
Argentine aujourd'hui

Usa, lynchage en famille
“Quand quelqu’un sent que sa vie ne vaut pas plus de 2 pesos pour le reste de la société, nous ne pouvons pas en attendre que la vie des autres à ses yeux vaille plus de 2 pesos”
Cristina Kirchner, présidente d’Argentine
Ceci est l’énigmatique phrase prononcée par la présidente Argentine face à la vague de « lynchages citoyens » qui a eu lieu récemment dans le pays.

David après le lynchage, il mourra trois jours plus tard
Les lynchages sont un phénomène permanent mais diffus dans le pays, et dans d’autres de la région. Cette fois cependant, ils ont pris un caractère plus organisé. Au début du mois, ce sont 9 lynchages qui ont eu lieu à Buenos Aires et dans les états de Rosario, Córdoba et Río Negro, dont un a coûté la vie, à David Moreyro, âgé de 18 ans, qui après avoir volé un portefeuille s’est vu entouré par une bande déchaînée de 50 à 100 personnes qui l’ont tabassé à mort, lui brisant le crâne. Après 3 jours d’agonie, il est mort à l’hôpital.
L’excuse des lyncheurs qui agissent en bandes est l’insécurité et l’absence de l’état. Et effectivement, l’état détourne pudiquement les yeux – comme si de rien n’était – et ce sont les défenseurs des droits humains et les mouvements sociaux qui posent les questions que soulèvent ce déni de justice expéditif, par lequel des gens se glorifient d’accomplir leur « devoir civique » : punir le méchant.
Ils ont été encouragés en ce sens par le leader d’extrême-droite et Conseiller de la Magistrature Carlos Maslatón qui a publié ses pensées :
« Sans aucune charge de la conscience. La population doit continuer à exercer justice de sa propre main et tuer dans l’action les délinquants capturés sur le fait. C’est très révélateur que cela se produise dans le pays, parce que l’état argentin a non seulement décidé de ne pas nous défendre mais en plus il se place du côté du crime et déclare la guerre aux gens de bien, empêchant la police de réprimer – au contraire – punissant la police qui accomplit son devoir. Ceci ne constitue pas une apologie du crime, il s’agit simplement de légitime défense. (…) C’est l’heure de l’insurrection populaire contre eux tous. Maintenant ou jamais ! ».

Une militante retrouve sa moto brûlée, peu après elle et d'autres recevrons des menaces de mort par téléphone
Les voleurs ne sont pas les seuls à subir menaces et agressions. Des bandes d’extrême-droites organisées s’en prennent elles aux militants de mouvements sociaux qui se font agresser ou menacer,voir assassiner. Et ici aussi nous retrouvons la nébuleuse qui inclue des narcotrafiquants et leurs sicaires. Des figures récurrentes et troubles qui font du narco-capitalisme une composante intrinsèque de la forme achevée du capitalisme - avec ses liens dans la police, la magistrature et le monde politique - soutenue par une idéologie fasciste.
De nombreuses réunions au sommet ont eu lieu au cours des derniers mois entre les dirigeants de l’extrême-droite latino et si la déstabilisation culmine au Venezuela, c’est que le gouvernement de ce pays est le domino majeur à abattre pour faire tomber les autres gouvernements souverainistes de la région, chacun d’entre eux est confrontés en ce moment à des manœuvres d’agitation concertées ayant de nombreux aspects communs.

Dont cette droitisation extrême d’une partie de l’opinion accompagnée d'une croissance des actes de violence commis par des milices d’extrême-droite (ou des délinquants payés) que nous connaissons également en Europe. L’étranger, le communiste (selon une vision large), les militants des mouvements sociaux et l’homosexuel, le sans-abri et leurs équivalents féminins étant les cibles des attaques. Les journalistes qui relayent leurs causes et les avocats qui les défendent sont également des victimes privilégiées.
C’est un long processus, de glissement en glissement, des années de propagande qui nous ont conduit là et vers une réelle intoxication des consciences (inconscients) à force de matraquages qui non seulement désignent des cibles qui seront systématiquement stigmatisées, mais aussi valorisent l’inacceptable, en pervertissant la notion de civisme. Ainsi la délation est comme au temps les plus vigoureux de l’Inquisition devenue un acte dont il convient de se glorifier, comme de la plus plate des normalités et du plus homogène des conformismes sociaux. Se conformer aux normes et obéir aux ordres vont de paire.
Nous voyons ici, que nous glissons toujours d’avantage et que le lynchage, cet acte de lâches, qui libèrent les pires pulsions des tréfonds les plus noirs des inconscients les plus pollués devient petit à petit l’acte civique par excellence, celui dont on a toute raison de se glorifier. C’est totalement minable, mais ils ne s’en rendent pas compte, ils ne réfléchissent pas tout simplement, ils libèrent leurs pulsions, leurs instincts avec la garantie de l’impunité, ils se contentent de faire ce qu’on leur dicte.

