29 octobre 2013 2 29 /10 /octobre /2013 08:41

 

En Belgique aussi nous voyons dans les comportements policiers les conséquences des entraînements que prodiguent les Opérations Spéciales, ces assassins, ces tortionnaires, sans cœur ni âme, aux corps de police et armées de plus de 12O pays du monde (Les opération spéciales "us" mènent guerre secrète dans 120 pays  ).

La police dont il est question ici, je la connais, je l’ai vu évoluer, même s’il reste vraiment de braves flics de quartiers, qui amènent des croissants aux petits enfants afghans, j’en ai rencontré, celui-là sans doute. Ils sont les derniers vestiges d’une époque révolue. L’ambiance générale est fort différente et la violence policière s’adresse à tous les marginaux qu’ils qualifient ouvertement de rebus dont il faut protéger voir débarasser la "bonne société" - je défends l'Ordre, me  dit un jour l'un d'eux genre Bon Aryen - cette violence est aussi dirigée contre toute personne quel que soit son statut social, son origine, qui serait tentée d’intervenir pour mettre fin à des abus policiers sur la voie publique.

Il y a quelques années, alors que j’habitais cette même rue où l’expulsion s’est produite, je n’hésitais pas à intervenir dans ces occasions. Je sais qu’aujourd’hui de telles interventions auraient pour réponse une mise au cachot accompagnée de violence. Je me pose parfois la question « Aurais-je le courage d’intervenir sachant cela ? », il me faudrait le vivre pour le savoir. Cela aussi est une des formes de la terreur, quand accomplir son « devoir civique » devient source de peur.

Anne W

 

 

 

Non monsieur, nous les belges on sortira en dernier, comme ça on voit qui vous tabassez

[Témoignage de Camille, doctorante en sciences sociales, sur son arrestation de mardi avec le collectif des afghans en lutte pour la prise en compte de la situation dans leur pays. Avec celui de Grégory, il vient compléter le témoignage de Selma, avocate des afghans. Plus de contenu sur la page du collectif afghan et celle du comité de soutien]

J’étais à l’université, comme tous les jours de la semaine. Je gardais mon téléphone près de moi parce que j’avais reçu un message pendant le weekend qui stipulait des risques d’expulsion. Je reçois donc le message « expulsion, besoin de soutien ». Je prends mon vélo, je pédale jusque rue du trône, il n’y a déjà plus rien à faire : l’entrée du bâtiment a été remplacée par un mur de combis et de policiers. Je reconnais quelques têtes (abasourdies) sur le trottoir d’en face et on me dit, que, ne sachant où aller, les afghans manifestent à art-loi. La revendication de la manifestation est simple : « après avoir expulsé ce bâtiment, que proposez-vous pour reloger 200 personnes ? ».

 On se lève tous, mais c’était déjà trop tard, on est encerclé, il y a autant de policiers autour de nous que de manifestants.

On se lève tous, mais c’était déjà trop tard, on est encerclé, il y a autant de policiers autour de nous que de manifestants.

Une fois arrivée à la petite ceinture, je vois cent-cinquante personnes en sit-in. Je m’assieds au sol et je chante avec le groupe « We want justice », « Afghanistan is niet veilig ». Le commissaire arrive au centre du groupe, il essaye d’arrêter le porte-parole, alors qu’il n’y a aucune violence. L’avocate et des membres du comité de soutien s’interposent, on voit la haine s’inscrire sur le visage du commissaire, je sens que ça va mal tourner.

Les policiers avancent en courant sur les côtés, on commence à se faire encercler. A ce moment là, l’avocate nous conseille de nous lever et de partir, de ne pas opposer de résistance. On se lève tous, mais c’était déjà trop tard, on est encerclé, il y a autant de policiers autour de nous que de manifestants. J’échange des regards avec la dizaine de belges présents, « qu’est ce qu’on peut faire ? », « rester les derniers ». On doit être 200 à ce moment là, les soutiens arrivaient au compte goutte, il faut dire que le message était parti il y a moins d’une heure.

 Je suis écrasée contre boucliers des policiers, un enfant se fait marcher dessus par les policiers, les poussettes sont écrasées par ce cercle toujours plus oppressant.

Je suis écrasée contre boucliers des policiers, un enfant se fait marcher dessus par les policiers, les poussettes sont écrasées par ce cercle toujours plus oppressant.

La panique commence à s’emparer des gens, une femme hurle, elle ne trouve plus son enfant, le cercle se referme de plus en plus, jusqu’à nous compresser les uns contre les autres. Je suis écrasée contre boucliers des policiers, un enfant se fait marcher dessus par les policiers, les poussettes sont écrasées par ce cercle toujours plus oppressant. On essaie de rester bien soudé, on se tient par les bras pour tenter de créer un noyau dur et peut être d’avancer un peu, mais on n’y arrive pas, les matraques se lèvent et s’abattent sur Ali.

Les matraques se lèvent et s’abattent sur Ali.

Les matraques se lèvent et s’abattent sur Ali.

Maintenant il est au sol, dans une flaque de sang, et il faut du temps pour convaincre les policiers d’appeler une ambulance. Pendant ce temps là, on a réussi à passer les petits par-dessus les cordons policiers, on s’est pris des gaz lacrymogènes (principalement ceux qui ont vu la figure du policier qui a frappé Ali) et une flaque de 50 cm² de sang sur le trottoir devient la matérialisation de la honte que je porte à mon pays.

une flaque de 50 cm² de sang sur le trottoir devient la matérialisation de la honte que je porte à mon pays

une flaque de 50 cm² de sang sur le trottoir devient la matérialisation de la honte que je porte à mon pays

Tout se passe très vite, les combis sont derrière, on sera tous arrêtés. Moi, je me dis qu’il faut que je quitte ce cercle le plus tard possible, pour la simple raison que sans papier c’est sans droit dans notre systèmes de répression (des mouvements sociaux), et qu’avec ma carte d’identité magnétique, on m’a offert l’illusion d’avoir le droit de voir, le droit de parler, le droit de témoigner et de revendiquer le respect des droits fondamentaux, face aux forces de l’ordre, mais aussi face à toute la politique migratoire et toute la politique (anti)sociale de notre pays. Le fait d’avoir cette carte d’identité, la nationalité belge, fait de moi un objecteur de conscience, un témoin privilégié de la violence engagée contre ces personnes, et je dois rester le plus longtemps possible dans ce cercle. La violence ne s’arrête pas aux coups, elle est ancrée dans les comportements, le commissaire se place au milieu du cercle, et crie en anglais que les manifestants peuvent remercie X, un réfugié politique qui a été régularisé il y a quelques années et qui offre son soutien au mouvement « You can say thank you fo X, it is no risk for him, but it’s very dangerous for you, you haven’t any visa or ID ». Quoi de plus beau de voir la police semer la zizanie au sein même de la solidarité qui unit les défendeurs de la cause.

« Alors mademoiselle vous sortez ? » « Non monsieur, nous les belges on sortira en dernier, comme ça on voit qui vous tabassez », c’est mal passé comme commentaire, une main m’agrippe les cheveux et me fait sortir en 5 secondes de ce cercle, ça s’appelle se faire traîner à terre. Ensuite, les colsons, et direction les combis, je vois une bonne partie des manifestants qui sont en file par terre, les mains attachées dans le dos. Puis, on me dépose à côté de l’avocate des afghans, dans les premières arrêtées, les mains aussi attachées que les autres et on nous met dans le bus.

Dans le bus, ce sont des regards tristes des « merci madame Selma », « merci mademoiselle pour nous soutenir », mais aussi des « au revoir, pour moi ce sera la deuxième fois en centre fermé, on ne me reverra plus ». Les vitres sont teintées, on ne peut pas voir dehors, on ne sait pas où on nous amène, il fait une chaleur étouffante, c’était une belle journée pour se faire arrêter. Ce bus me donne l’impression d’animaux qu’on enverrait à l’abattoir, voir d’un scénario similaire aux atrocités commises dans tous les génocides. On arrive aux casernes, les femmes et les hommes sont séparés, on nous place en cellule sans nous enlever les liens qui nous tiennent les poignés dans le dos. Ils sont parfois si serrés pour certaines d’entre nous que le sang ne passe plus, dans tous les cas, nos poignets sont rouges et certaines ont des traces de coup sur les bras. Et dire qu’on était pacifistes…

On a chanté, on a crié, on a parlé, on s’est tues… On n’a pas reçu d’eau, ni quoi que ce soit d’ailleurs.

Ils ont relâchés les belges à 19h, on a crié en passant devant les cellules de hommes « What do we want ? We want justice ». « Si tu ne te tais pas, tu y retournes directement ».  On n’avait des proches qui nous attendaient devant les casernes, mais il ne fallait pas donner de joie à ceux qui criaient pour notre liberté dehors, et on a du remonter dans le bus, et ils nous ont déposé en ville. Il pleuvait des torrents, encore une belle journée qui prend fin.

Les afghans commençaient à sortir ce matin, l’office des étrangers a été saisi, le combat continue…

 

Source : Non monsieur, nous les belges on sortira en dernier, comme ça on voit qui vous tabassez | "L'homme est né libre, et partout il est dans les fers"


 

Arrêtez moi l’avocate en rouge


[Témoignage de Selma sur l'arrestation du 22 octobre 2013, soutenant le collectif des afghans en lutte à Bruxelles contre les décisions de refus d'asile par le Commissariat Général aux Réfugiés et Apatrides. Pour différents points de vue, celui d'une autre personne arrêtée, celui d'une personne non arrêtée. Plus de contenu sur la page du collectif afghan]

« Arrêtez-moi l’avocate en rouge »

Mon arrestation a peut-être déjà été commentée par d’autres, mais je tiens à en faire le récit. Non pas que j’imagine qu’elle soit plus importante que celles d’autres militant(e)s et que celles beaucoup plus lourdes de conséquences des Afghans. J’ai juste besoin de raconter une journée surprenante à plus d’un titre.

Je me suis rendue à 10 heures du matin au parlement fédéral où la commission intérieure se penchait sur le rapport du CGRA et la politique de retour. Je savais qu’il serait question d’Aref, ce jeune Afghan, mort après son retour « volontaire » en Afghanistan.

J’ai entendu le CGRA et l’Office des Etrangers décrire leurs missions respectives, sans aucun état d’âme et sans la moindre remise en question. Les représentants des ONG (Vluchtelingenwerk, CIRE et Ligue des droits de l’Homme) ont pourtant pointé des dysfonctionnements et des lacunes dans l’examen de la protection qui doit être réalisé avant d’envisager un retour volontaire ou non. Le CIRE a énuméré les hypothèses – nombreuses- dans lesquelles cet examen n’est pas réalisé avec la rigueur voulue et a rappelé une récente condamnation de la Belgique par la Cour européenne des droits de l’Homme.

Plusieurs parlementaires ont parlé du jeune Aref. Cela n’a pas semblé émouvoir les représentants des institutions ou du moins n’a pas conduit à un changement de position.

Je suis sortie un peu avant la fin, attristée par la teneur du débat. La manifestation des Afghans devant le Parlement, plus exactement à Madou où la police leur avait enjoint de rester, s’était déjà éloignée

Je m’apprêtais à retourner au bureau, vers 13h15, quand j’ai reçu un appel annonçant l’expulsion du bâtiment rue du Trône. Les quelques 200 Afghans étaient à Arts-Loi. Je les ai rejoints. Ils faisaient un sitting, ils venaient d’apprendre qu’il était inutile pour eux de retourner rue du Trône et ne savaient pas du tout où aller. Ils semblaient découragés et désorientés.

Le Commissaire de police leur a dit de partir, ils ont répondu non. Au bout d’une demi-heure, j’ai vu arriver des policiers avec des boucliers et des chiens sans muselière. J’ai dit aux Afghans qu’il valait mieux partir. Lorsqu’ils se sont levés pour partir, ils ont été encerclés par des policiers. Le cercle était très serré et les policiers faisaient sortir du cercle les femmes et les enfants, mais avec une brutalité totalement injustifiée. Tout le monde avait très peur mais n’opposait pas de résistance.

 Lorsqu’ils se sont levés pour partir, ils ont été encerclés par des policiers.

Lorsqu’ils se sont levés pour partir, ils ont été encerclés par des policiers.

