Revue 4 : partage de notre monde
Nous vivons dans un monde surarmé, avec un potentiel suffisant pour détruire plusieurs fois la planète, alors que les foyers de tensions se multiplient. Nous ne savons pas grand-chose, en réalité, de ce qui se décide et nous concerne en ce moment inédit de l’histoire, alors que trois grandes puissances se partagent le monde-marché. Une chose est certaine, c’est que la dérive économiste et son corporatisme triomphant est un mal qui gangrène le monde dans son ensemble. La marchandisation du monde veut que jusqu’au dernier brin d’herbe soit évalué en terme de profit potentiel, les humains ne font pas exception, réduit aux termes de travailleurs et consommateurs, eux aussi sont évalués en termes de marché.
J’écoute les « experts » de la géopolitique internationale, et je constate que dans leur équation, les grands absents sont les peuples. Tout se joue dans des affrontements au sommet, dont nous n’apprenons que ce que les « Puissants » veulent bien nous en dire. C’est ce qui m’a le plus interpellé au cours des dernières semaines, dans ce partage du monde, la volonté des peuples semble être un facteur négligeable dans les équations des « Puissances ».
Les négociations vont bon train entre Chine, Russie et USA, les rencontres se multiplient qui décident du sort de régions du monde sans que les habitants concernés ne soient consultés à quelque titre que ce soit.
Des choix ont été fait à notre insu, qui développent des outils de contrôle du comportement toujours plus performant, la Chine est de loin en tête de la recherche et mise en application de ces technologies, la 5G est développée au service du système de « crédit social » dont la mise en place devrait s’achever d’ici quelques mois. Nous attendions Big Brother, c’est Big Sister qui se pointe et relègue le petit frère à la préhistoire du contrôle social. Tout est passé au crible, votre manière de marcher, ce jour-là quand vous vous rendiez à votre travail, l’appréciation de votre entourage envers vous mais aussi le niveau de crédit de vos relations, votre consommation, vos sorties, vos rencontres, vos activités de loisirs,… Votre accès à la consommation, au logement, votre droit de voyager ou non, votre mise à l’index de la « société conforme» se jouent à travers cette évaluation permanente, qui devrait pénétrer jusque dans les foyers - quand ne pas accepter se laisser filmer en permanence devient une manifestation d’anti-socialité.
La publicité nous fait avaler le morceau en montrant tous les avantages que va nous procurer le monde 5G, comme celui de pouvoir voir 200 films en même temps, en haute définition ! Le bonheur ? Mais du rôle que joue cet outil dans le contrôle des personnes on nous parle peu, alors qu’il s’agit d’une transformation qualitative irréversible de nos modes de vie, de celle qui demanderait des consultations des habitants, qui auraient auparavant eu les moyens de disposer d’une information de qualité.
Je glane des infos, alors que la guerre médiatique bat son plein et que foisonnent les gros mensonges et les contrevérités, répercutées en chaîne par les médias de propagandes et par les réseaux sociaux. Quelques-uns sont en train de décider pour nous tous de l’avenir du monde, et ce n’est pas le moment de les perdre de vue.
L’arrivée de Trump au pouvoir aux USA est aussi une victoire des nationalistes contre les auteurs-acteurs de la globalisation. Il tellement de contradictions dans ses politiques, dans son gouvernements, son comportement caractériel ne facilite pas l’analyse de son rapport au concept d’Ordre Mondial. Si Poutine, comme Xi Jiping adhèrent au concept de Nouvel Ordre Mondial, le premier le fait en prônant une vision plus « raisonnable » de sa mise en place, alors que Xi s’enorgueillit d’avoir apporté des modifications essentielles à ce concept. Lesquelles ? Là il nous faut faire la différence entre le magnifique discours de propagande « soft power » de la Chine et les applications pratiques de ses politiques de conquêtes de ressources et de marchés.
