18 janvier 2014 6 18 /01 /janvier /2014 00:25

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Dans le cadre de l’année de l’agriculture familiale, je vous propose ce texte fondamental pour comprendre le rôle de l’Agenda 21, et la grosse arnaque qu’il constitue, défendant les droits de grandes corporations transnationales au détriment de ceux des peuples qui sont toujours plus résolument incompatibles.

Aujourd’hui le terme capitalisme est en passe de devenir obsolète, la nouvelle phase d’accumulation capitaliste que nous subissons actuellement est un capitalisme par expropriation, qui transforme les quelques proprétaires de ces Corporations en véritables Propriétaires de planète qui substituent la Loi du Marché, une véritable Loi du plus Fort, au droit des états et des peuples, ne laissant plus même le minimum vital à plus d’un milliard de personnes, une sitation qui chaque jour s'aggrave.

 

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Comprendre ce que sont ces Corporations et ce qu’elles font, comment elles s’imposent au détriment des habitants en tous lieux et un préalable à tout engagement « pour sauver la Planète » et le vivant dans sa diversité. L’agenda 21 tel qu’il est présenté au public ne pose pas toutes les cartes sur la table. Un des but de cette année 2014 paysanne sera de mettre en évidence ces cartes cachées – en finir avec une rétention d’information dont le personnel politique se rend complice confisquant le pouvoir - afin que chacun puisse comprendre clairement les enjeux et décider en personne bien informée du choix d’un modèle et de l’avenir qu’il détermine.

Une chose aussi est à garder à l’esprit, une fois que les élus cessent de se comporter en mandataires, personnel politique à votre service et à votre disposition et pratiquent la rétention d’informations se comportant en dirigeants, , ils outrepassent leur mandat et abandonnent les règles de la démocratie pour imposer une dictature de fait. Il est alors nécessaire de les rappeler à l’ordre et à plus d’humilité.

Le but ici est de rendre public un débat dont dépend l'avenir et dont les enjeux nous concernent tous et chacun à part entière. Autrement dit de poser les bases d'une souveraineté populaire articulée sur la Souveraineté Alimentaire qui en est la fondation.

 

ville morte


Mettre fin au contrôle des multinationales sur l'Organisation des Nations unies

Friends of the Earth International, Corporate Europe Observatory, La Via Campesina, Jubilee South/Americas, Paix et Justice en Amérique Latine/SERPAJ-AL, Institut Polaris Institute, Le Conseil des Canadiens, The Transnational Institute, Third World Network, World March of Women

Déclaration conjointe de la société civile

Nous, les organisations signataires, estimons que l'Organisation des Nations Unies (ONU) est actuellement l'institution mondiale la plus démocratique et la plus appropriée pour les négociations internationales. Nous soutenons par conséquent le renforcement des institutions et des processus multilatéraux dans le cadre des Nations Unies, afin de les rendre plus démocratiques et réactifs aux besoins des peuples.

 

 

ancien jardin 

Toutefois, nous sommes fortement préoccupés par l'influence croissante des grandes entreprises et des groupes de pression industriels au sein de l'ONU: à travers leur influence sur les positions prises par les gouvernements nationaux dans les négociations multilatérales, et leur domination au sein de certains organismes et espaces de discussion onusiens. Nous constatons que de plus en plus de politiques de l'ONU ne servent pas nécessairement l'intérêt du public, mais soutiennent plutôt les intérêts commerciaux de certaines entreprises ou certains secteurs d'activité. Le Sommet de la Terre à venir, à Rio en Juin 2012, devrait être l´opportunité de stopper cette tendance, de mettre fin aux partenariats douteux entre l'ONU et les entreprises, et de mettre un terme à l'accès privilégié qui a été accordé au secteur des entreprises -et par conséquent son influence excessive sur d’importants processus multilatéraux et les décisions qui y sont liées.

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Le préambule de la Charte de l'ONU commence par les mots «Nous, peuples des Nations Unies". Aujourd'hui cependant, au sein des institutions et processus onusiens, priorité est de plus en plus souvent faite aux intérêts des entreprises par rapport à ceux des peuples. La prise de contrôle des positions d’États membres clefs par les intérêts des grandes entreprises se traduit par une influence significative de leur part sur les décisions de l'ONU. Sous l’Agenda 21, l’industrie bénéficie du statut de « groupe principal », alors qu’elle ne peut pas être considérée comme faisant partie de la société civile, à cause de sa différence essentielle par rapport à celle-ci. De même, puisque les entreprises ont de beaucoup plus larges ressources pour influencer les négociations à leur disposition que la société civile, elles sont souvent prépondérantes par rapport aux délégations de la société civile. Le lobby des entreprises au sein des négociations onusiennes a réussi à bloquer des solutions pourtant efficaces à des problèmes liés au changement climatique, la production alimentaire, la violation des droits de l'homme, l'approvisionnement en eau, les problèmes de santé, la pauvreté et la déforestation.

 

Fonds d'écran Constructions et architecture Villes - Villages Vue de l'Arc de Triomphe - Paris (France)

 

L'influence énorme des lobbyistes industriels et les déséquilibres de pouvoir qui lui sont liés dans certains espaces de négociation, tels que la CCNUCC, mettent à mal la démocratie et résultent trop souvent dans l’ajournement, l'affaiblissement ou le blocage d´avancées pourtant urgentes en matière de justice sociale et environnementale au niveau international.

La pression en faveur de solutions basées sur des systèmes de marché - pour l'air, la biodiversité, l'eau, les terres et autres biens communs - comme des solutions à la crise environnementale actuelle, illustre la promotion de fausses solutions. De telles solutions servent les intérêts des entreprises - qui profitent des crises affectant des millions de personnes - sans s´attaquer au fond du problème et tout en continuant à renforcerdavantage le contrôle des entreprises sur les terres, les ressources et la vie des populations.


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De nombreuses agences onusiennes, y compris l'UNICEF, le PNUD, l'OMS ou l'UNESCO, se sont engagées dans des partenariats avec des entreprises multinationales. Le PNUE a établi des partenariats avec ExxonMobil, Rio Tinto, Anglo American et Shell, tous impliqués dans des violations des droits humains et la destruction de la biodiversité. On compte, parmi d’autres exemples, Coca-Cola et le PNUD sur la protection des ressources en eau, et BASF et Coca-Cola avec ONU-HABITAT sur l'urbanisation durable. En plus de nuire à la crédibilité de l'ONU, de tels partenariats minent aussi sa capacité et sa volonté à réagir et à réglementer le secteur des entreprises lorsqu’il est impliqué dans la violation des droits sociaux, environnementaux et humains. En outre, le Pacte Mondial des Nations Unies (Global Compact) encourage une «citoyenneté responsable entrepreneuriale», sans pour autant obliger les entreprises à adhérer à des normes internationalement reconnues. Il permet à des violateurs des droits humains notoires de participer et donne la fausse impression que l'ONU et les multinationales partagent les mêmes objectifs. Ainsi, il permet le «Blue-Wash»1 et aide principalement les entreprises à renforcer leur image de marketing et leurs profits, au lieu de promouvoir des mesures contraignantes qui pourraient contribuer au changement de leurs performances. Dans le processus conduisant au Sommet de la Terre ¨Rio +20¨, l'ONU a établi un partenariat avec la Chambre de Commerce Internationale (CCI) et le Conseil Mondial des Entreprises pour le Développement Durable (WBCSD) dans le cadre de l´Action des Entreprises pour un Développement Durable2. L’avant-projet Zéro de la déclaration de Rio +20 renforce le rôle des entreprises en tant que promoteurs de l'économie dite verte, mais il néglige complètement la question de leur rôle dans la genèse des crises financière, climatique, alimentaire entre autres. Cela n’est pas une surprise, étant donné la forte implication de représentants d´entreprises de haut niveau, comme la Deutsche Bank, dans le développement du concept de la dite «économie verte».

 


Fonds d'écran Nature Champs de Fleurs à Samoens

 


Les groupes soussignés sont convaincus que l'ONU doit donner la priorité aux mesures qui servent l'intérêt public et répondent aux multiples crises en cours, plutôt qu’au développement de politiques qui résultent principalement en la création de nouveaux débouchés économiques et profits pour les entreprises.