Un policier a renversé une poussette avec un jeune enfant. Je n’arrêtais pas de répéter qu’il y avait des enfants, qu’il n’y avait aucune raison d’être violent.

Un policier a renversé une poussette avec un jeune enfant.

Un policier a renversé une poussette avec un jeune enfant.

J’ai vu un jeune homme blessé étendu par terre, il saignait à la tête. Il était agité et en état de choc. Je me suis agenouillée près de lui. J’ai demandé aux policiers s’ils avaient appelés les secours. Je parlais au jeune homme pour qu’il ne perde pas conscience. Je lui ai demandé de me dire son nom, il a répondu Ali. Un policier m’a tirée par la manche en disant « dégagez ». Son collègue lui a dit « laisse-la elle nous aide, elle le calme ».

Son collègue lui a dit « laisse-la elle nous aide, elle le calme ».

Son collègue lui a dit « laisse-la elle nous aide, elle le calme ».

J’ai entendu qu’on m’appelait pour me dire que Samir était arrêté, je suis encore restée près du jeune homme, me disant que je ne pouvais de toute façon rien faire.

J’ai vu Monsieur Joris Capenbergh  – que je connais – saisi par un policier, jeté au sol, alors qu’il était sur le trottoir et assistait médusé à la scène. Les policiers l’ont ensuite forcé à entrer dans le cercle. Il m’a appelé à l’aide, je me suis relevée et j’ai vu d’autres policiers projeter un Afghan par terre et le rouer de coups. Je suis intervenue très calmement en leur disant : La loi sur la fonction de police ne vous autorise pas à faire usage de violence. Il n’oppose pas de résistance. Vous ne pouvez pas le frapper.

Le commissaire m’a montré du doigt et je l’ai entendu distinctement  dire : Arrêtez-moi l’avocate en rouge.

Trois hommes sont venus vers moi, j’étais sur le trottoir, j’ai écarté les bras et je n’ai opposé aucune résistance. J’ai dit au policier qu’il me faisait mal et il a spontanément desserré mon bras. Il m’a attaché les bras dans le dos.

Trois hommes sont venus vers moi, j’étais sur le trottoir, j’ai écarté les bras et je n’ai opposé aucune résistance.

Trois hommes sont venus vers moi, j’étais sur le trottoir, j’ai écarté les bras et je n’ai opposé aucune résistance.

J’ai du aller m’asseoir dans la rue de la Loi à quelques pas du cabinet du premier Ministre où j’avais été reçue quelques jours avant. La situation était surréaliste.

Une policière est venue pour me surveiller. Elle a resserré mes attaches, sans raison, comme ca, juste pour faire mal. Et je dois dire c’est douloureux.

On m’a ensuite fait monter dans un bus, aux vitres teintées. Nous étions deux femmes et il n’y avait que des hommes. Les Afghans étaient atterrés de me voir là avec eux. Ils me disaient « merci madame » ou « on est désolé pour vous ». J’étais partagée entre un sentiment de solidarité avec ces hommes qui ne demandent que le droit de vivre en paix et d’impuissance. J’avais peur aussi et je me suis demandée qui irait chercher les enfants à l’école.

Le bus est parti. C’est un sentiment étrange d’être privé de liberté et emmener vers un endroit inconnu. J’avais peur. L’étudiante assise à coté de moi m’a dit qu’elle s’appelait Camille. On a chanté « Terre de détresse », j’ai pleuré.

Arrivés aux casernes d’Etterbeek, on nous a mis dans une grande cellule, où d’autres manifestantes nous ont rejointes. Nous sommes restées à six. Camille a réussi  à se détacher les mains. Elle a téléphoné à mon bureau où mes collègues m’ont dit que ma sœur irait chercher mes enfants et que le bâtonnier était prévenu. Une des manifestantes arrêtées avec moi a brulé mes attaches avec un briquet, j’avais enfin les mains libres et cela fait du bien.

Des journalistes m’ont téléphoné. J’ai pu raconter ce qui s’était passé.

On est venu nous chercher pour nous enregistrer, après une fouille de routine. Le policier à qui j’ai donné ma carte d’identité à juger utile de faire de l’humour. « Est-ce que vous êtes sure que vous êtes belge ? ». Je n’ai pas relevé. La policière qui m’accompagnait était visiblement gênée par la situation.

Un policier que je connais est venu me dire bonjour et me demander comment j’allais. Ce petit bout d’humanité était comme une bouffée d’oxygène.

On nous a conduit dans une autre cellule, sans sac, ni GSM, ni  montre, cette-fois-ci. C’est assez désorientant de perdre totalement la notion du temps.

Nous n’avons plus vu, ni entendu personne jusqu’à notre libération. Nous ne pouvions ni aller aux toilettes, ni boire un verre d’eau. Personne ne m’a parlé, ni donné les raisons de mon arrestation, ni dit à quelle heure on sortirait.

Nous avons été relaxées vers 18h30.

On nous a rendu nos affaires et nous avons du monter de nouveau dans un bus. J’ai téléphoné à mon collègue qui m’a dit que presque tous les avocats du cabinet étaient devant les casernes. J’ai demandé si nous pouvions sortir du bus, un policier m’a répondu que non. J’ai dit que si nous étions relaxées, il me semblait que cela signifiait que nous étions libres de nos mouvements et d’aller où bon nous semble.

Sur ce le policier est allé chercher son supérieur. Un homme brutal qui a crié que si je n’étais pas contente, il me recollait en cellule.

Le bus nous a amené, nous étions douze. Nous ne savions pas exactement vers où nous allions. Quelqu’un en plaisantant à dit Imaginez qu’ils nous conduisent à Charleroi.

Nous avons été véritablement remis en liberté avenue Louise, sous une pluie battante. Pourquoi cet endroit ? Je ne le saurai sans doute jamais.

Pourquoi ai-je été arrêtée ? Je ne le saurai sans doute jamais non plus.

Lors de l’arrestation, un afghan m’a demandé en anglais « Where is the law ? », un autre lui a répondu en me regardant « They arrested the law. » C’est à ce moment là que j’ai  pleuré.

 

Source : Arrêtez moi l’avocate en rouge | "L'homme est né libre, et partout il est dans les fers"

Via Mes coups de coeur

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17 octobre 2013 4 17 /10 /octobre /2013 13:30

Pour que

"Plus jamais ça !"

reprenne tout son sens.

Léonarda, 15 ans, arrêtée et expulsée pendant une sortie scolaire
par Resf 25
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La policía francesa vigila a una familia gitana que desaloja un campamento en Roubaix el 3 de octubr


 
 

Mme Dibrani et ses 6 enfants ont été expulsés  mercredi  9 octobre au matin vers le Kosovo. Ils habitaient un appartement à Levier (Doubs) qu'ils occupaient dans le cadre de la prise en charge des demandeurs d'asile du DLHD.

            M. Dibrani était depuis fin août retenu au centre de rétention de Strasbourg. Assigné à résidence, il a été arrêté à Mulhouse. Son expulsion programmée 2 fois a été repoussée jusqu'à mardi 8 octobre au matin.

            Après cette expulsion, le mardi soir Mme Dibrani a réaffirmé son vœu de rester en France pour l'avenir de ses enfants malgré l'angoisse qu'elle ressentait à l'idée d'être seule avec sa famille. Les enfants qui ont entre 5 et 17 ans étaient scolarisés depuis plus de 3 ans, ils étaient en France depuis presque 5 ans (4 ans et 10 mois), autrement dit, dans deux mois, ils entraient de plein droit dans le cadre dela circulaire Valls et pouvaient être régularisés. Le mardi soir avant l'expulsion la mère était perdue, les enfants attendaient et Hasan, l'avant dernier âgé de 5 ans, recopiait des lettres apprises à l'école agenouillé au-dessus d'un carton.

            La plus petite Médina est âgée d'un an, elle est née en France. Tous les enfants parlent parfaitement le français. Maria et Leonarda ont obtenu le DELF diplôme de français niveau B1 demandé par la préfecture pour obtenir la nationalité française. Après ses années de collège, Maria a fait cette année sa rentrée au lycée Toussaint Louverture en première année de CAP service. Son professeur de français souligne sa volonté et son enthousiasme. Dans le petit sac de sport qu'elle a pris le matin de l'expulsion, elle a emporté son costume de travail.

            Leonarda, scolarisée en 3ème DP3 (option découverte professionnelle) au collège André Malraux, n'était pas chez elle ce matin là. Les professeurs de la classe avaient organisé une sortie à Sochaux sur toute la journée avec un départ à 7h00. Pour être à l'heure, elle ne pouvait pas prendre le bus de son domicile. Elle a donc dormi chez une amie à Pontarlier. Les policiers ont été renseignés sur l'endroit où elle se trouvait. Le maire de Levier a appelé Léonarda et a demandé à parler à un professeur présent dans le bus, elle a transmis son téléphone à Madame Giacoma, professeur d'histoire-géographie-éducation civique au collège Malraux.

 Mme Giacoma : «je n'ai pas compris tout de suite ce qui se passait, j'ai cru que c'était la mère de Léonarda qui voulait être rassurée et en fait, c'était  le maire  de Levier, commune de résidence de Léonarda, qui m'a précisé qu'il savait que nous nous rendions à Sochaux et il me demandait expressément de faire arrêter le bus. Dans un premier temps j'ai refusé en précisant que ma mission était d'aller à Sochaux avec tous les élèves inscrits pour cette sortie pédagogique (visite de lycées + visite de l'usine Peugeot).

Le maire de Levier, Albert Jeannin, m'a alors passé au téléphone un agent de la PAF qui était dans son bureau : son langage était plus ferme et plus directif, il m'a dit que nous n'avions pas le choix que nous devions impérativement faire stopper le bus là où nous étions car il voulait récupérer une de nos élèves en situation irrégulière : Léonarda Dibrani cette dernière devait retrouver sa famille pour être expulsée avec sa maman et ses frères et soeurs ! Je lui ai dit qu'il ne pouvait pas me demander une telle chose car je trouvais ça totalement inhumain ...  il m'a intimé l'ordre de faire arrêter le bus immédiatement à l'endroit exact où nous nous trouvions, le bus était alors sur une rocade très passante, un tel arrêt aurait été dangereux !

Prise au piège avec 40 élèves,  j'ai demandé à ma collègue d'aller voir le chauffeur et nous avons décidé d'arrêter le bus sur le parking d'un autre collège (Lucie Aubrac de Doubs). J'ai demandé à Léonarda de dire au revoir à ses copines, puis je suis descendue du bus avec elle, nous sommes allées dans l'enceinte du collège à l'abri des regards et je lui ai expliqué la situation, elle a beaucoup pleuré, je l'ai prise dans mes bras pour la réconforter et lui expliquer qu'elle allait traverser des moments difficiles, qu'il lui faudrait beaucoup de courage... Une voiture de police est arrivée, deux policiers en uniforme sont sortis. Je leur ai dit que la façon de procéder à l'interpellation d'une jeune fille dans le cadre des activités scolaires est totalement inhumaine et qu'ils auraient pu procéder différemment, il m'ont répondu qu'ils n'avaient pas le choix, qu'elle devait retrouver sa famille...Je leur ai encore demandé pour rester un peu avec Léoanarda et lui dire au revoir (je l'a connais depuis 4 ans et l'émotion était très forte). Puis j'ai demandé aux policiers de laisser s'éloigner le bus pour que les élèves ne voient pas Léonarda monter dans la voiture de police, elle ne voulait pas être humiliée devant ses amis ! Mes collègues ont ensuite expliqué la situation à certains élèves qui croyaient que Léonarda avait volé ou commis un délit. Les élèves et les professeurs ont été extrêmement choqués et j'ai du parler à nouveau de ce qui s'était passé le lendemain pour ne pas inquiéter les élèves et les parents.»

             Lorsque la famille est partie, nous avons essayé de joindre par mail la préfecture fermée le mercredi matin. Mais la famille a été emmenée directement à l'aéroport pour prendre un avion à 13h00 le même jour. Nous avons eu au téléphone les deux filles Maria et Leonarda jusqu'au départ de l'avion.

             Nous, professeurs du collège André Malraux et du lycée Toussaint Louverture, sommes profondément choqués par les méthodes utilisées pour renvoyer des enfants issus de la minorité rom vers des pays qu'ils ne connaissent pas et dont ils ne parlent pas la langue.