Que veut dire Nouvel Ordre Mondial dans ce contexte, c’est ce qui se joue à présent, ce que nous découvrons petit à petit. Ce que la Chine annonce clairement, c’est qu’elle veut à terme (d’ici à 2030) y jouer un rôle hégémonique : une humanité, un destin un foyer et la Route de la Soie conçue comme Ceinture, le PCC comme une araignée au centre de sa toile planétaire, c’est le projet de Xi. La volonté de la Chine de devenir puissance hégémonique mondiale est une ligne de force que nous ne pouvons pas perdre de vue. Alors que la Russie serait prête à prendre sa place dans une tri-polarité équilibrée. Quand aux USA, qui n’ont vu venir ni l’une ni l’autre de ces concurrentes, ils essayent tant bien que mal de se raccrocher à une hégémonie qui n’est déjà plus de mise. Depuis que le Projet pour un Nouveau Siècle « américain », qui supposait l’absence de concurrents, a fait long feu, le pays vit dans l’improvisation sa confrontation avec les puissances montantes. Le pays sombre dans la décadence, les infrastructures se délitent, la drogue et la misère font des ravages, 1 % des adultes sont en prison, des gamins accros aux réseaux sociaux sombrent dans la folie, l’extraction non-conventionnelle du pétrole pollue irréversiblement les ressources d’eau potable du pays, ... Les soldats du Commandement Sud ont pris place autour du Lac Guarani, ils veillent sur la quatrième source mondiale d’eau potable. Ils se préparent pour la Guerre de l’Eau.
Quel désastre, pendant que la dispute sur le réchauffement climatique bat son plein, les ressources d’eau potable de la planète se raréfient drastiquement en conséquences de nos modes d’exploitation des ressources limitées et non renouvelables de la planète, ou de leur conséquences catastrophiques qui ont mis un terme aux équilibres des cycles de l’eau, un thème qui devrait faire la Une dans le monde, parce qu’il concerne chacun d’entre nous. Vous pouvez avoir autant de réserves de pétrole qu’il faut pour alimenter des jets, de puissantes voitures, etc. sans eau,... vous êtes mort. L’ONU a lancé l’alerte, d’ici a 2030, c’est la majorité de la population de la planète qui n’aura plus accès à l’eau potable. Mais sans doute une majorité d’occidentaux se fient à la qualité de leurs armées pour aller s’approprier l’eau là où elle se trouve au détriment des habitants. C’est un problème actuel et qui va en s’intensifiant. Une question vitale. Une question qui prend place aussi dans le partage du Monde.
J’ai collecté des échos de mauvaises pratiques de la Chine : des prêts usuraires qui grèvent d’hypothèque les matières premières et des infrastructures construites grâce à ces prêts par une main d’œuvre qualifiée chinoise, quand le débiteur ne peut faire face au remboursement de la dette ou même au payement des intérêt, la Chine s’approprie le pétrole mis en gage, le port qu’elle a construit…
Destruction du milieu ambiant par les minières chinoises qui privent les habitants de leurs sources de revenus traditionnels alors que les entreprises chinoises ne tiennent leurs promesses ni en matière de création d’emploi, ni dans celle du relogement des déplacés. Au Venezuela la participation de la Chine à l’exploitation de l’Arc Minier de l’Orénoque (112 000 km²) contribue à une catastrophe écologique de grande ampleur incluant la pollution irréversible des réserves d’eau potables du pays. Au Chili, détournement d’une rivière, au profit de producteurs chinois de cerises destinées à la classe moyenne de leur pays, alors que les habitants de la région privée d’eau vivent une mortelle sécheresse. Mais aussi ce grand projet de Chavez, des milliers d’hectares de riziculture et projets annexes, contrats avec des entreprises chinoises évalués à trois milliards de dollars et qui n’a jamais produit le moindre grain de riz. Il y a des torts partagés dans cet inaccomplissement, mais pour une grande partie les entreprises chinoises impliquées n’ont pas tenu leurs engagements, ont abandonné les chantiers en cours de route, laissant le matériel mis en place à disposition des voleurs qui ont pillé tout ce qu’ils ont pu , alors que des dizaines de corrompus ont engrangé 100 millions de dollars de subornation, 12 d’entre eux sont objet d’une enquête à Andorre pour blanchiment de l’argent de la corruption.