 

 

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Nous exigeons donc que:

 

  • L'ONU et ses États membres réaffirment que leur principale prérogative est de servir l'intérêt public plutôt que les intérêts du secteur privé. Les processus de prise de décision doivent être révises afin d'assurer un rôle prépondérant à la société civile et de limiter l'influence de l'industrie.
  • L'ONU et les Etats membres doivent résister à la pression exercée par les entreprises pour obtenir une position privilégiée dans les négociations des Nations Unies:

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  1. Les gouvernements doivent cesser de créer de nouveaux organes de discussion et des groupes de haut niveau (et dissoudre ceux qui existent déjà) qui offrent aux entreprises un statut privilégié dans les négociations officielles, comme les "dialogues mexicains" établis parallèlement aux négociations climatiques de Cancun en 2010.
  2. L'ONU et ses Etats membres doivent prendre des mesures résolues pour renforcer la transparence en matière de lobbying et veiller à ce qu'aucun des groupes représentant l’industrie ne bénéficie d´un accès privilégié dans l'élaboration des politiques de l´ONU. Le mécanisme de la Société Civile du Comité des Nations Unies sur la Sécurité Alimentaire Mondiale pourrait être utilisé comme un modèle pour améliorer la participation directe des Organisations de la Société Civile.
  3. Les représentants des entreprises ne doivent pas faire partie des délégations nationales participant aux négociations de l'ONU. 
  4. Le rôle du groupe principal « entreprises et industrie » doit être limité. Puisque l’industrie dispose de ressources beaucoup plus considérables que tous les autres secteurs, une limite devrait être imposée à sa participation ; l’industrie ne devrait pas avoir plus de représentants qu’aucun autre groupe dans les processus de négociations multilatérales.

marché de producteurs

 

  • L'ONU doit divulguer toutes les relations et les liens existants avec le secteur privé.
  • Un code de conduite pour les fonctionnaires de l'ONU, comprenant une "période de mise à l’écart" (cooling-off) pendant laquelle les fonctionnaires ne peuvent pas commencer à travailler pour des groupes de pression ou de lobbying des cabinets de conseil, devrait être introduit.
  • L'ONU ne doit pas s'engager dans de nouveaux partenariats avec des entreprises et autres organisations commerciales, de même qu´elle devrait revoir tous les partenariats similaires existants3.
  • L'ONU, en servant l'intérêt public, doit surveiller les impacts des entreprises sur les populations et l'environnement et établir un cadre juridiquement contraignant pour tenir les compagnies responsables vis-à-vis des lois en matière d'environnement, de droits humains et du travail. Ceci devrait inclure une obligation pour les entreprises de reporter sur leurs impacts sociaux et environnementaux. 

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Ce sont là les exigences de base nécessaires afin de garantir que l'ONU soit à la hauteur de sa mission fondatrice d'être un forum de représentation des peuples et de protection de leurs droits et leurs intérêts universels. Nous lançons un appel aux gouvernements pour qu’ils prennent en compte ces inquiétudes dans la perspective de construire un espace qui réponde aux besoins des peuples, et qui a le potentiel de prendre des initiatives en faveur de l’intérêt public et qui apportent des réponses adéquates aux multiples crises que le monde traverse actuellement.

Vous trouverez le formulaire pour signer cette déclaration sur: http://www.foei.org/en/get-involved/take-action/end-un-corporate-capture

 


1 Le terme “Bluewash’’ est apparu suite au lancement du Pacte mondial des Nations Unies (Global Compact). Il fait référence aux partenariats entre les NU et les grandes entreprises, en réaction aux entreprises qui utilisent le drapeau bleu de l’ONU afin de stimuler leur image, sans pour autant changer leurs pratiques de manière fondamentale.

 

http://www.unglobalcompact.org/NewsAndEvents/rio_2012/business_action_for_sustainable_development.html

3 For an overview of partnerships, see http://www.un.org/partnerships/Docs/Partnership_Initiatives.pdf

Source :
Via Campesina fr

 

 

 


Fonds d'écran Nature Fleurs Balade en pleine nature.

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17 janvier 2014 5 17 /01 /janvier /2014 01:12

 

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Vive l'Agriculture Familiale ! Non aux accords de libre échanges !

La Via Campesina appelle à la cohérence des politiques agricoles de l'Union européenne

b_350_0_16777215_00___images_stories_agriculture_paysanne_durable_2014-10-01meeting_FTA_Brusselsscaled.JPG(10 décembre 2013, Bruxelles). Pour marquer le lancement de l'Année Internationale de l'Agriculture Familiale, la Commission Européenne a organisé une conférence sur ce thème le 29 novembre à Bruxelles, où La Via Campesina a été invitée à s'exprimer1. L'enjeu a été de défendre une vision paysanne de l'agriculture familiale, son importance dans l'économie européenne et mondiale, et ses qualités sociales et environnementales.

Des cinq continents, nous avons fait venir une vingtaine de paysans et paysannes affiliés : Inde, Mozambique, Nicaragua, Argentine, Etats-Unis, Mali, Maroc, et les Européens d'Italie, de France, de Croatie, de Roumanie, d'Espagne et de Norvège. La problématique ne concerne pas uniquement les pays du sud, mais l'ensemble de la communauté internationale. Le « nord » détient la plus grande part de responsabilité quant à l'état de l'agriculture familiale dans le monde. 

Profitant de la présence de tout ce beau monde, des séminaires de travail et de préparation ont été mis en place à la Coordination Européenne Via Campesina (ECVC) à Bruxelles pour s'interroger aussi sur la question actuellement cruciale des Accords de Libre Échange, et notamment le fameux Transatlantic Trade and Investment Partnership (TTIP). Il s'agissait de construire une position commune sur ces accords, car ils se multiplient à l'échelle globale et concernent chacun d'entre nous : UE/Canada, UE/Maroc, US/Pacific, UE/US.

Le présent article vise à rendre compte des discussions et des décisions prises, afin d'encourager la prise de conscience et la mobilisation sur ces deux sujets.

  1. Agriculture familiale paysanne : un modèle d'avenir

Suite à une initiative un peu obscure2, la Food and Agriculture Organisation (FAO), rattachée à l'ONU, a décidé de faire de « l'Agriculture Familiale » la thématique de 2014. Si à l'échelle européenne, l'agriculture présente généralement moins de 5% des emplois, ce chiffre peut monter jusqu'à 80% dans les pays en développement, en Asie ou en Afrique. C'est donc un beau geste en faveur d'une grande partie de l'humanité, et c'est symboliquement fort en ces temps de crise économique, sociale, mais aussi idéologique.

Qu'est-ce que l'Agriculture Familiale ? Sans définition claire du concept, à laquelle La Via Campesina doit s'attacher dès à présent, le risque de détournement est majeur. Nous attachons une grande importance à rappeler que l'agriculture familiale est d'abord paysanne. Elle s'appuie ainsi sur une utilisation mesurée et écologique des ressources naturelles. Elle est orientée vers les circuits courts, locaux et nationaux, et ne prétend pas faire de l'exportation sa priorité. Elle renforce le tissu social du monde rural, favorisant l'emploi, les revenus de ses habitants, tout en dynamisant ces espaces souvent délaissés au profit des villes.

Tous ces avantages sont décisifs pour palier aux manques liés à la généralisation du système économique héritée du XXe siècle. Les monocultures, le productivisme, la concentration des exploitations ont largement participé à l'exode rural qui induit des problèmes sociaux importants3, à la capitalisation de l'agriculture, à la perte de qualité de la production, à la mise en concurrence mondiale du secteur agricole. Or, la récente crise capitaliste a une fois de plus montré les déficiences de ce système économique en ce qu'il favorise les inégalités et fragilise les petits producteurs.

La modernité agricole est entre les mains des paysannes et des paysans du monde. Ce sont eux qui nourrissent effectivement la planète et qui proposent le modèle économique le plus solide et durable du secteur agricole. Ce sont eux qui proposent les produits de qualité, ayant la valeur ajoutée la plus élevée, favorisant la relocalisation des champs et des élevages. Ils proposent un modèle durable quant à la gestion des ressources en limitant les externalités, tout en intégrant une organisation du rural socialement dense et dynamique, et en assurant une production en quantité et en qualité. C'est dans ce secteur et non dans l'agro-industrie que l'on crée des emplois dignes.

L'agriculture familiale comprise comme paysanne est un modèle d'avenir, qui doit être encouragé et soutenu par les politiques agricoles, notamment par la PAC, car les limites de la concentration de la production agricole sont visibles et évidentes. Il faut que ses aides directes et contraignantes soutiennent le travail et la production, et qu'elles arrêtent d'aller dans les poches des grandes exploitations qui sont, économiquement, socialement et environnementalement moins intéressantes pour la société. Les grosses fermes ne sont plus compétitives que parce qu'elles sont plus subventionnées.

La Commission européenne, et spécialement le personnel de la DG Agri est attentive à ce déplacement de paradigme économique. Soucieux d'utiliser cet espace ouvert, nous adressons un message à l'ensemble de l'Union européenne : l'agriculture d'aujourd'hui fait face à des problèmes qui ont été créés par la PAC d'après guerre, qui visait l'autosuffisance alimentaire de l'Europe. Cet objectif ayant été rempli, il faut à présent se tourner vers les problèmes actuels, qui sont d'ordre sociaux et environnementaux, et que le modèle de l'agriculture familiale paysanne est à même de résoudre. Il faut soutenir les petites fermes, en favorisant leur accès à la terre, à l'eau et aux semences, leur installation pour affronter le défi générationnel, leur accès au crédit en rattachant les aides directes à la production.

Enfin, nous pensons que les accords de libre échange ne donnent pas à l'Europe les moyens de résoudre les problèmes sociaux et environnementaux qu'elle rencontre. Au contraire, ils les rendent plus aigus. La déréglementation des normes et des politiques agricoles mettent en concurrence petites et grandes exploitations, menaçant les premières qui garantissent pourtant un avenir digne à l'Europe.

2) Les accords de libre échange menacent la souveraineté des Etats et les paysan(e)s

Les accords de libre échange que proposent l'Europe et les Etats-Unis au reste du monde sont aussi hérités de la tradition néolibérale, et sont la conséquence des échecs de l'Organisation mondiale du commerce. Les accords multilatéraux ne peuvent plus se faire dans le sens des Occidentaux à l'échelle globale, car les autres pays, lorsqu'ils se regroupent, sont capables de s'opposer à leurs prétentions planétaires4. Le multilatéralisme laisse alors la place à une multiplication des accords bilatéraux : EU/Canada et EU/Maroc ; US/Pacific ; US/EU pour ne citer que les plus actuels.