            Nous, professeurs du collège André Malraux et du lycée Toussaint Louverture, sommes choqués de voir comment les efforts d'intégration fournis par ces enfants à l'école sont réduits à néant par des politiques aveugles et inhumaines.

            Nous demandons le retour immédiat des enfants en France pour leur sécurité.

Enseignants du collège André Malraux et du lycée Toussaint Louverture

 

Contact presse

Noëlle Ledeur 06 74 83 11 94

ledeur.noelle@orange.fr
  via Réseau Education Sans Frontières - Mediapart (blog RESF) : Léonarda, 15 ans, arrêtée et expulsée pendant une sortie scolairepar Resf 25 Signer la pétition

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3 octobre 2013 4 03 /10 /octobre /2013 16:15

 

Je l’ai plutôt mauvaise ces jours-ci. Je me sens assez démunie  face à l’ampleur du désastre. Celui de la progression du micro-fascisme dans nos sociétés. Une gangrène qui repose sur l’ignorance, le rejet à priori de l’inconnu, de la différence, la recherche d’exutoires au mal-être en forme de boucs émissaires.

Mais aussi :

Le fascisme cool et sympa

tgb

À une époque de technologie avancée, le plus grand danger pour les idées, la culture et l'esprit risque davantage de venir d'un ennemi au visage souriant que d'un adversaire inspirant la terreur et la haine. Aldous Huxley
Si tu crois encore que le fascisme entrera par la porte au pas de l’oie, le bras levé, avec la tête de l’emploi, mèche sur le front pour bien l’identifier, moustache calibrée des fois que ça suffirait pas, tu te fourres salement le doigt dans l’œil de Lepen père.
Parce que l’extrême droite sait entrer par la fenêtre en épousant son temps. Elle peut être cool et sympa, jouer de la gratte en catogan, prendre de la coke et fumer des pétards, être homo et décontracte, avoir les traits d’une nana sexy et faire dans la séduction, la caution rebeu, ce qui ne l’empêche d’ailleurs pas de planquer un drapeau hitlérien dans sa cave.
Tandis que le fond conserve ses invariants, xénophobie, ordre, nationalisme… la forme s’édulcore, s’adapte à l’époque, se donne un coup de djeune et de réseaux sociaux. L’extrême droite a bien compris qu’il lui fallait avancer masquée, liftée, souriante ; éviter l’antisémitisme, y aller mollo sur les mœurs, enjoliver son discours, décerner à titre gracieux une carte FN au Valls méritant, s’accaparer les valeurs de l’autre, inspirer en loucedé un rire collabo qui ne déparerait pas à la une de Minute ou de Valeurs Actuelles.
Plantu Lepen, même combat !
En ce sens les crétins de la Daube Dorée n’auront pas fait dans la finesse. Avec leur croix plus ou moins gammée, leur panoplie revisitée du petit Nazillon à la grecque, ils devenaient un peu trop voyants, encombrants et difficilement sortables, voire assumables, par des autorités complaisantes pour ne pas dire conniventes. Quoi que le pouvoir grec prit son temps, il finit quand même par remettre (jusqu’à la prochaine fois) les petits gestapistes du 3ème Reich dans leur boîte.
Oui, la droite extrême new-look évite dorénavant de trop se commettre avec les crânes rasés un peu frustes et préfère distiller à petites touches ses insanités dans les ouvrages pseudo historiques du si sympathique et insoupçonnable Lorant Deutsh, porte serviette propret du sinistre Patrick Buisson, faire dans le discours populeux et social, opportunément anti-libéral, caresser la Janine rurale dans le sens du poil, le Jean-Claude suburbain dans le sens de la raie du milieu.
Il n’empêche que l’extrême droite, quelque soit sa plastique, reste le meilleur allié du capitalisme. En détournant la colère populaire vers des boucs émissaires, elle capte assez de voix pour empêcher toute alternative à gauche, toute remise en cause de la doxa et des privilèges de l'oligarchie.
Avec ou sans cravate, l’extrême droite porte en elle le fascisme comme la nuée porte l’orage. Plus elle sera proche du pouvoir plus elle se fera mielleuse et policée : bonne fille… à papa.
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24 septembre 2013 2 24 /09 /septembre /2013 18:05

 

 

 

 

“Temednos, que ya llegamos!” Estas fueron las primeras palabras de Nikos Michaloliakos, líder de Amanecer Dorado, formación neo-nazi que obtiene 21 escaños en el Parlamento Griego después de conseguir el 7% de los votos en las elecciones griegas

"Craignez-nous parce que nous arrivons".

Première parole du leader d'Aube Dorée, Nikos Michaloliakos,à son entrée au Parlement Grec

 

 

 

Prises par d’autres préoccupations, je n’ai pas accordé au meurtre de Pavlos Fyssas, par des militants nazis d’Aube Dorée, l’attention que méritait cet évènement qui ‘est produit alors que la fille de Franco en Espagne, appelle ouvertement au coup d’état militaire, encouragée par le PP qui non seulement réhabilite le franquisme mais dont certains militants n’hésitent plus à afficher leurs sympathies nazies, par exemple en pratiquant publiquement le salut hitlérien.

Ce qui se produit en Espagne, aussi mériterait que nous soyons plus attentifs que ne l’ont été dans leur immense majorité nos grands-parents et leur gouvernements alors que e peuple d’Espagne, les appelaient au secours contre l’insurrection fasciste soutenue par les armées d’Hitler et de Mussolini ravitaillée par les pétroliers étasuniens. Les mêmes, ne l’oublions pas qui ont permis la seconde guerre mondiale, en contribuant de manière importante au développement de l’armée nazie, à son équipement, à son approvisionnement, mais aussi à son entraînement alors qu’elle était encore insignifiante.

Ce sont des leçons de l’histoire qui ont été gommée de nos manuels scolaires, raison de plus pour leur donner l’importance qu’ils méritent, une importance essentielle, pour nous permettre de comprendre cette sortie actuelle des hordes nazies depuis le  souterrain dans lesquels elles ont proliféré.

Un soutien au peuple espagnol assiégé par l’insurrection fasciste et ses alliés, aurait évité la seconde guerre mondiale, et aussi que nous soyons à présent témoins d’une résurgence du mal sans commune mesure avec cette poussée de fièvre du siècle dernier.

Je lisais cette nuit quelques documents relatifs à la stratégie de la tension et aux liens qui avait pu dans ce cadre se tisser entre les Opérations Spéciale US, certains membres de nos corps d’armée et de renseignement les plus secrets appartenant au réseau Gladio, mais aussi entre groupes terroristes d’extrême-gauche et membres de l’extrême-droite et/ou de la pire pègre, avec l’approbation tacite ou la complicité avérée de politiciens des hautes sphères.. Quel imbroglio, sur fond de construction d’une Europe nous échappe.

En vertu de l’adage : « Les moyens sont constitutifs de la fin, qu’ils déterminent » je ne peux approuver quelques formes de terrorisme que ce soit. Ce qui ne m’empêche d’être sensible à la détresse qui doit être celle de jeunes, idéalistes, lorsqu’ils comprennent – pour ceux qui le comprennent – qu’ils ont été manipulés et leurs actions détournées à des fins contraires aux objectifs qu’ils pensaient servir. Et voilà que cela recommence…

 

Extraits d’un article dont vous trouverez l’intégrité en espagnol ici : Altos miembros de la policía griega, apartados de sus cargos por presunta relación con Amanecer Dorado 

Un enquête est menée actuellement au sein de la police grecque,  un nombre importants de hauts gradés ont été écartés de leurs responsabilités ou transférés à d’autres postes à cause de leurs relations présumées avec Aube Dorée ou pour leur négligence dans la répression des actions violentes du parti néonazi.

Une enquête à été ordonnée par le Ministre de l’Ordre Public dans tous les rangs de la police pour débusquer les membres et sympathisants de ce groupe qui y seraient infiltrés.

L’inspecteur général de la région d Sud de la Grèce et le directeur général de la Police de Grèce Centrale ont remis leur démission. Pour des raisons personnelles dit le communiqué du Ministère, ce que dément la presse, qui affirment qu’ils y furent forcés.

Une autre enquête est menée sur l’ile d’Evia à 70 km d’Athènes qui concerne la présence d’individus armées au siège d’Aube Dorée. Des policiers de l’ile ont été suspendu en raison de la négligence dont ils ont fait preuve dans cette enquête, alors que les chef et sous-chef des forces spéciales anti terroristes,. Alors que d’autres hauts responsables de la région de l’Attique ont été transférés.

Quant au chef de l’unité anti-troubles il a été relevé de ses fonctions pour n’être pas intervenu contre les néo-nazis lançant des pierres aux manifestants qui protestaient contre la mort de Pavlov Fyssas. D’autres transferts ont eu lieu pour cette raison dans des commissariats où la présence de sympathisants s’Aube Dorée est soupçonnée.

Une autre enquête à également été ouverte. Elle concerne l’entraînement au maniement des armes que des militaires d’active donneraient aux militants d’Aube Dorée.

En plus, des membres de la famille et autres proches du chanteur, affirment qu’alors qu’il se faisait assassiner des forces de police étaient présentes et ne sont pas intervenues.

Suite aux pressions faites sur la police, des dizaines de sièges d’Aube Dorée auraient été perquisitionnés depuis.

 

 

Je vous renvoie aussi à la lecture de cet article édifiant du Courrier International

 

 

Un ancien membre d'Aube dorée témoigne


Le quotidien grec To Ethnos a rencontré un ancien membre du parti néonazi Aube dorée, deux jours après la mort d'un militant antifascite tué par un membre de la formation d'extrême droite. Extraits.


Des militants d'Aube dorée manifestent devant le Parlement d'Athènes, le 29 mai 2013 - AFP/STR  
Des militants d'Aube dorée manifestent devant le Parlement d'Athènes, le 29 mai 2013 - AFP/STR
Un ancien membre d’Aube dorée (AD), ayant appartenu à son noyau dur pendant un an et demi, révèle l'existence d'un bataillon d’assaut de l’organisation nazie.

Pendant cette période, il a côtoyé de près les hommes qui composent la branche locale du parti "dont le meurtrier de Pavlos fyssas était sous-chef", affirme-t-il. Dans ce long entretien qu’il accorde à To Ethnos, il fait sortir de l’ombre cette branche locale dangereuse d’Aube dorée de la ville de Nikaia [quartier du Pirée], au sud-ouest d’Athènes.

Ce qu’il nous révèle est plus ou moins ce que nous imaginions, mais demeure choquant. Le bataillon d’assaut de Nikaia, dirigée par Giorgos Patelis et présidé par le député [d'Aube Dorée] Ioannis Lagos, dispose d’une hiérarchie, d’une structure et d’une organisation que l’on rencontre seulement dans des équipes paramilitaires criminelles.

Lire la suite : GRÈCE • Un ancien membre d'Aube dorée témoigne | Courrier international

 

 

 

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19 septembre 2013 4 19 /09 /septembre /2013 17:29

 

Tout va bien à bord ? Euh non pas vraiment…

mercredi 18 septembre 2013


Par Paul C.

Une rentrée guère réjouissante, marquée par les bruits de bottes du côté de la Syrie, et le pilonnage médiatique concernant l’état de grâce des droites populistes en Europe et plus particulièrement du Front National en France. Il ne se passe pas une journée sans que l’on ait droit à un communiqué de presse évoquant la sympathie d’une large couche de la population pour les idées nauséabondes du FN. Cela va du « un Français sur trois se sent proche des idées de Marine Le Pen » à « 16 % des électeurs envisagent de voter FN aux prochaines élections municipales », en passant par une large couverture des moindres propos, des moindres faits et gestes de la patronne de la boutique.