Ce dernier exemple a fait l’objet il y a quelques jours d’un long article de Reuters, il donnait la réponse a une de mes questions : je me rappelais avoir vu Chavez parcourir fièrement les terres destinées à un projet de riziculture, qui devait contribuer à assurer la Souveraineté Alimentaire du pays et au cours de ces dernières années, alors que la proportion de population du Venezuela en dénutrition ne cesse de croître, forçant des millions de personnes a abandonner le pays, il n’avait plus jamais été question de ces méga-rizières, jusqu’à ces derniers jours. Aujourd’hui leur unique rôle est de servir pour des firmes privées de lieu d’emballage pour du riz d’importation. Des grands projets qui débouchent sur… rien, et pire puisqu’ils laissent derrière eux un endettement qu’aucune production ne permet de rembourser. C’est une des méthodes d’endettement déjà pratiquée par les usuriers du Plan Marshall : fonder des prêts sur une hypothétique production à venir, qui n’adviendra jamais. La Chine a retenu la leçon et applique la méthode.
La faillite de l’agriculture illustre mieux que toute exemple la totale faillite économique du Maduro-chavisme. Bien sûr il y a la guerre économique et des sanctions inhumaines, ces derniers jours les USA ont bloqués des bateaux de l’Inde et de la Chine qui transportaient des médicaments génériques au Venezuela. Mais Trump et cie stigmatisent le madurisme qui ne peut approvisionner les hôpitaux et pharmacies en médicaments, c’est plus plus qu’absurde, c’est tout simplement ignoble.
Mais ce qui me préoccupe moi ici, c’est la question de la Souveraineté Alimentaire et pourquoi ce projet prioritaire pour Chavez a été réduit à presque rien. Un pays n’a pas besoin de dollars pour parvenir à la souveraineté alimentaire, il lui faut de bonnes terres (le Venezuela n’en manque pas, et la terre on peut l’enrichir), des semences de qualité (dont la reproduction est gratuite), des manches retroussées et de la sueur (l’amour du travail de la terre) et des transmetteurs de savoirs (ce qui ne manque pas non plus dans cette région et des meilleurs). De tout cela le Venezuela redondait. Or en ce qui concerne l’agriculture, le Venezuela, c’est le chaos quasi-total. Le choix de Maduro, c’est de privilégier avec une inefficience éprouvée l’agro-industrie à la culture paysanne. Des bonnes volontés et des communes productives, il en existe, mais elles doivent se battre contre le système pour continuer d’exister, ainsi que contre l’oligarchie des propriétaires terriens et autres maffias de la Terre dont font partie des fonctionnaires du régime, des membres des forces de répressions de l’officialisme. Ici aussi les paysans sont assassinés par des tueurs à gage, emprisonnés, menacés, etc. Quant aux potagers urbains, ils ont pour la plupart été abandonnés offrant le triste spectacle d’une terre nue et sèche. En résumé : le Venezuela disposait des terres, du potentiel de bonne volonté et de savoirs pour parvenir à la Souveraineté Alimentaire. Pourquoi des projets qui ont coûté de milliards de dollars ont conduit à… rien. Pourquoi aujourd’hui une grande partie de la population dépend de l’aide alimentaire (majoritairement d’importation, insuffisante et inadaptée aux besoins essentiels) du gouvernement dont la distribution (CLAP) est fonction de la possession d’un Carnet de la Patrie, qui détermine la distribution de nourritures et autres avantages à travers un système qui se rapproche de celui du crédit social chinois.