L'idée défendue par ses partisans est celle d'un double avantage. D'une part, la mise en place d'immenses marchés (c'est-à-dire le nivellement des réglementations, des droits de douane et des standards) favorise les investissements et le développement économique. Dans le cas du TTIP, on parle de 0,5-1% de point de croissance, et d'un million d'emploi aux Etats-Unis5. D'autre part, cette définition des standards et des règles de commerce s'appliquera à terme à l'ensemble du globe, jusqu'à la Chine. En effet, il faudra les respecter et s'y aligner pour commercer avec les acteurs économiques de ces entités, qui représentent la plus grande partie du commerce mondial. L'effet attendu est celui de la tâche d'huile. Or, l'avantage de définir les normes et les modèles est commercialement décisif dans le contexte de la mondialisation. Il s'agit, en d'autres termes, de pérenniser la domination de l'Occident sur le reste du monde6.

Face à cet argumentaire, La Via Campesina souligne l'un des effets les plus pernicieux de cette libéralisation des échanges. Il ne s'agit pas, dans les faits, de défendre des régions du monde et leurs sociétés, mais au contraire de renforcer les entreprises transnationales qui les habitent. Or, cette logique reste la même que celle décrite plus haut : concentration, inégalité, disparition des unités économiques et sociales à même de répondre aux besoins du XXIe siècle. De plus, ces accords ont pour conséquence d'étendre ce même système économique très critiqué et très limité, à l'échelle planétaire.

La Via Campesina démontrent que trois bonnes raisons existent qui justifient de s'opposer à ces accords : a) l'absence de démocratie et des acteurs politiques dans les négociations ; b) les avantages juridiques donnés aux entreprises sur les Etats et les peuples ; c) les conséquences potentielles néfastes pour les paysans et paysannes.

a) Les négociations sont conduites de la manière la plus obscure possible. Le contenu des négociations est inconnu du grand public, et même les parlementaires européens sont tenus à l'écart, comme nous l'a appris Michel Dupont, assistant parlementaire de José Bové ! Le peu d'informations qu'ils recevront seront confidentielles. De plus, les gouvernements nationaux ne font pas leur travail. Dans les couloirs de RMC radio, la Ministre française au Commerce, Sylvia Pinel a confié à José Bové qu'elle n'avait pas lu le mandat de négociation confié à la Commission européenne.

Des indices pourtant existent sur le contenu des accords. Ainsi, la Malaisie a signé un accord de libre échange avec les Etats-Unis récemment. D'après un député Malaisien de passage à Bruxelles, Charles Santiago, le contenu est le même que celui en cours de négociation avec l'UE, et ne porte presque pas sur le commerce: « ces deux accords ont exactement le même contenu. Le gouvernement malaisien lutte contre la signature du TPP. Dans tout le texte de l’accord, il n’y a qu’un seul chapitre sur le commerce et 24 chapitres qui ne portent pas sur le commerce : ce n’est pas un accord commercial, mais un accord pour contrôler le commerce, dans l’intérêt des grandes compagnies. C’est comme une nouvelle constitution dont nous, parlementaires, nous n’avons pas le contrôle. Même le Parlement des USA, avec la procédure du « fast track », n’en a pas le contrôle. L’objectif des accords de libre échange est avant tout la convergence des normes et des règles, bien avant la baisse des droits de douane. Où est notre souveraineté, où est notre espace politique ? Le business régule le gouvernement : c’est cela la nouvelle constitution. Il faut restaurer la souveraineté des Etats ». Ces éléments doivent inquiéter les citoyens d'Europe et des Etats-Unis. ECVC et La Via Campesina exigent une transparence totale sur le contenu des négociations et une place prioritaire au politique. Ces accords ne doivent pas être laissés uniquement entre les mains de la DG Commerce de la Commission Européenne car leur champ d'application dépasse ce domaine. Il faut appliquer la stratégie Dracula comme le suggère Susan George : exposer les négociations à la lumière pour qu'ils soient détruits.

b) L'accord prévoit un tribunal qui permettrait aux entreprises d'assigner des Etats en justice au prétexte que certaines dispositions législatives leur ferait perdre des bénéfices, et d'exiger un dédommagement. Cet « Investor/State dispute agreement » fera perdre un pouvoir régalien aux Etats qui sera transféré aux multinationales : celui de rendre la justice et de dépenser l'argent public comme bon leur semble, sous la souveraineté du peuple. Ainsi, si telle loi environnementale ou sociale, bien que politiquement fondée, fait perdre de l'argent aux agents économiques, ceux-ci n'ont plus qu'à exiger leur dédommagement à l'Etat en question.

La Via Campesina, ECVC et bien d'autres organisations appellent à sortir ce système d'arbitrage des négociations du TTIP.

c) Les conséquences de ces accords dans le domaine agricole sont difficiles à connaître précisément car, justement, le contenu des négociations n'est pas rendu public. En revanche, nous pouvons tout à fait anticiper certaines dispositions. Premièrement, les standards de production sont mis sur la table à travers le concept de reconnaissance mutuelle : « reconnais que mes standards sont bons, et je reconnaîtrai les tiens » ; ainsi de ceux qui protègent les consommateurs américains et européens : les seconds pourraient se voir obliger d'accepter le retour de vieux dossiers comme celui de la viande aux hormones ou des OGM ! Ne nous y trompons pas, dans certains domaines, les États-Unis protègent mieux leurs consommateurs que l'Europe. Le résultat attendu est le suivant : les entreprises pourront piocher chez l'un ou l'autre les éléments qui les arrangent, et faire interdire ceux qui les gênent. Deuxièmement, la logique néolibérale est à l’œuvre, la même que celle dénoncée par ECVC et La Via Campesina dans le dossier de l'agriculture familiale : encourager les concentrations d'entreprise, les capitaux transnationaux, le productivisme hérité du XXe siècle.

Réunis à Bruxelles en même temps que d'autres membres de la Via Campesina le sont à Bali à propos des accords de l'OMC et du cycle de Doha, nous appelons à la définition de nouvelles règles de commerce à l'échelle globale qui respectent les principes de la souveraineté alimentaire et ne fixent pas les agenda politiques.

En conclusion, nous voulons rappeler les liens très forts entre l'agriculture familiale et les accords de libre échange : l'un et l'autre sont en parfaite contradiction, alors que les défis sociaux et environnementaux qui sont ceux de notre temps doivent pris au sérieux. Nos sociétés doivent s'orienter vers des modèles durables, locaux, résilients. Dans le domaine agricole, seuls le modèle de l'agriculture familiale paysanne offre une réponse solide et crédible à ces défis. En revanche, le néolibéralisme tel que prôné dans les accords de libre échange est la cause principale des dégradations sociales et environnementales. Il est du ressort des institutions européennes, et en premier lieux des gouvernements, de se saisir de ces questions et d'écouter ce point de vue émergeant, concret et intelligent. Il est aussi de leur ressort d'assurer la cohérence de leurs politiques et de réduire l'influence des lobbys sur leurs décisions7.

Pour finir, la Via Campesina et sa Coordination Européenne se sont aussi rendus compte de la similarité des situations sur les cinq continents, dont la cause est l'imposition globale d'un même système économique. Et c'est également avec un point de vue global que les paysans et paysannes du monde entier s'unissent et réfléchissent ensemble à ces questions cruciales, pour eux, mais aussi pour les autres, appelant à multiplier les alliances et à partager et diffuser ces réflexions.

2 Voir le World Rural Forum:http://www.familyfarmingcampaign.net/

3 Voir les travaux d'Henri Rouillé d'Orfeuil sur la perte d'emploi produite par la modernisation de l'agriculture.

4 D'après Gérard Choplin lors de son intervention jeudi 28 novembre à ECVC ; la conclusion des accords de Bali a minima ne vont sans doute pas remettre en cause cette logique.

6 Lori Wallach, « le traité transatlantique, un typhon qui menace les européens », Le Monde Diplomatique, nov 2013.

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15 janvier 2014 3 15 /01 /janvier /2014 14:10

 

Des potagers en pleine rue

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November 11, 2013 by Mathieu

Faire pousser courgettes, tomates, potimarrons, rhubarbe et capucines le long des casse-vitesse, c’est possible ! Depuis le mois de mai 2013, des Schaerbeekois(es) suivent l’exemple, tout à fait étonnant, de trois femmes originaires d’une petite ville anglaise du Yorkshire (Todmorden) qui ont eu l’initiative très surprenante de faire pousser des légumes en pleine la rue. Elles ont ainsi créé un mouvement qui fait aujourd’hui des émules dans toute l’Europe, et notamment dans notre ville et notre commune : ce mouvement s’appelle Incredible Edible.

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A Bruxelles, le concept anglais des Incroyables Comestibles (c’est-à-dire des potagers de rue en libre-service) s’est développé à partir de la rue Frédéric Pelletier, non loin de la station de pré-métro “Diamant”, grâce à l’enthousiasme d’un petit groupe de Schaerbeekois(es) : notamment grâce à Catherine Piette et à la conseillère communale Joëlle van Zuylen.

potagers

” A partir du moment où on offre un lambeau de terre aux citadins, ils se rappellent que la nourriture sort du sol. Et ce qui est étonnant, c’est qu’ils ont envie d’en prendre soin” (Catherine Piette, Le Soir, le 7 novembre 2013)

Bruxelles compte aujourd’hui une centaine de potagers (ici) et de vergers urbains, etablis sur des zones non-bâties, mais aussi des toits, des toitures d’immeubles. A ceci, il faut rajouter des initiatives plus plus symboliques qu’alimentaires, mais qui ont aussi leur importance : Brussels Farmer s’efforce par exemple de faire pousser des tournesols dans les parterres et les espaces de terre inutilisées.

