21 février 2019 4 21 /02 /février /2019 18:34

 

Selon les critères qui justifient une intervention humanitaire au Venezuela, d’autres pays d’Amérique Latine devraient eux aussi bénéficier d’une telle intervention urgente, à commencer par la Colombie et le Honduras. Dans ces deux pays coexistent misère, violence, persécution et élimination systématique de l’opposition. Mais ces deux pays ont des gouvernements vassaux des USA.

Je vais donner quelques exemples comme très faible aperçu de toutes les raisons qui justifieraient une intervention humanitaire d’urgence dans chacun de ces deux pays. Des conséquences du « protectorat étasunien ».

 

Ces deux pays connaissent un exode au moins aussi inquiétant que celui des vénézuéliens.

La Colombie avec près de 8 millions de personnes déplacées dans le pays (à cause de 60 ans d un conflit armé permanent, une guerre qui a fait des centaines de milliers de morts et à cause des expropriations par les transnationales - extraction, agro-industrie, tourisme « écologique »). Si des millions de personnes ont quitté le pays, l'exode aujourd'hui est principalement interne. Et chaque jour de nouveaux groupes indigènes et autres paysans, se joignent à cette errance sans but. En 2012, 1 enfant sur 4 mourrait avant d’avoir atteint l’âge de 6 ans… une majorité de ces enfants étaient des enfants de l’exode. Des Colombiens s’étonnent : si les vénézuéliens connaissaient vraiment les conditions de vie ici, la violence, la dénutrition, le déplorable système de santé, ils resteraient chez eux…

 

Depuis des années, c’est par dizaines que chaque jour des gens fuient le Honduras, l’année passée, à chaque heure, deux d’entre eux étaient des enfants non accompagnés. Ils se lancent dans un voyage de quelques 4 mille kilomètres à la poursuite d’un mirage « le rêve américain »,Seule une toute petite minorité d’entre eux connaîtront une issue « heureuse », une vie un petit peu meilleure que celle qu’ils connaissaient au Honduras. Pour avoir un aperçu de ce qui les attend : Maria José, jeune hondurienne sur la route de l'enfer j’ai pleuré en traduisant ce texte. Traite humaine , vols d’organes, viols, crime sadique, faim, soif, et ceux qui meurent ou finissent estropiés pour être tombé de la Bestia, les trains auquels les migrants s’accrochent pour traverser le Mexique…. Quelque part, l’histoire des Caravanes, c’est un peu la goutte d’eau qui cache la rivière… le flux migratoire d’Amérique Centrale vers les USA est dense, constant, et cela dure depuis des années. Les disparus de l’exode, ceux dont on entendra plus jamais parler se comptent par dizaines de milliers.

 

 

 

La Colombie est le pays où des enfants livrés à eux-mêmes, entrent par centaines, dès l’âge de 11 ou 12 ans dans les écoles de tueurs à gage des narcos et autres maffias. Leur initiation : manger de la chair humaine, celle d’un otage assassiné, un procédé initialement mis au point pour détecter les agents infiltrés de la DEA. C’est la seule éducation qui leur soit offerte, celle que leur donnent les narcotrafiquants. La plupart meurent avant d’atteindre 18 ans, auteurs de quelques crimes qui ont tué leur conscience.

 

Ce n’est pas une grave, très grave urgence humanitaire cela ? Venir en aide à ces enfants ! Leur ouvrir la possibilité d’un avenir digne, d’apprendre de l’intérieur ce que bonheur veut dire ?

 

En espagnol, il existe des dizaines de reportages à ce sujet, ce phénomène affecte plusieurs pays, mais la Colombie est en tête de ce sinistre peloton. Parmi tous les reportages et tous les témoignages d’enfants que j’ai vu, il existe un passage, un de ces enfants, particulièrement touchant, il exprime, simplement, ce que tous ces enfants ont sur le cœur. Ce qu’il dit entre autre au journaliste alors qu’il cherche les mots pour raconter son expérience : « Monsieur, si vous étiez à ma place, vous comprendriez… mais vous n’êtes pas à ma place… et vous ne pouvez pas comprendre » C’est vrai, on peut compatir, pas comprendre. 

Les bugs entre les vidéos se poursuivent, donc si ce n'est pas la bonne vidéo qui apparaît, voici le lien

Cette scène, 6 minutes est extraite d’un reportage que vous pouvez voir en entier ici : reportage entier. Ce gamin à 11 ans ou 12 ans, il est tueur à gage, pas besoin de comprendre l’espagnol pour devenir témoin de ce crime contre l’enfance… et devenir, peut-être, de ceux qui contribuent à ce que ces enfants ne meurent plus en silence. Ils sont des milliers, et plus sans doute, aussi au Mexique, dans toute l’Amérique Centrale. Au Pérou : tuer une personne qui dérange est le genre de boulot de dépanne que les gamins peuvent se voir proposer dans les rues…

La Colombie est souvent cité par les USA comme un modèle de démocratie en Amérique Latine.

 

 

Quand au Honduras, pourquoi ne parle-t-on pas d’avantage du Honduras, de l’urgence vécue là-bas par l’immense majorité de la population, dans le pays qui a le plus haut taux au monde de morts par homicide, alors que les élections organisées depuis le coup d’état pourraient servir de modèle pour un Manuel de Fraude Électorale… En 2O12, j’avais recensé quelques unes de ces méthodes… Une, parmi une bonne dizaine : on voyait Kubiske, ambassadrice des USA, aller au fin fond des campagnes, apportant des cadeaux aux habitants et aussi des cartes d’électeurs accompagnée d’une méthode pour « bien voter »…

Il y a deux catégories sur ce blog consacrées au Honduras, avec des suivis quotidiens, des traductions inédites… un bon aperçu du sort réservé aux pays « intervenus » par les USA… des griffes du Pentagone au crimes de la DEA… … …

La catastrophe du Honduras est le fruit pourri d’un coup d’état militaire, fomenté depuis les USA, qui en juin 2009 avait « rétablit la démocratie » dans le pays. Les deux principaux auteurs militaires de ce coup d’état, Joya Amendola et Vasquez Velasquez sont tous deux produits de l’École des Amériques (école des bourreaux de l’Amérique Latine), ils ont une longue histoire criminelle au service de Washington : au 20ème siècle, ils avaient été au service de Pinochet, sévi sous la dictature argentine et participé aux escadrons de la mort dans leur propre pays. Vous savez, ceux qu’avaient formé des Negroponte (présent en 2008 au Honduras pour préparer le coup d’état), et le même Eliott Abrams que Trump a joint récemment à son équipe de tueurs et de criminels de guerre, ses experts pour l’Amérique Latine. Abrams, l’opposition oligarchique n’en peut plus, elle se gargarise à coups de : waouh ! Un spécialiste des renversements de gouvernements, il ne va pas faire long feu le Maduro.

No Comment... les tueurs sadiques l’oligarchie fasciste latino adore cela. Quelques images du discours de Trump à Miami, parmi ces momies, pourraient servir de source d'inspiration pour un film d'horreur, style "Venezuela, le retour des zombies"

 

La situation du Honduras depuis juin 2009 est l’exemple des conséquence du premier coup d’état militaire US du 21ème siècle pour « rétablir la démocratie dans le pays ». C'est surtout le premier pas réussi d'un jeu de dominos qui vise à rendre à l'Amérique Latine son statut domestique (Brezinski). Presque 10 ans d’horreur, et c’est de pire en pire… JOH comme on l’appelle, Juan Orlando Hernandez, président du Honduras est considéré comme un bon élève par Washington.

 

En Colombie, en 2018, 287 leaders sociaux ont été assassinés probablement avec la complicité de l’état… ce qui est certain : l’état ne fait rien pour arrêter le massacre qui se poursuit… des groupes paramilitaires, certains fascistes, comme les Aguilas Negras, sèment la terreur en poursuivant un nettoyage (meurtres) politique, ethnique, social. Il répandent en permanence des tracts par dans lesquels ils profèrent des menaces, personnelles et générales, pour entretenir ce climat de peur permanente dans la population. L'état ne fait rien...

Au Honduras, en plus des incessants assassinats de militants, le métier de journaliste, comme au Mexique, est un métier dangereux pour les chercheurs de vérités qui désignent les responsables des crime contres l’humanité qui se produisent quotidiennement dans ces deux pays. On va voir si AMLO, Andres Manuel Lopez Obrador, président depuis peu, et de plus en plus populaire, réussira à redresser une situation qui pourrit depuis des décennies… Plus le peuple l’apprécie, plus les USA et les fascistes latinos le haïssent… on sait bien que c’est dangereux la haine de ces gens-là. Surtout par les temps qui s'annoncent.

Je pourrais ajouter des exemples et d’autres et encore, tous confirmeraient que le Honduras comme la Colombie, pays chéris des USA, sont dans une crise humanitaire grave, vivent des états de terreurs et de guerre permanente qui mériteraient une attention soutenue et une intervention urgente de la Communauté Internationale.

 

Une seule conclusion s’impose… les USA veulent entraîner toute la région sur les traces de la Colombie et du Honduras : état de guerre interne, omniprésence de la terreur sur fond de misère, expropriation massive des populations au profit des transnationales…. Et extermination de tous ceux qui incarnent les idéaux de socialisme, d’autodétermination, de souveraineté populaire…

 

Qui va réussir à arrêter le massacre avant qu’il ne commence…

 

« Nous allons mettre fin une fois pour toute au socialisme et au communisme »

«Nous allons commencer par le Venezuela »

« Après j’irai sur Cuba et sur la Nicaragua et enfin j’irai par toute l’Amérique Latine; ...Et dans le monde »

« Cette fois, il n’y aura pas de retour en arrière »

Donald Trump, Miami, 18 février 2019

 

Cette menace est aussi une menace pour l’humanité.

 

Anne Wolff

 

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21 mars 2014 5 21 /03 /mars /2014 06:41

 

El regreso del amigo.


Par Ollantay Itzamná*

25 février 2014 – Il est rationnellement impossible d’être latino-américain, né pendant la décennie des 70 du siècle passé, et d’être indifférent à la torture brutale que souffre le projet de Vie vénézuélien.

L’Amérique Latine au 20ème siècle a souffert de prés de 1OO coups d’états sanglants promus et financés par les États-Unis. Les arguments pour ensanglanter Abya Yala furent toujours les mêmes : Démocratie, Liberté, Progrès.

Le gouvernement nord-américain, a été jusqu’à créer et financer des églises, fondations et ONG pour « faire de nous de fervents croyants, et que nous sentions coupables de « nos » disgrâces » Et qu’elle fut la conséquence de cette constante domination autorisée ? Aimer et créer le bourreau et d’être en disgrâce malgré que nous soyons privilégiés par la Terre Mère.

D’avoir cru le Prométhée yankee, l’Amérique Latine s’est convertie en honte de l’humanité jusqu’à la fin du siècle passé. Privilégiée de la Terre Mère et malheureuse dans son histoire. Mes parents n’ont jamais connu de Centres de Santé, ni non plus l’école. Mes frères et moi, de même que des millions de mes contemporains d’Abya Yala, nous sommes nés sous les polleras (jupes) de nos mères, sans hôpitaux, ni médecins. Ainsi nous avons survécu dans la misère, sur le sous continent le plus riche de  la planète, converti en cloaque et arrière-cour par l’Empire de la Mort. Sans rêves ni espoirs propres. Écrasés, résignés et providentialistes. Presque convaincus de n’avoir pas le droit d’avoir des droits.

Mais depuis les entrailles de la Abya Yala profonde, les ressources morale et intellectuelle latino-américaine ont fécondé Hugo Chávez au catastrophique Venezuela. Et alors, renaquirent le rêve et l’espoir de la dignité en Abya Yala. Ce fut en ce temps de Chávez que le projet émancipateur endormi de l’Amérique Latine, commença à pétiller avec à sa tête une inédite pléiade de gouvernants comme Lula, Kirchner, Fernández, Mujica, Correa, Morales, Roussef, Ortega et d’autres. Avant le phénomène Chávez, non seulement l’Amérique Latine était méprisée dans le monde, mais les latino-américain(e)s avaient honte de se présenter comme tels en dehors de la région.

Avec Chavez, des millions d’exclus et d’exclues, réduits à néant, nous avons commencer à exister et à croire en nous-même. Le projet de changement vénézuélien a réveillé en nous la liberté et l’amour endormis qui nous habitaient. Sans Chávez et la pléiade de gouvernements latino-américains progressistes actuels, Abya Yala serait restée l’éternelle mendiante, installée dans la banqueroute. Mais cela a changé et il faut que ce soit pour toujours.

Nous qui venons des 70, nous connaissons et avons bu jusqu’à la lie, les malheurs des politiques nord-américaines comme la Doctrine de Sécurité, le Consensus de Washington et la Sécurité Internationale (antiterroriste). Pour cela, les historiques projets régionaux sans Washington, comme la CELAC, UNASUR, ALBA, etc, nous enthousiasment jusqu’à en rayer dans nos structures psychologiques nos frontières nationales, jusqu’à nous convertir en latinos américain(e)s sans frontières. Et à ce défi de liberté, nous ne sommes pas disposés à renoncer, pour rien au monde. Encore moins pour les promesses éculées et néfastes de Prométhée enchaîné à la Mort. Nous ne voulons pas continuer à être les cendres des énergivores sociétés du Nord ! Nous ne voulons pas qu’Abya Yala se convertisse dans la honteuse Honduras du continent !

La tentative nord-américaine de coup d’état, prolongée dans le Venezuela actuel, cœur de la dignité et la souveraineté Latino-américaine du 21ème siècle, ce n’est pas un attentat seulement contre le Venezuela. C’est une atteinte au grand projet d’intégration d’une Amérique Latine digne et souveraine. La tentative de coup d’état prolongée ne se perpétue pas contre Maduro, elle ne se menait pas contre Chávez, elle était et est dirigée contre les idées et projets émancipateurs de l’Amérique Latine. Elle est dirigée contre 500 millions de fils et filles de la Terre qui cohabitons dans cette région avec nos rêves de dignité  

Les empreintes de l’interventionnisme nord-américain sont macabres. Que ceux qui doutent, regardent, en ce moment, la réalité sanglante, qui fait froid dans le dos,  la perverse politique a semé et sème la mort nord-américaine, en Irak, en  Afghanistan, en Lybie, en Syrie entre autres, toujours avec les mêmes arguments : défense de la démocratie, du progrès, de la liberté. Tournez vos regards vers la violence de la réalité hondurienne depuis le coup d’état. Jusqu’aux anges du ciel pleurent de voir tant de sang et de destruction.

C’est pour cela, pour la conscience et la vocation de Vie qui nous habitent, que nous devons défendre le Venezuela libertaire et digne. Accroître nos petites actions de résistance économique par une consommation responsable (ce n’est pas cohérent d’être pour la vie et de consommer les produits de la mort). Il faut activer notre résistance culturelle en nous déconnectant des medias d’infotoxication télévisée, comme CNN ou les autres chaînes du monde des entrepreneurs promoteurs de la mort. Ce serait un impardonnable suicide que de continuer à choisir dans « nos pays » des politiciens néo libéraux, valets des corporations financières.

En ces temps sans distances infranchissables, nous avons la possibilité de convertir notre majorité démographique en une majorité politique et culturelle. Si nous activons notre conscience et notre instinct d’auto-préservation nous pouvons, nous devons vaincre toutes les stratégies multimillionnaires implantées par les apôtres de la mort (1). Nous sommes une majorité numérique et la vérité et la raison sont de notre côté. Si nous abandonnons le Venezuela, demain ils viendront contre nous, Et eux (les nord-américains désinformes) continuerons à se demander comme il y a 13 ans : « Pourquoi nous haïssent-ils tant ? »

Notas: 

(1) http://www.theguardian.com/commentisfree/2014/feb/18/venezuela-protests-us-support-regime-change-mistake

 

Ollantay Itzamna, indigène quechua. Il fait partie des organisation indigènes et sociales de la zone maya. Il a appris le Castillan à l'âge de 10 ans, quand il a découvert l'éclole, la route, etc... Depuis 10 ans il écrit, non pour gagner de l'argent, mais pour contribuer au changement par l'apport de ses réflexions et  faire partager l'apport de celles et ceux qui n'ont pas la possibilité d'écrire.  Ollantay Itzamna est également avocat et anthropologue.