Il suffit de regarder un événement qui réunit des membres du PSUV, pour constater que les militants du parti sont nettement mieux nourris que l’ensemble de la population. Il faut dire que la réponse aux convocations du parti, en plus d’avoir des répercutions sur le crédit social dont chacun dispose (ou non) s’agrémente de distributions de nourriture et boissons, dont les militants ramènent l’excédent à la maison, un apport bienvenu en période de pénurie. Donnant donnant, dit textuellement Maduro, tu me donnes ton vote, je te donne à manger, un logement sinon tu peux te brosser » Il y a là un véritable chantage à la survie. Il avait été question pendant la campagne électorale présidentielle que les votants, qui auraient enregistré leur participation via le Carnet de la Patrie reçoivent une rétribution en espèce, idée finalement rejetée pour son inconstitutionnalité, mais oui, c’est comme cela que ça fonctionne. Un salaire minimum d’un mois, suffit tout juste pour acheter un kilo de fromage, de poulet ou une trentaine d’œufs, alors que le gouvernement met un terme aux conventions collectives de différents secteurs, réduisant une grande partie des travailleurs au bénéfice du seul salaire minimum indépendamment de leur degré de formation ou de leur ancienneté. Les travailleurs de tous les secteurs liés au « domaine public » se voient soumis à une loi d’exception qui leur interdit tout droit de grève ou de protestation qui sont requalifiées d’Atteinte à la Sécurité de l’État. Et Maduro connaît les classiques : qui domine la Chaîne Alimentaire, domine le Peuple.
Ici quelques précisions, Maduro qui s’auto-accorde des pouvoirs d’exception indéfiniment prolongés gouverne en grande partie par des décrets ayant rang, valeur et force de loi organique, c’est le cas du décret 1473 du 19 novembre 2014 qualifié de Loi organique de la Sécurité de la Nation qui réduit les droits des travailleurs des secteurs publics. Autant pour la démocratie.
Il n’y a pas que les paysans qui font l’objet de disparitions forcés, de menaces, d’emprisonnement, les dirigeants syndicaux et ouvriers sont eux aussi des cibles du gouvernement. Qui profite amplement de l’état de guerre induit par les USA, pour élargir toujours d’avantage les domaines de définition de la notion de « traître à la Patrie ». Les actions de déstabilisations menées par les USA, la menace d’intervention militaire, sont utilisées par le régime pour poursuivre sa dérive autoritaire. Les USA jouent de cette manière un rôle déterminant dans la fracturation et la répression des mouvements qui pourraient constituer une unité de résistance. Je ne sais pas où Maduro veut en venir, ni son équipe. Par contre dans ses discours des dernières semaines, je constate qu’il appelle à se préparer à la guerre, appelant l’armée à se tenir prête, mettant l’accent sur l’entraînement et l’armement des milices de citoyens. Rien de tel qu’une menace de guerre pour favoriser un « état fort ».
Des négociations avec l’opposition commence aujourd’hui en Norvège. Quelle opposition ? Guaido, après son dernier soulèvement raté a perdu son pouvoir de mobilisation, et s’est ouvertement tourné vers le Commandement Sud des USA, il joue sur les mots, remplaçant intervention militaire, par coopération militaire, mais personne n’est dupe. Et des dirigeants des autres partis d’opposition, les uns après les autres, s’indignent de cet appel à l’ingérence et s’en désolidarisent ouvertement.
Un des grands problème de l’opposition, c’est quelle n’a aucun candidat valable à produire qui ferait le poids face à Maduro au cours de nouvelle élection. Guaido a échoué a créer un mouvement de masse en sa faveur, au contraire son pouvoir de mobilisation n’a cessé de diminuer, alors que ses actions révélaient son aventurisme et son inconsistance, sa dépendance vis-à-vis de Washington. L’opposition est divisée en une vingtaine de petits partis d’importance variable, qui n’ont plus réussi promouvoir un candidat commun depuis 2013 (Capriles) Et le parti de Guaido, Volontad Popular moins que d’autres, personne n’ignore au Venezuela les liens qu’entretient son leader, Leopoldo Lopez, avec le mouvement d’ultradroite régional dirigé par l’ex-président colombien Alvaro Uribe Velez.