 

Et vidéo à la source: Des potagers en pleine rue | I love Meiser

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 


 

 

 

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14 janvier 2014 2 14 /01 /janvier /2014 23:26

farine de blé

Mobilisation pour défendre les droits des paysan-nes

La Vía Campesina / lundi 13 janvier 2014

 

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photo credit : Mox07 via photopin cc

Pour les droits des paysan-nnes d’utiliser et d’échanger librement leurs semences et leurs animaux reproducteurs, et d’accéder sans restrictions à l’ensemble de la diversité cultivée disponible ;

Contre les brevets sur le vivant et le contrôle du marché des semences par les multinationales.

Mobilisation du lundi 20 janvier 2014 dés 13h- Place du Luxembourg, devant le Parlement Européen !

Le Parlement Européen va voter un paquet législatif sur la commercialisation des semences, la santé des animaux et des plantes et les contrôles sur la chaîne alimentaire.

La Coordination Européenne Via Campesina appelle à l’organisation d’action à Bruxelles ou dans votre pays, avant le vote de ce règlement.

L’industrie exerce d’immenses pressions pour que le Parlement annule les quelques ouvertures proposée par la Commission :

- la reconnaissance du droit des paysan-nnes d’échanger leurs semences ;

- la commercialisation de semences de variétés non enregistrées ou hétérogènes, dans un cadre malheureusement déjà trop étriqué.

Les autres problèmes qui font l’objet des plus vives controverses concernent :

- la généralisation des plantes et des variétés brevetées et le risque d’interdiction totale des semences de ferme et de contamination de toutes les semences paysannes qui en résulte ;

- la privatisation du contrôle public du marché remplacé par de grosses structures privées sous contrôle de l’industrie, ou, pour les grosses entreprises, par leurs propres autocontrôles internes ;

- l’établissement de normes de production et de commercialisation inaccessibles aux petits opérateurs et aux semences biologiques ;

- et enfin la difficulté accrue pour certaines associations de conservation de la biodiversité de continuer à diffuser leurs semences.

C’est pour quoi la Coordination Européenne Via Campesina lance cet appel destiné à tous les agriculteur-ices, défenseurs des semences de ferme et paysannes, aux organisations de l’agriculture biologique, à toutes les associations de conservation et de diffusion de la biodiversité cultivée et à toutes les personnes qui se sentent concernées, de soutenir cette lutte paysanne en rejoignant la mobilisation le 20 janvier mais aussi en organisant des actions (échanges publique de semences, actions symboliques, interpellation de politiciens, etc.)dans leur propres pays avant le vote de ce règlement.

Comment participer à la mobilisation ? Ramenez vos semences à échanger et de quoi faire du bruit et de la musique !!

Plus d’information www.eurovia.org et si vous organisez une action, contactez benjamin@eurovia.org

 

Graines : Vue macro de graines de s?same dans le sac de lin avec cravate isol? sur fond blanc

 

 

Graines : Grand ?crou et la s?lection des semences vivri?res en porcelaine bols sur fond de toile de jute Banque d'images
Source ;
Mobilisation pour défendre les droits des paysan-nes
Agencia Prensa Rural Colombia
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13 janvier 2014 1 13 /01 /janvier /2014 16:38

 

 

2014, année internationale de l’agriculture familiale : mise en scène ou opportunité ?

b_350_0_16777215_00___images_stories_agriculture_paysanne_durable_2013-23-12exploitation-laitiere.jpgLe 22 novembre dernier, a été lancée l’année internationale de l’agriculture familiale et le Commissaire européen à l’agriculture Dacian Ciolos a organisé une conférence internationale à Bruxelles le 29 novembre. Pendant ce temps le Commissaire au commerce extérieur Karel De Gucht préparait ses valises pour la réunion ministérielle de l’OMC à Bali. Là-bas, pas question d’agriculture familiale, mais plutôt d’exportations, d’importations, d’accès au marché,….. Alors mettre en lumière l’agriculture familiale pendant un an, est-ce une mise en scène ou une opportunité ?

Les règles actuelles du commerce international agricole et des politiques agricoles contribuent à la disparition de l’agriculture familiale.
En avril 2014, la signature de l’accord GATT de Marrakech, qui a défini les règles actuelles du commerce international et créé l’OMC, aura 20 ans. Cet accord a déterminé depuis les politiques agricoles, et il a fait de l’importation/exportation leur priorité, au détriment du commerce local/régional et de l’agriculture familiale. Entre 2003 et 2010, l’UE a perdu 20% de ses exploitations agricoles (3 millions), pour la plupart des exploitations familiales (http://www.eurovia.org/spip.php?article518)

Un accord de « partenariat » transatlantique favoriserait-il l’agriculture familiale ?
En s’engageant dans la négociation d’un accord transatlantique avec les USA, l’Union Européenne pense-t-elle pouvoir orienter l’agriculture US vers un modèle d’agriculture familiale ? Ou bien ne craint-elle pas plutôt l’inverse ? Accepter le lavage des poulets au chlore pour tuer les bactéries issues des grands élevages hors-sol est de mauvaise augure pour l’agriculture familiale…….

L’année internationale de l’agriculture familiale ne sera qu’une mise en scène
• Si on s’entête à négocier des accords commerciaux qui la tuent,
• Si elle consiste à éclairer une dernière fois ce que l’on détruit (comme avant la mise en eau des barrages), en gardant juste une vitrine de bons produits issus de l’agriculture familiale, dont raffole la nomenklatura néolibérale, qui s’enrichit par ailleurs de sa disparition.
• si elle ne remet pas en cause l’industrialisation de la production agricole, qui ruine l’agriculture familiale . A ce titre, la réforme de la PAC de l’UE qui vient d’être adoptée ne va pas freiner le développement des grandes usines à porcs, poulets, œufs, lait, etc…, ainsi que des grandes serres industrialisées de légumes.
• si l’exploitation agricole familiale reste d’abord l’exploitation de la famille par l’amont, l’aval, et les banques

Mais l’année internationale de l’agriculture familiale est aussi une opportunité pour :
• mettre en lumière les coûts réels –actuellement externalisés- de l’agriculture industrialisée,
• mettre en lumière la multifonctionnalité positive d’une agriculture familiale durable qui pourvoit nourriture, emplois, paysages et défend mieux l’environnement.
• mettre en question les règles actuelles du commerce international agricole, qui datent du siècle passé, et reconnaître, comme le dit l’Inde, que la boîte verte à l’OMC n’est qu’un blanchiment du dumping, qui contribue à la ruine de l’agriculture familiale ici et dans les pays tiers.
• mettre les institutions devant leurs responsabilités : vous voulez vraiment faire de l’agriculture familiale le cœur de la sécurité alimentaire ? Très bien, bravo, alors changez les règles, changez les politiques agricoles et commerciales actuelles. Les alternatives existent.
• arrêter l’accaparement des terres par les firmes et les banques en Europe Centrale et dans les pays du Sud, qui porte atteinte à l’agriculture familiale. En Europe un plafonnement significatif des paiements directs de la PAC, refusé dans la dernière réforme, y contribuerait.

La décision des institutions internationales de faire de l’année 2014 l’année de l’agriculture familiale ressemble à un défi lancé à elles-mêmes et à l’opinion publique. Le fossé grandit en effet entre la prise de conscience du changement nécessaire de paradigme – y compris par les institutions- et les politiques qu’elles mettent en œuvre, enfermées encore dans un cadre idéologique dépassé du siècle précédent.
Le rapport international de l’IAASTD et plusieurs rapports de la FAO ont montré que la sécurité alimentaire sera mieux assurée par une agriculture paysanne durable familiale. Face au pouvoir économique et financier, pour qui l’agriculture familiale ne se mesure qu’en terme de compétitivité (internationale), pour qui le moyen et long terme n’existent pas et qui pourtant impose encore ses vues aux décideurs politiques élus, les citoyens et les institutions qui les représentent ont plus que leur mot à dire.

L’agriculture sera paysanne, familiale, durable ou ne sera plus qu’une industrie intégrée par l’amont et l’aval, exploitant une main d’œuvre ayant perdu autonomie et savoir-faire paysan.
Si l’année de l’agriculture familiale n’amorce pas un changement de priorités dans les politiques agricoles et commerciales, la fin annoncée des paysans sera plus probable que la fin de la faim.

Gérard Choplin, Bruxelles,  décembre 2013

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Gérard Choplin (animateur CPE/ECVC de 1988 à octobre 2013)

Formateur, rédacteur, consultant (UE, politiques agricoles, commerce international, alimentation, sécurité alimentaire, souveraineté alimentaire, environnement, ….)

choplin.gerard@skynet.be, http://gerardchoplin.wordpress.com

skype: gchoplin, mobile: + 32 (0)473257378

 

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2014, année internationale de l’agriculture familiale : mise en scène ou opportunité ?