 



Traduction Anne Wolff

Source en Espagnol :

Servindi » La Vida y la dignidad Latinoamericana en peligro | Servicios en Comunicación Intercultural Servindi

 

 


Carlincatura de Carlos Tovar. Diario La República Capriles y Machado

 

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18 mars 2014 2 18 /03 /mars /2014 14:59

 

 

 

 

Les récentes manifestations de masses générées par les droites dans les pays les plus divers, montre leur capacité à s’approprier les symboles qu’auparavant elles dédaignaient, semant la confusion dans les rangs des gauches.

Le 17 février 2003, Patrick Tyler réfléchissait à ce qui se produisait dans les rues du monde dans une chronique du New York Times. « Les énormes manifestations contre la guerre dans le monde entier cette fin de semaine sont un rappel qu’il existe toujours deux superpuissances sur la planète : les États-Unis et l’opinion publique mondiale. »


Regarde autour de toi et tu verras un monde en ébullition” écrivait l’éditeur étasunien Tom Engelhardt, éditeur du site TomDispatch. En effet, 10 ans après le célèbre article du Times, qui fit le tour du monde lors du mouvement contre la guerre, il n’y a quasiment pas un recoin de la planète qui ne soit en ébullition, en particulier depuis la crise de 2008.


On peut énumérer le Printemps Arabe qui a mis en déroute des dictateurs et parcourut une bonne partie du monde arabe ; Occupy Wall Street, le plus grand mouvement critique aux Etats-Unis depuis les années 60 ; les indignés grecs et espagnols qui cavalcadent sur les désastres sociaux provoqués par la méga spéculation. Aux mêmes moments, l’Ukraine, la Syrie, le Soudan du Sud, la Thaïlande, la Bosnie, la Turquie et le Venezuela sont affectés par des protestations, des mobilisations et des actions de rues de diverses tendances. 

   

Un pays qui depuis des décennies n’avait plus connu de protestations sociales comme le Brésil s’attend à des manifestations pendant le Mondial après que 350 villes virent des troubles qui gagnaient les rues. Au Chili un puissant mouvement de la jeunesse étudiante s’est mis en place qui ne montre pas de signes de fatigue, et au Pérou un conflit autour de l’extractivisme qui ne s’apaise pas dure depuis des lustres.


Quand l’opinion publique atteint la force d’une superpuissance, les gouvernements ont comme pratique de l’écouter pour la surmonter, la manipuler, la canaliser dans des directions où elle sera plus maniable que dans la conflagration des rues, conscients de ce que la répression à elle seule n’obtient pas grand-chose. C’est pour cela que des savoirs qui avant étaient le monopole de la gauche, depuis les partis jusqu’aux syndicats, à présent se rencontrent chez des concurrents capables de mouvoir les masses à des fins opposées à celles auxquelles aspire la gauche.

 


 Le style militant

 

 


Campement en Uruguay (2010) sous les auspices de l’Open Society Institute de George Soros. 

 Du 20 au 26 mars 2010 s’est réalisé dans le département uruguayen de Colonia un “Campement Latino-Américain de Jeunes Activistes Sociaux », dans la convocation duquel était annoncé “un espace d’échange horizontal” pour travailler à “une Amérique Latine plus juste et solidaire”. Parmi la bonne centaine d’activistes qui y participèrent aucun ne suspectait l’origine des fonds pour payer leur voyage et séjour, ni qui était en réalité derrière cette invitation.(Alai, 9 avril 2010, voir résumé en fin de texte Cómo el imperio expropia los saberes sociales)

 Un jeune militant décida de mener une enquête pour savoir qui étaient ces Jeunes Activistes Sociaux qui organisaient une rencontre participative pour « commencer à construire une mémoire vive des expériences d’activisme social dans la région, apprendre les difficultés, identifier les bonnes pratiques locales utilisables au niveau régional, et maximiser l’étendue de la créativité et liens entre les protagonistes ».

 Le résultat de ses investigations à travers les sites web lui permit de démontrer que le campement s’était déroulé sous les auspices de l’Open Society Institute de Georges Soros et d’autres institutions liées à celui-ci. Sa surprise fut grande parce que dans le campement se réalisèrent des réunions en cercles et des travaux collectifs avec de grandes feuilles de papier, ayant pour fond des whipalas (bannière indigène aux carrés de 7 couleurs des peuples andins. NdT) et autres bannières indigènes. Un décor et un style qui donnaient à penser qu’il s’agissait d'une rencontre de même nature que les Forums Sociaux et tant d’autres activités militantes qui emploient des symboles et manières de faire similaires. Certains des ateliers utilisaient des méthodes identiques à celle de l’éducation populaire de Paulo Freire (Pédagogue Brésilien, auteur de Pédagogie de l’Autonomie, ayant une grande pratique de l’alphabétisation des adultes dans le but de leur donner des outils de résistance à l’oppression. NdT) qu’habituellement, les mouvements anti systémiques sont les seuls à employer.

 Ce qui est certain, c’est que ces quelques militants furent utilisés “démocratiquement” - puisque tous assurèrent qu’ils purent exprimer librement leurs opinions - pour des objectifs opposés à ceux pour lesquels ils avaient été convoqués. Cette formation de la fondation de Soros fut appliquée dans plusieurs ex républiques soviétiques, durant la « révolte » au Kirghizstan en 2010 et pendant la révolution orange en Ukraine en 2004.

Il est tout aussi certain que de nombreuses fondations et les plus diverses institutions envoient des fonds et des instructeurs à des groupes en affinité pour qu’ils se mobilisent et travaillent à faire tomber des gouvernements opposés à Washington. Dans le cas du Venezuela, ont été dénoncées à diverses reprises, des agences comme le Fond National Pour la Démocratie (NED sigle en anglais), crée par le Congrès des Etats-Unis pendant la présidence de Ronald Reagan. Ou la Fondation Espagnole D’analyse et Etudes Sociales (FAES) sous égide de l’ex président José Maria Aznar.

Nous sommes face à une réalité très complexe : comment l’art de la mobilisation de rue, en particulier celle destinée à faire tomber des gouvernements, a-t-il été récupéré par des forces conservatrices ?

 

 

L’art de la confusion 

  

Le journaliste Rafael Poch décrit le déploiement des forces de la place Maidan de Kiev : “Dans les moments les plus massifs, on pouvait compter quelques 70 000 personnes dans une ville de 4 millions d’habitants. Parmi eux, il y avait une minorité de quelques milliers, peut-être 4 ou 5 mille, équipés de casques, barres de fer, boucliers et battes pour affronter la police. Et dans ce collectif, il y avait un noyau dur de 1000 à 1500 personnes purement paramilitaires, disposés à mourir et à tuer qui représentaient une autre catégorie. Ce noyau dur a fait usage d’armes à feu ». (la Vanguardia, 25 février 2014)

 

 

 

Venezuela: Grupos violentos en plena acción. Foto: AVN  

Cette disposition de forces pour le combat de rues n’est pas nouvelle. Au cours du temps, elle a été utilisée par des forces différentes, antagoniques, pour parvenir à des objectifs tout aussi différents. Le dispositif que nous avons pu observer en Ukraine se répète en partie au Venezuela, ou des groupes armés s’infiltrent dans des manifestations plus ou moins importantes, avec l’objectif de faire tomber un gouvernement, en générant des situations d’ingouvernabilité, et le chaos jusqu’à la réalisation de  leur objectif.

 

 La droite a tiré les leçons de la grande expérience insurrectionnelle de la classe ouvrière, principalement européenne, et des soulèvements populaires qui se sont succédé en Amérique Latine depuis le Caracazo de 1989. Une étude comparative entre ces deux moments devrait rendre compte des énormes différences entre les insurrections ouvrières des premières décennies du 20ème siècle, dirigées par des partis solidement organisés, et les soulèvements des secteurs populaires des dernières années de ce même siècle.

 

Dans tous les cas, les droites se sont montrées capables de créer un dispositif « populaire » comme celui que décrit Rafael Poch pour déstabiliser des gouvernements populaires en donnant l’impression que nous étions face  à une mobilisation légitime qui finissait par faire tomber des gouvernements illégitimes malgré que ceux-ci aient été élus et conservent le soutien de secteurs importants de la population. A ce point, la confusion devient un art aussi décisif, que l’art de l’insurrection dominé auparavant par les révolutionnaires.

 

Surfer sur la vague. 

Un art fort similaire fut celui dont firent preuve les groupes conservateurs du Brésil durant les manifestations de juin. Alors que les premières marches ne reçurent quasiment aucune couverture médiatique, sauf pour mettre en évidence le « vandalisme » des manifestants, à partir du 13, quand des centaines de mille descendirent dans la rue, une inflexion se produit.

 Les manifestations obtinrent les grands titres mais il se produit ce que la sociologue brésilienne Silvia Viana définit comme « une reconstruction de la narration” vers d’autres fins. Le thème du prix des transports fut relégué au second plan, les drapeaux du Brésil furent mis en avant ainsi que le slogan « A bas la corruption » qui ne figurait pas dans les rassemblements du départ (le Monde Diplomatique, 21 juin 2013). Les medias de masse firent aussitôt disparaître les mouvements qui avaient appelé à manifester et mirent en leur lieu et place les réseaux sociaux, allant jusqu’à criminaliser les secteurs les plus militants pour leur supposée violence, pendant que la violence policière restait au second plan.

De cette façon, la droite, qui au Brésil n’a pas de capacité de mobilisation, a tenté de s’approprier la mobilisation qui avait des objectifs (la dénonciation de la spéculation immobilière et des mega chantiers du mondial) qu’elle était loin de partager. « Il est clair qu’il n’y a pas de lutte politique sans conflit pour des symboles » assure Viana,Dans ce conflit symbolique, la droite, qui à présent emballe ses coups d’états de prétextes comme la « défense de la démocratie » apprend plus rapidement que ses adversaires.

 

- Raúl Zibechi, journaliste uruguayen, il écrit dans Brecha et La Jornada et est collaborateur de ALAI 

 

Traduction Anne Wolff


Source espagnole :

Derechas con look de izquierda - América Latina en Movimiento

En prime un résumé de  Cómo el imperio expropia los saberes sociales

 

Il y eu environs 120 jeunes qui participèrent à cette réunion des Jeunes Activistes Sociaux, accourus remplis d’espoirs. Sous la technique de l’Open Space, ils travaillèrent pendant plusieurs jours sur base des attentes des participants. Mais aucun résultat final ne vit le jour, parce que beaucoup de participants au fil des jours n’adhérèrent pas aux méthodes utilisées, et que se produisirent des sortes de désordres qui rendaient impossible pour les participants de se mettre d’accord pour la rédaction d’un document final.

L’annonce avait été alléchante (un espace d’échange horizontal” pour travailler à “une Amérique Latine plus juste et solidaire) et elle avait attiré des jeunes de tous le pays, de tout le continent, prêts à partager leur expérience pour en « construire la mémoire vive » (plus productif encore que les espionnages de la NSA, les militants et leurs pratiques, leurs objectifs se livrant eux-mêmes sur un plateau d’argent à ceux qui les combattent.  NdT).

Les participants étaient venus avec d’autant plus d’enthousiasme que leur voyage et tous les frais sur place étaient pris en charge. Une « aubaine » dont le coût a été évalué à 150 mille dollars. Ce qui mis la puce à l’oreille d’un des participants - qui désire rester anonyme – il mena alors sont enquête : Qui finançait ce « projet horizontal entre pairs » ? Il découvrit alors en première ligne une série de Fondations et Organisations façades, en remontant il réalisa que toutes dépendaient où étaient liées avec l’Open Society Institute créé par George Soros, le multimillionnaire présent à tous les Forums Economiques Mondiaux qui a financé le syndicat Solidarnosc Lech Walesa en Pologne,  la Révolution des Roses en Géorgie et la campagne présidentielle de Barack Obama, entre autres. Un fidèle défenseur du libéralisme économique qui se présente comme financier, investisseur et philanthrope.

En redescendant les liens il parvint à des organisations telles que Fondacion Nuevos Lideres, Jovenes Impresarios de Chile, Union Mundial, Tactical Technology Collective, entre autres. Toutes ces organisations défendent des lieux communs fort louables : défense de la démocratie, lutte contre la corruption et la défense des droits humains, mais en réalité la liberté qu’elles défendent est celle du Capital. Elles ont des contacts dans les hautes sphères de l’ONU, au Forum Économique Mondial de Davos, avec l’USAID (agence étasunienne – branche des services secrets US – de développement internationale), etc… Ils promeuvent des projets dans le Sud-est Asiatique, en Afrique et à présent en Amérique Latine.

Parmi ces organisations, Tactical Technology Collective mérite une mention à part puisque c’est cette organisation qui se dédie à former des activistes sociaux ayant la maîtrise des outils informatiques et de téléphonie mobile de réseaux, medias digitaux, et enregistrement de toutes les réunions (tss, tss… j’en ai vu débarquer un du genre, il avait aussi une maîtrise avérée pour canaliser les débats et imposer ses propres vues, exiger que tout soit filmé, quand il ne préparait pas tout simplement  l’ordre du jour à respecter et les conclusions qui seraient imposées indépendament du contenu des débats. NdT).

Après s’être interrogé sur le but de l’introduction de ces méthodes sur le continent latino, en particulier sur le rôle qu’elles pourraient jouer au Venezuela ou Chávez déjà lance l’alerte sur l’utilisation subversive des réseaux sociaux (et dont nous avons des traces de la préparation de la tentative de « Révolution de Couleur » que vient d’essuyer le Venezuela qui remontent à cette même période NdT)  Zibechi conclu :

En tout cas, cela vaut la peine de prendre le temps de réfléchir à cette manière dont les multinationales étudient patiemment les mouvements d’en bas et leur militants pour s’approprier leurs savoirs et leur manière de faire. (…) une bonne partie de ceux qi accoururent à cette réunion le firent plein de bonne volonté pensant qu’il s’agissait d’une rencontre de mouvements anti impérialistes, de base qui utilisaient les méthodes de l’éducation populaire dans leur travail. Démontrer que ceci fut organisé par le plus grand spéculateur financier de la planète - qui eut le pouvoir de briser la Banque d’Angleterre en 1992 et contribue à la chute des gouvernements anti impérialistes - montre jusqu’où ils peuvent aller quand il s’agit de maintenir leurs privilèges.

Zibechi (2010)

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27 février 2014 4 27 /02 /février /2014 12:25

 

En réponse à

Colombie : à l’opinion publique internationale - Appel à la solidarité suite à l’attentat contre des dirigeant-e-s de l’Union Patriotique

 

Extrait

 

En Colombie (département d’Arauca, municipalité de Tame, secteur de Puerto Jordan), ce dimanche 23 février, la caravane de l’Union Patriotique dans laquelle voyageaient la candidate à la présidence Aida Abella Esquivel, le candidat au Sénat et journaliste Carlos Lozano Guillen, la candidate au parlement andin Lilia Solano et le candidat au Parlement de l’Union Patriotique du département d’Arauca, a subi un attentat commis par des individus en motocyclette qui ont tiré des coups de feu avec des armes à gros calibre. Plus de 18 balles ont atteint le véhicule blindé dans lequel voyageaient les dirigeant-e-s de l’Union Patriotique, qui par chance sont indemnes.


Un petit sourire tout de même : Vive la démocratie colombienne où les candidats populaires doivent se déplacer en véhicule blindé s’ils veulent avoir quelque chance de survivre jusqu’à l’élection… et s’ils gagnent, chaque jour de survie, méritera qu’on leur tire notre chapeau.

C’est exactement ce modèle de « Démocratie Internationale » comme l’indique le nom de sa fondation à Washington, qu’Uribe Velez et ses sponsors veulent imposer à toute la région, où les systèmes de militarisations de pays les plus retors, sadiques, assassins ont reçu la jolie appellation de « Colombianisation ».