 Tout cela est plutôt décourageant pour les militants qui se battent pied à pied contre cette progression rampante des idées fascisantes ; en ce qui me concerne, une envie de plus en plus forte aussi de gueuler « les cons ! », en pensant à un certain nombre de mes concitoyens. C’est le point de vue qui domine dans la première partie de cet article ! S’arrêter à ce stade là dans l’analyse serait une erreur et je vais essayer de positiver un peu plus dans la seconde partie… Il est clair qu’une fraction non négligeable de la profession journalistique contribue à la promotion volontaire ou involontaire des thèses du Front National… Il faut néanmoins garder tête froide et donner à ce matraquage de communiqués et d’informations plus ou moins tapageuses la place qui doit être la sienne : il n’y a rien de bien nouveau sous le soleil, mais c’est sacrément inquiétant. Le discours frontiste se situe à un niveau de démagogie rarement atteint. Grâce aux propos tenus successivement par les représentants de la droite comme de la gauche depuis 1981, ses idées les plus répugnantes ont été largement banalisées. On peut glisser sans peine des propos tenus par un présentateur de JT à une allocution télévisée des leaders populistes ou de leurs marionnettes. Les idées les plus réactionnaires du moment bénéficient d’un fort courant de sympathie dans l’opinion et les leaders de la droite classique comme ceux de la gauche molle surfent dangereusement sur cette vague.

Le fait que l’on préfère le niveau de réflexion des conversations de bistrot à celui des conférences universitaires n’est pas une nouveauté. Dans tous les pays, à toutes les époques (je suis prêt bien entendu à recevoir des contre-exemples !) la majorité de la population s’est toujours plus préoccupée de sa survie quotidienne que d’un combat pour des idées tout aussi nobles qu’abstraites, parce que d’application lointaine. Les tendances les plus radicales du Front Populaire en 1936 n’ont jamais été soutenues par un raz-de-marée populaire ; quant à la Résistance contre le nazisme – certes héroïque – elle n’a été soutenue que par une fraction de la population. Comme le fait remarquer si justement Émilie Carles dans « la soupe aux herbes sauvages », en 1945, nombre de familles françaises se sont contentées de remplacer le portrait du Maréchal Pétain par celui du Général de Gaulle. Les idées de Pétain et Laval étaient simples, faciles à expliquer et donc faciles à adopter. On avait perdu la guerre ; c’était la faute des autres – non pas les Maghrébins à l’époque mais les Juifs, les Anglais, les étrangers… On devait accepter l’occupation allemande et la vengeance contre ceux qui avaient provoqué la débâcle était tout à fait légitime. On ajoute à cela une pincée de ruralité, une pincée de bon sens près de chez vous plus une pincée de nostalgie du bon vieux temps et la potion de sorcière est prête.

Si je fais cette brève allusion au discours pétainiste, c’est que les mots ont quelque peu changé, mais le fond du discours reste le même : le montage d’illustrations ci-dessus, volé à Patrick Mignard sur son blog « Fédérer et Libérer », le montre bien. Les responsables du mal-être actuel sont les « immigrés » pour l’essentiel, les Juifs pour un peu mais on ne le dit pas (faut bien faire plaisir à certains gros bras nostalgiques d’Hitler), la finance internationale et apatride pour le reste (mais on se garde bien de l’attaquer). C’est plus simple de s’attaquer à l’Arabe, au Turc ou au Sénégalais de l’immeuble d’à côté que d’aller traquer le vrai responsable du licenciement dont on est victime, ou de la crise économique dont on paie les pots cassés. Le film « Louise Michel » constitue une très bonne illustration de mon propos. Le patron (que connaissent les ouvrières) a fermé l’usine de textile… Il est facile à abattre, mais le problème c’est que derrière le patron de la firme, il y a le patron du groupe industriel, puis le fond de pension domicilié fiscalement aux îles Caïman ou ailleurs, qui contrôle toute la situation économique de la filière.

Le réflexe primaire de taper sur plus petit que soi est un réflexe de survie élémentaire. Je me souviens d’une scène à laquelle nous avons assisté dans un charmant hôtel-restaurant d’une délicieuse ville provinciale. Lors du dîner, pris dans une salle à manger gracieusement meublée, entourés de retraités distingués (comme nous maintenant), l’un des serveurs a commis une maladresse et laissé tomber le contenu du plateau qu’il transportait. Nous étions près de la porte des cuisines et nous avons entendu la remarque faite par le maître d’hôtel : « vous souriez maintenant ; vous verrez tout à l’heure, cela ne se passera pas comme ça ; reprenez votre service ! » . Nous avons alors eu une pensée émue pour le pauvre garçon… Le lendemain, nous avons croisé notre héros de la veille dans une toute autre posture : il traversait à grande vitesse la salle à manger, bousculant une femme de ménage espagnole qui passait la serpillère. Les propos pour s’excuser ressemblaient à un « pousse-toi salope » proféré avec haine… Certes je ne m’attendais pas à ce qu’il rédige un tract appelant à l’expulsion des exploiteurs et à la collectivisation de l’entreprise… Mais je fus quelque peu désappointé. Cette histoire, qui date un peu, est toujours restée dans un coin de ma mémoire.

La force du discours du Front National c’est donc de s’appuyer sur un certain nombre de lieux communs, faciles à admettre, d’autant que finalement il n’y a plus de complexes à avoir puisque la majorité des politiciens et des animateurs de show télévisé, tiennent le même à quelques nuances près. Que le reste du programme s’appuie sur une analyse économique tout aussi délirante qu’incohérente n’a aucune importance. Il ne s’agit pas de cohérence mais de démagogie. L’artisan qui a du mal à assurer la survie de sa petite entreprise est ravi d’entendre que l’on va baisser ses impôts de moitié, relâcher les contrôles fiscaux, lui offrir une mallette gratuite pour transporter ses économies au Lichtenstein et qu’on fera payer l’addition aux Maghrébins qui volent le pain des Français. Point final, on lève les yeux vers le ciel pour admirer le coq sur le clocher de l’église bleu blanc rouge. Tant que l’extrême-droite ne va pas trop loin dans son programme haineux, et tant que l’on ne touche pas aux intérêts majeurs des grands groupes industriels, le grand capital est prêt à recourir à ses bons et loyaux services. Ne jamais oublier qu’Hitler est arrivé au pouvoir de façon tout à fait légale et avec le soutien massif des patrons de la grande industrie comme de la petite. Certes ses gesticulations exagérées l’ont poussé à aller un peu trop loin, ce qui fait que même les pétroliers américains qui l’ont soutenu jusqu’en 43/44 ont fini par le lâcher. On peut lire à ce sujet l’excellent ouvrage « le mythe de la bonne guerre » de Jacques R. Pauwels, publié aux éditions Aden. (voir la vidéo-conférence de Jacques R. Pauwels sur son livre ici) En général les financiers soutiennent la droite extrême tant qu’ils ont besoin d’elle pour « remettre de l’ordre » dans la population travailleuse. Après, peu importe, on solde. Les « Droits de l’Homme » reviennent timidement sur le devant de la scène. Le cas Pinochet illustre bien cette théorie. Celui des colonels grecs aussi. Espérons que la population grecque saura réagir intelligemment avant qu’Aube dorée ne lui serve un dessert aussi épicé que moisi.

Le premier moyen à utiliser pour faire rempart aux arguments simplistes employés par les populistes c’est d’agir sur le terreau même dans lequel leurs idées s’épanouissent. Notre société se caractérise par un appauvrissement plus ou moins rapide des couches sociales les plus démunies ainsi que de la petite bourgeoisie. Elle se caractérise aussi par une destruction rapide de toute forme de lien social, ayant pour conséquences le repli sur soi, l’isolement et l’angoisse. Cela est vrai aussi bien dans les grands ensembles d’habitation que dans les quartiers pavillonnaires, dans les zones rurales comme dans les zones urbaines. Cet isolement enfonce un peu plus les gens dans la misère. Les familles maghrébines résistent un peu mieux à la crise car de nombreux réseaux de solidarité fonctionnent encore : échanges de services, d’adresses pour des approvisionnements moins onéreux… Ce mutualisme est trop souvent absent dans les familles « françaises de souche » auxquelles s’adresse le FN. Ces dernières ont donc une forte impression de disparité de revenus, et jalousent fortement leurs voisins de palier, parfois moins bien lotis, mais mieux organisés. Le discours selon lequel les étrangers volent les services sociaux et roulent en BMW grâce aux allocs surgit souvent dans les discussions. Le frontiste du coin arrive, la bouche en cœur, et n’a plus qu’à déclarer : « nous on se préoccupe de votre sort… Ce ne sont point les grands groupes financiers qui sont responsables de votre misère. D’ailleurs, ils sont inaccessibles. Votre voisin basané est une cible de proximité plus facile à atteindre ! » Un certain nombre d’études montrent que la reconstruction d’un lien social de proximité permet de limiter l’enracinement du F Haine. Au moment où j’écris ces lignes, je découvre un article fort intéressant paru dans le journal « Le Monde », sur les pratiques municipales dans une petite ville de l’Oise, Feigneux. Plutôt que de paraphraser cet article, je vous invite à en prendre connaissance. Je trouve qu’il illustre fort bien mon propos.

Le second axe de lutte utile pour contrer la progression des idées de l’extrême-droite dans l’opinion publique se situe au niveau du discours. Il ne faut en aucun cas laisser le terrain libre à aucune forme de propagande et s’opposer systématiquement, sans concession aucune mais en veillant à se placer dans un registre adapté au champ de préoccupations du public concerné. C’est difficile parfois, je l’admets, car il n’est pas évident de lutter contre la mauvaise foi et les énormités, surtout quand on est habitué à manier le verbe et à tenir des propos philosophiques de salon, domaine dans lequel trop d’écologistes politiques excellent. Je comprends fort bien que certains de mes concitoyens ne soient guère réceptif à un discours sur la décroissance alors qu’ils ne trouvent pas les fonds nécessaires pour assurer une alimentation suffisante et surtout équilibrée à leur famille. Je ne dis pas qu’il « suffit de » trouver les bons mots (je rédige en ce moment une chronique concernant les « Y’a qu’à » alors je ne vais pas tomber dans ce piège-là !). Je dis que démonter c’est la seule méthode pour réparer. Il est contre productif de vouloir jeter l’interlocuteur avec l’eau du bain, de vouloir ridiculiser ses idées, ou de sembler les accepter partiellement pour essayer de les faire évoluer par la suite – pratiques courantes dans la rhétorique politicienne... La gauche française joue à ce jeu dangereux depuis des années et l’évolution des opinions montre à quel point elle se trompe. Tenir un discours droitiste pour appâter l’électeur de droite et espérer qu’il va se bonifier comme le vin en fût est une utopie. L’électeur de droite (extrême) n’a confiance que dans les politiciens de droite (extrême) pour mener une politique de droite (extrême). Les gesticulations de Sarkozy aux dernières élections ont bien fait rigoler la clique fascisante… Puisque l’on parle d’élections, il est quand même bon de s’arrêter sur le fait que le nombre de votes d’extrême-droite progresse en pourcentage, mais comme le nombre d’abstentions ou de non-inscrits s’accroit également à grande vitesse, on peut se demander sur quelle base les sondeurs sont si tranchés quant aux soutiens populaires engrangés par la fille à papa.

Le discours est une chose ; la pratique reste essentielle. Il faut aussi recréer les échanges de proximité, la vie de quartier et sortir les gens de leur isolement de plus en plus mortifère. On a moins envie de parquer, d’exclure, de trucider… un être humain que l’on connait personnellement et non en tant que marionnette d’un quelconque fait-divers. Que de fois n’ai-je entendu, dans la bouche d’enseignants ou de parents d’élèves quand je travaillais, cette phrase lourde de sens « oui mais eux ce n’est pas pareil, on les connait ». Dans notre micro-région, le Nord du département de l’Isère où le Front de la Haine obtient des résultats proches de celui énoncé dans le titre de cette chronique, c’est dans les villages où la population immigrée est quasiment absente que les adorateurs de la déesse blonde raciste sont les plus virulents… Cela mérite réflexion, car cela montre que ce sont les rumeurs, les faits-divers montés en mayonnaise, la main tendue des médias au FN qui font le plus de dégâts dans les mentalités. Les réflexes d’entraide, de solidarité, de convivialité ne sont peut-être pas si morts que cela.

Terminons donc sur une petite note d’optimisme : lors des combats menés contre l’expulsion d’une famille étrangère, RESF ne mobilise pas que des intellectuels de gauche ou des militants. Nombre de simples voisins font souvent partie des comités de soutien et cela gêne considérablement les sbires du Ministère de l’Intérieur, que ceux-ci soient les serviteurs d’une officine de droite ou de gauche par ailleurs.

lafeuillecharbinoise.com


[Altermonde-sans-frontières] « Un Français sur trois se sent proche des idées de Marine Le Pen » ?