Je peux rêver d’un Venezuela communaliste parfait, mais il serait comme le postulat d’un Venezuela majoritairement socialiste, un déni de réalité, le déni du droit à exister comme sujet politique de la moitié de la population. Mais c’est une question qui se pose aussi dans nos régions, comment mettre un frein à la croissante polarisation politique antagoniste de la population ?
Je sais très bien quel monde je voudrais voir exister, un monde où les humains auraient une « empreinte écologique » positive. Un choix largement partagé mais qui n’est pas le choix de tous, alors quoi ? On va continuer d’utiliser les mêmes vieilles méthodes absolutistes, coercitives, de table rase (élimination des non conformes idéologiquement) ou enfin nous allons apprendre à penser au pluriel dans la diversité ? C’est un enjeu palpable au Venezuela, se multiplient les tentatives qui – enfin – commencent à prendre forme de créer de larges plateformes unissant les ni Guaido, ni Maduro, ni surtout, avant tout, par dessus tout l’ingérence militaire étasunienne et les sanctions criminelles. En un peu plus d’un an, j’ai vu émerger 10, 15 de ces tentatives de reconstruire une option de gauche hors madurisme. Seulement voilà, chacun essayait de tirer la couverture à soi, la sauce jusqu’ici n’a pas pris, faute d’objectifs prioritaires communs clairement définis. Mais un nouveau rapport de force se dessine… à suivre, au goutte à goutte des infos significatives.
Alors que à d’autres échelles :
Quand on parle de partage du monde, on pense bien sûr aux derniers échanges, la telenovela des rapports d’amour haine entre « puissants » - entre Trump et Poutine au téléphone, Pompeo et Lavrov en Russie, les discussion Russie – USA – Chine, qui décident du sort de la Libye, de la Syrie, de l’Afghanistan, de l’Ukraine ou de l’Iran et du Venezuela (points brûlants). On se doute bien que dans ce genre de marchés, il y a des avancées, des terrains cédés pour se mettre d’accord sur les conditions d’une « partage équitable », un équilibre de la balance des Marchés et du Pouvoir, des zones d’influences.
On se doute que tout cela ne se déroule pas toujours avec le sourire, que les menaces et exhibition de force jouent un rôle crucial. Si l’entente entre Mogherini et Pompeo (venu à Bruxelles lundi avant de se rendre en Russie) semble plus que cordiale et détendue, je n’en dirais pas autant du climat qui régnait lors de la Conférence de Presse de Lavrov et Pompeo après leurs entretiens. Lavrov langue de bois et préoccupé à coté d’un Pompeo affichant un grand sourire triomphant,… les deux offrent un concentré de généralités qui ne nous informe en rien du contenu concret des débats ou de leurs résultats. Juste une impression, j’ai déjà vu Lavrov, ce vétéran de la diplomatie en meilleure forme, remettre les USA en place avec assurance et une tranchante concision, là, il tergiverse et énonce un maximum lieux communs et de pieux souhaits concernant le rétablissements de bonnes relations d’associés, ouvertes et loyales, respectueuses entre les deux nations.
Moi, je n’ai pas éliminé la volonté des peuples dans l’équation du devenir du monde. Il ne faut pas oublier l’autre bout de la lorgnette. Ce n’est pas parce que ces gens pensent qu’ils peuvent décider entre eux du sort et de l’avenir du monde que les peuples n’ont pas leurs propres scénarios à proposer. En réalité, je ne suis pas très optimiste quand au proche avenir, trop de processus destructeurs des conditions de possibilité de la Vie à renverser, de bombes à désamorcer, trop de psychopathes puissants et autres machines à tuer à neutraliser, ... pourtant je ne perds pas l’espoir que toutes ces petites expériences de bonne volonté, à dimension humaine qui fleurissant partout sur la planète, toujours menacées, souvent éphémères, puissent devenir un jour ce qui fera sens. Pas sans que ne s’allonge la liste déjà bien trop longue des martyrs, paysans, leaders sociaux, journalistes, militants ouvriers, peuple « surnuméraires » :l’intensité de la répression augmente . Les champs de guerre vont continuer de s’étendre, pour un temps indéfini, et le risque d’une guerre totale existe. Une partie du monde continue à vivre comme si de rien n’était, déni de vérité ou manque d’intérêt, et cela m’interpelle, tant d’inconscience, d’indifférence, de vanité.
