le gouvernement américain de mettre la main dans la pâte pour faire le coup d’état lui-même alors qu’il ne voulait pas avant à visage découvert. Alors la création d’une force armée parallèle, le Président Préval ne doit pas tomber dans ce piège. À mon avis, il faudra renforcer la police nationale pour résoudre les problèmes de sécurité.

DE : Donc, cette question est très importante pour l’avenir d’Haïti. C’est un dossier à suivre pour les grands médias.

LPA : Tout à fait. Nous dans la Fondazyon Trant Septanm, après la période carnavalesque, on va mener campagne contre la mise en place de cette force de sécurité parallèle. On est pour le renforcement de la Police nationale. Au contraire, le Président Préval doit travailler dans le sens d’un amendement de la Constitution pour faire en sorte que la Constitution ne prévoie qu’une seule force : la Police nationale.

DE : Autre chose qui pourrait empêcher un autre coup d’état ?

LPA : Que le gouvernement des Etats-Unis nous laisse tranquilles. Qu’ils laissent aux Haïtiens le soin de diriger leur pays. À chaque coup d’état qu’ils réalisent ici en Haïti – on a déjà 35 ou 36 coups d’état dans notre histoire – il faut toujours repartir à la case de départ. Donc, cette politique du gouvernement américain de vouloir tout contrôler en Haïti nous empêche, nous interdit même tout développement, tout progrès, que ce soit politique ou sociopolitique.

DE : Pourquoi ? C’est un petit pays. Les Etats-Unis c’est une superpuissance. Pourquoi contrôler un petit pays comme Haïti ?

LPA : Question de d’intérêt géopolitique. Il ne faut pas oublier que la question du contrat de la base de Guantanamo qui va arriver à terme. Donc, il faut une autre base dans la région. Question aussi économique. C’est un marché de 8 millions d’habitants. Actuellement, les Haïtiens ne consomment en majorité que le riz qui provient de Miami. La production nationale est réduite à zéro. On importe des œufs, on importe la viande de poule, on importe le riz, on importe du ciment, on importe tout ! Donc, l’intérêt est aussi économique.

DE : Une dernière question : votre organisation a dit que les milliers de meurtres des deux derniers coups d’état, c’était le meurtre de l’idéal démocratique en Haïti. Est-ce que l’idéal démocratique en Haïti a été tué ?

LPA : Quand je regarde la vaillance des gens de Cité Soleil et les autres quartiers populaires, je dis que l’idéal démocratique n’est pas mort. Il existe encore en Haïti des gens qui sont prêts à lutter, qui continuent de lutter pour le retour de la démocratie en Haïti. Des gens meurent chaque jour à Cité Soleil pour cette cause. Donc l’idéal démocratique, l’idéal Dessalinien ou Ouverturien ou Péraltien n’est pas mort. Il est bien vivant et je le sens chaque jour quand je parle avec des camarades des quartiers populaires. Je l’ai senti le 7 février dernier au moment où plus de 200 000 personnes ont envahi les rues de Port-au-Prince pour faire une manifestation exigeant le retour du Président Aristide. Question de principe ! Question de principe ! Pourquoi le Président Aristide ne peut pas revenir en Haïti ? Pourquoi le gouvernement des Etats-Unis s’oppose au retour ? En a-t-il le droit ? Et pourquoi ? Donc le peuple haïtien continue d’exiger son retour. Et également la libération des prisonniers politiques puisqu’il en existe encore sous ce gouvernement dit démocratique. Ils ont été mis en prison par le régime de Latortue.

Donc, l’idéal démocratique en Haïti n’est pas mort, mais il faudrait le chercher dans les quartiers populaires. Il faudrait le chercher – je pèse mes mots - parmi cette population pauvre de Cité Soleil et des autres quartiers populaires. Ce sont eux qui ont fait 1804, à côté de Dessalines. C’est eux qui étaient aux côtés de Charlemagne Péralte. Et c’est eux aujourd’hui encore qui en prenant les armes ou de manière pacifique continuent de lutter pour le retour de la démocratie en Haïti, et pour le respect de la souveraineté nationale.

Darren Ell

Photographe

c: 514-992-8908

w: www.darrenell.com

A lire également :

Mémoire oubliée d'un passé récent, d'un présent menaçant, d'un avenir possible

 

Haïti : Pétrole, or, cuivre, iridium, dans le sous-sol du "pays le plus pauvre de l'hémisphère ouest"

 

 

Source: vHayti.net - Site officiel de l´Organisation Politique Fanmi Lavalas

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11 mai 2012 5 11 /05 /mai /2012 15:42

 

 

Un blog à découvrir : Laboratoire Urbanisme Insurrectionnel

 

Quelques passages de l'un des très longs et pleins d'enseignements d'articles de ce blog.