Je lance une grande alerte, et invite à la réflexion : Démocratie Internationale  est employé aujourd’hui comme synonyme de Fascisme Mondialisé , ni plus ni moins et avec des armées qui se mettent en place pour l’imposer, celle paramilitaire d’Uribe  compte 46 OOO hommes, dont 20 000 s’occupent du Venezuela et des contingents ont été envoyés soutenir la « rébellion syrienne » qui sont aujourd’hui rapatriés pour prêter main forte aux changements qui se préparent dans la région .

 

Pour rappel les parles de Kerry : “L’hémisphère occidental (terme de la même connotation colonialiste utilisé aux USA pour désigner l’Amérique Latine. NdT) est notre cour-arrière, il est d’une importance vitale pour nous. Avec une grande fréquence, beaucoup de pays de la région sentent que les USA ne leur portent pas assez d’attention et dans certaines occasions c’est très certainement la vérité. Nous devons nous rapprocher vigoureusement, nous avons planifié de le faire. Le Président se rendra bientôt au Mexique et ensuite au Sud je ne me rappelle pas dans quels pays, mais il va dans la région ». 


Chronique d’une guerre annoncée. Fini la « basse intensité » on passe à la vitesse supérieure dans le processus de subordination de la région à la sécurité et aux intérêts des Etats-Unis Corporations ». Et pour qui suit l’inexorable progression des expulsions d’habitants dans tous les pays d’Amérique Latine non-Alba (6 millions de déplacés en Colombie), et voit qui les cause, et à quel usage, au profit de qui, le terme de Corporations prend un sens très concret, effayant et douloureus : leur pouvoir sur les politiques, leur instrumentalisation des forces de répressions locales et leur usage d’armées privées pour réprimer ou assassiner les dissidents fait que le terme Corporation apparaît chaque jour d’avantage comme le terme adéquat qui désigne très précisément les bénéficiaires de ce processus d’accumulation de capital qui sous le nom de « crise du capitalisme » s’approprie y compris les petites et moyennes entreprises. Et si les Etats-Unis semblent s’effondrer, c’est qu’ils ont cessé d’être utiles en tant que nation à ces Corporations qui sont en train  de tenter d’imposer leur pouvoir mondial – fasciste, j’insiste après amples études  et documentation  et constatations de terrain – une gouvernance qui n’a besoin du Nationalisme que comme solution de replis des peuples sur eux-mêmes, avortant dans l’œuf toute velléité de solidarité entre les peuples, une Anti-Internationale.

Une approche pour voir l’ampleur de ce mal… entrez néonazis dans un moteur de recherche, puis voyagez… Mexico, Kuala Lumpur, Etats-Unis, Syrie, Buenos Aires, Taiwan, Pologne, Russie, Espagne, Suède, Hollande, Palestine, Japon, Flandre, Bogota, Norvège, Tchéquie, Slovaquie, Roumanie, Pays Balte et des dizaines d’autres…. Et quand vous approfondissez vous voyez que ce sont les mêmes structures,  que ces gens sont liés entre eux, échangent sur le net, se réunissent, une partie d’entre eux « bénéficient » de formations paramilitaires avancées… Je n’ai pas encore visité l’Afrique !

Et je vous conseille aussi une petite recherche sur le nazi-chic-  ou la création dès l’enfance d’un inconscient collectif Hitlérien…  Et un petit détour par  la Colombie l’affiche qui annonce les camps de jeunesse, ses sœurs existent en Europe, même présentation et même contenu au programme !

 

Les résultats sont édifiants et effrayants et appellent une réflexion de tous ceux qui ne veulent pas de ce monde. Derrière ce nationalisme xénophobe  universel, se cache une internationale, constituée des héritiers de ceux qui ont armé Hitler, Mussolini, Franco, assassiné Eliecer Gaetan, Lumumba, Sankara, Arbenz, … et tant d’autres et plus que probablement Chavez,  fait des centaines de milliers de morts en Amérique Latine avec le Plan Condor entre autres.  Aujourd’hui, pas un jour sans que ne s’accumule les morts qui s’ajoutent à tant d’autres morts,  un journaliste assassiné au Honduras, un leader paysan et sa famille en Colombie, des militants qui luttent contre l’implantation d’une mine au Pérou, des membres d’une garde indigène de Guerrero au Mexique, une sociologue indigène au Guatemala, etc, etc… rien qu’avec Servindi  (plate-forme indiène) et Agencia prensa rural  (Colombie) vous en comptez quelques-uns chaque jour, suivez les liens et la liste s’allonge, faite un tour du côté de la Copinh (Honduras) ou d’Ofraneh (Honduras) et en dehors même des événements actuel sur apporea (Venezuela) des assassinats ou tentatives, d’indigènes yupka, de petits paysans  se sont multipliés depuis quelques semaines… Sabino, cacique yupka assassiné alors que mourrait Chavez, le génocide indigène est une réalité concrète, ciblée, voulue… Sans parler de ce nouveau trafic lucratif au sujet duquel l’OMS lance l’alerte et qui culmine au Mexique, parmi les migrants d'Amérique Central qui veulent franchir le MUR, je cite l’OMS « Chaque heure trois personnes sont mutilées ou assassinées dans le monde pour fournir des organes »


Tous sont les morts d’une guerre de conquête qui ne dit pas son nom.

 


La Colombie comme le Venezuela sont aujourd’hui des zones à défendre, des peuples frères, amis qui sont menacés par les ennemis communs d’une guerre qui est aussi la nôtre.

La GUERRE, voilà pourquoi les candidats de gauche, se déplacent en voiture blindée, en Colombie.

 

Anne Wolff


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4 février 2014 2 04 /02 /février /2014 23:39

 

 

Ana Esther Ceceña 

Rebelión

 


Selon JV2020, la domination du spectre complet est “la capacité des forces des Etats-Unis, opérant unilatéralement ou conjointement avec des alliés multinationaux ou des forces-inter-agences, de vaincre, n’importe quel adversaire et contrôler n’importe quelle situation dans toute l’amplitude du spectre des opérations militaires » Et, il énumère ses différentes situations « incluant le maintien d’une attitude de dissuasion stratégique. Incluant l’action sur le théâtre d’opérations et activités de  présence. Incluant les conflits impliquant l’emploi de forces stratégiques et armes de destruction massive, guerres de théâtre principal, conflits régionaux et contingences de moindre intensité. Ces situations comprennent également celles ambigües qui oscillent entre paix et guerre, comme par exemple les opérations  pour maintenir et ramener la paix, de même que les opérations non-combatives d’aide humanitaire et l’appui aux autorités locales. »

 

La guerre, dans les termes que pose le JV2020, requiert pour ’une conduite unifiée : « une direction intégrée qui repose dans l’usage de tous les outils du statisticien pour atteindre nos objectifs nationaux, unilatéralement quand c’est nécessaire, en même temps que de faire un usage optimum des qualifications et des ressources fournies par les forces militaires multinationales et les organisations de volontaire privées quand c’est possible. La participation de la force conjointe à des opérations d’appui aux autorités civiles augmentera également en importance à cause des menaces émergentes sur le territoire des EU, telles que le terrorisme et les armes de destruction massive. »

Le document JV2020 accorde une attention spéciale aux “opérations informationnelles”, qui se définissent comme « celles qui sont entreprises pour affecter l’information et les systèmes d’information, de même qu’à la défense de nos propres informations et systèmes d’information. Ce type d’opérations regroupent depuis la piraterie informatique jusqu’à ce qui dans l’armée des EU est connu sous le nom « Opérations Psychologiques »


Il met en relief, en plus que «  l’interopérabilité est la base des opérations multinationales et inter-agences effectives ». Et ajoute comme élément fondamental «  la coordination sui se produit  entre les éléments du Département de la Défense et les agences du Gouvernements des EU impliquées, les organisations non-gouvernementales, les organisations de volontaires privées et les organisations régionales et internationales avec le propos de réaliser un objectif » lequel devra se réaliser « malgré la diversité des cultures, des intérêts en confrontation et les différentes priorités d’intérêt des organisations participantes » 

« Trois aspects du monde de l’année 2020 auront des implications significatives pour les Forces Armées des EU. Premièrement, les États-Unis continueront à avoir des intérêts globaux et seront engagés avec une série d’acteurs régionaux. »

Notre sécurité et nos intérêts économiques, de même que nos valeurs politiques,  donneront l’impulsion à nos engagements avec nos associés au niveau international. La force conjointe 2020 doit être préparée pour  gagner dans tout le spectre des opérations militaires dans n’importe quel lieu du monde ; pour opérer avec des forces multinationales ;  pour coordonner des opérations militaires ; pour opérer avec des agences gouvernementales et avec des organisations internationales quand c’est nécessaire.

Précisément, le concept de “domination du spectre complet” implique que les forces des EU soient capables de mener des opérations rapides, soutenues et synchronisées avec des combinaisons de forces sélectionnées à la mesure de chaque situation spécifique et avec la possibilité et la liberté d’intervenir dans tous les domaines : mer, air, terre et information. En plus, du fait du caractère global de nos intérêts et obligations, les Etats-Unis doivent maintenir leurs forces de présence outremer et la capacité de projeter rapidement du pouvoir dans le monde entier dans le but d’obtenir la domination du spectre total. »

Extraits de
 Le complexe académico-militaire étasunien et ses relations avec les forces armées d’Amérique Latine  Nouveaux masques pour de vieux projets

Par Rina Bertaccini

 

 

 

Depuis 1998-2000, après une révision complète large et exhaustive des affaires militaires au cours des 50 dernières années, et en gardant en vue la planification stratégique correspondant aux défis, menaces et conditions du siècle à venir, le Commandement Conjoint des Etats-Unis a émis un document conceptuel qui résume les expériences, objectifs, risques, capacités et savoirs,  et cela dans le but d’opérer une réorientation des trajectoires, mécanismes et variantes de la consolidation des Etats-Unis en tant que leader indispensable, en tant que  puissance hégémonique indiscutable (Joint 1998 et 2000)

Plusieurs porte-parole du Département d’État et de la Défense signalèrent qu’il s’agissait d’une opportunité historique, en grande mesure à cause de la faillite du camp socialiste, grâce à laquelle les Etats-Unis avaient la possibilité et les moyens pour construire un leadership planétaire total et ils présentèrent leur plan stratégique pour qu’il en soit ainsi. 


Répartition et contrôle du monde 

La délimitation territoriale de la planète s’est faite selon 5 régions qui la couvrent entièrement et qui se trouvent actuellement sous le contrôle de chacun des cinq différents Commandements des forces armées étasuniennes.[i] Peu de temps après, en 2001, après les événements des Tours Jumelles à New York, le Commandement Nord s’est ajouté la charge d’assurer directement une sécurité interne qui couvre non seulement son propre territoire mais toute la surface de l’Amérique du Nord. Il est important de signaler, qu’à présent au bout d’une décennie, neuf Commandements ont été créés[ii], garantissant un contrôle plus détaillé des terres, mers, glaciers et populations que compte la planète Terre dans son ensemble.

La géographie de mise sous discipline globale.

Des équipes de spécialistes à leur tour, travaillèrent à l’identification des problématiques différenciées dans le champ de la mise sous discipline en termes géopolitiques et ils déterminèrent une caractérisation qui distingue trois grandes régions (Barnett, 2004), envers lesquels sont élaborées des politiques différentes.

1. Les alliés. La région développée regroupée en organisations de gestion internationale et engagée dans l’établissement et l’accomplissent des normes de sécurité qui assurent la bonne marche du système et le respect et la protection de la propriété privée.

2. L’ère de risque ou ingouvernable. Un large groupes de pays incluant des zones maritimes et qui est reconnue comme « fracture critique » dans laquelle il y a en permanence des risques de d’explosions, d’insubordination face aux règles établies par les organisations internationales comme l’Organisation Mondiale du Commerce(OMC), le Fond Monétaire International(FMI) et la Banque Mondiale, de rébellion contre le mode de gestion des controverses entre Etats et entreprises transnationales (ETN) par le Centre International de Règlement des Différents Relatifs aux Investissement (CIADI), d’indiscipline en terme de gouvernabilité, etc.

Ces régions sont qualifiées de conflictuelles, partiellement ingouvernables et susceptibles de mettre en risque les zones voisines par un agrandissement de la zone pourrie ou de pouvoir mettre en risque d’explosion le système mondial, quoique que, pas plus que conjoncturellement. Pour ces raisons, c’est une région qui requiert une grande attention et doit être maintenue sous surveillance et le cas échéant faire l’objet d’intervention opportune et efficiente. Ceci est la région de la plus grande étendue parmi les trois identifiées et c’est celle qui recèle la plus grande quantité de richesse de la Terre : la ceinture de biodiversité, les eaux, le pétrole et autres énergies, les minéraux et cultures.

3. La charnière. C’est une région importante en soi tant politiquement que pour ses richesses mais elle se situe comme chaînon ou comme fer de lance dans le ralliement ou la récupération des pays de la fracture critique. Elle est composée des pays semi-développés ou caractérisés d’émergents, respectueux des règles du jeu quoique en certaines occasions ils éprouvent des difficultés pour suivre le rythme des politiques internationales (cas des renégociations de dettes ou similaires) mais intéressés à se maintenir dans les dynamiques établies. Avec les pays de cette région il est possible de souscrire des accords diplomatiques, politiques et économiques sans qu’il soit nécessaire d’intervenir directement par la force. De différentes manières, ils ont tous un poids régional déterminant et seraient capables de faire évoluer les normes globales à travers des mises en concordances, canaux et compromis au niveau régional. Entre les pays de cette tranche se trouvent le Brésil, l’Inde, l’Argentine, l’Afrique du Sud, la Russie et la Chine.


Socio politique de la mise sous discipline globale

L’idée centrale des guerres du 21ème siècle est celle du maniement asymétrique, une fois rompu l’équilibre des pouvoirs par la faillite du camp socialiste. La construction de l’ennemi a opéré un glissement des entités institutionnelles vers les ennemis non-spécifiques, créant un imaginaire de guerre aveugle.

L’ennemi identifiable ou conventionnel voit son statut réduit à celui de menace régionale et dans ce camp se retrouvent l’Irak, la Lybie, l’Iran et le Venezuela, chacun d’entre eux considéré comme potentiel leader régional, ainsi que tous les types de coalition auxquels ils participent (ALBA, OPEP, Petrocaribe, etc…). Il s’agit à chaque fois d’un pôle articulé de pouvoirs alternatifs ou hostiles aux États-Unis et à leur american way of life converti en politique internationale. Pour cet ennemi la réponse est l’isolement et la démonisation, ou l’application d’une force surdimensionnée pour le détruire, et par-dessus tout l’humilier. Le prototype en est l’intervention en Irak.

L’ennemi non institutionnel est diffus, relativement invisible, éloigné des règles de fonctionnement du pouvoir et en un certain sens indéchiffrable. C’est, depuis un vietnamien apparemment inoffensif de qui ont perçoit seulement le chapeau et jamais le visage, jusqu’à des femmes ou des enfants d’une communauté qui ne se conforment pas avec la construction d’un barrage générateur d’énergie électrique en passant par des masses urbaines qui protestent contre l’élévation du prix des transports, ceux dont on imagine qu’ils peuvent déposer une bombe, fabriquer des armes chimiques ou biologiques dans des laboratoires domestiques ou qu’ils peuvent mobiliser d’amples contingents pour s’opposer aux politiques et projets hégémoniques.

Le danger vient du fait que ces petits ennemis insignifiants qui apparaissent dans tous les recoins, où se dissimulent dans chaque trou peuvent mettre en risque le système lui-même. C’est pour cela que l’on cherche à les attaquer avant qu’ils ne se retrouvent en position de force dissuadant ceux qui sont susceptibles de se transformer en de tels ennemis. Boucher tous les pores et ne pas laisser la plus petite ouverture à l’ennemi dit le missel militaire étasunien (Joint 1998)


Domination du spectre complet

La carte conceptuelle stratégique du projet hégémonique se construit comme nous le disions, autour de l’idée de profiter, ou de ne pas laisser se perdre, l’opportunité historique, qui ne se répétera pas, d’une émergence des Etats-Unis comme leader mondial. Sans guerre froide, sans pouvoirs équivalents auxquels se confronter, mais une conflictivité générale extrêmement complexe et généralisée. Les Etats-Unis ont redéfini leurs objectifs, leurs espaces, modifiant ou adaptant leurs mécanismes, générant des exigences technologiques, recomposant les équilibres entre travaux de renseignement, de persuasion et de combat, redéfinissant les points critiques et explorant les schémas d’approche mais sans renoncer en aucune mesure a ce que, dès ce moment, ils ont appelé « domination du spectre complet » (Joint 1998 et 2000).