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19 septembre 2013 4 19 /09 /septembre /2013 07:06

 

Pavlos Fyssas, el rapero asesinado por un miembro del partido neonazi Amanecer Dorado

Pavlos Fyssas,




 

Rassemblement jeudi 19/09/13 à place St Michel contre l’assassinant de Pavlos Fyssas, militant antifasciste



Le musicien de hip-hop et militant antifasciste Pavlos Fyssas est mort. Il a été froidement assassiné par un membre du parti Néo-nazi, Aube Dorée le 17/09/2013. L’antifasciste a reçu des coups de couteau directement au niveau du cœur devant de dizaines des personnes avec la tolérance des forces policières qui ont refusé d’intervenir.

Cet assassinat intervient cinq jours seulement après l’attaque meurtrière des néonazis d’Aube Dorée contre des militants du PC grec qui faisaient un collage dans un quartier ouvrier de Pirée. Ces événements font partie d’une grande série des agressions, des ratonnades et des assassinats des immigrants et des militants antifascistes qui ont eu lieu pendant les dernières années.

Dans un pays où le taux du chômage atteint 28%, où la plupart des travailleurs sont soit licenciés soit au chômage technique, où le 20% de la population vit sous le seuil de pauvreté, les néonazis en pleine collaboration avec le gouvernement grec poursuivent une attaque contre l’ennemi intérieur. Chaque travailleur qui ne baisse pas la tête devant les attaques du capital, chaque immigrant qui essaie de gagner sa vie, chaque femme qui défend ses droits, chaque résistance contre la politique gouvernementale est qualifié « d’ennemi intérieur ». L’Aube Dorée est devenu l’amortisseur parfait de la colère populaire née par le désastre humanitaire provoqué par le gouvernement et la Troïka.

Le gang d’assassins a « bien » choisi les dates des attaques. Au moment où les enseignants menacés de licenciement descendent dans la rue avec une participation à la grève qui monte à 90%, au moment où les travailleurs d’autres secteurs rejoignent les enseignants en lutte, les néonazis jouent le seul rôle qu’ils connaissent depuis 70 ans, celui de l’écrasement de chaque voix libre.

La mort de Pavlos Fyssas n’est pas en vain. Elle rend plus décisives la lutte antifasciste et la lutte des travailleurs contre le gouvernement, la Troïka et l’Aube Dorée, le bras dur du capitalisme.

Les morts de Clément Méric et de Pavlos Fyssas doivent être les derniers crimes des criminels fascistes et néonazis.

Ni en France, ni en Grèce !
Le fascisme No passaran !
Solidarité internationale !
Appel au rassemblement jeudi 19/09 à 19.00, à la place Saint-Michel


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8 juin 2013 6 08 /06 /juin /2013 10:07

 

Je reprends ce texte publié sur CAP 2012   parce qu’il met en garde, les mots que nous emploierons ne sont pas dénués d’implications y compris celles opératives des actes qu’ils pourraient provoquer.

Que l’agresseur ait frappé sans intention de tuer est ici secondaire. La violence potentiellement prédispose à de tels accidents et elle est en soi inacceptable. Point. Et cette violence entre dans les mœurs.

Cela fait un moment que je mets en garde contre le risque de voir de telles agressions se multiplier, et je continuerai à le faire. Mais pour aborder la mort de Clément Méric, j’attendrai que les émotions se soient calmées.

Trop nombreux déjà sont ceux qui instrumentalisent cette mort. On ne lutte pas contre le fascisme avec de la haine. La haine est un synonyme du fascisme et la composante de micro-fascisme qui réside en chacun de nous.

 


Tras el asesinato de un joven militante de izquierda por matones de la extrema derecha

 

Clément Méric : choisir ses mots, choisir son camp

 

Sur @si

09h15 le neuf-quinze  

 

Clément Méric : choisir ses mots, choisir son camp

Evidemment l'indignation. Un jeune homme de 18 ans, frappé à mort en pleine rue par un groupe d'agresseurs, s'écroule, sa tête heurte un plot, il est en état de mort cérébrale. Tout nous indigne : l'âge de la victime, l'agression, la mort. Mais juste après l'indignation, l'embarras des mots, et les questions sur les circonstances. La victime, Clément Méric, était étudiant à Sciences Po Paris, dit-on, et militant proche du mouvement "Action antisfasciste Paris banlieue". Quant aux agresseurs, ils seraient, eux, des militants des "Jeunesses Nationalistes Révolutionnaires" de Serge Ayoub, dit Batskin (pour en savoir plus sur ces charmants jeunes gens, voir quelques extraits du documentaire de Canal+ que nous diffusions dans une de nos dernières émissions (1), et entendre notamment Ayoub y déclarer que "la violence est un moyen d'expression").

Comment, pour les journalistes qui relatent les premiers l'événement, survenu mercredi en fin d'après-midi, désigner d'abord la victime ? Etudiant ? C'est évidemment incomplet, et ce n'est pas en qualité d'étudiant, que Clément Méric a été frappé. Militant d'extrême-gauche ? Attention à ne pas créer une fausse symétrie avec l'extrême-droite, renvoyant ainsi dos à dos agresseurs et agressés. Militant antifasciste ? Mais les agresseurs peuvent-ils vraiment être appelés des "fascistes" ? Quant à ces agresseurs, mêmes questions. Faut-il les appeler des "skinheads", ce qui atténue la responsabilité éventuelle de leur organisation politique ? Faut-il les désigner par le nom de cette organisation, les "Jeunesses Nationalistes Révolutionnaires" ? Mais le seul témoignage sur leur appartenance à ce mouvement provient manifestement des accompagnateurs de la victime, et il est donc à confirmer.

Pour la presse comme demain pour la police, impossible de répondre à ces questions sans reconstituer le plus précisément possible les faits, pour l'instant peu clairs. Quel enchainement d'événements, apparemment en dehors de tout contexte de manifestation, a conduit à la bagarre mortelle ? Agresseurs et victimes se sont-ils retrouvés par hasard ? Et sinon, comment le groupe d'agresseurs savait-il qu'un petit groupe de militants ennemis se trouvait dans cette "vente privée" d'un magasin de vêtements de sport, dans le quartier de la gare Saint-Lazare, à Paris ? Les deux groupes se connaissaient-ils ? Il faudra, pour savoir, attendre l'enquête de police, et surtout le procès, qui seul permet d'approcher la réalité du déroulement des événements. Et en attendant, savoir que choisir ses mots, c'est choisir son camp.

Spécial Investigation, Canal+, capture écran

 

Daniel Schneidermann

Via :
CAP 2012

 

Je vous invite à lire d'autres articles sur le même sujet, et j'invite chacun à réfléchir sur le sens des mots utilisés par chacun pour s'exprimer à ce sujet, c'est le premier pas vers la création d'une intelligence collective face à la montée du fascisme, et sans l'organisation concertée née de cette intelligence collective, jamais nous ne pourrons combattre efficacement la peste brune renée de ses cendres.

 

 

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4 juin 2013 2 04 /06 /juin /2013 11:16

 

 

Quelques points sur la lutte contre le racisme

À la suite du meurtre d’un soldat dans le quartier londonien de Woolwich le 22 mai 2013, une vaste campagne raciste est mise en œuvre pour stigmatiser les musulmans et assimiler l’événement à un attentat terroriste. L’English Defence League, principal courant d’extrême droite adepte des rassemblements et des démonstrations de force, est parvenue à réunir près d’un millier de personnes pour dénoncer l’Islam, mobilisant bien davantage que les réseaux antifascistes (pourtant solides en Grande-Bretagne) ont pu le faire et les mettant en difficulté. Dans les notes qui suivent, Richard Seymour tire le bilan de cet échec et émet quelques propositions stratégiques pour le combat antiraciste.  

 

La débâcle du 28 mai dernier à Londres – et qui se doit d’être considérée comme une débâcle pour les antiracistes compte tenu du fait qu’ils ont largement été mis en minorité par les sympathisants de l’EDL (English Defence League), et qu’ils ont été victimes d’une pluie de bouteilles tandis qu’ils étaient encerclés –, cette débâcle devrait nous amener à un peu repenser les choses. C’est ainsi que j’aimerais partager avec vous les quelques idées que je souhaite développer prochainement :

  1. La lutte à mener est de longue haleine et se joue sur différents plans. Il ne s’agit pas uniquement de remporter des batailles politiques immédiates. Le tempo des luttes politiques est extrêmement rapide, et la pérennité d’une lutte en particulier peut être en effet extrêmement brève. Mais ces luttes se jouent sur un terrain formé par des années de travail culturel et idéologique et entre des forces façonnées par ce même travail mené sur la longue durée. Le rythme des luttes culturelles et idéologiques est, en comparaison avec les batailles politiques, pour le moins glaçant. Mais ce n’est pas parce qu’on ne voit simplement pas les succès immédiats sur ces fronts que cela veut dire qu’elles n’ont pas de valeur – elles sont absolument centrales. L’intense offensive raciste qui a suivi le meurtre de Woolwich n’était pas inévitable. Elle s’inscrit au creux des efforts poursuivis par différentes forces pour élaborer de nouvelles idéologies racistes sur un temps long.
  2. Nous ne pouvons pas combattre l’EDL sans également combattre les forces majeures du racisme au sein de notre société. L’EDL ne serait rien sans les magazines, sans la police, sans les partis néolibéraux qui siègent au parlement, etc. Les idéologies qui légitiment les actions de l’EDL, ou au moins qui en font les réactions explicables à une provocation excessive, prennent leur source à Whitehall, chez la BBC, dans la presse, au parlement tout comme chez les bailleurs de fonds de la réaction. Et pour mettre en défaite ces forces, nous avons besoin d’un large panel de tactiques. L’EDL s’ancre avant tout dans la violence de rue, il nous incombe donc de s’inscrire dans la contre-mobilisation et l’autodéfense. Une telle tactique ne pourrait par contre  pas être déployée contre l’UKIP (United Kingdom Independence Party), la presse de Murdoch ou le Département d’État. Il ne s’agit pas ici de proposer une panoplie de tactiques alternatives ; il s’agit simplement pour moi de mettre en avant la nécessité de ne pas s’en tenir aux contre-mobilisations.
  3. C’est une impasse que d’essayer de fondre l’antiracisme dans les luttes contre l’austérité. De telles tentatives ne correspondent qu’à un réflexe ouvriériste, et elles ont fait surface de façon surprenante parmi certaines franges de la gauche radicale – y compris Alexis Tsipras. Le racisme ne naît pas simplement d’une colère déplacée liée à la précarité et  au dénuement. Son développement comme sa large diffusion peuvent être bien entendu accélérés par une profonde crise politique, les effondrements financiers, une crise de légitimité, une crise de surproduction, etc. Et pour sûr, les luttes contre la crise capitaliste et sa résolution sont en lien avec le combat antiraciste : ce qui veut dire que des initiatives comme Left Unity ou People's Assembly feraient bien de prendre au sérieux l’antiracisme en tant que composante semi-autonome d’une stratégie plus large. Mais pour comprendre la relation entre racisme, crise économique et émergence de subjectivités politiques encore faut-il fournir une analyse à des années lumières de la rengaine qui veut que « crise du capitalisme = périodes difficiles = racisme ».
  4. Il n’y a pas non plus beaucoup de sens à dissoudre l’antiracisme dans le mouvement antiguerre, ainsi qu’il peut en être aujourd’hui. Ce n’est pas moins réducteur. Pour exemple, les analyses du meurtre de Woolwich qui ont tenté de l’inscrire dans le cadre de « la guerre contre le terrorisme » (war on terror), et ainsi d'orienter la réflexion vers une ligne politique essentiellement antiguerre, me semblent d'une faiblesse déconcertante. Michael Adebolajo et Michael Adebowale, les protagonistes du meurtre de Londres, semblent certes avoir agi dans le contexte de « la guerre contre le terrorisme », et avoir expliqué leur geste dans cette perspective.  Mais les processus par lesquels ils en sont arrivé à rejoindre la plus marginale et la plus militante des sectes islamiques sont susceptibles d’être s’enracinés dans le processus continu du capitalisme britannique. Nous devons nous battre et gagner cette bataille argumentative : oui, la Grande-Bretagne est une société profondément raciste et injuste au sein de laquelle les Noir•e•s sont humilié•e•s et défavorisé•e•s de la manière la plus outrageusement visible.
  5. Cela est évident depuis longtemps, et cela l’est bien plus encore désormais. On ne peut pas segmenter différents types de racisme comme s’ils étaient complètement séparés ; ils se renforcent mutuellement. La montée de l’islamophobie – comme on a pu en juger au moment des émeutes, et qui devient de plus en plus claire avec les intrigantes raciologies qui ont fait suite au meurtre de Woolwich (le porte-parole de l’EDL a notamment appelé à « renvoyer ces sales Noirs d’où ils viennent ») – n’exclut pas la possible régénérescence d’autres types de racisme à long terme. En effet, le rôle de l’islamophobie comme forme dominante du racisme culturel permet la réhabilitation d’éléments issus de l’essentialisme racial – qui étaient pourtant frappés de discrédit depuis un certain temps – tout en les articulant sous une nouvelle forme. Cela ne signifie pas seulement que l’islamophobie est une simple métaphore vertueuse du racisme traditionnel. Il était d’usage de dire qu’il s’agissait simplement d’une manière respectable d’exprimer du racisme à l’encontre des Pakistanais. Non, les formes courantes du racisme ne se bornent pas à réanimer de plus anciennes formes. Comme l’a démontré Stuart Hall, « Le racisme est toujours un phénomène historiquement spécifique. Bien qu'il puisse se nourrir des traits culturels des séquences historiques passées, il ne se manifeste qu'à travers des formes spécifiques. Il émerge de la situation présente – et non de conditions passées –, ses effets se spécifient par rapport à l'organisation de la société dans son état actuel, au développement effectif de ses processus politiques et culturels – et non par rapport à un passé simplement refoulé. » Les formes actuelles du racisme reflètent et organisent les antagonismes actuels qui s’expriment au sein de luttes politiques complexes, des émeutes de 2001 à celles de 2012. Et il y a quelque chose de tout à fait spécifique à propos de l’islamophobie et de son contenu – une obsession qui vise les identités religieuses, l’exégèse amateuriste du Coran, etc. – voilà quelque chose de très courant. L’idée n’est pas que l’islamophobie soit une instrumentalisation, un simple épiphénomène, mais plutôt qu’il existe une convergence entre les techniques de racialisation, les forces politiques en présence et le contenu idéel investi dans les types de racisme à l’œuvre aujourd’hui en Grande-Bretagne. Je crois que cela veut dire qu’on commettrait une faute politique à essayer d’identifier un type de racisme en tant qu’il serait un « racisme respectable » et en menant simplement campagne contre cela – la tendance, pour le racisme en général, consiste à être toujours « plus respectable », et c’est pour cela que nous avons besoin de prendre d’assaut sur tous les fronts le racisme en général.