 

Kar-A-Sutra

 

(...) Le prototype Kar-A-Sutra est l'un des plus parfait symboles de la marchandisation "intellectuelle" de l'"esprit hippy" (...)

Kar-A-Sutra, 1972

En conclusion de notre article sur le nomadisme hippy, nous évoquions le fait de l'influence majeure de la contre-culture hippie au sein de la société. François Hollande, président de la République française, n'y échappera pas : comme tant d'autres jeunes - futurs - cadres dynamiques, emporté par la vague néo-hippie, il sillonnera l'Europe en communauté à bord d'un J7 Peugeot reconverti, écoutant les Beatles et  Jimi Hendrix. Il sera arrêté en Grèce par la police. La prise de drogue, nécessaire et recommandée pour une  écoute optimale de ce type de musique et de voyage, n'est pas mentionnée dans sa biographie. Plus grave encore, en 1974, François Hollande obtint une bourse de l'école de commerce pour un séjour d'étude aux États-Unis, lui permettant, à nouveau, de  voyager sur les routes de New York à San Francisco...


 
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2 mai 2012 3 02 /05 /mai /2012 15:43

 

Conditions de travail au début de la troisième république

Vinaigrerie Dessaux : un règlement très spécial

  4305582893_79166b8c8d.jpgLe texte ci-dessous est rigoureusement authentique. La France de 1880 vient de se doter d'une IIIème République et le réglement intérieur des usines doit changer. Voici les changements spectaculaires proposés par la vinaigrerie Dessaux. Et je vous laisse apprécier la conclusion de cet étonnant document :

 

 

 

 

"Règlement intérieur de la Vinaigrerie Dessaux, année 1880.

1- Piété, propreté et ponctualité font la force d'une bonne affaire.

2- Notre firme ayant considérablement réduit les horaires de travail, les employés de bureau n'auront plus à être présent que de sept heures du matin à six heures du soir, et ce, les jours de semaine seulement.
3- Des prières seront dites chaque matin dans le grand bureau. Les employés de bureau y seront obligatoirement présent.
4- L'habillement doit être du type le plus sobre. Les employés de bureau ne se laisseront pas aller aux fantaisies des vêtements de couleurs vive;ils ne porteront pas de bas non plus, à moins que ceux-ci ne soient convenablement raccommodés.
5- Dans les bureaux, on ne portera ni manteaux, ni pardessus. Toutefois, lorsque le temps sera particulièrement rigoureux, les écharpes, cache-nez et calottes seront autorisés.



6769984973_2abf621695.jpg



6- Votre firme met un poêle à la disposition des employés de bureau. Le charbon et le bois devront être enfermés dans le coffre à cet effet. Afin qu'ils puissent se chauffer, il est recommandé à chaque membre du personnel d'apporter chaque jour quatre livres de charbon durant la saison froide.
7-Aucun employé de bureau ne sera autorisé à quitter la pièce sans la permission de M. le directeur. Les appels de la nature sont cependant permis et pour y céder, les membres du personnel pourront utiliser le jardin au dessous de la seconde grille. Bien entendu, cet espace devra être tenu dans un ordre parfait.
  5808782989_1b00376fd3.jpg8- Il est strictement interdit de parler durant les heures de bureau.
9- La soif de tabac, de vin ou d'alcool est une faiblesse humaine et, comme telle, est interdite à tous les membres du personnel.
10- Maintenant que les heures de bureau ont été énergiquement réduites, la prise de nourriture est encore autorisée entre 11h30 et midi, mais en aucun cas, le travail ne devra cesser durant ce temps.
11- Les employés de bureau fourniront leurs propres plumes. Un nouveau taille-plume est disponible sur demande chez M. le directeur.
12- Un senior, désigné par M. le directeur, sera responsable du nettoyage et de la propreté de la grande salle, ainsi que du bureau directorial. Les juniors et les jeunes se présenteront à M. le directeur quarante minutes avant les prières et resteront après l'heure de la fermeture pour procéder au nettoyage. Brosses, balais, serpillières et savon seront fournis par la Direction.
13- Augmentés dernièrement, les nouveaux salaires hebdomadaires sont désormais les suivants:
-cadets (jusqu'à 11 ans) 0,50F -juniors (jusqu'à14 ans) 1,45F
-jeunes 3,25F
-employés 7,50F
-seniors 14,50F

Les propriétaires reconnaissent et acceptent la générosité des nouvelles lois du Travail, mais attendent du personnel un accroissement considérable du rendement en compensation de ces conditions presque utopiques."



 Source

Bistro Bar Blog

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Gilles Deleuze, février 1977.

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