Empoderamiento (émancipation, autonomisation, responsabilisation), c’est un mot qui fait sens, en particulier au Venezuela. Peut-être que le chavisme à conduit à une trahison de l’espoir qu’il avait suscité : être le chemin qui conduisait à une véritable souveraineté populaire. La Souveraineté populaire communaliste est antithétique du socialisme. La commune n’a pas a entrer dans le moule que lui impose quelque idéologie que ce soit, elle est le résultat toujours contingent de l’entente pratique des voisins qui décident ensemble de la manière dont ils vont concrètement habiter leur territoire, en prendre soin, et se donner les moyens de bonne vie. Si on prend l’exemple de la commune indigène de Cheran (Michoacan, Mexique), en plus de chasser les cartels de leur territoire, ils en ont également bannis les partis politiques, à leurs yeux une invention occidentale qui sert surtout à semer la division entre voisins, et dont on se passe très bien en la remplaçant par une Assemblée des Voisins.
Je suis tout à fait d’accord avec Trump, il faut en finir avec le Socialisme, avec toutes les formes de socialismes. Là s’arrête notre point notre point de vue commun, je pense qu’il faut également en finir avec le Corporatisme, le Capitalisme, et un système qui porte au sommet de l’ex-première puissance mondiale (le titre est en jeu et le combat en cours) un gugusse caractériel de son acabit. Poutine et Xi sont des pro de la politique, ils sont tombés dedans quand ils étaient petits et ont eu toute la vie pour peaufiner le plan qui les a conduit au Pouvoir, pour mettre en place les rétroactions qui leurs permettent de s’y maintenir. A côté de ces professionnels de haut niveau, Trump est un novice, un amateur, il improvise tant bien que mal, entouré d’’une équipe qui le manipule en fonctions d’intérêts occultes qui le dépasse. Il est offensé d’avoir été à ce point désinformé sur la situation réelle au Venezuela or j’ai beaucoup de mal à croire que les Services Secrets étasuniens et autres Mossad, hyperactifs au Venezuela soient à ce point à côté de la plaque. Pas à ce point. Qui est maître du Jeu ?
On voit se poursuivre les opérations d’étouffement, lente agonie à laquelle la guerre économique soumet la population la plus fragile (40 à 50 %, les chiffres varient selon les sources, mais c’est un ordre de grandeur), de mêmes que les opérations de déstabilisation, psychologiques, médiatiques, de terrain.
Je ne crois pas dans un premier temps à une intervention militaire officielle des USA, une guerre proxy par armées brésilienne et colombienne interposées semble aussi exclue, trop de résistance au sein de ces deux armées et des populations, en particulier de la part des Colombiens qui sont plongés dans un état de guerre permanent depuis plus d’un demi-siècle et qui voudraient bien voir la fin du tunnel. Une intervention au Venezuela aurait toute les chances de provoquer une guerre qui aurait également la Colombie pour champ de bataille. Je crois d’avantage aux opération sous couverture, à l’utilisation de mercenaires comme les 5000 soldats de Blackwater mis à disposition de Guaido, et à l’intensification des affrontements entre groupes armés de l’officialisme et ceux de opposition radicale. Opérations sous fausses bannières, accidents frontaliers, et tout ce qui pourrait favoriser l’éclatement d’une guerre civile, jusqu’à ce qu’une intervention militaire « Humanitaire » soit justifié. Et cela ferait certainement des centaines de milliers voir des millions de morts. Il est clair que le projet des USA pour le Venezuela, au-delà des discours de propagande, ne permet pas la survivance d’une résistance chavistes et autres mouvements de Souveraineté Nationale qui seraient en permanence en résistance contre l’envahisseur, contre le capitalisme et en particulier sa forme Corporatiste.