Alors que la maman de David pleure son fils, les assassins sur les réseaux sociaux se glorifient de leur acte.
En ce qui concerne les lynchages qui ont eu lieu en Argentine, les personnes qui se sont penchées sur le phénomène mettent en évidence la nature raciste des lynchages mais aussi, ce phénomène qui apparaît dans de nombreux autres pays d’Europe comme d’Amérique Latine ou sévit croissante une culture d’extrême-droite, dont Juan Barreto nous dit :
"De la dénonciation des « micro-fascismes » de la vie quotidienne (atomiques au sens individuels NdT), nous en venons à nous confronter à des comportements, affects et agencements d’énonciation de caractère molaire (collectifs, de masse NdT)."
La notion clé, celle qui va disqualifier de manière générique l’ensemble des cibles est en espagnol « escoria » en français « rebut », le principe actif étant de contribuer à débarrasser la société de ses rebuts - purge dans la version vénézuélienne, lissage en Ukraine - le terme utilisé est toujours un terme qui évoque un acte de purification, une catharsis, c’est aussi un devoir que tout bon citoyen se doit d’accomplir, qu’il se cache ou non sous le prétexte d’une sorte de principe d’auto-défense obligée (faute de forces de l’ordre efficaces). Les bons citoyens se « défendent », au-dessus d’eux dans cette hiérarchie de la haine, les hommes d’honneurs sont des attaquants. Il y a aussi une gradation dans l’expression de la haine, le fait de pouvoir accomplir les pires actes de tortures sans éprouver de sentiments fait partie des caractéristiques de la crème de l’élite fasciste. C’était aussi l’idéal des SS. La catharsis pour les lyncheurs est aussi le meurtre de sa propre peur, de sa lâcheté, la peur qu’éprouve la victime va renverser les rôles, et dans la bonne tradition, le bouc-émissaire sera frappé de tous les péchés de ses bourreaux qu’il emmènera dans le désert de la mort, un simulacre, qui soulage provisoirement les exécutants, mais charge encore d’avantage leur inconscient de scories non élucidées, il faudra donc reproduire régulièrement le rituel.


Venezuela, mars 2014, sans preuves des opposants arrêtent un homme à "l'apparence de voleur "
Cette arme de guerre que sont les médias, propriétés des Corporations qui dirigent l’ensemble du mouvement, joue un rôle inestimable dans cette dévolution de la société de droit, ils manipulent les inconscients collectifs, formatant les comportements, désignant les boucs-émissaires tout en ajoutant en contrepoint que nous sommes trop sur Terre, et qu’il est de bonne guerre de se débarrasser des inutiles, des charges sociales que représentent les improductifs, et quand on va voir plus loin, vers les sites fascistes, on peut trouver des propagandes qui vont jusqu’à prétendre que se produit sur la planète un génocide des blancs par les colorés. Tout coloré dans ce contexte devient un ennemi à abattre pour sauver les siens !
Chacun s’imprègne de cette vision du monde, on en parle entre collègue, entre voisins, au coin du bar, se montant mutuellement la tête, jusqu’au moment critique, le passage du seuil de l’action collective. Une fois ce point critique atteint, un petit événement peu servir de déclencheur, se constitue le noyau autour duquel pourront s’organiser les haines, les frustrations, les rejets. Un des rôles récurrents de l’arme médiatique est de véhiculer également les éléments qui font mousser l’insécurité créant une peur, un sentiment d’angoisse latente, corrélatif de la honte de sa propre lâcheté. La peur et sa reconversion en haine de ce qui fait peur sont les moteurs de cette dynamique de destruction de la cause du mal (la peur), qui est identifiée comme le bouc-émissaire désigné à cet effet, mais le lâche ne peut surmonter sa peur que collectivement, noyé dans la masse dans la responsabilité diluée de l’anonymat, nul ne saura jamais qui a porté le coup qui a tué, personne n’est donc en soi responsable.