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17 décembre 2013 2 17 /12 /décembre /2013 14:10

 

 

par Sophie Chapelle 22 novembre 2013

Les paysans qui ressèment leur récolte seront-ils considérés comme des trafiquants ? Oui, ont répondu les sénateurs en adoptant le 20 novembre à l’unanimité un projet de loi élargissant aux plantes le délit de contrefaçon. S’émanciper des droits de propriété détenus par les grandes firmes semencières sera désormais un délit. La loi prévoit aussi de nouveaux moyens de répression contre paysans et jardiniers clandestins. Pour les promoteurs de la loi, il s’agit simplement de « protéger les entreprises ».

Semer sa propre récolte. Un acte des plus banal perpétué depuis les prémisses de l’agriculture. Un acte désormais considéré comme criminel, au même titre que l’impression de fausses monnaies, la vente de médicaments illicites à partir de molécules copiées, ou la reproduction de sacs ou de montres de grandes marques. En 2014, la chasse aux contrefaçons pourrait s’étendre jusque dans les potagers, les champs et les fermes. Le 20 novembre, les sénateurs ont voté à l’unanimité – y compris les écologistes – une proposition de loi destinée à renforcer la lutte contre la contrefaçon. Celle-ci représente « près de 10 % du commerce international » et grève les recettes fiscales de la France de plus de six milliards d’euros chaque année. Or, la répression de la contrefaçon prévoit d’être étendu à l’ensemble des branches de la propriété intellectuelle. Parmi elles, les « obtentions végétales ». Un terme qui recouvre les semences de ferme, ces graines issues de variétés sélectionnées par l’industrie semencière, que l’agriculteur sème, récolte et, de fait, multiplie.

La contrefaçon est « souvent le produit de l’exploitation d’être humains et du travail illicite », pointe le projet le loi, et « participe au financement de nombreuses organisations mafieuses et terroristes ». « Les agriculteurs qui utiliseraient des semences de ferme sur leur propre exploitation [sont assimilés] de manière tout à fait abusive, à des criminels en réseau », s’insurge la Coordination rurale. « L’acte millénaire de sélectionner et de ressemer une partie de sa récolte sera considéré comme une contrefaçon, c’est à dire sera mis sur le même plan que la reproduction frauduleuse d’un objet ou d’une monnaie », renchérit le collectif Semons la biodiversité [1] qui avait interpellé les sénateurs dans une lettre ouverte. Graines de soja, de maïs, de tomates, de céréales ou de patates pourront ainsi être considérées comme des copies illégales !

Plusieurs groupes parlementaires [2] avaient pourtant demandé que soit insérée la précision suivante : « La production à la ferme par un agriculteur de ses semences pour les besoins de son exploitation agricole ne constitue pas une contrefaçon et ce, quelle que soit l’origine de ses semences. » Au final, seuls vingt sénateurs ont voté pour l’amendement porté par le groupe communiste, suite à la promesse du député socialiste Michel Delebarre, rapporteur du projet de loi, d’un nouveau débat. « Ce débat aura lieu dans le cadre de la loi d’avenir agricole en janvier prochain, a-t-il assuré. Il n’y a pas de risques avec ce projet. » Une lecture attentive du texte révèle pourtant le contraire.

L’État au service des entreprises privées

Cette loi vient renforcer un arsenal juridique qui protège les entreprises commercialisant des semences. Depuis 2011, une loi (analysée ici) autorise la reproduction à la ferme de seulement 21 variétés de semences, en échange du paiement d’une redevance appelée « Contribution volontaire obligatoire » (sic)... Pour toutes autres variétés, la reproduction est donc interdite, au prétexte de ne pas violer le droit de propriété intellectuelle détenue par l’entreprise ! « La loi de 2011 demande à tous les agriculteurs qui font des semences de ferme de s’enregistrer auprès de l’administration, explique Guy Kastler du Réseau semences paysannes, contacté par Basta !. Aujourd’hui, les entreprises ne poursuivent pas les agriculteurs qui n’ont pas payé cette redevance car elles n’en ont pas les moyens. Cela leur coûterait trop cher d’apporter la preuve de la contrefaçon. » Jusqu’à maintenant, les agriculteurs continuaient donc de reproduire leurs semences à la ferme, sans risquer d’être poursuivi [3].

« La nouveauté, c’est que ce projet de loi demande à l’administration d’aider l’entreprise à lutter contre les contrefaçons et de transmettre toutes les informations dont elle dispose », poursuit Guy Kastler. Les services de l’État mettront donc à disposition des entreprises une liste d’agriculteurs qui sont présumés contrefacteurs. Sur simple demande de l’entreprise détenant un droit de propriété intellectuelle sur une variété, les services des douanes pourront saisir les semences « contrefaites », ou la récolte qui en est issue. Un agriculteur ayant cultivé une variété pour laquelle les semences de ferme sont interdites pourra voir sa récolte détruite... « Ou confisquée jusqu’à ce qu’il paye des royalties (redevances, ndlr) s’il s’agit d’une espèce dérogatoire », précise Guy Kastler. Et d’ajouter que « si l’Etat n’applique pas la loi en faisant payer l’agriculteur, il pourra être poursuivi par l’entreprise », comme Basta ! l’avait déjà souligné dans cette enquête.

Des douaniers infiltrés en zone rurale ?

Pire, l’agriculteur ne devra pas seulement disposer de factures pour ses semences, mais aussi pour ses animaux reproducteurs et ses préparations naturelles. Quid du paysan-boulanger qui élabore son propre levain pour faire son pain, ou du fromager qui utilise son propre ferment ? Avec ce projet de loi, les douaniers pourront se présenter comme des acheteurs de semences de ferme en vue de prouver la contrefaçon. Ils pourront utiliser deux techniques, « l’infiltration » (article 9) et « les coups d’achat » (article 10), décrites dans la proposition de loi :

« Jusqu’à maintenant, l’entraide et la confiance sont des fondements du tissu social du monde rural », rappelle Guy Kastler. Mais avec ces dispositions, toute personnes demandant d’échanger des semences sera susceptible d’être un agent de la lutte contre les contrefaçons. De quoi générer un climat de méfiance généralisé... Pourtant, selon la Coordination nationale pour la défense des semences fermières (CNDSF), il existe déjà « un arsenal juridique (...) permettant aux détenteurs des certificats d’obtentions végétales de faire respecter leur droit. Il en est pour preuve l’ensemble des contrôles réalisés sur le terrain très régulièrement chez les agriculteurs et chez les prestataires de service par les organismes habilités dans le but de contrôler le respect de la législation sur les semences. » En mai dernier, Basta ! relatait la visite d’un agent de la répression des fraudes sur un marché en Ariège, où les petits maraîchers se sont vus notifier une amende potentielle de 450 euros pour diffusion de « légumes clandestins »...

Généralisation des OGM ?

« C’est cette menace constante de poursuite en contrefaçon qui a conduit les agriculteurs américains à cultiver en moins de dix ans plus de 90 % de leurs champs de soja et de maïs avec des OGM brevetés et qui a condamné à la faillite ceux qui ont voulu résister », alertent plusieurs personnalités dans le journal Le Monde. Aujourd’hui, 75 % du marché mondial de semences est contrôlé par seulement… dix multinationales ! Mais pour le sénateur socialiste Richard Yung, à l’origine de la proposition de loi sur la contrefaçon, il s’agit de « protéger nos entreprises ». Richard Yung a fait toute sa carrière dans le monde de la propriété intellectuelle et des brevets, de l’Institut national de la propriété industrielle à l’Office européen des brevets, à Munich. « Le risque, c’est que vous développiez une nouvelle plante, et qu’elle soit reproduite sans que l’on vous paye », explique-t-il, cité par Reporterre.

Que les semenciers ne soient pas payés n’est pourtant pas d’actualité. Le montant des exportations de semences et plants, hors Hexagone, représente près de 1,5 milliard d’euros en 2012-2013, soit une hausse de 15 % par rapport à l’exercice précédent. « Cette performance représente l’équivalent de 20 Airbus A320 », se félicite ainsi le Groupement national interprofessionel des semences. Celui-ci reproche aux agriculteurs qui reproduisent leurs semences à la ferme de ne pas participer au financement de la recherche. Le caractère de telle variété plus résistante aux climats secs, ou de telle autre moins vulnérable aux insectes est-elle pour autant la propriété des grandes firmes semencières ? « Il est le résultat de 10 000 ans de sélection paysanne, anonyme et publique », estime Jacques Caplat de l’association Agir pour l’environnement. Le sélectionneur professionnel serait donc tout aussi redevable en s’appropriant un travail engagé par les paysans depuis des millénaires. Mais lui ne commet pas de délit de contrefaçon.

Paroles, paroles, paroles...

Le sort du premier maillon de la chaine alimentaire se joue désormais dans les arènes politiques. En 2007 déjà, une nouvelle loi sur la contrefaçon avait fait de la semence produite à la ferme une contrefaçon. A l’époque, le groupe socialiste avait initialement soutenu, avec des élus communistes, écologistes et centristes, un amendement qui excluait de la loi les semences de ferme [4]. Ils avaient retiré leur amendement à la suite de la promesse [5] du ministre de l’époque, Hervé Novelli, de reconnaître le droit des agriculteurs de produire leurs semences et de ne pas le considérer comme une contrefaçon dans une future loi. Or, la loi de 2011 a maintenu le caractère délictueux des semences de ferme... Et ce sont aujourd’hui les socialistes qui le promettent à leur tour...