S’il y a un espoir pour le Venezuela, il passe par la fin du socialisme. Le pays est endetté pour des générations, les structures productives sont inexistantes, la haine fait son chemin dans des familles, entre voisins, tout est à reconstruire alors qu’il faut mettre d’urgence un terme au silencieux génocide indigène (les populations indigènes sont victimes de rougeole, de malaria, d’un taux très élevés d’une souche de VIH qui tue, rapidement, de préférence les hommes, les pollutions minières amènent d’autres maladies et provoquent des déplacements qui sont autant d’errances misérables). Reconstruire demande de se retrousser les manches, sans se demander à quel parti appartient celui qui travaille avec vous, mais bien comment on va s’y prendre ensemble pour atteindre un objectif : faire revivre un potager, reconstruire des structures productives, déterminer des objectifs de productions raisonnables depuis l’échelle locale. Si d’une part les tensions montent, d’autre part les dramatiques coupures d’électricité dans tout le pays ont également mis un terme à la distribution de l’eau courante. Et des voisins se sont organisés de manière solidaire, sans soucis d’appartenance politique, pour essayer de pourvoir ensemble aux besoins de la communauté. Comme on a toujours vu lors d’incendies, les habitants de villages habités par de vieilles querelles, prendre place ensemble dans la chaîne de l’eau quand le feu menace le hameau.
Ainsi que… ce n’est bien sûr pas un passage en revue exhaustif… trop d’événements actuels sont pareils à des puzzles évolutifs dont il est possible de s’approprier quelques pièces sans pouvoir toujours en deviner le dess(e)in.
La fin du socialisme ne devrait pas être un retours en arrière fondé dans le mythe d’une ancienne prospérité capitaliste du Venezuela, dont jamais bénéficié qu’une minorité de la population. Le dépassement du socialisme, je crois qu’il est nécessaire, pas le renoncement, mais le passage au crible de la critique historique entre les belles idées porteuses d’un projet de monde harmonieux et leurs perversions et mauvaises pratiques. Il ne peut y avoir de dépassement heureux du socialisme sans que soit mis un terme à l’ère capitaliste. Je les entends les nouveaux croisés de la chasse aux sorcières communistes et socialistes, qui stigmatisent les résultats terrifiants de ces deux idéologies pour les populations qui les ont vécues en pratique. Et ils n’ont pas tout à fait tort, mais où je ne les suis pas c’est dans ce nouveau catéchisme capitaliste… « Sans le capitalisme, il paraît, que nous vivrions toujours dans les arbres » et autres apologies en déni de réalité du genre. Personnellement je me sentirais sans doute mieux à ma place parmi les habitants des arbres que parmi ceux de villes, mais cela c’est personnel. De plus en plus le monde édifié par les humains me semble absurde, contre nature, et c’est bien en ce sens qu’il s’est construit, contre la nature, qu’il fallait dominer, violer, exploiter, ce sont les métaphores qui président à la naissance de la Science Moderne. C’est toute la différence entre le monde pris comme environnement sur lequel on est en quelque sorte posé ou comme milieu ambiant dont on est partie intégrante.
Deux axes de lutte voisinent et parfois se confondent, d’une part la défense de principes d’autodétermination de peuples qui doivent résoudre des contradictions internes de projets de personnes aux aspirations distinctes - que la politisation fait souvent apparaître comme incompatible - la possibilité de décider entre voisins, entre habitants, sans être soumis à l’hégémonie d’une « grande puissance » quelle qu’elle soit, de la manière d’habiter un territoire et d’en partager les ressources.
D’autre part, avec une urgence croissante, un axe qui implique une dimension mondiale, planétaire, la nécessité d’une concertation pour mettre un terme aux atteintes à la Vie en inventant d’autres manières d’habiter la planète.
Anne W