La plus grande nouveauté de cette conception stratégique réside dans sa capacité à articuler dans un sens général unique des stratégies sectorielles, partielles, spécifiques, temporelles et plus limitées qui sont déployées par différents émissaires ou agents de la politique de sécurité et de la recherche de suprématie des Etats-Unis sur tous les plans. Rien de nouveau n’a été inventé mais le problème a été pensé de manière intégrale et cela en a changer les expressions et les priorités.

Une systématisation, avec des détails scientifiques, a été opérée pour chaque niveau ou espace du spectre où pourrait se dissimuler un ennemi potentiel. L’espace extérieur, l’espace atmosphérique, les eaux, les surfaces terrestres, les profondeurs de la terre, les espaces publics et privés qui doivent être pénétrés grâce à des mécanismes panoptiques (caméras aux coins des rues, dans les banques et bureaux, puces espionnes, systèmes de données centralisées, etc.) Vie quotidienne, vie productive, pensée et action. Quartiers populaires avec des politiques différentes des quartiers de classe moyenne ou de classe élevée, stratification compétitive, transport, dotation de service, etc. tous les points d’observation et de manipulation des populations.

Avec deux objectifs généraux : garantir le maintient du capitalisme et à l’intérieur la suprématie des États-Unis ; et garantir la disponibilité de toutes les richesses du monde comme base matérielle de fonctionnement du système, assurant le maintient de ses hiérarchies et dynamiques de pouvoir[iii]. En d’autres termes, ils insistent, empêcher la formation de forces individuelles ou collectives capables de devenir un contrepoids significatif au pouvoir des États-Unis autoproclamés leader mondial, empêcher ou dissuader toute forme d’insubordination ou de rébellion qui mettrait en risque le système ou les intérêts centraux de ses principaux protagonistes, parmi lesquels ont compte la liberté de disposer sans limites des territoires et vies.

L’ambition géographique de cette stratégie de mise sous discipline embrasse tout le globe et l’espace extérieur, mais étant donné la conformation territoriale de la planète et la conception du monde comme champ de bataille, il a comme territoire de base, comme territoire interne, le Continent Américain.



[i]  Les cinq commandements qui se répartissent le monde sont : Central Command, European Command, Northern Command, Pacific Command, Southern Command.

 

[ii] Actuellement les Commandements de Combats sont neufs parmi   sont transversaux à savoir African Command, Central Command, European Command, Northern Command, Pacific Command, Southern Command,  Special Operations Command, Strategic Command y Transportations Command. (DoD, 2014).. Cependant une nouvelle modification se profile qui en réduirait le nombre à 5 commandements géographiques, dans une certaines mesure pour des questions de budget. (DoD 2013)

 

[iii] Il est intéressant de revoir de ce point de vue la définition de la mission historique des forces armées des États-Unis, qui dans ses cinq objectifs fondamentaux inclus les deux mentionnés (Cohen 1998)

 

Traduction Anne Wolff

Source espagnole Rebelion. La dominación de espectro completo sobre América

 

 

Lire le tout : 

 

La domination du spectre complet en Amérique (et dans le monde)1

La domination du spectre complet en Amérique (et dans le monde) 2

La domination du spectre complet en Amérique (et dans le monde) 3

 

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4 février 2014 2 04 /02 /février /2014 23:34

Par

Ana Esther Ceceña

L’Amérique Latine dans la géopolitique du spectre complet

Considérant le caractère insulaire du continent, les abondantes et diverses ressources qu’il contient et calculant aussi les limitations réelles des États-Unis restreints à leur seul territoire, l’Amérique Latine devient une aire stratégique pour créer les conditions d’une invulnérabilité relative ou pour le moins d’un avantage hégémonique relativement à tout pouvoir qui se voudrait alternatif. De là découle, la conception de sécurité hémisphérique, quasi coïncidente avec celle de sécurité nationale qui est une traduction moderne de la doctrine de Monroe. Veiller sur le territoire pour disposer de ses richesse et pour empêcher que d’autres ne le fassent (Ceceña 2001)


Les trois plis de l’occupation continentale

L’hégémonie se construit sur l’étendue du spectre complet, un spectre pleins de plis qui se superposent et se dédoublent pour tisser l’histoire. La construction d’hégémonie est de ce point de vue un processus de lissage et combinaison de ces plis et de formation de nouvelles topologies de pouvoir. Une protection militaire ne suffit pas si les vannes économiques ne s’ouvrent pas et rien de tout cela n’est possible sans l’instauration d’un imaginaire qui le rend possible. Le premier stade de l’hégémonie consiste à universaliser leur vision du monde, l’american way of life, pour permettre d’influencer sous ce voile de manière relativement souple les politiques économiques qui favorisent l’intégration hémisphérique et les avoirs des plus puissantes entreprises installées sur le Continent.

Concrètement l’hégémonie se manifeste par l’implantation institutionnellement consensuelle - quoique les peuples puissent exprimer leur rejet – d’un ensemble de politiques, projets, normes et pratiques par lesquels est organisé le territoire[i] dans son ensemble.  

Les relations entre les États-Unis et l’Amérique Latine, à la lumière de la reconceptualisation des stratégies hégémoniques globales, sont entrées dans le 21ème siècle marquées par des changements profonds. 30 années de néo-libéralisme ont permis d’éradiquer quasi totalement les législations et pratiques protectionnistes et cela est propice à une extension croissante des grands capitaux internationaux qui se sont approprié les infrastructures absorbant ou détruisant les entreprises locales. De nouvelles infrastructures sont nécessaires pour poursuivre le processus, à la fois de nouvelles normes légales et des disciplines qui légitimeront le déploiement et qui contrôleront les mécontents, qui se mobiliseront de manière grandissante. (Ceceña, Aguilar et Motto 2007)


1. Lissage du pli économique. En 1994 entra en vigueur le premier traité international régional de libre échange (Traité de Libre Echange d’Amérique du Nord (TLCAN)) qui met en évidence les modalités d’un ambitieux projet d’intégration continentale (Accord de Libre Echange des Amériques (ALCA)) qui depuis son échec circonstanciel en 2005, à Mar de Plata, s’est réalisé petit à petit par sous-régions. Les nouvelles normes pour le transit des capitaux passent par dessus toute prétention de souveraineté ou de protection du patrimoine national, avec la protection additionnelle de la banque mondiale à travers le CIADI, par lequel dans presque tous les cas les états sont mis en déroute par les entreprises privées.

Le réseau de traités de libre échange et investissement qui s’est tramé sur le continent représente un réajustement complet du pli économique, de manière à ce qu’il en finisse avec l’habitude de restreindre l’entrée de capitaux étrangers et de réserver des espaces stratégiques comme base pour la subsistance de la nation.

A présent ce sont ces capitaux qui dictent les règles, ce sont eux qui encadrent les dynamiques, eux qui corrompent les gouvernements et eux qui s’accaparent du territoire.


2. Le pli territorial. En plus des appropriations individuelles, locales perpétrées directement par les entreprises, en 2000 ont été lancés deux projets de réorganisation territoriales cherchant une ouverture quasi totale vers le marché mondial et une rationalisation/amplification de la production énergétique pour soutenir le rythme de croissance du Continent : le Plan Puebla Panamá (PPP) actuellement Projet Mésoaméricain et l’Initiative d’Intégration de l’Infrastructure Régionale Sud-Américaine (IIRSA), actuellement COSIPLAN-IIRSA.

Les plus ambitieux projets d’infrastructures que l’on ai vu de mémoire américaine, conçus comme support d’une croissante exportation de matières premières en grande partie produites par les grandes transnationales de la mine, du bois/cellulose et les produits énergétiques simultanément avec l’extension des plantations de soya, palme et canne à sucre, entre autres, pour alimenter le bétail, pour la génération de biocombustible ou pour des usages industriels. Avec ces mégaprojets est induite une nouvelle géographie marquée par les canaux de communication et de génération d’énergie, qui vont suivre les entreprises principalement extractives et qui dessine une nouvelle carte politique interne, avec de nouvelles frontières et de nouvelles normativités.


3. Le pli militaire, incontournable face aux situations généralisées de dépossessions et de violence sociale qui provoquent différentes manifestations de résistance et de rejet, fut initié ave le Plan Colombia, premier du genre qui a permis une présence des États-Unis dans le centre de l’Amérique Latine. A la réorganisation de l’économie territoriale qui implique une mainmise légale sur les territoires et peuples s’ajoute une initiative d’empreinte pesante (heavy footprint) sur le plan militaire.

 L’initiative, flexible et variable pour s’adapter aux scénarios changeants quoique sans perdre l’objectif stratégique, encadrer la région latino-américaine et caraïbe, établissant un ample réseau de bases militaires (Ceceña, Yedra et Barrios, 2009 ; Ceceña, Barrios, Yedra et Inclán, 2010) et des bases d’opérations anti narcotiques, des patrouilles navales croissantes et constantes, avant et après la reconstitution de la IVème flotte en 2008 ; des armées conjointes qui rendent naturelle la présence de troupes étasunienne et homogénéisant les caractéristiques entre les forces armées de la région ; une généralisation des codes civils criminalisants et des dites loi anti-terroristes qui introduisent la figure du suspect et la tolérance zéro ; un ensemble d’accords ou d’initiatives de sécurité sous régionales, toutes avec la participation des États-Unis, qui ont pour prétexte le déroulement du plan Colombia, jusque dans d’autres  régions comme cela se passe actuellement au Mexique et en Amérique Centrale avec la dite Initiative Mérida (Ceceña, 2006 et 2011).

Dans l’ensemble, la stratégie hégémonique ambitionne d’investir des capitaux, de les multiplier, de disposer des ressources ayant la plus grande valeur, et de réduire les coûts avec des régime de sous-traitance, d’implanter des cultures d’exploitation industrielle, dans la majorité des cas avec des méthodes agricoles hautement prédatrices, et, en général, d’utiliser le territoire selon ses critères, en accord avec ses besoins et intérêts, comme espace propre de renforcement interne et de défense face au reste du monde. Les mécanismes combinent diplomatie, politique, asymétrie et force, et elles varient en fonction des défis internes et de la vision et conditions globales de lutte pour l’hégémonie. La tenaille est mise depuis l’économico-territorial jusqu’au militaire, avec une offensive transversale qui circule sur le plan des imaginaires, des sens communs virtualisés et des politiques culturelles colonisatrices.


Où en est l’Amérique Latine

Le 21ème siècle a vu naître une Amérique Latine et Caraïbe rebelle, pleine de mouvements décolonisateurs sur tous les terrains et d’amplitude diverse. Depuis des mouvements pour la construction d’une société post capitaliste inscrits dans la notion d’un monde qui contient plusieurs mondes zapatiste jusqu’à celle d’une vie de plénitude ou bien vivre des peuples andino-amazoniens. ; et un ensemble de mouvements sociaux par l’autogestion, la participation directe ou la démocratisation dans différents domaines, ou de mouvements politiques qui depuis les instances de gouvernement ont installé quelques dispositifs de frein et d’alternative au système de pouvoir, comme la création d’espaces d’intégrations avec des critères de solidarités et non compétitifs, la recherche de processus de solution divergeants de ceux des capitaux déprédateurs ou nocifs, la dévaluation des dettes odieuses et d’autres semblables.

Des populations qui s’organisent pour défendre leurs coutumes, paraphrasant E.P. Thompson, apparaissent de toutes parts corrodant l’ordre établi et celui qui est en phase d’établissement. La situation ressemble à celle d’une guerre sans merci dans laquelle les dispositifs de sécurité combattent la population qui défend ses droits - parfois précédés, parfois accompagnées par des paramilitaires, mercenaires, gardes privés, autrement dit par des forces armées illégales ou irrégulières, avec des affectations confuses mais avec des degrés d’intervention et d’impunité forts élevés. S’opposer à l’exploitation d’une mine est devenu une cause d’emprisonnement alors que tuer les opposants n’entraîne aucune conséquence.

Des attentats déstabilisants comme le coup d’état au Honduras, la mobilisation séparatiste de la Media Luna en Bolivie, la tentative de coup d’état en Équateur et tout ce qui a été mis en action au Venezuela ; l’un après l’autre, depuis plus de 10 ans, font à présent partie de la mécanique géopolitique ordinaire. Des processus post capitalistes se construisent dans un scénario de guerre et il faut y être préparés. Le 21ème siècle est une guerre à la fois ouverte et occulte, spécifique et atypique et faites de modalités multidimensionnelles qui combinent des variantes moins belliqueuses, comme les attaques financières, avec d’autres comme celles de choc et terreur.

Le scénario latino-américain et caraïbe ne paraît pas être adéquat pour mener une attaque comme celle d’Irak ou d’Afghanistan. Dans ce scénario ce qui a opéré, en plus de l’introduction de mercenaires ou de l’introduction de commandos spéciaux clandestins, est une escalade de positionnements physiques qui encerclent les zones identifiées comme stratégiques en commençant par le canal de Panama, bien protégé dès le départ par les positions du Plan Colombia auxquels à présent s’ajoutent beaucoup d’autres (carte 1) (Ceceña, Yedra et Barrios 2009) et la région  de la grande Caraïbe (carte 1) (Ceceña, Barrios, Yedra et Inclán 2010) ainsi que la région environnant la triple frontière entre Paraguay, Brésil et Argentine (carte 2) (Ceceña et Motto 2005).


 

La mosaïque politique de la région est variée et complexe. Les pays qui se sont unis dans l’Alliance du Pacifique fonctionnent clairement comme alliés des Etats-Unis, reçoivent des gratifications sous la forme d’aide et dans le cas de la Colombie accomplissent des fonctions qui étaient auparavant assumées directement par le personnel étasunien.


 

A ce sujet, il est intéressant de parcourir le rapport préparé  - par Latin America Working group éducation fund, Center for international policy (CIP) et WOLA - pour le congrès des États-Unis, dans lequel est affirmé que la Colombie a été le principal bénéficiaire de l’assistance policière et militaire au cours des 20 dernières années (moins une) (Isacson, 2014 : 22). Le rapport cite une note qui figure sur le site du Département de la Défense (avril 2012) dans laquelle il est affirmé que la Colombie donne à son tour une assistance en capacitation et entraînement dans 16 pays de la région et au-delà, y compris en Afrique. Le Ministre Colombien de la Défense, pour sa part, a déclaré au Miami Herald que les forces colombiennes ont entraîné plus de 13 000 hommes dans 40 pays différents entre 2005 et octobre 2012 (Isacson, 2014 : 22)

.. … les gouvernements des États-Unis et de Colombie mènent ensemble un “Plan d’Action en Coopération Régional de Sécurité” à travers lequel ils tentent de coordonner l’aide à des pays tiers. (Isacson, 2014 22, traducción AEC)

Le cas du Pérou est notable, par dessus tout dans les dernières années au cours desquelles se sont déroulés des exercices militaires dans auxquels participaient des énormes contingents de personnel étasunien, mille effectifs en 2008 par exemple, sans que soient précisées leurs fonctions et pour des périodes atteignant 6 mois (Congrès de la république du Pérou, 2008). Des déclarations de Léon Panetta, Secrétaire de la Défense des États-Unis lors de sa visite à Lima en 2012, insistent sur le fait que les États-Unis sont prêts à travailler conjointement avec le Pérou dans la planification, l’échange de renseignements et à développer une coopération militaire trilatérale avec le Pérou et la Colombie en relation avec des problèmes de sécurité (Isaacson, 2014 : 24) réactivant l’idée  originelle d'inclusion du Pérou dans le Plan Colombia.