Une bataille législative s’amorce (lire notre entretien avec la sénatrice EELV Hélène Lipietz). Alors même que le gouvernement a estimé que ce texte devait être voté en « procédure accélérée ». Le projet de loi sur les contrefaçons devrait être discuté à l’Assemblée nationale en février 2014. Face à l’arsenal législatif déployé pour interdire aux paysans d’exercer leur métier, une pétition et une campagne pour une loi de reconnaissance positive des droits des agriculteurs et des jardiniers ont été lancées. Après les sénateurs, les députés se contenteront-ils aussi de se comporter en simple chambre d’enregistrement des desiderata des lobbys industriels ? Et de considérer nombre d’agriculteurs comme des voleurs ?

Sophie Chapelle
(@Sophie_Chapelle)

- A lire également : Semences : pourquoi les écologistes ont voté la loi sur les contrefaçons, entretien avec la sénatrice EELV Hélène Lipietz, qui explique les raisons du vote écologiste sur cette loi.

Photo : CC Daniel Jolivet

Notes

[1Ce collectif regroupe 22 associations et syndicat, et promeut le respect absolu du droit des agriculteurs de réutiliser et échanger leurs semences.

[2Les groupes écologiste, CRC (communiste républicain citoyen), Nouveau-Centre, UMP, RDSE (Rassemblement démocratique et social européen).

[3A l’exception du blé tendre pour lequel le décret est déjà appliqué.

[4L’amendement défendu était le suivant : « Ne constitue pas une contrefaçon la reproduction par un agriculteur de semences de ferme pour les besoins de son exploitation agricole, et ce quelle que soit l’origine de ces semences. »

[5Lire la retranscription des débats du 17 octobre 2007.

 

Source Agriculteurs et jardiniers seront-ils bientôt obligés de cultiver dans la clandestinité ? - Basta !

 

Article lié

Suite aux nombreuses réactions suscitées par cet article, Basta ! a souhaité revenir sur les raisons de ce vote dans un entretien accordé le 26 novembre 2013 par la sénatrice écologiste Hélène Lipietz : http://www.bastamag.net/article3565.html

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5 décembre 2013 4 05 /12 /décembre /2013 05:30

 

 

 

Titre de l'image : Paul Gauguin - La vache rouge

Les gouvernements européens dans les mains des corporations

Le projet d’Unilever et ses programmes « d’incorporation » de l’agriculture familiale à ses chaînes productives, se transforme en projet de l’Union Européenne.

 


(...) C’est dire que le discours des gouvernements européens est hautement idéologique, prisonnier des narrations et négoces des corporations.

 


Les gouvernements Européens (...) comme toujours face à la crise du capitalisme et du libéralisme appliquent stupidement les recettes libérales qui ne font rien d’autre que d’empirer la situation des peuples

 


« La subordination totale de l’agriculture aux intérêts des corporations », ce n’est pas un problème des paysans, c’est le problème de l’humanité toute entière"

 



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 Conférence de l’agriculture familiale de l’Union Européenne

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Par Diego Montón - Movimiento Nacional Campesino Indígena (Mouvement National Paysan Indigène)

 Secretaría operativa CLOC (Coordination Latino Américaine des Organisations des Campagnes) Vía Campesina

04-12-2013

 

View Of Auvers Sur Oise - Paul Cezanne - www.paul-cezanne.org


 L’année 2014 a été déclarée année mondiale de l’Agriculture Familiale par la FAO dans le cadre de la crise alimentaire qui frappe les peuples du monde, cela semble être une opportunité pour approfondir les analyses et défis. Cependant on s’aperçoit d’emblée qu’on ne pourra éviter la bataille du sens.

Que signifie Agriculture Familiale ? Quelle est son importance réelle ? Quelles sont les causes de la faim ? 

Les corporations se sont déjà lancées à l’assaut pour accaparer la mémoire historique du rôle des paysans et paysannes, et là, elles y vont à fond, construisant une narration qui occulte l'histoire et subordonne l’agriculture mondiale à leurs intérêts spéculatifs.

La Conférence de l’Agriculture Familiale qu’a organisé la Commission Européenne, à la fin novembre, à laquelle nous avons participé, une vingtaine de compagnons et compagnonnes de la CLOC (Coordination Latino Américaine des Organisations des Campagnes) et de la Via Campesina, fut exemplative.

 


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Lamentablement comme pour le reste de la politique, les gouvernements européens répondent directement à l’idéologie imposée par le capital financier. Ainsi, paradoxalement à l’ouverture de la conférence, il n’y eu pas d’orateurs des organisations paysannes et de l’agriculture familiales, seuls parlèrent des fonctionnaires et à notre grande surprise, un exécutif d’UNILEVER qui présenta ses « réalisations » et expectatives pour l’année de l’agriculture familiale.

  

 Unilever est une transnationale agro-alimentaire qui dirige 400 marques dans 100 pays, fameuse pour ses « cubes » Knorr, et sa production mondiale de 50 millions de cubes par seconde. Bien que cela soit peu diffusé, dans la matière première utilisée abondent les transgéniques et agro toxiques, les conservateurs et les produits chimiques, et par-dessus le marché, des dénonciations ont été faites au sujet de ces cubes produits par le travail  d'enfants et du travail précarisé.

 


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 Le discours des fonctionnaires européens est celui d’une “Agriculture Familiale” qui doit être « protégée » pour des questions de culture, et des problèmes sociaux, mais relever le défi d’alimenter l’humanité en 2050 ne sera possible que par les corporations. Ainsi le projet d’Unilever et ses programmes « d’incorporation » de l’agriculture familiale à ses chaînes productives, se transforme en projet de l’Union Européenne. Productivité, compétitivité, rentabilité, innovation, etc, sont les paroles qui prédominent dans un discours vide d’analyses, sans que soit prononcée la parole crise. C’est dire que le discours des gouvernements européens est hautement idéologique, prisonnier des narrations et négoces des corporations.

 

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 Il faut donc faire remarquer l’exception, parmi les discours officiels, que constitua l’intervention de Graziano da Silva, le Brésilien directeur de la FAO. Graziano ne rentra pas dans les causes, mais il fut clair quant à l’importance de l’Agriculture paysanne ; “Le problème n’est pas de l’ordre de la productivité, c’est une question d’accès et de la distribution des aliments (…). Les agriculteurs familiaux ont été et seront ceux qui résoudront le problème de la faim dans le monde (…). Le marché global ? Où est-ce qu’il se trouve ? Comment peut-on acheter des aliments là ?(ironise-t-il). Il faut renforcer les marchés locaux et le rôle de l’agriculture familiale. Le marché global des aliments et l’agriculture industrielle implique une immense perte d’aliments par décomposition(…) » Il faut dire que cette position novatrice de la FAO constitue une ouverture favorable dans le contexte institutionnel international. Les gouvernements Européens par contre, comme toujours face à la crise du capitalisme et du libéralisme appliquent stupidement les recettes libérales qui ne font rien d’autre que d’empirer la situation des peuples.

 

Titre de l'image : Vincent van Gogh - La Moisson à La Crau, avec Montmajour dans le Fond


 Mais il y eu une autre surprise lors de cette conférence quand s’est rendu compte  de la présence de Etchvere, le Président de la Société Rurale Argentine, cette entité oligarchique de propriétaires terriens qui a grandi en tuant des indigènes en 1880 et s’appropriant leurs terres, et qui  continue de le faire à présent, cette entité qui a conclu des alliances avec des transnationales qui a provoqué et accompagné chaque dictature civico-militaire, qui a essayé par tous les moyens d’éliminer la démocratie. Ils vinrent comme membres de l’OMA (Organisation Mondiale des Agriculteurs), qui est devenue héritière de la FIPA et qui prétend également participer à l’année de l’agriculture familiale.

 J’ai vu Etchevere et immédiatement m’est revenu à la mémoire notre compagnon Cristian Ferreira, assassiné par un sicaire dans sa maison, devant sa famille. Cristian était un dirigeant du Mouvement Paysan, un jeune, son “péché” fut de promouvoir l’agriculture paysanne et d’avoir détenu un entrepreneur qui voulait s’approprier la terre communautaire. L’entrepreneur aujourd’hui est emprisonné. La Société Rurale agit politiquement et judiciairement pour le faire libérer. De même que Cristian, me passèrent en tête des centaines de paysans et de paysannes assassinés au Honduras, au Paraguay, au Guatemala, et dans tant d’autres pays de Notre Amérique Latine en lutte quotidienne pour la terre. Au cours de ces mêmes journées, un gang de nervis agressait violement un campement et un barrage établi pour empêcher la construction d’une usine de MONSANTO, dans le village de Malvinas, Cordoba, Argentine, une résistance dont les meneuses sont les mères dont les enfants souffrent ou souffraient de cancer et de leucémies causés par les fumigations au Glifosate qui se pratiquent quotidiennement dans les villages ruraux du Cône Sud et dans d’autres régions du continent.

 

A Turn In The Road - Paul Cezanne - www.paul-cezanne.org

 


 Mais les gouvernements européens nous viennent encore une fois avec les contes de fées, d’une harmonie possible entre corporations et paysans, dans laquelle résiderait la solution. Celle d’un prétendument libre marché dans lequel nous pourrions tous être en compétition et dont les règles sont « transparentes ».

 


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 Voyons quelques données :

- avec seulement ¼ des terres arables du monde, les paysans et paysannes alimentent 70% de la population mondiale,

et selon la FAO : plus de 40% des aliments de la chaîne agro-industrielle se perdent par décomposition.