C’est tout pour l’instant.

Richard Seymour est journaliste indépendant, militant politique et anime le blog Lenin’s tomb (www.leninology.com). Il est notamment l’auteur de The Liberal Defense of Murder (Verso, 2008), American Insurgents: A Brief History of American Anti-Imperialism (Haymarket, 2012) et Unhitched. The Trial of Christopher Hitchens (Verso, 2013).

Photographie: Alex Webb

Traduit de l'anglais par Stella Magliani-Belkacem.

Publié avec l’aimable autorisation de l’auteur.

Source : http://www.leninology.com/2013/05/a-few-points-on-struggle-against-racism.html

 

Via : Quelques points sur la lutte contre le racisme | Contretemps

Merci à Anne-Marie (Les coups de coeur d'Anne-Marie)   qui m'a signalé ce texte.

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1 juin 2013 6 01 /06 /juin /2013 17:30

 

 

 

J’avais laissé un commentaire sur le blog des coups de cœur d'Anne-Marie , sous le texte Pour un mouvement antifasciste européen avant qu’il ne soit trop tard. | Mes coups de coeur

Elle m’a répondu et je relaye sa question et j’ai enchaîné, voici cet échange

·  ·  Anne W dit :
mai 31, 2013 à 6:51 | Réponse

Je venais d’écrire …
Je crois qu’à force de tout interpréter dans le cadre étroit du nationalisme à gauche comme à droite, empêche de voir les grandes avancées de la globalisation et sa composante fasciste et nazie qui est omniprésente. Et plus tard, il sera trop tard…
quand j’ai lu ce titre… et la suite. La montée du fascisme n’est pas qu’Européenne, elle est mondiale, et concertée. Jamais l’humanité ne s’est trouvée confrontée à un tel danger global intrinsèque. Je suis contente de voir que d’autres qui ont un peu plus de poids que moi s’en inquiètent…Et un front européens ne suffit pas, ils sont légions aux USA, en Russie, en Amérique Latine… … …
Rassurant aussi que je ne sois pas la seule à penser (ici) qu’ils sont au service du système, en Amérique Latine c’est évident, ils sont manipulés directement par Washington qui a utilisés les nazis recyclés au siècle passé pour torturer et tuer les forces vives de la Région… et c’est reparti aussi là-bas.
Et en Belgique on fait quoi ?

On joue les autruches, en attendant que ça passe ou quoi !!!

 

Et ma réponse :

Je ne sais pas… d’essayer de ne pas jouer les autruches me donne le sentiment d’un décalage toujours plus grand avec la plupart des gens d’ici. C’est d’autant plus fort que quand je me confronte aux courants de pensées dominants en Amérique Latine, je me sens tout à fait en phase.

Cela fait un moment que j’essaye d’alerter sur cette montée généralisée du fascisme en général et du néonazisme en particulier. Je n’ai pas fait de recherches approfondies en ce qui concerne les pays d’Orient, je n’en ai ni le temps ni les moyens. Mais j’ai trouvé un site musulman qui rappelle les bonnes dispositions d’Hitler envers les affidés de cette religion et deux photos de néonazis faisant le salut hitlérien, les uns Syriens, les autres palestiniens. En Israël, en plus des natifs d’extrême-droite, il y a une forte immigration de membres de la très forte et assassine extrême-droite russe. Informations complémentaires bienvenues. Une carte mondiale de la nébuleuse serait éclairante et je pense effrayante.

Aux Etats-Unis et au Canada, les groupements d’extrême-droite sont nombreux et souvent surarmés, les photos qui montrent leurs réunions ne les distinguent en rien de celles de groupes européens.

En Amérique Latine, l’ex-président de Colombie dirige un parti politique régional fasciste, UnoAmerica qui entretient des liens très forts avec le PP espagnol et son leader de fait le fasciste Aznar, et ce parti noyaute toute une série d’ONG et autres fondations, alors que la jeunesse qui est ciblée par des organisations comme CANVAS ex-OTPOR est la droite raciste du continent. Une partie bénéficie d’entrainements paramilitaires, dans la Media Luna en Bolivie, au Venezuela… et je retrouve les agissement de néo-nazis en Colombie, au Mexique, au Brésil, notamment à travers des actions fort similaires à celles menées par Aube Dorée en Grèce, et autres organisations néonazies d’Europe : chasses organisées aux migrants, vagabonds, militants de gauche… et dans l’Est du continent les Rroms sont une cible privilégiée.

Et partout ils ont les mêmes gueules, les mêmes fringues, les mêmes tatouages, les mêmes saluts nazis et les mêmes battes ou barres de fer. Plus effrayant encore à mes yeux sont ces charmantes gretchens aux doux sourires, qui vous parlent en toute bonne conscience de cette « Suprématie blanche » que leurs potes ont le devoir de préserver.

En Amérique Latine, les ficelles sont mises à jour qui relient ces groupes directement à Washington, les analyses se multiplient forts bien documentées. Et nous devrions en prendre de la graine pour remonter aux racines du mal qui nous affecte.

Ici, ce qui est surtout flagrant, c’est que les médias qui appartiennent comme on le sait à la corporation « du nouvel ordre mondial » diffusent une propagande qui permet à l’extrême-droite de se décomplexer et à ses idées de pénétrer les consciences populaires et les inconscients collectifs. Et cela marche, et court même.

On peut aussi observer que les formations données par les « Opérations Spéciales » US à nos forces armées et de polices sont concourantes d’un noyautage de ces mêmes forces par des mouvements d’extrême-droite très bien organisés. Or nous savons – ou pas - que ces forces d’Opérations Spéciales ont travaillé en étroite connexion avec les nazis, récupérés après la seconde guerre mondiale, qui ont collaboré à leur formation dans les méthodes de tortures qui ont été (et sont encore) pratiquées massivement en Amérique Latine au siècle passé contre les militant(e)s de la gauche de la région au nom de la Guerre Froide. A présent de telles opérations se mènent sous couvert d’une guerre aux narcotrafiquants qui ne trompe plus grand monde. Quand ce n’est pas par les mercenaires directement au service des transnationales et qui ont des liens très fort avec les OP dont beaucoup sont issus.

L’obédience d’extrême-droite de ces armées de mercenaires et de ceux qui les dirigent n’est pas un secret. Monsanto, Coca-Cola, Nestlé et beaucoup d’autres ont de telles armées privées à leur service, alors que les mêmes sont également utilisées par le gouvernement des USA quand il ne convient pas de déployer les troupes nationales sur le terrain - entre autre parce qu’elles sont nettement moins sanguinaires et sans scrupules, mais aussi pour se préserver des réactions de l’opinion publique qui s’était fortement mobilisée contre le sort des soldats US pendant la guerre du Vietnam. Les soldats ont souvent des petites familles, pas les mercenaires.

D’autres pistes plus anciennes, des rapports, enquêtes et documents déclassifiés, des témoignages a posteriori des personnes impliquées, nous ramène de Gladio à la loge P2, et à partir de là à un réseau de ramifications qui nous conduisent jusqu’aux « tueurs fous du Brabant Wallons » par exemple. Opus Dei, Degrelle, et d’autres rescapés du nazisme réapparaissent dans cette toile d’araignée à de nombreuses reprises. L’extrême-droite n’a jamais cessé d’être active en Europe et on la retrouve au pouvoir officiellement en Espagne, en Grèce, au Portugal pendant des décennies.

En 2005 ? en Belgique un réseau est démantelé au sein des forces de l’ordre qui fomentait un coup d’état. Etc, etc, etc… Ma route n’a cessé de croiser des membres belges avoués de ces réseaux dans différentes occasions et dans différents contextes qui me prouvent qu’il ne s’agit pas d’un mythe, mais bien d’une réalité et que certains d’entre eux sont terriblement dangereux, s’entrainent au maniement des armes et aux interventions paramilitaires. Certaines sociétés de « surveillance » leur donnant une couverture idéale. Là c’est une amie de gauche qui y avait été propulsée comme secrétaire par les services de l’ONEM (placement des chômeurs) qui m’a renseignée, elle est sortie traumatisée de l’expérience.

Ces groupements organisent des réunions transnationales, en général dans des lieux où les « festivités » seront accueillies sous l’œil bienveillant de la population. Et pratiquent des échanges de bons procédés pour exécuter leurs mauvais coups.

En prenant les choses dans l’autre sens, par le recrutement sur Internet par exemple, nous voyons qu’il se produit par ces cercles concentriques. Un premier cercle de première ligne diffuse des propos qui semblent censé et relativement anodins, on y parle même de restauration de la démocratie mise à mal par les partis en place, mais en remontant les liens successivement le discours se durcit et on se retrouve sur des sites ouvertement d’extrême-droite. Après le lien se coupe, les niveaux supérieurs étant très certainement réservés aux seuls initiés.

J’ai relayé il y a pas longtemps un article relatant les confessions » d’un ancien militant, je retrouve ce que avais pu observer, ce fonctionnement par cercles successif gravissant une hiérarchie alors que le discours se fait toujours plus radical. Et aussi, ses commentateurs qui gangrènent certains sites par ailleurs souvent intéressants mais sur lesquelles une vue d’ensemble jette le doute quant à la pensée qu’ils représentent effectivement. Donc aussi des lieux douteux qui ne font pas de recrutement mais sèment la confusion dans un mélange des genres peu ragoutants encourageant le franchissement de la ligne. On pouvait y trouver une haute participation en promotion à la campagne de Marine Le Pen lors des élections. Et on peut constater qu’une certaine gauche déçue est plus sensible aux appels de la bête qui lui a adapté une partie de son discours, que la droite traditionnelle qui ne partage pas le discours anti-impérialiste de façade.