Argentine autre victime de lynchage 2014
2013 Venezuela, après les élections un étudiant
chaviste se fait lyncher par les troupes de Capriles
Je n’ai pas fait ici un travail de systématisation exhaustif, j’ai rassemblé des résonnances, des récurrences, des points communs, ceux que j’ai pu constater en Belgique où ailleurs, dans mon expérience de terrain, où je reconnais les composantes de propagandes et de réactions dans ce que je peux voir constaté par d’autres ailleurs.
Une propagande qui conduit vers le meurtre rituel des rebuts (les non utiles ou nuisibles au Monde Marchand) est à l’œuvre dans le monde, s’adaptant aux caractéristiques locales. Le fascisme corporatiste se fiche bien de l’idéologie que pense défendre celui qui le sert, il n’est pas question ici ni de réflexion, ni de valeurs ou d’éthique mais bien de jouer sur le clavier des instincts et des émotions (inconscient) dans un champ pré-reflexif, créer des mouvements de masse par le=a prise de contrôle des comportements collectifs.
C’est pourquoi la seule réponse efficace n’est pas celle que pourraient fournir d’autres mouvements de masse, manipulés en fonction d’autres valeurs aussi respectables soient-elles en soi. La seule réponse passe par la détermination au sens le plus littéral de ce terme, le passage de la pensée inconsciente, réflexe, émotionnelle, à la pensée consciente, réfléchie, éthique. La masse en action est par nature indéterminée, amorphe, chacun y suit le mouvement en le créant, elle est an-organisée. La réponse qui peut l’arrêter ne peut venir que d'un peuple organisé, quand chacun pense par soi même et voit d’un seul regard en quel lieu, à quel place, par quelle action à un moment donné son action permettra au collectif un maximum d’efficacité.
Les masses haineuses qui lynchent dans le désordre sont le premier cercle de la nébuleuse fasciste. Un second cercle est constitué par les milices, une sorte de stade intermédiaire qui présente le caractéristique d’une ébauche d’organisation et de hiérarchisation. Si nous regardons de vieilles images de défilé des armées de l’Allemagne nazie, cercle suivant nous voyons le terme « machine de guerre » prendre tout son sens. Moi, cela me fait froid dans le dos. Chacun est un rouage qui doit fonctionner mécaniquement à l’unisson des autres rouages obéissant aux ordres, sans se poser de questions, sans prendre d’initiative. Une stricte hiérarchisation détermine qui peut prendre des initiatives, donner des ordres et dans quelles limites strictement établies. Le soldat sera sélectionné parmi les miliciens les plus aptes à devenir rouage efficace de la machine à tuer, sans pensée personnelle, Les troupes d’élites elles seront sélectionnées parmi ceux qui peuvent infliger le pire à un humain sans éprouver de sentiment, et subiront les entraînements terribles qui font les bourreaux sans âmes. Déshumanisation Etc…
La Sainte Inquisition
Au-delà, les "hautes sphères" de cette hiérarchie restent pour moi assez mystérieuses - j'aime autant - les maîtres du jeu sont de vieux fous qui sont depuis longtemps dans la partie. Une chose me semble pourtant de plus en plus claire, le Profit n’est pas leur moteur principal. Le Pouvoir, le sentiment de Puissance absolue sur le destin, la vie, la mort et la souffrance d’autres êtres est pour eux encore bien plus important. Le Profit n’est que le moyen d’y parvenir. Et cette volonté de déshumanisation placée comme un objectif en soi, est un aveu de haine de soi, de rejet de son humanité. L’humain est le mauvais de l’histoire, la partie de soi qu’il faut détruire en détruisant celui qui incarne l’humanité.
C’est pourquoi, je pense que ceux qui aujourd’hui ceux nous proposent le chemin d’une culture de paix, en cultivant l’amour de soi, de l’autre, de la vie, de le faire collectivement, de manière intelligente et concertée, organisée nous indique le bon chemin, la seule issue pour que demain l’humanité advienne – enfin – en tant que telle, ensemble organisé d'habitants d'une même planète, déterminés par leur histoire, ayant développé leurs potentiels créatifs de manière à créer une unité dans la diversité, dans la complémentarité, l’espèce humaine et ses cousins vivants, habitant la planète en harmonie, des bons voisins.La complémentarité est en soi bien plus économique que la concurrence, et bien plus enrichissante.
Ce n’est pas gagné, la guerre sera longue, la culture de la mort gangrène la planète, et n’a pas fini de sévir, ses maîtres ont déclaré la guerre à l'humanité, à laquelle ils préfèrent les machines qu'ils fabriquent et qu'ils contrôlent. Beaucoup d’entre nous aurons certainement de choix très difficiles à faire, face aux soldats de la culture de la Mort, de la déshumanisation, ils devront répondre en guerriers, tuer parfois pour protéger les germes de la vie quand ils seront menacés. Aujourd’hui des gens sont contraints de se battre pour que nous n’ayons pas à faire ce genre de choix, pour sauver ce qui reste de Paix dans le monde et que ce soit elle à présent qui se répande sur notre planète envahie ldes guerres qui nuisent au vivant dans son ensemble. C’est une tâche d’une ampleur infinie arrêter cette guerre dont nous ne voulons pas, elle prendra certainement des générations et ce n’est pas gagné. Mais quoi de mieux à faire, quel autre combat serait plus important que celui de l’amour, du respect, celui qui fait que l’autre cessera définitivement d'être ce rival, ce concurrent, cet ennemi potentiel dont on se méfie, provoquant le soupçon pour se faire ami potentiel, complément, l’occasion d’un sourire échangé, qui fait chaud dans le cœur.
Des gens aujourd’hui donnent leur vie pour cela, payent de leurs souffrances, pour que d’autres un jour peut-être aient droit à l’amour, au bonheur, à la tranquillité créatrice. Tout mon respect pour eux.
Anne