90% du marché mondial des grains est entre les mains de quatre corporations : ABC, Bunge, Cargil et Dreyfus.

Monsanto contrôle 27% du marché global des semences et joint à 9 autres corporations plus de 90% du Marché des agro-toxiques.

 

Cette concentration leur permet de faire pression par la spéculation pour que les prix des marchandises augmentent systématiquement. En plus leur alliance étroite avec la finance internationale leur permet de disposer d’immenses masses de capital d’origine spéculative qui est utilisé pour l’accaparement de Terres, le lobbying et la pression sur les gouvernements du monde, la corruption, etc…

 


 

 

 De quel marché libre nous parlent-t-ils ? Le marché est otage des corporations et du capital financier.

 

 

 

Si nous ajoutons au monopole les problèmes de perte de biodiversité et de crises du milieu ambiant provoquée par de grandes extensions de monocultures, les graves problèmes de santé et la contamination par des milliers de tonnes d’agro-toxique par fumigation non discriminée, le travail d’esclave, l’usage sans discrimination de combustibles fossiles, la destruction des marchés locaux, entre autres, il nous apparaît clairement qu’il n’est pas possible d’harmoniser l’agriculture paysanne avec l’agriculture des corporations, comme il ne sera pas possible d’en finir avec la Faim par ce modèle né de la révolution verte.

 


 La Via Campesina,, malgré qu’elle n’était pas des mieux placées,  rendit cela très clair dans la conférence, faisant la preuve de la consistance, de l’humilité et de la force de la vie paysanne. Les fonctionnaires européens ne s’attendaient pas à  autant de critiques, et ils furent surpris par les applaudissements que reçurent chaque compagnon et compagnonne qui levait la main et parvenait à exprimer ces idées. Avec des visages africains, asiatiques, latino-américains et européens, ici, est apparue la voix paysanne, millénaire, vive et porteuse d’espoir.

 Il est à espérer que cette situation se reproduise sur tous les continents,  avec un fort débat autour de l’année de l’agriculture familiale.


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Pour l’année à venir se dessinent d’importants défis idéologiques et politiques. Nous devons parvenir à potentialiser la mobilisation et la lutte dans le monde entier, soutenant nos luttes historiques : Réforme Agraire pour la Souveraineté Alimentaire, aiguisant le regard sur notre principal ennemi : Les corporations transnationales et leur projet idéologique et technologique.

 

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 Il est fondamental d’établir les meilleures alliances, de parvenir à connecter tous les processus de lutte et de résistance, avec des messages qui soient capables de transmettre quels sont les enjeux « La subordination totale de l’agriculture aux intérêts des corporations », ce n’est pas un problème des paysans, c’est le problème de l’humanité toute entière. Pour cela notre projet paysan et populaire doit pouvoir s’intégrer dans un projet politique populaire qui exprime les projets des secteurs populaires paysans, travailleurs, désoccupés, indépendants et professionnels, qui permettent que nos luttes et projets soient reflétés dans les politiques publiques.

En Amérique Latine, nous avons le défi de porter le débat à l’ALBA, UNASUR, MERCOSUR, à la CELAC, et de porter le débat dans ces programes qui ont permis de grandes avancées vers l’intégration anti-impérialiste et la construction d’une nouvelle hégémonie, mais qui a présent se retrouve engagé dans une grande bataille concernant le modèle à suivre, et dans laquelle la re-primarisation des économies est une grande menace.

 

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 Difficile de concevoir une Amérique Latine unie et libre si son agriculture reste subordonnée aux corporations et dans cette discussion, la question technologique est clé, l’agro-écologie doit avoir le caractère d’une « innovation ». La Banque du Sud devrait devenir un outil qui permette aux gouvernements de financer le développement agricole rural depuis la perspective de la Souveraineté Alimentaire et La Réforme Agraire est une politique continentale urgente.

 


 

 

 Cela sera possible en renforçant les organisations et en amplifiant nos luttes, avec un caractère créatif et diversifié, combinant l’action directe, avec l’action politique et le dialogue avec ces gouvernements progressistes et populaires articulant au niveau continental, national et local. Conservant l’autonomie nécessaire pour éviter que la bureaucratisation étatique et libérale et les programmes à court terme des gouvernements ne rendent la marche trop lente.

Les paysans et paysannes, nous allons continuer à alimenter les peuples, octroyant la vie et la liberté, c’est cela notre tâche historique.


Diego Montón

 


 

Traduction Anne Wolff

 


Plus de 200 défenseurs des terres fertiles, comme ils aiment à se définir, ont défilé hier matin dans les rues d’Avignon pour dénoncer le projet de déviation dans la Ceinture Verte d’Avignon. Photo DL / Angélique SUREL

 

Source  espagnole Los gobiernos europeos en las manos de las corporaciones | Minga Informativa

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4 décembre 2013 3 04 /12 /décembre /2013 21:20

 

 

 

Une année pour orienter radicalement les politiques agricoles en faveur de l'agriculture paysanne familiale

Communiqué de Presse de la Coordination Européenne Via Campesina. 

2014 : Année internationale de l'agriculture familiale  

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(21 Novembre 2013- Bruxelles) Ce vendredi 22 novembre, l'Organisation des Nations Unies lancera à New-York l'Année Internationale de l'Agriculture Familiale, en 2014. Depuis 1993, La Via Campesina est la seule organisation internationale qui défend quotidiennement l'agriculture familiale paysanne dans le monde avec plus de 160 organisations dans 79 pays et plus de 200 millions de paysans/nnes représenté(e)s. En Europe, la Coordination européenne Via Campesina (ECVC membre de LVC)

est présente dans plus de 18 pays d'Europe et fédère des organisations de paysans et de travailleurs agricoles sous la bannière de la souveraineté alimentaire et de l'agriculture paysanne - essence même de l'agriculture familiale.

A quelques jours de la conférence organisée sur le sujet par la Commission européenne le 29 novembre, il est indispensable de rappeler quelques faits.

Les petites et moyennes exploitations agricoles paysannes sont l'épine dorsale économique et sociale de l'agriculture européenne, la plus puissante de la planète, où les fermes ont 14 ha de terre en moyenne, dont plus de 69 % faisant moins de 5 ha et seulement 2,7 % plus de 100 ha.

Basée sur la capacité et l’intensité du travail – et non le capital – adaptées à l'infinie diversités des conditions naturelles, sociales et économiques, ces structures productives garantissent la sécurité et la diversité alimentaire des citoyens européens, et sont un modèle de durabilité sociale, économique et écologique. C'est une agriculture pour vivre, non une activité spéculative.

Pourtant, années après années les politiques s'appliquent à les faire disparaître dans une pseudo-modernité inadaptée aux enjeux du 21ème siècle et à la crise globale qu'affrontent les peuples européens.

Il faut aujourd'hui encourager la relocalisation des productions agricoles, et mettre en place, sans attendre, des politiques basées sur les principes de la souveraineté alimentaire pour soutenir, maintenir et élargir la durabilité économique et sociale du modèle de l'agriculture paysanne.

Il faut assurer dès aujourd'hui l'installation de nouveaux d'agriculteurs, avec des jeunes mais aussi de nouveaux entrants en provenance des autres secteurs économiques en crise qui n'offrent pas d'avenir.

Il faut faire évoluer l'idée même de l'agriculture familiale, suivant en cela l'évolution de la famille en Europe, loin du patriarcat et sans discrimination.

La politique foncière doit évoluer, selon les directives validées par les Etats au Comité Sécurité Alimentaire de l'Organisation des Nations Unies pour l'Agriculture et l'Alimentation (FAO).

Les réglementations concernant l'hygiène doivent être adaptées aux réalités de l'activité familiale.

La réglementation sur les semences doit soutenir le contrôle paysans sur cet élément fondamental de toute production agricole, et non favoriser uniquement l'industrie semencière.

Il faut des financements plus adaptés aux petites fermes que dans les programmes actuels de développement rural.

Il faut faciliter la création de nouveaux circuits de marché bien plus appropriés à l’agriculture paysanne familiale.

ll faut réguler les marchés pour garantir des prix rémunérateurs et stables.20788146_c689dd1820.jpg

Il est enfin indispensable de permettre l'organisation collective et solidaire de l'agriculture paysanne familiale.

ECVC appelle les institutions internationales, et notamment l'Union Européenne, à se montrer cohérentes et systématiques dans la définition des politiques agricoles. L'année de l'agriculture familiale ne doit pas être un voile de communication pour faire oublier les négociations actuelles cruciales telles l'accord commercial avec les Etats-Unis – destructeur pour les paysans –, celles sur la réglementation concernant les semences et les derniers ajustements de la future PAC .

Seuls ces changements radicaux de politiques assureront la reconnaissance et l'avenir de l'agriculture familiale au delà de l'année 2014.