En Belgique il semble que ce soit la nouvelle coqueluche, ce député dont j’ai oublié le nom, qui diffuse de la pédopornographie sur le web (la diffusion des détails les plus crus des autopsie des fillettes assassinées par Dutroux, comme un nouveau viol public cette fois, vous appelez cela comment ?), félicitait Sarkozy pour le traitement qu’il réservait au Rroms et appelle au coup d’état en Belgique, qui joue ce rôle de Cheval de Troie de l’extrême-droite liftée.

Là on nage dans le populisme, qui flatte les pires penchants d’un peuple afin de le manipuler et de l’instrumentaliser. A ne pas confondre avec une politique populaire, parce que des politiciens qui assument leur mandat de représentants réalisent des politiques émanant du peuple. Noyés au milieu d’arguments de bon sens, sous couvert d’une vertueuse indignation, le coup de force est alors d’associer le premier ministre au descriptif insoutenable des blessures subies par les fillettes. On retrouve les mêmes principes associatifs dans la fameuse histoire du mollah pédophile et assassin avec l’ensemble des musulmans. 

Appel au « bon sens », émotionnalité, et coup de force. Ci-dessus le coup de force constituent à associer un phénomène émotionnel de rejet justifié avec une figure politique ou les membres d’une religion par juxtaposition, sans aucune logique, sans démonstration.

Mais le coup de force récurrent de la propagande d’extrême-droite adapté au malaise des populations, c’est de tenir un discours anti-impérialiste, un espace honteusement ouvert par une gauche qui soutient les interventions « humanitaires » de l’OTAN et élue y participe de grand cœur, une gauche qui ne remet pas en question l’amalgame entre antisémitisme et  antisionisme et joue lamentablement profil  bas et bouche cousue quand il s’agit de dénoncer les exactions de ce dernier. C’était déjà pas triste avant l’arrivée de Hollande au pouvoir en France, depuis c’est la catastrophe… la gauche au pouvoir devient l’incarnation de la traitrise pro-impérialiste et des plus proches alliés de la corporation capitaliste allant même au-delà de ses exigences sans même simuler la résistance. Une gauche qui pourtant en matière de racisme et d’islamophobie n’a plus grand-chose à envier à l’extrême-droite qui fait son nid dans cette faillite de la gauche et dans l’échec du projet internationaliste qui auparavant était un moteur de son combat. Le constat est que l’esprit colonialiste gangrène notre culture tout autant que le mécanisme.

Mais permettre aux homosexuels de devenir des petits bourgeois comme les autres était une priorité pour un président qui a pour lui-même refusé cette institution du mariage trop bourgeoise à ces yeux ! Juste un leurre qui fait monter d’autres tensions, religieux intégristes contre modérés, laïcs et athées, et la aussi l’extrême-droite à trouver un terrain fertile pour recruter.

Et donc cette extrême-droite qui stigmatise la colonisation US via la construction de l’Europe, une construction à laquelle elle a été intrinsèquement et structurellement associée (cherchez l’erreur), qui se pose en chevalière, nouvelle Jeanne d’Arc de l’anti-impérialisme, qui dénonce à juste titre la colonisation dont nous sommes l’objet par nos cousins d’Outre-Atlantique, qui défend fièrement son pinard et son saucisson, au lieu d’associer cette perte de valeurs au phénomène d’acculturation indissociable de cette colonisation et de mettre en évidence les mécanismes et processus qui lui ont permis de couper nos racines et d’effacer nos mémoires, joue, encore une fois le coup de force… c’est la faute à la multiculturalité (encore une fois chercher l’erreur)…

Je me suis enrichie au contact d’autres cultures, jamais elles n’ont porté atteinte à ma Belgitude, pas plus que 12 ans de vie en France, ou 6 en Espagne. Au contraire, c’est certainement à travers des contacts avec des mondes de différences que j’en ai pris pleinement conscience. Par contre je refuse de devenir une consommatrice encarcanisée dans un emploi et de participer à la productivité destructrice de notre planète et de nos cultures par des processus de globalisation qui impliquent une transformation radicale du paysage, des consciences et des modes de vie. Je refuse de compatir à des impératifs de compétitivité qui sont en réalité le souci  d’une rentabilité illimitée au détriment des peuples imposée par des corporations qui se partagent le marché et font alliance pour nous dépouiller de tout, jusqu’à nos intimités. Ce malaise nous sommes nombreux à le partager. Nous n’avons pas envie d’engraisser par notre travail un patronat de plus en plus parasite qui est en train sans scrupule de tuer son hôte, la planète Terre remplaçant progressivement le vivant naturel par des machines ou les produits monstrueux et hybrides de sa mécanique du vivant.

Pas de réponse de la gauche à ce malaise… la gauche continue au mieux à parler de redistribution de richesses, sans poser la question de savoir ce que l’on entend par là et ce qui nous rend vraiment riche et heureux. Or la donne a complètement changé quand la question des limite des ressources vs explosion démographique à remis en cause le modèle industriel. Un nouveau courant a été créé par les corporations, l’écologie afin d’anticiper et canaliser le malaise qui résulterait de la prise de conscience du caractère fini de nos ressources et des conséquence du choix de ne pas modifier le modèle de production-consommation occidentale, qui a provoqué des flux de réfugiés venus des pays que nous avions pillés et dépouillés de leur souveraineté alimentaire en obligeant leur ressortissant à abandonner les cultures vivrières au profit de produit de luxe à destination des consommateurs occidentaux, en les plongeant dans la misère, la famine, la soif.

Aujourd’hui une écologie eugéniste et raciste prône une réduction de population censée affecter essentiellement les peuples non-occidentaux, ceux qui n’appartiennent pas à la caste de la « suprématie blanche », sauf que ce discours ici se fonde sur des présupposés économiques : inutiles, improductifs et incapable en tous genres, en toute bonne logique économique il faudrait se débarrasser. Larry Summer nous le dit très clairement, cet ancien directeur du FMI devenu conseiller de la première heure d’Obama. Et l’écologie capitaliste est soumise au contrainte de l’économie devenant un mode de gestion de la planète de moins en moins respectueux du vivant au fil de ses dérives. Un choix éthique a été confisqué aux habitants de la planète, le choix d’adapter nos modes de vie, nos modes de production et de consommation en fonction du nombre des habitants et non l’inverse… sacrifier l’immense majorité des habitants pour qu’un petit nombre de gens puissent continuer à vivre leur fantasme.

Et là, on retombe sur cette extrême-droite, citée plus haut qui se charge des basses besognes de ce nettoyage, en bon petits SA, des clochards de Bogota au Rroms de Slovaquie, ce sont les mêmes méthodes et les mêmes cibles : les « rebuts » (terme qui progressivement se substitue à « exclus » dans les discours de droite marquant une nouvelle phase du programme) de société, les faibles, les désarmés. Expliquez-moi comment d’un discours anti-impérialiste et anticapitaliste les milices de l’extrême-droite au lieu de s’en prendre au capitaliste, à l’impérialiste, qu’elles stigmatisent en viennent à s’en prendre physiquement à ses victimes les plus précarisées, les plus démunies, se mettant objectivement au service de ce nouvel ordre mondial qu’elles récusent ?

Il y a un coup de force logique. Et un détournement de la colère légitime des peuples vers des boucs-émissaires. Si nous voulons lutter contre le fascisme montant, il y a bien sur un travail idéologique à faire aussi bien historique que d’actualité. Il est important de pouvoir désigner les réseaux, leur importance mais aussi de remonter vers leur véritable direction, la partie occulte de la nébuleuse et ses connexions avec le pouvoir central.

Mais le véritable travail est de terrain. Ma propre expérience corroborée par beaucoup d’autres démontre que le rejet qui vient d’une peur de l’inconnu se transforme souvent en solides amitiés quand les barrières sont franchies et que l’ont fait connaissance. C’est un premier point, Les liens sont d’autant plus fort qu’ils se nouent dans des relations de solidarité dynamique qui permettent de chercher des solutions collectives pour sortir de l’impasse et de mettre un terme à impuissance de l’inaction qui provoque une tension qui se transforme souvent en agressivité (au sens large, voler est une forme d’agressivité aussi bien que de jouer des poings ou du couteau… quand ce n’est pas de la kalach). Et je ne parle pas des processus d’autodestruction collectifs que j’ai eu de tristes  occasions d’observer, communauté de l’alcool, des médicaments, des drogues, de l’ennui et de l’inaction… passer le temps, ce n’est pas vivre et souvent cela rend malade. De véritables processus de dévolutions induits par le contexte de misère.

La gauche qui reste la plus active dans un travail à la base, c’est une certaine gauche ouvrière et c’est tout à son honneur. Mais alors que la classe ouvrière est de plus en plus réduite et qu’une bonne partie d’entre elle s’est assimilée à la petite bourgeoisie le nombre des « réprouvés » augmente de jour en jour. Ceux que les matrices d’opinion de la propagande instituée qualifie à présent de rebuts constitue un ensemble hétérogène. C’est également un vivier de talents qui se perdent, de bonnes volontés qui avortent faute de pouvoir se concrétiser dans des projets qui ont du sens. La gauche qui est aujourd’hui électoraliste, n’y voyant pos de clients potentiels pour son baratin, a le plus souvent abandonné le terrain, sauf pour y mener des actions d’assistance souvent méprisantes et encore plus inefficaces  en surplomb. Les gens efficaces et motivés, se barrent parce qu’à un moment quand ils commencent à faire un travail réellement productif en matière de prévention, on les arrête, ou on leur demande jouer le rôle de contrôleurs sociaux qui rentrent des rapports sur les uns et les autres. Et c’est foutu, la confiance est perdue, et plus rien ne va…

Parce que ce qui est porteur, ce sont des projets qui s’opposent à la progression capitaliste en proposant des alternatives motivantes, de bonne convivialité productive. Et les alternatives le système n’en veut plus ou alors strictement sous contrôle. Je l’ai appris à mes dépens.  De fait en pratique il laisse pourrir les choses, en donnant parfois un petit coup de pouce.

Je pense que c’est là que se joue autant la lutte contre l’extrême-droite que la lutte contre l’endoctrinement islamiste qui amène aujourd’hui de jeunes belges à aller se battre en Syrie aux côtés des envahisseurs (au service de l’Empire qui risque de subir un de ces quatre un effet boomerang). C’est dans la mise en œuvre d’action de solidarité collective, concrètes et pratiques dans la diversité mais qui donne aussi la possibilité aux intelligences de s’exprimer et de chercher collectivement à comprendre ce monde et comment il est possible ensemble de déminer des tensions qui nous rapprochent d’une guerre civile de basse intensité avec son lot de violence et de peur. Démonter les matrices d’opinions pur comprendre ce qu’elles dissimulent, dans le cadre de quel projet de monde, qui mène vers où ? J’ai rencontré énormément de lucidité dans ce monde des « réprouvés », une lucidité sans concession parfois suicidaire pour qui est voué à l’impuissance.  

Je n’ai pas de recettes et je sais que même si ce n’est pas clairement dit une opposition systémique se fait sentir pour ceux qui veulent rompre avec l’assistanat social au profit du vivre-ensemble convivial. Il n’y a pourtant pas d’autre chemin, pour créer des rapports de bon voisinage, comme pour trouver ensemble des solutions pour affronter la misère qui vient dans la joie du combat plutôt que dans morosité de la soumission qui est la vraie austérité, celle du manque d’imagination, du manque de créativité, du manque de dynamisme, du manque à vivre, sinistrose..

Anne W.

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31 mai 2013 5 31 /05 /mai /2013 18:19

 

En guise d’avertissement, la montée du fascisme n’est pas qu’Européenne, elle est mondiale. Les USA, la Russie, l’Amérique Latine et pas queux sont en plein dedans…

 

(Pour un mouvement antifasciste européen avant qu’il ne soit trop tard…

 

25 mai par Yorgos Mitralias

L’approfondissement et la généralisation de la crise à –presque- toute l’Europe Unie fait qu’il soit désormais possible d’appréhender non seulement la dynamique et les caractéristiques de cette crise, mais aussi les tâches que devrait assumer en toute priorité la gauche qui ne se rend pas et persiste à résister.