L’équilibre entre les différentes positions a permis de faire fonctionner des organisations comme l’UNASUR, importantissimes pour fortifier l’indépendance régionale mais avec les positions les plus variables à l’intérieur. Il suffit de rappeler l’emblématique réunion de Bariloche, juste après que la Colombie ait autorisé l’installation de 7 nouvelles bases militaires étasunienne sur son territoire, et que plusieurs membres avec le Venezuela en tête, tentèrent en vain de faire rejeter cet accord.

L’équilibre géopolitique dans la région, en permanence et par définition, est exactement cela, un équilibre.


Le plan México

En 2005 a été signé le premier accord de sécurité sous-régionale du continent, prenant à nouveau la région d’Amérique du Nord comme point d’ancrage de ce qui s’est, à présent, étendu à toute la région de la Grande Caraïbe. L’Accord de Sécurité et Prospérité d’Amérique du Nord (ASPAN) est un court texte quasi équivalent à une déclaration d’intention, mais il a servi de cadre au lancement de l’Initiative Mérida (2008), qui après s’est répliquée dans l’Initiative de Sécurité Régionale d’Amérique Centrale (CARSI) en 2008, et de l’Initiative de Sécurité du Bassin de la Caraïbe (CBSI) en 2010.

 Le montant de l’aide apportée par les EU à L’Amérique Latine et la Caraïbe dans le domaine policier et militaire s’élève notablement si on y inclut celui destiné à la Colombie et au Mexique pendant cette période. En 2013 la Colombie a reçu pour ce poste budgétaire 279 millions de dollars, ce qui était le montant le plus bas depuis 2000 alors que le Plan Colombie en était à ses débuts. Même si on tient compte de cette réduction, la Colombie reste le premier destinataire des ressources, à présent suivi par le Mexique, qui en 2013 a reçu 154 millions de dollars. Les estimations qui ont été faites pour le CARSI dans la période de 2008-2014 se montent à 665 millions de dollars (Isacson 2014), en grande partie justifiées - par les fonds destinés au Honduras, où il semble clairement que soit en cours d’installation un méga centre d’opérations beaucoup plus ambitieux que ne l’était jusqu’ici la base de Soto Cano, - et par les sommes destinées au Guatemala, en particulier celle destinées aux opérations et forces de sécurité de la frontière avec le Mexique.

Actuellement, on trouve plus d’effectifs de la DEA au Mexique que dans n’importe quel autre de ses cantonnements étrangers (selon le rapport cité), en plus des effectifs de la CIA qui comptent un centre d’opération, évidemment illégal mais en pleine vue, à Mexico. Le bombardement de la région de Sucumbios, en Équateur, en 2008, comprenait l’implication - tout indique qu’elle fut délibérée pour s’ajuster avec le plan général - de plusieurs jeunes mexicains qui furent conduit au quartier de paix de la FARC de cette localité, ils servirent de justification pour mettre en marche une grosse opération « antiterroriste » au Mexique, qui se combina avec le guerre contre les narcos » déclenchée par Felipe Calderón depuis 2007. Ce sont les prémisses du Plan México, mieux connu comme Initiative Mérida.

De manière très similaire à ce qui s’est passé en Colombie, le Mexique a été frappé par un déferlement de violence qui se poursuit à présent depuis une décennie, pendant laquelle ont été détruits les tissus communautaires, alors qu’une culture de la peur et de la solitude était introduite par laquelle des recherches d’appartenances immédiates ont remplacé les racines des histoires longues. Aux références collectives d’identité nationale ont été petit à petit substituées celle des pandillas (bandes) ou de groupes qu’ils soient d’autodéfense ou d’attaque, qui se convertissent en l’unique territoire fiable mais bien sûr sans garantie.

Ce qui est surprenant, c’et la rapidité avec laquelle le pays s’est militarisé et a commencé à s’habituer à la présence étrangère incarnée par des corps de sécurité ou d’application de la loi, avec des protestations de rejet dans de nombreux cas, mais qui ont reçu de l’état des réponses cyniques et indolentes. Depuis le personnel du FBI installé aux barrages de migration de l’aéroport de Mexico jusqu’aux arrestations réalisées par du personnel étranger sur le sol national. Tout cela, bien entendu, justifié par la lutte contre le narcotrafic.

L’armée s’occupe d’affaires de sécurité interne et a été dénoncée pour sa complicité avec le dit crime organisé, tout autant que les polices. L’état est loin d’être le seul à exercer la violence. Il y a également ce qu’on pourrait qualifier de milices du crime organisé, non seulement impliquées dans le narcotrafic mais aussi dans d’autres activités illicites, généralement fort violentes, auxquelles il faut ajouter les services privés de sécurité et les paramilitaires.s

Le Mexique avait toujours été mis en évidence comme un des pays d’Amérique Latine exemplaires pour ne pas être passé par les dictatures militaires, comme beaucoup d’autres et pour maintenir une politique de respect de l’autodétermination des peuples et des nations et de non ingérence, ce qui implique de ne pas participer à des activités militaires à l’étranger; mais à présent il s’est incorporé aux exercices conjoints, et il s’est impliqué dans des décisions d’interventions dans d’autre pays à travers l’ONU et, sans dictature militaire interne, il  a dépassé de loin les bilans des dictatures du cône Sud : lors de la Première Réunion Trilatérale de Ministres de la Défense d’Amérique du Nord, Léon Panetta, Secrétaire de la Défense des États-Unis, a assuré que le nombre de morts de la guerre contre le narcotrafic au Mexique s’élève à 150 mil, donnée qui fut par la suite démentie par le Secrétariat de la Défense du Mexique sans qu’il offre aucune donnée alternative ; l’institut de Géographie, Statistique et Informatique (INEGI) enregistre 94 249 assassinats violents entre 2006 et 2011 seulement et les organisations de la société civile donnent un chiffre de 100 000. Dans ces cas, les calculs sont terriblement compliqués mais il y a une coïncidence des diverses sources sur le chiffre de 100 000 morts et de 25 000 disparus alors que le nombre des déplacés se situerait entre 780 mille et 1 million 648 mille.

Les accords militaires entre le Mexique et les États-Unis ont été en augmentant. Sous les auspices du Commandement Nord qui prodigue des entraînements, capacitations et conseils aux Mexicains, qui ont suivi ponctuellement les indications de politique de sécurité des États-Unis. Elles ont démontré qu’elles sont catastrophiques pour le pays, mais par contre pas pour les intérêts et ingérences des États-Unis, vu qu’après une décennie sanglante ils sont finalement parvenus à obtenir l’ouverture du secteur énergétique, si fortement souhaitée par la puissance du Nord.

L’accord entre le Mexique et les États-Unis atteint un point tel que la présence d’effectifs de sécurité étasuniens armés et opérationnels, ainsi que le survol l’espace aérien mexicain, en particulier par des drones, ont été autorisés depuis 2009.



[i] Notre conception du territoire n’est pas géographique ou physique mais historique et culturelle. Le territoire se construit par l’interaction entre les êtres vivants et leur milieu, dans la construction d’un habitat spécifique, qui est évidemment politique.

Traduction Anne Wolff

Source espagnole

 

Rebelion. La dominación de espectro completo sobre América


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La domination du spectre complet en Amérique (et dans le monde)1

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4 février 2014 2 04 /02 /février /2014 23:24

Par Ana Esther Ceceña

 

 

 

Le chaînon hondurien

Le coup d’état au Honduras en 2009 a non seulement permit de freiner l’avance d’intégration comme celle de l’Alternative Bolivarienne pour les Peuples de Notre Amérique (ALBA) mais aussi, comme dans les années 80, elle a permis de retransformer le Honduras en épicentre des activités étasuniennes dans la région centraméricaine. 

 Le Honduras héberge sur son territoire un des sièges étrangers du Commandement Sud à Palmerola, dans l’emblématique base de Soto Cano qui, à en juger par les ressources mobilisées dans ce pays, semble s’être étendue pour se convertir en un méga centre régional, comme nous l’avons déjà mentionné. Les mouvements sociaux honduriens ont signalé - dans leur dénonciation de la présence d’effectifs étasuniens - non seulement leur présence à Soto Cano mais également dans d’autres régions où sont très probablement localisées de nouvelles bases. Nous en avons enregistré deux autres sur la Côte de la Caraïbe et dans le rapport Time to listen qui contient les données publiques plus récentes, concernant les budgets et activités des politiques de contrôle du narcotrafic, il est question de quatre de plus (Guanaja, Mocarón, El Aguacate et Puerto Castillo) qui auraient été financées par les Etats-Unis, il est également question d’un transfert de 1 388 million de dollars en équipement électronique d’usage exclusivement militaire, une partie duquel est destiné expressément à l’usage exclusif du personnel étasunien au Honduras. Se trouverait là, probablement, un des plus grands centres d’information et télécommunication du Continent.

Il ne faut pas manquer de faire remarquer l’importance géostratégique du Honduras, situé au centre de l’Amérique Centrale et disposant d’issues vers le Pacifique et vers la mer Caraïbe. Le Honduras, après le coup d’état, s’est converti en chaînon centroaméricain du corridor militarisé qui va depuis la Colombie jusqu’au Mexique, touchant la frontière avec les États-Unis et couvrant le Canal de Panama. Le point de chute que représente le Honduras dans cette perspective a justifié les ressources et politiques spéciales appliquées au pays.

 

Le bras sud du plan Colombie

L’extension du corridor militarisé vers le sud trace une ligne directe avec le Pérou, depuis le début membre mineur du plan Colombie et jusqu’au Paraguay, centre d’opérations des forces étasuniennes pendant une bonne partie du 20éme siècle.  

Il faut mettre en évidence que le tracé géographique de ce corridor a éprouvé des difficultés à trouver une sortie vers l’Atlantique, région remarquable par les gisements de pétrole du Brésil. La recherche du passage vers l’Atlantique a été mené avec la mobilisation de la 4ème flotte, avec quelques échecs de tentatives de projets de bases militaires (Alcántara au Brésil, par exemple) et avec la position privilégiée de l’île d’Ascension, où a été installé un centre d’information du plus haut niveau, et qui est une des positions en relation directe avec le concept stratégique qui sous-tend la convention de 2009 pour l’installation de 7 nouvelles bases en Colombie, et qui en réalité n’a pas encore pu être appliqué (Carte 3)

 

 

Le rapprochement avec le Pérou s’est substantiellement intensifié à partir de 2008 et avec le Paraguay les engagements de capacitation offerts par les Colombiens ne se sont pas interrompus y compris avec le gouvernement de Fernando Lugo, et maintenant, il y a eu le coup d’état parlementaire et  de gouvernement de rechnange a pour objectif de les intensifier. Déjà pendant le gouvernement de Lugo il avait été convenu avec les États-Unis de l’installation d’une base d’opération et d’entraînement dans la zone nord qui est tout à fait fonctionnelle, et où les instructeurs, en accord avec le pacte, seraient étasuniens, mais nous savons qu’ils sont également colombiens.

Les pions joués de cette manière, chacun de son côté mais clairement articulés dans le concept stratégique continental, conforment une route sûre qui parcourt l’Amérique du Nord au Sud (carte 4) et qui permet les conditions d’une réponse rapide à n’importe quelle situation de risque. Les troupes étasuniennes et leurs alliés - qui se sont entraînées ensemble, et entretiennent des protocoles similaires quand ils ne sont pas identiques, qui se sont exercées à des simulacres de réponse à des contingences variées parmi lesquelles se retrouvent les soulèvements, les troubles urbains et d’autre du même style, disposant d’une plateforme territoriale aussi étendue et adéquatement équipée - sont dans de bonnes conditions pour intervenir avec efficacité le cas échéant.


 

 

Le virage technologique

Un des importants avantages asymétrique que comptent les États-Unis, c’est la technologie, tant dans le champ de la production civile comme, de manière superlative dans le domaine militaire. Les communications militaires, les techniques d’encryptage, les protocoles, armes, avions, télédirection, télédétection, armes chimiques et biologiques, technologie nucléaires et toutes leurs dérivées et innovations. C’est sur cette base que sont menés la prévention et les travaux de renseignements qui éviteraient les guerres - parce qu’ils neutraliseraient ou détruiraient les potentiels ennemis avant qu’ils puissent se convertir en une menace réelle. Dans ce but est également mise en jeu l’application de forces surdimensionnées dans des opérations de choc et terreur qui confèrent un avantage matériel et logistique à tous les types d’incursion.

L’élément le plus innovant, quoique pas forcément le plus décisif, ce sont les mini avions sans pilote, communément appelés drones. Les drones sont utilisés par les États-Unis depuis déjà un bon moment dans des opérations spéciales, tant de monitoring et de détection que d’attaque. Leurs légèreté, imperceptibilité et coût relativement bas les convertissent en un outil qui a tendance a se développer massivement et c’est aussi en un commerce juteux. Israël est actuellement le producteur et exportateur de cette technologie. Le Brésil est en train de lui acheter le know how pour initier sa production localement et on pourrait penser que les drones, cessent, du fait de leur multiplication, d’être un avantage. Cependant, ce qui compte ce sont les importantes fonctions que peuvent accomplir les petits avions et cela dépend de leur contenu. Les équipements de détection ont des potentialités multiples. Les équipes d’attaque miniaturisée sont l’exclusivité du Pentagone pour le moment et la miniaturisation semble leur conférer un avantage décisif sur le restant des peu nombreux producteurs.

Les drones diminuent les coûts de la guerre et contribuent à alléger l’empreinte militaire sur les territoires. Les bases de lancement requises sont de taille micro et cela permet de rendre invisible la situation de guerre généralisée vers laquelle inexorablement nous mène le capitalisme.


L’équilibre latino-américain et Caraïbe et ses dérives.

Bien que les scénarios de guerre du Moyen-Orient, si complexes et explosifs soient ceux qui occupent l’attention des medias, la bataille interne qui se livre en Amérique est extrêmement intense et indubitablement décisive. Elle a pour qualité d’avoir ouvert des routes de pensée et de construction de modes d’organisation sociale pas seulement conflictuels mais distincts, et du coup aussi d’avoir proposés des alternatives, à celles qu’offre le capitalisme. Le passage vers le non-capitalisme, quelle que soit la dénomination qu’on lui donne, rencontre un tas d’obstacles et fera l’objet de toutes les pressions, menaces et attaques. Des opérations de déstabilisation en tous genres, des interventions directes, des tentatives de coups d’état, des massacres de populations dissidentes ou insurgées, l’imposition de politiques et normes, blocus, conflits frontaliers et beaucoup d’autres dispositifs de contre-insurrection, entendue au sens large de ce terme.


Tout cela nous conduit dans un chemin ardu et de longue haleine mais pas impossible

C’est ici que Mariátegui revient résonner avec force. Ni calque, ni copie. Nous ne pouvons dérouter la guerre par la guerre mais bien par la construction d’un monde de paix, de dignité et de respect. Et c’est cela qui ouvre son chemin, avec des modalités variées, en Amérique Latine et Caraïbe.  Et c’est pour cela que l’offensive ne cessera pas de s’intensifier.

 

 


Bibliographie des citations

Barnett, Thomas 2004 The Pentagone’s new map. War and peacein the twenty-first cntury (New York : G.P. Putman’s Sons)

Ceceña, Ana Esther 2001 ‘“La territorialidad de la dominación. Estados Unidos y América Latina” en Chiapas 12 (México: ERA-Instituto de Investigaciones Económicas)

 

Ceceña, Ana Esther 2006 “Los paradigmas de la militarización en América Latina” en Pensamiento y acción por el socialismo. Rosa Luxemburgo. América Latina en el Siglo XXI (Buenos Aires: FISyP-FRL, http:// www.geopolitica.ws/leer.php/30).

Ceceña, Ana Esther 2011 "Los peligros de la militarización en América Latina”, en La Jiribilla, Año X, 19 de julio, (La Habana).

Ceceña, Ana Esther y Motto, Carlos 2005 Paraguay: eje de la dominación del Cono Sur (Buenos Aires: Observatorio Latinoamericano de Geopolítica)

Ceceña, Ana Esther, Aguilar, Paula y Motto, Carlos 2007 Territorialidad de la dominación. Integración de la Infraestructura Regional Sudamericana (Buenos Aires: Observatorio Latinoamericano de Geopolítica)

Ceceña, Ana Esther, Barrios, David, Yedra, Rodrigo e Inclán, Daniel 2010 El Gran Caribe. Umbral de la geopolítica mundial (Quito: FEDAEPS).