1. C’est ainsi que dorénavant on peut parler d’une tendance à la « grécisation » -au moins- du sud européen, dans la mesure où les uns après les autres des pays comme l’Espagne, l’Italie ou même la France voient leur paysage politique en train d’être bouleversé très profondément à l’instar de ce qui se passe en Grèce depuis 2-3 ans. À des degrés divers, mais de façon de plus en plus claire, le pilier de leur système politique, c’est-à-dire leur bipartisme traditionnellement triomphant entre en profonde crise (France, Espagne…) ou même s’effondre (Grèce, Italie…) au profit des forces politiques, jusqu’alors souvent inconnues, appartenant aux deux extrémités de l’échiquier politique. En un temps record, leurs deux grands partis néolibéraux de droite et de gauche qui s’alternaient en toute sécurité au pouvoir et totalisaient 70%, 80% ou même plus des voix, reculent ou pire, se décomposent additionnant désormais moins de 50%, 40% ou même… 30% des préférences des citoyens.

2. Bien que la droite classique subisse aussi les conséquences de la désaffection des citoyens, c’est pourtant la social-démocratie qui en est sa victime principale. Les partis sociaux-démocrates s’effondrent partout (Grèce, Espagne, Italie, France, Allemagne…) et, signe des temps, ils n’arrivent plus à profiter de l’usure de la droite quand elle est au pouvoir. Ils reculent fortement même quand ils sont à l’opposition !

En somme, on assiste à une crise sans précédent de la social-démocratie qui a toutes les caractéristiques d’une crise… terminale ! La conséquence est historique et cataclysmique : étant amputé d’un de ses deux piliers, le bipartisme qui garantissait la stabilité politique et le bon fonctionnement d’un système fondé sur l’alternance au pouvoir des partis néolibéraux, reste suspendu en l’air, ne fonctionne plus. Alors, dans ces conditions, la crise de régime n’est pas loin…

3. Force est de constater que la gauche européenne n’est pas aujourd’hui en état d’incarner les espérances des citoyens en colère qui sont en train d’abandonner les partis jusqu’à hier dominants. Sauf en Grèce avec SYRIZA, nulle part ailleurs en Europe la gauche n’a ni la crédibilité, ni la force organisée et l’ancrage social, et surtout ni la capacité pour inspirer les masses qui se détournent des grands partis bourgeois tout en radicalisant leur rejet de l’ordre établi.

La conséquence de l’actuelle impuissance de la gauche européenne face à la crise généralisée du système de domination bourgeois ne peut pas se résumer à la prévision que la gauche ne va pas profiter de cette crise cataclysmique du capitalisme. Malheureusement, il y a désormais bien pire que ca. Ce qui se profile déjà à l’horizon européen est que cette crise historique combinée à l’actuelle impuissance de la gauche pourrait très bien conduire à ce que des pans entiers d’une société aux abois et désorientée se tournent finalement vers l’extrême droite ou même des forces néo-fascistes et néo-nazies pour exprimer leur révolte anti systémique !

4. Simple hypothèse de travail ? Non, c’est exactement ce qui commence déjà à se produire dans un nombre toujours croissant des pays européens. Maintenant, il ne s’agit plus de l’ « exception grecque » qui a vu l’éclosion et le développement foudroyant des néonazis de l’Aube Dorée. Maintenant, il s’agit dun véritable raz de marée d’extrême droite, ou tout au moins de l’euroscepticisme réactionnaire (Allemagne, Angleterre), même dans des pays du nord européen encore relativement épargnés par la crise de la dette et les politiques d’austérité ! Encore plus important que la presque généralisation du phénomène est le fait que maintenant l’extrême droite fait une percée historique dans un grand pays comme la France, qui a toujours marqué l’histoire de notre continent. Et même là où l’extrême droite reste toujours marginalisée (Italie, Espagne, Belgique...), la crise sociale et la fragilité politique sont telles que la situation pourrait évoluer au profit de l’émergence d’une force d’extrême droite en un temps-record, d’autant plus qu’il faudra désormais tenir compte de l’effet de contagion… 

5. En somme, dorénavant sont présents en Europe tous les ingrédients d’une crise sociale et politique sans précédent depuis la fin de la dernière guerre mondiale, nous rapprochant plutôt de l’entre-deux guerres et de ses « démons », bien que le monde actuel a énormément changé depuis les années 1930…

Cependant, les ressemblances avec l’entre-deux guerres ne se limitent pas à la situation « objective ». Malheureusement, on voit le « facteur subjectif », la gauche non social-démocrate d’aujourd’hui, faire preuve de la même incapacité de la gauche d’alors de comprendre ce qui se passe aux tréfonds de la société, et de réagir en conséquence. La conclusion doit être catégorique : bien qu’impétueuse, ce n’est pas la montée de l’extrême droite qui fait peur. Ce qui est effrayant et détermine les tâches d’aujourd’hui et de demain est plutôt l’incapacité ou l’impossibilité de la gauche non seulement de résoudre la crise à son profit, mais même de faire barrage à cette montée de la réaction et de l’extrême droite ! 

6. Alors, si le diagnostic est bon, que devons-nous faire, si évidemment on refuse toute attitude passive et fataliste et on choisit de se battre avant qu’il ne soit trop tard ? La réponse parait évidente : il faut au plus vite rassembler toutes les forces disponibles de par l’Europe -est et ouest, nord et sud- afin de mener un combat à long terme contre l’extrême droite montante, néofascisme et néonazisme inclus. 

7. Pour faire sens, et surtout pour pouvoir donner des résultats tangibles, ce rassemblement antifasciste européen doit être à la fois unitaire et radical, de masse et démocratique. Toute approche sectaire qui préfère exclure plutôt qu’unir, trahit une profonde incompréhension ou sous-estimation de la gravité de la situation, qui impose la constitution d’un front unique de tous ceux, sans exclusives, qui sont disposés à combattre la peste brune. Les leçons de l’entre deux guerres, celles de l’Italie des années 20 et celles de l’Allemagne des années 20 et 30, sont ici pour nous rappeler que le chemin le plus court vers le suicide programmé du mouvement ouvrier et socialiste passe par ses sectarismes et ses divisions face à la montée de l’extrême droite raciste, fasciste et nazie… 

8. Pour pouvoir inspirer les antifascistes et répondre aux attentes des populations en ces temps de guerre sociale prolongée, ce rassemblement antifasciste doit être unitaire mais aussi radical. Ici, il ne s’agit pas seulement de constater que les combats contre les affameurs du peuple et contre l’extrême droite sont organiquement liés puisque l’extrême droite défend –en dernière analyse- le système et ses fondements économiques. Il s’agit de tenir compte de la révolte, même si elle est confuse et partielle, des victimes des politiques d’austérité contre le système qui les génère et le personnel politique qui les applique. Car c’est la « modération » d’une certaine gauche, perçue –à juste titre- par la population comme « mollesse »[i] et refus de traduire en actes les belles paroles de gauche, qui fait tourner les masses paupérisées et désespérées vers les fascistes et autres extrémistes de droite presque partout en Europe… 

9. Unitaire et radical, ce rassemblement antifascisteeuropéen doit impérativement être aussi démocratique, fondé sur l’auto-organisation des citoyens.[ii]Pourquoi ? Parce que seuls les citoyens et citoyennes mobiliséEs peuvent combattre et battre l’extrême droite et parce que la condition sine qua non pour qu’ils se mobilisent est qu’ils décident eux-mêmes de leur combat, de ses objectifs et de ses formes d’action. En somme, qu’ils prennent leur destin en main…

10. Mais il y a plus que ca. Si on veut se battre avec des chances de succès contre l’extrême droite, on doit le faire partout, en permanence et surtout de façon globale, sur tous les terrains, sans négliger aucun champ de bataille. Car il ne s’agit pas seulement d’affronter dans les rues les troupes d’assaut et autres milices et bandes racistes et néofascistes, mais aussi les énormes ravages que fait dans les esprits et les comportements la contre-révolution néoconservatrice, le retour de la pire réaction raciste, antisémite, homophobe et antiféministe et chauvine. Et tout cela parce que la montée actuelle d’une extrême droite de masse ne tombe pas du ciel, elle a été préparée par l’empoisonnement méthodique de nos sociétés par les « valeurs » égoïstes et antihumaines de la contre-révolution néolibérale, patriarcale et en dernière analyse, misanthrope et barbare. 

11. Autrement dit, il n’est pas possible de se dire antifasciste tant qu’on n’est pas en guerre contre les piliers et la raison d’être de l’extrême droite, c’est-à-dire le racisme, l’homophobie, l’antisémitisme, le chauvinisme, le sexisme, et aussi le culte de la violence aveugle, du machisme et de l’intolérance. En quelques mots, une organisation politique ou autre ne peut pas pratiquer un antifascisme conséquent tant qu’elle reste homophobe, patriotarde, machiste ou… fait même parader ses militants au pas de l’oie.

Alors, qui peut donner toutes ces batailles quotidiennes sinon les premiers intéressés, les citoyens/ennes eux-mêmes, là où ils travaillent, habitent, étudient, se manifestent, nouent des rapports entre eux, s’aiment. La conclusion parait évidente : pour être efficace, l’antifascisme ne doit pas être l’affaire des appareils mais des citoyens auto-organisés partout où ils exercent leurs activités en tant qu’êtres sociaux. Un antifascisme qui ne s’attaquerait pas à tous les aspects de la contre-révolution réactionnaire en marche et qui se limiterait à combattre seulement ses épiphénomènes, serait condamné d’avance à l’impuissance…
12. Mais attention : vue l’extrême urgence d’une situation déjà critique, le vrai dilemme actuel n’est plus agir ou ne pas agir contre la menace grandissante d’extrême droite. Maintenant, il s’agit de se décider et d’agir vite, le plus vite possible, car on a déjà perdu énormément de temps précieux tant en Grèce et en Hongrie qu’ailleurs. Qu’on arrête donc de nous mettre en garde en nous disant qu’il ne faut pas laisser le serpent brun sortir de son œuf. Malheureusement, cet avertissement ne sert plus à rien car cela fait déjà longtemps que
le serpent est non seulement sorti de son œuf mais qu’il est devenu un monstre qui se balade dans les rues semant la terreur au moins dans plusieurs de nos pays européens !...

Alors, décidons-nous vite et agissons ! Produit d’une initiative pour le moins atypique, le Manifeste Antifasciste Européen * a le grand mérite d’exister et de nous mettre tous et toutes devant nos responsabilités. L’heure n’est plus ni à l’indécision des uns ni au fatalisme et à la passivité des autres. Elle n’est plus au sectarisme de ceux qui refusent de comprendre que seulement tous et toutes ensemble nous aurons la crédibilité nécessaire pour inspirer la volonté antifasciste des grandes masses citoyennes. L’heure est à l’unité et à l’action antifasciste, l’heure est à la création du mouvement antifasciste européen. Aujourd’hui ! Demain, il sera peut être trop tard…

* Campagne espagnole : www.antifascismeuropa.org
Campagne grecque : www.antifascismeuropa-ellada...
Campagne française : www.manifesteantifascisteeur...
Campagne slovène : www.odbor.si/antifa

 



[i] (Anne NdL)Non seulement comme mollesse mais surtout comme complicité plus ou moins active et ouverte.

[ii] (idem)Là je ne suis pas d’accord, on ne se sortira pas de la montée du fascisme si les seuls citoyens sont admis dans cette mobilisation, ce front doit être ouverts aux habitants qui le désire qu’ils soient citoyens ou qu’ils ne le soient pas.

 

Source ;CADTM - Pour un mouvement antifasciste européen avant qu’il ne soit trop tard…

Via Mes coups de coeur

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"Le vieux fascisme si actuel et puissant qu’il soit dans beaucoup de pays, n’est pas le nouveau problème actuel. On nous prépare d’autres fascismes. Tout un néo-fascisme s’installe par rapport auquel l’ancien fascisme fait figure de folklore […].

Au lieu d’être une politique et une économie de guerre, le néo-fascisme est une entente mondiale pour la sécurité, pour la gestion d’une « paix » non moins terrible, avec organisation concertée de toutes les petites peurs, de toutes les petites angoisses qui font de nous autant de microfascistes, chargés d’étouffer chaque chose, chaque visage, chaque parole un peu forte, dans sa rue, son quartier, sa salle de cinéma."

 

Gilles Deleuze, février 1977.

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