Ceceña, Ana Esther, Yedra, Rodrigo y Barrios, David 2009 El águila despliega sus alas de nuevo. Un Continente bajo amenaza (Quito: FEDAEPS).

Cohen, William 1998 Annual report to the President and the Congress. ( U. S. Department of Defense )

Congreso de la República del Perú 2008 Diario de los Debates, Segunda Legislatura Ordinaria de 2007 - Tomo 2, 21 de mayo (http://www2.congreso.gob.pe/sicr/diariodebates/Publicad.nsf/SesionesPleno/05256D6E0073DFE90525745000747C78/$FILE/SLO-2007-2S.pdf)

Isacson, Adam; Haugaard, Lisa; Poe, Abigail; Kinosian, Sarah y Withers, George 2014 Time to listen: trends in U.S. security assistence to Latin America and the Caribbean (USA: Latin America working group education fund, Center for international policy (CIP), WOLA)

Joint Chiefs of the Staff 1998 Joint vision 2010 (US governmet)

Joint Chiefs of the Staff 2000 Joint vision 2020 (US governmet)

U.S. Department of Defense (DoD) 2013 Defense News (http://www.defensenews.com/article/20130811/DEFREG02/308110001/DoD-Weighs-Major-COCOM-Realignment)
 

Notes

Article publié dans Patria n°1 décembre 2013 (Équateur : Ministère de la Défense Nationale)

Ana Esther Ceceña est Directrice de l’Observatoire Latino-Américain de Géopolitique, Institut d’Investigations Économiques et Professeure de Postgraduat des Études Latino-Américaines de l’Université Nationale Autonome du Mexique. Enquête réalisée dans le cadre du projet Territorialité, mode de vie et bifurcation systèmique (IN301012) anae@unam.mx

Traduction Anne Wolff

Source espagnole :  Rebelion. La dominación de espectro completo sobre América 

 


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29 janvier 2014 3 29 /01 /janvier /2014 04:24

 

https://espanol5pazcurbelo.wikispaces.com/file/view/honduras_transit.JPG/64908596/honduras_transit.JPG

  

Honduras: sous la dictature du cartel nord-américain de la drogue

Par Ollantay Itzamná

26janvier 2014 – Qui croyait que l’incertitude et la désintégration violente  qui culmine au Honduras, accélérée par le coup d’état politico-militaire de 2009 serait résolue au moyen des rituels politiques électoraux se trompait.

Au Honduras, après ce fatidique coup d’état (exécuté avec la complicité silencieuse du gouvernement nord-américain), deux processus électoraux pour le rétablissement de l’institutionnalité démocratique ont été célébrés à présent. Quand bien même le Front National de Résistance Populaire (FNRP) participait au second processus,, quoique pour s’y voir éliminé frauduleusement. Mais loin de la démocratie, la thanatocratie (gouvernement de la mort) règne au Honduras semant la peur sous la consigne : « enfermement ou bannissement ou enterrement pour tout opposant ».

La communauté internationale (CELAC, OEA et UE incluses) et le FNRP, qui s’étaient opposées au rustique autoritarisme de Roberto Michelleti, s’en laissèrent imposer par le sourire idiot de PEPE Lobo, et se relâcha la résistance à la dictature de la mort en vigueur au Honduras[i]. Et, voici les conséquences. La persécution, la terreur et les massacres collectifs font rage dans ce pays habité par une quantité croissante de veuves et d’orphelins réfugiés dans les églises. Un pays dans lequel Madame la Mort est personnifiée par le sournois regard photoshop de Juan Carlos Orlando Hernandez, qui a déjà dicté son verdict final : «Tout opposant doit s’être confessé »

La dictature de la mort et la sanglante désintégration sociale du pays est la conséquence de l’échec de la consolidation de l’état souverain. Et cette condition d’Etat failli est la conséquence à son tour, du triomphe momentané et chaotique de la permanente intervention nord-américaine de « basse intensité »

Le Sud (CELAC, UNASUR, ALBA) n’aurait jamais du se laisser enjôler par l’Empire de la Mort (EU) qui agissait par le malsain sourire de Pepe Lobo. A présent le projet Sud doit être conscient que Juan Orlando Hernandez est le nouveau visage de l’Empire de la Mort désespéré et blessé. Une menace non seulement pour la géopolitique centre-américaine mais aussi pour la CELAC et les projets de Vie émergeants.

Les USA sont le plus grand cartel de la drogue de l’histoire du Honduras.

Le gouvernement des EU ne veut pas perdre son contrôle total du territoire hondurien parce qu’à partir de là se distribue le flux dynamique régional et continental de l’industrie du narcotrafic qui injecte d’immenses quantités de dollars frais dans le critique système bancaire nord-américain.

Sans les dollars du narcotrafic et des bénéfices de l’industrie des armes qui descendent vers le Sud, l’économie yankee se serait écroulée. C’est pour cela qu’à présent le gouvernement étasunien s’est pratiquement converti dans le cartel de la drogue le plus étendu et terrorisant du Honduras, qui n’admet aucune concurrence et encore moins d’opposition. Les cartels de Sinaloa et les Zetas, qui avant se partageaient comme un fromage le territoire hondurien[ii], à présent semblent se retrouver sous contrôle de ce cartel majeur.


 « Ici le combat n’est ni pour la démocratie, ni contre le communisme. Il est pour le contrôle total du territoire stratégique hondurien afin que l’industrie narco-militaire, libre d’obstacles continue d’injecter des devises fraîches dans le fragile système financier yankee ». 

 

Diluer l’état, effrayer la coopération internationale et les ONG européennes et canadiennes et châtier par des assassinats sélectifs les activistes de la résistance à un but. A présent, sur ce territoire chaotique et sanglant, le cartel nord-américain contrôle la quasi-totalité des églises (évangéliques et catholiques), il n’existe plus de coopération internationale significative autre que celle de l’USAID, sur tout le territoire national, le système électoral et judiciaire est également contrôlé par ce cartel. Ce qui c’est produit avec les dernières élections frauduleuses et la subséquente alliance des deux partis traditionnels pour maintenir une apparence de gouvernement au Honduras est une évidence de plus de cette stratégie narco-criminelle de l’Empire de la mort.

Si vous avez des doutes au sujet de cette perversité, et de la manière dont un Empire en difficulté financières opère, en des points stratégiques, comme un cartel de la drogue, voyez ce qui est arrivé aux naissantes forces antidrogues du Honduras, qui officieusement, sans autorisation de la DEA, se risquèrent à abattre en 2012 une narco-avionnette qui se dirigeait vers le Nord,. Face à cette action déloyale, le gouvernement nord-américain retira son radar antidrogue, installé dans la partie nord-orientale du Honduras et laissa aveugle les restreintes Forces Aériennes du Honduras (FAH)[iii], et alla jusqu’à ordonner de destituer le chef de la FAH. Au Honduras, les narco-militaires récupèrent las narco-avionnettes confisquées pour continuer leurs opérations[iv].

Jusqu’à il y a peu, les cartels de l’industrie du narcotrafic opéraient avec une discipline et un “ordre” moyen. Sans générer un grand chaos sanglant sur le territoire. Amicaux et paternalistes avec les habitants (construisant des écoles, des églises et des centres de santé, payant des professeurs, des pasteurs, des curés et des médecins). A présent face à la fragmentation et la multiplication des cartels, ils se battent entre eux violemment pour le contrôle du territoire. Ils recoururent à l’industrie de la séquestration et à des sicaires. Ils imposent des impôts élevés aux différentes activités économiques locales. Ils utilisent jusqu’à la mystique et la spiritualité religieuse pour soumettre et se légitimer dans les communautés. Michoacán, Mexique manifeste cette évolution de la narco-industrie fragmentaire[v].

Comment opère le cartel nord-américain au Honduras ?

Mais le cartel nord-américain agit au Honduras d’une manière inédite, imposant ses acolytes comme gouvernants nationaux. Il définit les lois nationales par l’intermédiaire de ses gestionnaires au Congrès National. Il finance et promeut la croissance des églises avec pour finalité le contrôle de l’esprit et de la morale des honduriens. Monopolise les œuvres de charité internationales par l’intermédiaire de l’USAID. Remet le peu qui reste de bien commun du pays à ses subalternes serviles agglutinés dans le Conseils Hondurien de l’Entreprise Privée (COHEP), hommes de paille de consortium multinationaux. Tout cela avec pour finalité de tenir assuré le contrôle absolu et direct du stratégique territoire hondurien, inégalable piste d’atterrissage et de redistribution de l’inimaginable quantité de chargement qui file vers le Nord et les armes qui descendent vers le Sud.

Le peuple hondurien et la communauté internationale solidaire, doivent prendre conscience de cette mutation caméléonesque de l’Empire de la Mort. Ici la lutte ne se mène pas pour la démocratie, ni contre le communisme. Elle est menée pour le contrôle total du territoire stratégique hondurien par l’industrie narco-militaire, afin que libérée des obstacles, elle puisse continuer à injecter des devises fraîches au fragile système financier yankee. Pour cela, tout mouvement social et politique qui pose la refondation de l’Etat du Honduras est condamné à être annihilé.

A présent plus que jamais, il est clair que la lutte antidrogue nord-américaine a pour objectif de convertir le gouvernement nord-américain en cartel de la drogue le plus grand de l’histoire. C’est pour cela que les yankees ne gagneront jamais aucune guerre contre la drogue dans aucun recoin de la planète.

 

 

Traduction Anne Wolff

 Source en espagnol

Honduras: bajo la dictadura del cartel norteamericano de la droga

Ollantay Itzamná

Rebelión

Les notes de renvoi apportant des informations importantes pour comprendre les propos de l'auteur, je vous propose des traductions libres et résumées des articles auxquelles elles se réfèrent.



[i]2 juin 2011, l’OEA réincorpore le Honduras sans exiger l’accomplissement d’élémentaires principes de justice.

Nous ne pouvons ressusciter les morts, mais nous exigeons l’emprisonnement pour ceux qui ont établit le régime de terreur du Coup d’état.

Face à cette situation les honduriens s’interrogent. Est-ce que même l’indignation de l’OEA après un coup d’état dont les auteurs ont assassiné et torturés plus de 200 personnes était feinte ?

Est-ce que ce sont des anges venus du ciel qui ont assassinés 12 journalistes sociaux sous le régime actuel ? Où sont les auteurs intellectuels et matériel du coup d’état  ? Quelle peine de prison purge Roberto Micheletti Bain, les magistrats de la Cour Suprême de Justice, les militaires et les congressistes qui ont destitué le président, utilisant jusqu’à une signature de renoncement falsifiée ?

Les auteurs du coup d’état furent récompensés

Roberto Micheletti Bain : décoré comme héros national par son complice le Cardinal Oscar Andrés Rodriguez, dans le sanctuaire de la Vierge de Suyapa en 2010. Quelque mois plus tard il fut dénoncé pour vol d’énergie électrique et pour ne pas rétribuer les services d’eau de ses entreprises. Il est actuellement un des principaux chantres de la méthode des coups d’états pour domestiquer les gouvernements progressistes de la région. N’est-il pas un archétype de Frankenstein pour la région ?

De même, les Magistrats de la Cour suprême qui ont galvanisé le coup d’état, les politiques qui l’ont légalisé sont toujours en place. Les premiers envoient les dissidents en prison, expulsent de leur fonction les juges qui manifestent leur désaccord. Et ce après leur fiction de jugement de destitution de Manuel Zelaya ! Les politiques eux, continuent a ratifier des lois perverses favorables aux entreprises privées avec pour finalité un transfert rapide des richesses du pays, de ses ressources naturelles. L’eau a été privatisée par la Loi de l’Eau, des concessions ont dépouillé le pays de sa souveraineté sur des rivières, plages, sols, bois remis entre des mains privées. Cela ne sont-ils pas de délits de lèse-humanité ?

Des lois ont été négociées comme les Plan Nation et Vision du Pays qui auront cours jusqu’à 2038, planification du transfert de la souveraineté nationale aux mains d’intérêts privés.. La loi d’Investissement public/privé qui favorise les entreprises. La loi Antiterroriste criminalise la protestation sociale. La loi de la Promotion de l’Emploi Horaire (<qui enterre les journées de 8 heures). Après avoir introduit les Cités Modèles, la Loi des Mines fut négociée en un quart d’heure derrière le dos du peuple. C’est cela la démocratie pour l’OEA ?

Le Géneral Romeo Vásquez V, auteur matériel et intellectuel du coup d’état fut récompensé par la charge de gérant général de l’entreprise nationale de télécommunication, Hondutel. Les militaires qui réalisèrent le coup d’état ont reçu en récompense la Marine Marchande et les Migrations. Osario qui dirigea l’enlèvement de Zelaya est le chef des Forces Armées du Honduras.

La persécutions suivies de torture et d’assassinat sont en vigueur sous les régime actuel. Toutes les 43 minutes une personne meure sous des tirs à balles.

C’est dans ce contexte que dans son ultime résolution l’OEA non seulement a légitimé les auteurs du Golpe, mais à justifié le retour de plus d’un siècle de massacre des droits humains au Honduras et la pratique du coup d’état dans l’Amérique Latine du 21ème siècle ! Les gouvernements du continent qui ont permis cela creusent leur propre tombe ! (et celle de leurs successeurs).

(1) http://www.rebelion.org/noticia.php?id=129607

 

[ii]

 

Les narcotrafiquants des 2 organisations opèrent depuis des années dans ce pays, où ils appuient économiquement les campagnes électorales.

Le Honduras est la principale plaque-tournante de la drogue en Amérique Centrale. 80% du trafic de cocaïne y transite, les Zetas et le cartel de Sinaloa se disputant le contrôle du territoire.

Depuis 2010, l’organisation dirigée par Joaquin « El Chapo » Guzman (Alors déclaré ennemi n°1 au Mexique NdT) opère depuis Olancho et les villages proches du Golfe de Fonseca. Ce cartel qui est considéré comme le plus puissant du Mexique a appuyé les candidatures des maires des départements de Copán, Santa Barbara, et Cortés.

Selon un rapport du Département d’Etat US, les narcotrafiquants mexicains profitent de la faiblesse des infrastructures pour introduire par air et mer la drogue, principalement dans le secteur de La Mosquita et du Littoral Atlantique.

Le Honduras étant une première escale pour 87% des avionnettes qui transportent la cocaïne depuis le Sud. 

Et bien que le Mexique conserve la majeure partie de l’attention de la guerre du narcotrafic,le Honduras connait le taux d’homicide les plus élevés au monde, 82 pour chaque 100 000 habitants.

 Les Zetas ne sont pas le seul cartel à opérer sur le territoire du Honduras, on y retrouvent divers cartels mexicains qui entretiennent des relations avec le crime organisé local., ainsi que des cartels d’origine colombienne.

Un Hondurien José Miguel Handal Perez a été identifié comme le chef d’une des organisations de narcos ayant son siège au Honduras. Il serait responsable de la coordination et de la distribution des envois de drogues qui seront ensuite redistribués par les Zetas et le Cartel de Sinaloa. Seraient également impliqués sa femme, son père et plusieurs de ses entreprises toutes situées à San Pedro Sula.

 http://www.24-horas.mx/chapos-y-zetas-se-disputan-honduras/

 

[iii] Les EU confirment avoir confisqué un radar au Honduras. (08-09-12)

Les pièces du radar seront transportées aux EU privant laissant les militaires honduriens de Puerto Lempira démunis devant les narcos dont ils ne pourront plus repérer les avionnettes. Ces derniers n’y comprennent rien. Ils devront à présent se fier aux informations venues de Miami pour les avions en provenance des EU par contre ils n’auront plus aucun moyen d’information sur les mouvements en provenance du Sud.

Cette mesure fait suite à l’initiative des militaires d’abattre deux avions suspects de transporter de la drogue en violation des accords avec les EU. Cet accord interdit de dérouter des avions civils.  Les militaires étasuniens menaient une opération anti-narco conjointe avec les honduriens depuis la mi-juin. Mais lorsque les avionnettes en question furent détournées, aucun agent de la DEA n’était présent. A la suite de cet événement le commandant des Forces Armées du Honduras fut destitué, mais les EU nient toute intervention dans ce renvoi. « Nous ne nous ingérons pas dans les affaires internes d’autres pays »(sic) affirme leur représentant.

Le président de la cour suprême lui dit qu’une enquête a été menée concernant la violation d’un traité international bilatéral, la mise en déroute d’une avionnette par une autorité nationale qui ne respecta pas le protocole de combat contre le narcotrafic.

http://www.laprensa.hn/honduras/tegucigalpa/327797-98/estados-unidos-confirma-que-se-llev%C3%B3-radar-de-honduras

 

[v] Terra Caliente : clés pour une lecture anthropologique

Claudio Lomnitz

Première clé : Une tension récurrente entre des formes sociales inspirées de l’ordre militaires  et d’autres qui s’enracinent dans l’ordre familial ou communautaire.

Après le déploiement de l’armée dans la région en 2006, la Tierra Caliente fut dominée de manière informelle d’abord par les Zetas et ensuite par La Familia et depuis par les Caballeros Templarios.

Aujourd’hui la reconquête du territoire est récupérée ou revendiqué d’une part par les sites défenses communautaires et de l’autre par l’Armée fédérale.

La séquence Zeta-Familia-Caballeros Templarios-défense communautaires suggère une spirale récurrente entre stratégie de contrôle informelle inspirée par le modèle de l’armée, celui d’une structure de commandement vertical, rationnel et séparé de la société face à des stratégies fondées dans le modèle familial et de la communauté, un ordre fondé sur la complémentarité – hommes et femmes, pères et fils, peuple églises et fidèles en opposition avec l’ordre estatal, bureaucratique et  militaire qui est alors représenté comme une force déprédatrice venue de l’intérieur.

Explications. Les Zetas sont une organisation qui est née comme une scission de l’Armée et qui selon ce que disent certains experts, s’est organisée selon une chaîne de commandement et des stratégies quasi-militaire. Cette stratégie a commencé par réduire l’ennemi en miette de forme visible et publique et de cette manière semer la peur nécessaire pour pouvoir opérer en pleine impunité. C’est ce qui c’est produit en Tierra Caliente.

Les points faibles de cette stratégie ont été démontrés à de multiples reprises depuis le combat contre Zapata jusque dans les actions des armées US dans les campagnes vietnamiennes. La peur génère des abus en tous genres – et pas seulement de la part des organismes militaire ou paramilitaires) qui entraînent à leur tour un problème de gouvernement. N’importe qui utilisant cette peur peut alors se faire passer pour Zetas afin de commettre des méfaits, vols ou viols, prise de contrôle d’un village, d’un quartier….

Cela génère un mécontentement grandissant et diffus. Les Zetas ont pu dominer la Tierra Caliente, pas la gouverner. Surgit alors une seconde organisation ; La Familia michoacanne qui noua des alliances avec les communautés afin de chasser les Zetas de la région. Cette expulsion fut le fruit d’une organisation financée à la fois par le narcotrafic et par le « commerce de la protection » mais qui s’identifiât avant tout comme « locale » : La Familia michoacanne.

Le problème qui va se développer à partir de la prise de pouvoir de La Familia, c’est que la famille comme modèle peut être une forme d’organisation aussi abusive que l’armée. D’une manière ou d’une autre, La Familia comme les Zetas sont des organisations armées qui ont pour but le lucre. De la famille nous retrouvons les fondements patriarcaux mais ce modèle exponentialise le manque d’affections réelles à l’intérieur de l’ordre et pratique l’usage des armes comme instrument de domination. Ainsi La Familia favorisa les uns, châtiant les autres comme des pères arbitraires, ils violèrent les femmes de la communauté comme des pères abusifs, réveillant à nouveau l’indignation dans l’ordre familial et communautaire local.

C’est dans ce contexte que firent leur apparition les Caballeros Templarios adoptant un symbole qui n’est pas directement de l’ordre familial mais bien plutôt de l’ordre moral. Il faut se rappeler que ceci se produisit dans une région chrétienne. Ainsi la nouvelle organisation narco-locale pris pour bannière la foi chrétienne face à une Famille qui avait violé la normativité des peuples. En résumé, le désordre produit par une invasion militaire (de l’Armée fédérale) et par une invasion quasi-militaire (des Zetas) a généré tout d’abord une organisation armée liée à l’ordre communautaire (La Familia) dont les abus furent mis à profit par une troisième organisation qui se présente comme rédemptrice de l’ordre moral (Los Caballeros Templarios)

C’est alors que surgit un troisième mouvement communautaire local contre les abus, violations et assassinat par les Caballeros : les défenses communautaires. Leur mouvement a été tellement ample et étendu, qu’il a entraîné l’intervention des militaires obligés de négocier pour reprendre le contrôle de la région. Et c’est là que nous en sommes.

La tension entre un ordre fondé sur l’image du pouvoir rationnel-bureaucratique (dont l’Armée est le symbole le plus pur) et un ordre fondé sur le modèle du pouvoir communautaire (qui a pour symbole la famille et la religion) semble refléter non seulement la contamination de l’Etat par le narcotrafic, mais aussi la dissolution de la famille et le démembrement des liens communautaires.

Il semble donc que le travail de reconstruction de cette région michoacanne passe non seulement par une organisation plus effective et plus juste de l’état, ce qui a été amplement commenté, mais aussi par une recomposition des relations communautaires. Ce qui va nécessiter un large mouvement social de recomposition et de réintégration qui pourrait commencer par une recomposition de la signification des liens d’amitié.

Les mafias abusent non seulement de l’image de la communauté (la famille, la communauté religieuse) mais aussi plus spécialement de l’image de l’amitié des membres de l’organisation qui se voient comme des égaux, comme des amis. Mais comme l’expliquait déjà Cicéron, un ami ne doit jamais demander une faveur déshonorante parce que cela viole l’essence même de l’amitié. Assassiner, violer, capturer, pratiquer l’extorsion sont des activités qui n’ont rien d’honorable. Les amis qui demandent de telles faveurs ne sont pas des amis mais des complices. La complicité qui naît ainsi est une union d’intérêt et les jeunes qui qui s’abandonnent à cette relation d’intérêt n’ont d’autre avenir que l’ignominie.

Il faut donc qu’un large mouvement culturel qui commence par la recomposition des liens de l’amitié. Seul un ami digne pourra être un jour un époux digne, un père digne, un membre digne de sa communauté.

La Jornada: Tierra Caliente: lectura en clave antropológica

 

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28 décembre 2013 6 28 /12 /décembre /2013 23:03

 


 

 

Congrès international sur les peuples indigènes d’Amérique latine, sans indigène 

Ollantay Itzamna

 

Dans la ville hospitalière de Oaxaca, du 28 au 31 octobre, près de 1600 académiciens et chercheurs indigénistes, en provenance de plus de 10 pays d’Amérique et d’Europe, se sont réunis pour assister au premier congrès international intitulé : « Les peuples indigènes d’Amérique latine, du XIXe au XXIe  siècles, avancés, perspectives et défis. » L’événement était organisé par le Centre d’investigation et d’Études supérieures en anthropologie sociale (CIESAS) de Mexico, avec une vingtaine d’autres institutions académiques et culturelles coorganisatrices. Les spécialistes des enjeux indigènes en Amérique latine, organisés en 156 symposium ont présenté et ont débattu sur les avancés de leurs recherches sur des thèmes tels que : Théorie y curriculum d’éducation interculturelle, dé-colonialisme, et épistémologies du Sud, migrations internes et internationales d’indigènes, agenda des peuples indigènes, terre-territoire-eau-forêts, État y citoyenneté des peuples indigènes, droits collectifs et gouvernements néo - extractivistes, etc.

 


 Vendeurs instalés devant la poste de Oaxaca de Juarez, Mexique

Les indigènes au Mexique

Au XVIe siècle, les européens ne purent cacher leur étonnement devant la quantité de peuples organisés , vivant dans des villes sur ces terres. La qualité humaine, et le contenu intellectuel et spirituel de ces civilisations étaient d’une qualité supérieure à celles habitées par le dieu du métal. Mais l’avarice fit que les visiteurs barbus attaquèrent leurs hôtes hospitaliers. Ils nièrent la condition humaine aux aborigènes pour s’approprier leurs biens et les convertir en esclaves.

Aux XVIe et XVIIe siècles, la Couronne espagnole organisa une infinité de peuples indigènes sur leurs terres communales respectives dans le but de les maintenir réunis pour leur charger l’impôt royal et avoir sous la main une main-d’œuvre indigène pour les nouveaux propriétaires terriens et miniers. Au commencement du XIXe siècle, avec la supposée indépendance menée par les prêtres Hidalgo et Morelos, l’esclavage indigène fut juridiquement aboli, mais le Mexique indépendant continua de bénéficier des biens et de la sueur des indigènes.

Au début du XX siècle, en 1910, Emiliano Zapata et Pancho Villa, lancèrent l’emblématique Révolution libérale mexicaine avec la promesse de moderniser le pays. Pour cela, la révolution dépeça les terres communales indigènes et les transféra, sous des titres individuels, à l’insipide bourgeoisie mexicaine. Convertissant les indigènes en « mexicains » sans terre, et surtout, en «prolétaires ruraux ».

L’argument fut : « La propriété privée est la base de l’investissement et le progrès. Les indiens sur des terres communales sont un obstacle au développement. » Ainsi, leur enlevèrent-ils non seulement leurs terres, mais aussi les sources hydriques et les forêts.

 

Dans ce contexte apparaît José Vasconcelos, pédagogue des libéraux pour construire la nation mexicaine, avec son projet d’éduquer (hispaniser et acculturer) les indigènes pour les inclure dans la nation mexicaine. C’est-à-dire : « Tuer culturellement l’indigène, tout en le préservant biologiquement parce que le Mexique officiel a besoin de sa force de travail. » Dans la dernière décennie du XXe siècle, les « célébrations » du cinquième centenaire de l’invasion européenne ainsi que le soulèvement zapatiste, montrèrent à la face du monde que les peuples indigènes étaient au Mexique sans être mexicains et que le projet de la nation et de l’État mexicain, sans indigène, avait échoué.

 

 

 

Un congrès international sur les peuples indigènes sans indigène

 

Actuellement, sur les 112 millions d’habitants que compte le Mexique, plus de 10% sont de culture indigène et parlent une langue indigène, répartis en 65 nations. Dans le seul État de Oaxaca, l’un des trois États les plus indigènes du pays, vivent 18 peuples qui, dans leur ensemble, représentent 34% de la population totale de cet État.  La ville accueillante et pittoresque d’Oaxaca n’affiche pas la palette polychrome culturellemixtequesoaxacamab1.jpg des villes du Guatemala, mais les visages, contextes et couleur des corps, indiquent que la ville est dynamisée par le sang zapotèque, population indigène majoritaire de cet État. Mais, même à cela, les Zapotèque ne furent pas invités au premier Congrès international sur les peuples indigènes d’Amérique latine réalisé à l’Institut culturel d’Oaxaca, et financé par des centres de recherches subventionnés par l’État mexicain.

Pourquoi ? N’y a-t-il pas de chercheurs ou d’académiciens indigènes en Amérique latine ? Pur racisme académique ? Gène des chercheurs autochtones de s’identifier comme tel ? Ou serait-ce que Vasconcelos continue d’être présent dans l’éducation « interculturelle » mexicaine et latino-américaine ?   

 

Indigénisme académique en plein XXIe siècle

Comme pour les libéraux, disciples de Comte, de Kant, de Darwin, etc., il était impossible d’être un pays progressiste en acceptant des autochtones comme des citoyens à part entière. Ainsi, également, l’académie métisse (porteuse d’une seule et unique civilisation), assume qu’ontologiquement il est impossible d’être indigène et académicien en même temps. Pour être académicien ou chercheur qualifié (selon les catégories occidentales) l’indigène doit vendre son âme, amputer sa langue et tuer sa logique symbolique rituelle. C’est ce que démontre le système d’éducation latino-américain qui demeure indigéno-phobique et latinisant (assimilation à la culture européenne).

Nous, peuples indigènes sommes assez anciens pour accéder à l’âge de la majorité et parler pour nous-mêmes. Nous savons qui nous sommes, ce que nous voulons et ce que nous refusons. Nous ne sommes plus de simples « informateurs » pour le travail des académies occidentalisantes. Le métisse, comme catégorie de compréhension occidentale, jamais ne pourra comprendre le monde, les aspirations et les processus des peuples indigènes. L’Occident est linéaire, rapide, violent et exclusif. Nous Nous sommes cycliques, pausés, cordiaux et inclusifs.

J’ai entendu, au Congrès international, des critiques sévères contre les processus de changement des pays andins comme s’il s’agissait de gouvernements

antipopulaires européens actuels, mais les temps des révolutions occidentales ne sont pas les temps des révolutions ou pachakutis andins. Pour étudier et comprendre cela, il est nécessaire d’avoir des catégories d’analyse et de compréhension indo-latino-américain. Comment faire entendre ceci aux académiciens figés dans leurs catégories métisses qui se méfient de l’indigène ?

Le jour où l’académie officielle latino-américaine reconnaîtra en pratique la coexistence des épistémologies et connaissances des peuples indigènes, commencera la libération de celle-ci, car elle demeure prisonnière de son discours multi-culturaliste, en s’efforçant de s’européaniser, alors que l’Europe des lumières n’est plus. Nous, peuples indigènes, fils et filles de la Terre-Mère, frères et sœurs dans le pluri-nivers, nous n’avons pas besoin d’indigénistes, ni de tutelles. Nous avons besoin de complices, d’activistes réflexifs et de penseurs accompagnateurs qui marchent sur le chemin poussiéreux, au-delà de l’asphalte.

 

 

Traduit par Yves Carrier depuis Rebelión

Source : FDC-2013-12.pub - FDC-2013-12.pdf 

 

Source L' 'autre guerre' contre les indigènes de Oaxaca

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28 décembre 2013 6 28 /12 /décembre /2013 12:38

 

Un article plus ancien mais qui élucide différents sujets très actuels, mettant en scène tout à la fois des figures clés du régime espagnol, le roi coopté par Franco ou Aznar, membre éminent de la transnationale fasciste qui complote en permanence pour déstabiliser les gouvernements rebelles à la néo colonisation de l’Amérique Latine et en renverser certains, celui de Zelaya au Honduras, celui de Lugo au Paraguay. Un moment de l’histoire qui montre tout à la fois le racisme ouvertement manifesté du roi, mais aussi le soutien donné à son comportement tant par le « socialiste » espagnol Zapatero qu’implicitement par la présidente « socialiste » et latino-américaine de la séance qui brille par son absence de réaction face à l’inadmissible grossièreté du roi. Or cette présidente n’est autre que Michelle Bachelet qui vient d’être réélue avec un flagrant manque d’enthousiasme de la part des électeurs dont seul 40% se sont donné la peine de participer au scrutin.

Le roi d’Espagne dont les frasques dépensières avec l’argent d’un peuple qui subit une crise qui réduit des millions d’espagnols à la misère font scandale et défraient la chronique et Michelle Bachelet, présidente réélue « faute de mieux » sont des acteurs de la géopolitique contemporaine dont l’incident du Sommet Ibéro-Américain de 2007 par la grossièreté de l’un et le silence de l’autre  démasquent le vrai visage : des collaborateurs à part entière de la recolonisation méprisante des peuples de l’Amérique Latine par les puissances occidentales au service du Corporatisme Marchand.

Les acteurs sont en scène, le spectacle continue, mais n'oublions pas celui qui reste omniprésent :


L’occasion aussi d’honorer la mémoire de l’Hugo Chavez.


CHAVEZ VIVE, LA LUCHA SIGUE !

Hugo Chávez, José Luis Rodriguez Zapatero et le roi d’Espagne

 

 

Le XVIIe Sommet ibéro-américain qui s’est déroulé au Chili du 8 au 10 novembre 2007 a été l’objet d’un intense débat qui a opposé l’Amérique latine à l’Europe et à l’Espagne en particulier. Un incident survenu entre le président vénézuelien Hugo Chávez d’un côté et José Luis Rodríguez Zapatero, premier ministre espagnol, et le roi Juan Carlos de l’autre a eu une ample répercussion médiatique internationale. Néanmoins, la presse occidentale a pris un soin tout particulier à se focaliser uniquement sur la violente et peu courtoise réaction du roi d’Espagne, sans aborder les questions de fond qui ont débouché sur le vif échange.

 

 

Plusieurs dignitaires latino-américains tels qu’Evo Morales de Bolivie, Carlos Lage de Cuba, Daniel Ortega du Nicaragua et Chávez ont appelé à l’instauration d’un nouveau modèle économique alternatif au néolibéralisme sauvage qui ravage le continent depuis les années 1980. La privatisation des ressources naturelles et des entreprises latino-américaines, qui ont entraîné la ruine de nombreuses économies et plongé dans un désarroi social sans précédent les populations, ont uniquement profité aux élites locales et aux multinationales étrangères. « Les services de base comme l’eau potable, les systèmes d’assainissement, les télécommunications ou l’énergie ne doivent pas continuer à appartenir au domaine privé », a déclaré Morales (1).

Ces propos n’ont guère été du goût du président du gouvernement espagnol Zapatero qui a rétorqué que les nationalisations n’étaient pas « une fin en soi » et il en a profité pour signaler « l’énorme responsabilité » de l’Amérique latine dans son retard actuel, éludant complètement la réalité de la sanglante conquête espagnole. Zapatero était surtout désireux de protéger les intérêts des multinationales espagnoles présentes sur le continent. Pour sa part, le vice-président du Conseil d’Etat cubain Carlos Lage a mis en évidence « la contradiction entre la nécessité des changements et les intérêts des multinationales (2) ».

Répliquant à Zapatero, le président Chávez a mis en garde contre la tentation facile de minimiser les « facteurs externes » qui expliquent le marasme dans lequel se trouve l’Amérique latine. « Voyons notre histoire, pas celle d’il y a deux cents ans mais l’histoire plus récente » en référence au coup d’Etat organisé par la CIA contre Salvador Allende en 1973. « Un président avec un programme démocratique et pacifique » avait été renversé, instaurant l’une des dictatures les plus cruelles du continent (3).

Le président vénézuélien a rappelé également que José María Aznar, ancien premier ministre espagnol, avait soutenu le coup d’Etat orchestré contre lui en avril 2002 et qu’il parcourt actuellement le monde en menant une campagne de diabolisation à son encontre. Il a qualifié l’héritier de l’idéologie franquiste dont le mentor était Manuel Fraga – ancien ministre du dictateur Franco et membre de la Phalange espagnole –, celui qui avait ouvertement soutenu la dictature éphémère de Pedro Carmona en 2002 et qui participé à la sanglante l’invasion de l’Irak de « fasciste (4) ».

Contre toute attente, Zapatero a pris la défense d’Aznar en arguant que ce dernier avait été élu par les Espagnols et qu’il méritait un peu de respect. Répondant du tac au tac, Chávez a opportunément fait remarquer le premier ministre espagnol qu’Aznar n’avait guère été un modèle de courtoisie à son égard et que cela n’avait jamais suscité aucune réaction de la part de l’Espagne. « J’ai le droit de défendre la dignité du Venezuela », a-t-il ajouté (5).

Mais apparemment, toutes les vérités ne sont pas bonnes à dire. C’en fut trop pour le roi d’Espagne qui, perdant sa sérénité légendaire, s’est adressé au président vénézuélien de manière virulente et particulièrement offensante. « Toi ! […] Pourquoi tu ne la boucles pas ? », s’est-il exclamé en le pointant du doigt de façon peu amicale, plongeant les 22 pays participants dans la surprise la plus totale (6).

Loin de répondre à l’attitude irrespectueuse du monarque espagnol, Chávez s’est contenté de citer José Gervasio Artigas, héros des guerres d’indépendance latino-américaines contre l’Empire espagnol : « ‘Avec la vérité, je n’offense personne ni ne crains personne’. Le gouvernement du Venezuela se réserve le droit de répondre à n’importe quelle agression dans n’importe quel endroit […] et sur le ton qui lui semblera (7) ».


José Gervasio Artigas

Le parti socialiste espagnol (PSOE) a tenu à apporter son soutien au roi. « L’Espagne veut maintenir de bonnes relations avec les pays latino-américains, mais ne tolèrera pas le manque de respect à ses citoyens, et encore moins à quelqu’un d’éminent comme Aznar », a déclaré Diego López Garrido, porte-parole du PSOE au Parlement. Pour sa part, le ministre de l’Intérieur espagnol Alfredo Pérez Rubalcaba a averti que si Chávez souhaitait maintenir de bons rapports avec la péninsule ibérique, il devait « respecter notre roi, notre président et nos ex-présidents ». Même le ministre des Affaires étrangères chilien s’est rangé du côté de l’Espagne, regrettant « le style » de Chávez. Le Parti Populaire espagnol (PP) dont est issu Aznar a invité le gouvernement à prendre des mesures face aux « gravissimes accusations » lancées par le président vénézuelien (8).

Cependant, l’indignation du gouvernement espagnol, du roi, du parti socialiste, du parti populaire et du Chili suite aux propos du président vénézuelien est à géométrie variable et quelque hypocrite. En effet, Aznar s’en est pris à plusieurs reprises à Chavez et à son gouvernement qu’il a successivement qualifiés de « dictateur », « de caudillisme populiste », de « tyrannie », de « nouvelle espèce totalitaire », de « régime autoritaire », de « régime totalitaire », de « retour au nazisme », de « très grand danger pour la démocratie en Amérique », de « démagogie bon marché », d’« effet de contagion dangereux », d’« indigénisme raciste », d’« adversaire de la liberté qui désormais se drape en populiste », a mis en garde contre « l’élimination des libertés de base comme celle d’expression » et a conclu que « les mauvaises idées produisent Hugo Chávez (9) ».

Ces propos n’ont jamais suscité la réprobation de Juan Carlos, de Zapatero, du Chili ou du PSOE. Quant aux « graves accusations » évoquées par le PP, qui prétend ignorer le soutien d’Aznar au putsch de 2002, une source incontestable – la déclaration de l’actuel ministre des Affaires étrangères espagnol Miguel Ángel Moratinos qui a eu accès aux archives non déclassifiées du ministère des Affaires étrangères espagnol – permet de jeter une lumière sur cette question. Lors de sa comparution devant la Commission des Affaires étrangères du Congrès le 1er décembre 2004, Moratinos s’était exprimé avec clarté : « Mes affirmations ont été 1. qu’il y a eu un coup d’Etat au Venezuela ; 2. que l’ambassadeur espagnol a reçu des instructions du gouvernement espagnol ; 3. que l’objectif de ces instructions, ou mieux encore, pour éviter les procès d’intention, que l’effet de l’exécution de ces instructions et d’autres agissements a été de soutenir le coup d’Etat […]. Mes propos doivent être compris dans le sens où par soutenir je veux dire qu’il n’a pas condamné le coup d’Etat, qu’il l’a endossé et qu’il lui a offert une légitimité internationale (10) ». On ne saurait être plus clair.

En réalité, le président vénézuélien n’a fait que répliquer aux innombrables attaques verbales émanant de l’ancien premier ministre espagnol. L’irritation de Zapatero et la colère du roi d’Espagne ont suscité une grande incompréhension. Interrogé par la presse suite à l’incident, Chávez a avoué ne pas s’être rendu compte de l’ire du roi : « Je ne sais même pas ce qu’il a dit, j’étais en train de défendre la dignité de millions de personnes », ajoutant « qu’aucun chef d’Etat n’a le droit d’en faire taire un autre ». « La vérité, je la dis en face et avec respect (11) ». Il a exprimé sa surprise face à « la furie de sa majesté, un homme pourtant mûr ». « Je ne faisais que parler d’histoire universelle », a-t-il souligné en allusion à la conquête espagnole (12).

Le vice-président vénézuelien Jorge Rodríguez n’a guère apprécié l’invective de Juan Carlos à l’égard de Chávez et a rappelé que son pays était indépendant depuis la victoire de Carabobo. « Monsieur Juan Carlos peut traiter ses sujets de cette manière s’ils le permettent », a-t-il déclaré en regrettant le ton insultant utilisé par le monarque (13). « Quand le roi explose face aux expressions d’un indien, ce sont 500 ans d’arrogance impériale qui explosent […], 500 ans de sentiment de supériorité », a rappelé Chávez (14).

Le président Chávez a également rejeté les propos de Zapatero qui a justifié sa défense d’Aznar par le fait que ce dernier avait été élu par les Espagnols. « Hitler a également été élu, non ? Cela veut donc dire que personne ne peut s’en prendre à Hitler non plus ? C’est absurde ». « Quand je dis qu’Aznar, ancien président espagnol, est un fasciste, c’est une grande vérité », a-t-il dit, rappelant que ce dernier était responsable du génocide iraquien. Il a annoncé une révision complète des « relations politiques, diplomatiques et économiques » avec l’Espagne (15).

Il a également tenu à souligner qu’il était un chef d’Etat « tout comme le roi, à la différence que j’ai été élu trois fois et lui aucune (16) ». Il a rappelé une réalité que certains en Espagne préfèrent oublier : « Il faut se souvenir de la manière dont il est devenu roi. Le caudillo de Dieu, ainsi appelait-on Francisco Franco, par la grâce de Dieu et pour la disgrâce de l’Espagne, l’a nommé Roi ». En effet, Juan Carlos ne dispose même pas de légitimité monarchique car la norme aurait voulu que son père Juan de Borbón, héritier légal, accède au trône. Mais le dictateur Franco en avait décidé autrement (17).

Pourquoi le fait d’avoir rappelé qu’Aznar avait apporté son soutien au coup d’Etat contre Chávez a-t-il amené le roi d’Espagne à perdre son sang-froid ? « Monsieur le roi, répondez, étiez-vous au courant du coup d’Etat contre le gouvernement du Venezuela, contre le gouvernement démocratique légitime du Venezuela en 2002 ? », a-t-il demandé (18). En effet, en Espagne, ce n’est pas le premier ministre qui dirige la politique étrangère mais le chef de l’Etat, c’est-à-dire le roi Juan Carlos. Selon le Titre II de la Constitution de 1978, « le Roi est le Chef de l’Etat […] [et] assume la plus haute représentation de l’Etat espagnol dans les relations internationales (19) ».

L’ambassadeur espagnol Manuel Viturro de la Torre avait soutenu le coup d’Etat contre Chávez en 2002, et avait offert son soutien politique et diplomatique au dictateur Pedro Carmona. Viturro avait informé Aznar dans un télégramme du 13 avril 2002 qu’il avait été reçu par Carmona (20). « Il est difficile de croire que l’ambassadeur ait soutenu les putschistes, qu’il se soit rendu au Palais [présidentiel], sans l’autorisation de sa majesté », a souligné Chávez. « Je comprends désormais la furie du roi […], c’est pour cela qu’il se met en colère lorsque je dis qu’Aznar est un fasciste. […] Il s’agit du même roi et c’est lui qui dirige la politique étrangère (21) ».

La parole est à Sa Majesté.

Notes 

1 Cuba Información, « Quién fue el responsable del incidente entre Chávez y el Rey de España », 12 novembre 2007. http://www.cubainformacion.tv/index.php?option=com_content&task=view&id=2625&Itemid=86  (site consulté le 13 novembre 2007).

2 Ibid.

3 Ibid.

4 Ibid. ; Agencia Bolivariana de Noticias, « Juzgar la verdad del pasado no tiene por qué ofender a los españoles », 10 novembre 2007 ; Agencia Bolivariana de Noticias, « No puede minimizarse influencia de factores externos en situación latinoamericana », 10 novembre 2007.

5 Cuba Información, « Quién fue el responsable del incidente entre Chávez y el Rey de España », 12 novembre 2007, op. cit.

6 Ibid.

7 Federico Quilodran, « El rey de España manda a callar a Chávez en la Cumbre », Associated Press, 11 novembre 2007.

8 Daniel Woolls, « España : socialistas respaldan al rey en disputa con Chávez », Associated Press, 12 novembre 2007 ; Associated Press, « Canciller chileno se solidariza con España en pugna con Chávez », 12 novembre 2007.

9 Javier Alder, « Aznar respetando a Chávez », Kaos en la red, 11 novembre 2007.

10 Miguel Ángel Moratinos, « Los fax que envió la embajada española en Caracas que muestran el papel del gobierno Aznar en el golpe de Venezuela », Rebelión, 14 novembre 2007.

11 El Nacional, « Rey de España manda a callar a Chávez », 11 novembre 2007.

12 El Nacional, « Hugo Chávez responde : ¿Por qué no se calla usted, rey? », 11 novembre 2007.

13 JMS, « Vicepresidente Rodríguez : El señor Juan Carlos puede tratar así a sus súbditos, si ellos lo permiten », Globovisión, 11 novembre 2007.

14 Agencia Bolivariana de Noticias, « Si yo me callara gritarían las piedras de los pueblos de América », 12 novembre 2007.

15 Federico Quilodran, « El rey de España manda a callar a Chávez en la Cumbre », op. cit. ; Agencia Bolivariana de Noticias, « Chávez señaló que revisa con profundidad las relaciones con España », 14 novembre 2007.

16 Federico Quilodran, « El rey de España manda a callar a Chávez en la Cumbre », op. cit.

17 El Nuevo Herald, « Chávez acusa al rey de prepotente », 14 novembre 2007.

18 JMS, « Presidente Chávez: ¿Sería que el Rey sabía del golpe contra mí? », Globovisión, 11 novembre 2007.

19 Constitution espagnole de 1978, Titre II.

20 Miguel Ángel Moratinos, « Los fax que envió la embajada española en Caracas que muestran el papel del gobierno Aznar en el golpe de Venezuela », op. cit.

21 Paulina Abramovich, « Chávez vincula al rey con golpe del 2002 », Associated Press, 12 novembre 2007 ; El País, « Chávez acusa al Rey de pasividad en la intentona golpista de 2002 », 11 novembre 2007 ; Jorge Marirrodriga, « Chávez reta al Rey a revelar si conocía el golpe de Estado de Caracas en 2002 », El País, 12 novembre 2002.

Salim Lamrani est enseignant, écrivain et journaliste français, spécialiste des relations entre Cuba et les Etats-Unis. Il a notamment publié Washington contre Cuba (Pantin : Le Temps des Cerises, 2005), Cuba face à l’Empire (Genève : Timeli, 2006) et Fidel Castro, Cuba et les Etats-Unis (Pantin : Le Temps des Cerises, 2006).

 

Source :
Hugo Chávez, José Luis Rodriguez Zapatero et le roi d’Espagne | Mondialisation

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  • Amoureuse de la vie, d'une fleur, d'un papillon, d'un arbre, du sourire d'un enfant, je m'oppose à tout ce qui conduit à la destruction systématique de ce que la nature a créé, de la vie, de la beauté du monde, de la tendresse et de la dignité
  • Amoureuse de la vie, d'une fleur, d'un papillon, d'un arbre, du sourire d'un enfant, je m'oppose à tout ce qui conduit à la destruction systématique de ce que la nature a créé, de la vie, de la beauté du monde, de la tendresse et de la dignité

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Nouvelles formes du fascisme

"Le vieux fascisme si actuel et puissant qu’il soit dans beaucoup de pays, n’est pas le nouveau problème actuel. On nous prépare d’autres fascismes. Tout un néo-fascisme s’installe par rapport auquel l’ancien fascisme fait figure de folklore […].

Au lieu d’être une politique et une économie de guerre, le néo-fascisme est une entente mondiale pour la sécurité, pour la gestion d’une « paix » non moins terrible, avec organisation concertée de toutes les petites peurs, de toutes les petites angoisses qui font de nous autant de microfascistes, chargés d’étouffer chaque chose, chaque visage, chaque parole un peu forte, dans sa rue, son quartier, sa salle de cinéma."

 

Gilles Deleuze, février 1977.

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