« On a besoin des petites fermes ! »

Porte Parole :

Geneviève Savigny : +33 6 25 55 16 87

Andrea Ferrante: +393480189221

 

Source :
Une année pour orienter radicalement les politiques agricoles en faveur de l'agriculture paysanne familiale

 

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28 novembre 2013 4 28 /11 /novembre /2013 16:10

 

 

OU

Comment les écologistes contribuent à l'interdiction de la liberté de circulation et d'usage des semences de ferme sous prétexte que les plaquettes de frein contrefaites sont dangereuses

 

Comme toujours avec Bastamag du tout bon ! Et de l’édifiant tant en ce qui concerne tant la privatisation des semences que l'arnaque de la démocratie représentative ou l'incompétence avérée du personnel politique... écolo la demeurée de service ? Sait-elle seulement ce que cela veut dire et est censé impliquer … je vous laisse apprécier

 

Semences : pourquoi les écologistes ont voté la loi sur les contrefaçons

par Sophie Chapelle 27 novembre 2013

Le vote des écologistes en faveur d’une loi qui prévoit de nouveaux moyens de répression contre les contrefaçons a suscité beaucoup de réactions. Car en l’état, la production à la ferme par un agriculteur de ses semences constitue une contrefaçon. Basta ! a souhaité revenir sur les raisons de ce vote dans un entretien avec Hélène Lipietz, sénatrice écologiste. « Nous ne pouvions rien faire dans une loi de procédure pour modifier une loi de fond », explique-t-elle. A part obtenir la garantie que ce point sera traité dans le cadre de la loi d’avenir agricole, examinée en janvier 2014 à l’Assemblée nationale. « C’est là, assure t-elle, qu’il va falloir mettre la pression et faire du lobbying ».

Basta ! : La loi sur les contrefaçons a été adoptée à l’unanimité le 20 novembre. Le groupe écologiste avait pourtant émis des réserves en déposant des amendements pour en exclure les semences de ferme [1]. Cette loi représente-t-elle un danger pour les agriculteurs, arboriculteurs ou maraîchers qui utilisent leur propres graines pour en faire de la semence ?

Hélène Lipietz [2] : Ce n’est pas cette proposition de loi qui présente un danger, mais les marchandises contrefaites qui peuvent se révéler très dangereuses pour leurs utilisateurs. Cette proposition de loi concerne toutes les contrefaçons – les freins de voiture, les médicaments, les produits de luxe ou encore le matériel électronique – et pas l’agriculture en particulier. Les problèmes de contrefaçon agricole doivent représenter à peine cinq lignes sur un rapport [3] de quatre-vingt pages...

Ces quelques lignes sont néanmoins importantes : la répression de la contrefaçon, en étant étendue à l’ensemble des branches de la propriété intellectuelle, y compris aux « obtentions végétales » et donc aux semences de ferme, peut s’abattre sur les agriculteurs qui ressèment des variétés sélectionnées par l’industrie semencière.

Nous avons reçu des propositions d’amendements émanant du Réseau semences paysannes et de la Confédération paysanne. J’ai été la première à relayer la question des semences de ferme, car je sais que c’est un problème. La loi a été votée en plusieurs morceaux : la loi de fond sur la contrefaçon en 2007, puis la loi sur les certificats d’obtention végétale (en 2011, ndlr). La proposition de loi examinée le 20 novembre modifie certaines procédures de saisie pré-judiciaire dans le domaine de la contrefaçon. Ce n’est pas une loi de fond mais de procédure. Ce qui signifie qu’on ne peut faire des amendements que sur la procédure, et non sur le fond.

Consciente qu’il y a un problème sur les semences, j’ai cependant déposé un « amendement d’appel », pour signifier au gouvernement qu’il ne faut pas oublier cette question (lire l’intervention au Sénat). Le gouvernement a répondu que j’avais raison de le rappeler et que ce point sera traité dans le cadre de la loi d’avenir agricole, qui est une loi de fond (examinée en séance à l’Assemblée nationale en janvier 2014, ndlr). Je ne peux que prendre acte. Ma mission d’alerte a été claire et je ne peux pas aller plus loin.

Le groupe communiste (CRC) est le seul à avoir maintenu au vote son amendement sur les semence de ferme, qui a été soutenu par 20 sénateurs et donc rejeté. Pourquoi le groupe écologiste a-t-il retiré les amendements déposés ?

Les représentants du groupe CRC ne sont pas juristes. Cela ne sert à rien de déposer des amendements qui, en admettant qu’ils puissent être adoptés, auraient été censurés par le Conseil constitutionnel.

Cela n’aurait-il pas permis de porter le débat dans les plus hautes instances ?

En tant que juriste, j’essaie de faire une loi cohérente. Je ne m’amuse pas à vouloir mettre dans une loi quelque chose qui ne concerne pas cette loi. Les communistes sont dans une autre logique, une « logique de position », tout aussi louable. Mais j’estime qu’il vaut mieux montrer que l’on a compris la règle du jeu législatif pour que, lorsque je présenterai un amendement au bon endroit et à la bonne place, il ait des chances d’être voté et d’être intégré au corpus législatif. C’est une question de stratégie. J’essaie d’être pragmatique.

Vous expliquez sur votre site que la loi « permet déjà la réutilisation par un agriculteur des semences paysannes » en vous référant à l’article L624-23-1 du code de la propriété intellectuelle. Mais cet article a été créé dans le cadre de la loi du 8 décembre 2011 sur les Certificats d’Obtention Végétale qui limite le droit de ressemer à 21 espèces. Et ce à condition de payer des redevances à l’obtenteur [4]...

Oui, il faut rectifier cet article qui pose problème. Mais cet article n’était pas en débat. Je ne pouvais donc pas le rectifier dans le cadre de la loi de saisie des contrefaçons. C’est tout.

Faut-il dès lors supprimer les certificats d’obtention végétale ?

Je n’ai pas de réponse, je ne suis pas à la Commission des affaires agricoles. Le jour où je serai membre de la commission agricole, j’aurai des réponses pertinentes à vous faire. Je suis compétente sur un point de droit : ce projet de loi discuté a pour but de lutter contre la contrefaçon, quelle qu’elle soit. Il n’y a pas simplement les semences fermières ou les sacs Vuitton, mais aussi les médicaments qui contiennent non pas des principes actifs mais de la farine ! Le risque de tomber sur un médicament contrefait ou sur des fausses plaquettes de frein me paraît plus élevé que le risque d’avoir peut-être un jour des gros semenciers qui réussissent à faire saisir des semences agricoles. En tant que législateur, je devais faire un choix. J’ai fait celui de la pertinence de la saisie des contrefaçons qui sont dangereuses.

Vous avez voté cette loi en échange de la promesse du gouvernement de revenir sur cette question lors du débat sur la loi d’orientation agricole au printemps 2014. N’est-ce pas « périlleux » au regard du bilan des engagements socialistes vis-à-vis des écologistes ? D’autant que cette promesse d’exclure les semences de ferme du champs de la contrefaçon a déjà été faite en 2007, sous un gouvernement de droite, et que la loi de 2011 a maintenu le caractère délictueux de la semence de la ferme [5]...

Bien sûr, c’est périlleux ! Mais n’est-il pas plus périlleux de laisser sur le marché des médicaments ou des plaquettes de freins contrefaits ? J’ai fait ce choix-là, peut-être ai-je eu tort. Mais comment pourrais-je dire que je ne veux pas que des médicaments contrefaits ou que des plaquettes de freins contrefaites soient saisis le plus vite possible ?

Le fond du problème n’est vraiment pas dans la saisine de la contrefaçon. Nous n’avons rien changé sur le fond du droit, nous n’avions pas les possibilités de le faire. On a l’impression que le législateur est tout puissant, mais il y a des règles prévues par la Constitution : il n’est pas possible constitutionnellement de changer des règles de fond lorsqu’on est dans une loi de procédure, ou inversement. On a fait le maximum. C’est au moment de la discussion de la loi d’avenir agricole que les gens devront se mobiliser.

Quelles garanties précises vont demander les écologistes, dans le cadre de la loi d’orientation agricole, pour éviter que l’industrie semencière entrave la liberté de cultiver et le droit de replanter ? Et pour que ce droit ne soit pas réprimé ?

La loi d’avenir agricole relève de la commission agriculture, dont je ne suis pas membre. C’est là qu’il va falloir mettre la pression et faire du lobbying. En tant que citoyenne, je trouve scandaleux que les semences végétales puissent faire l’objet de brevets par les géants de l’alimentaire, alors qu’elles sont fondamentales pour préserver la planète d’une crise alimentaire majeure. Et je trouve encore plus scandaleux qu’il y ait une liste de semences qu’on ait le droit de cultiver alors qu’on a besoin du maximum de richesse biologique pour préserver un potentiel de gènes différents en cas d’épidémies. Je peux vous le dire en tant que citoyenne. Mais en tant que législateur, je n’ai pas les compétences en matière agricole pour vous répondre.

Propos recueillis par Sophie Chapelle
@Sophie_Chapelle

A lire :

- L’article publié par Basta ! le 22 novembre 2013 : Agriculteurs et jardiniers seront-ils bientôt obligés de cultiver dans la clandestinité ?

- La tribune publiée par Hélène Lipietz le 24 novembre 2013 : Pourquoi les écologistes ont voté une loi de procédure sur la contrefaçon

Photo : © Réseau Semences Paysannes

Notes

[1L’un des amendements demandait notamment à insérer un article additionnel ainsi rédigé : « La production à la ferme, par un agriculteur, de ses semences, de ses plants ou de ses animaux pour les besoins de son exploitation agricole, ne constitue pas une contrefaçon. La production à la ferme, par un agriculteur, de ses ferments, levains, levures et autres préparations naturelles à base de micro-organismes ou d’autres éléments naturels issus de sa ferme ou de l’environnement naturel, et destinés à ses productions fermières ou aux soins de ses cultures ou de ses animaux, ne constitue pas une contrefaçon. » (voir ici).

[2Sénatrice EELV de Seine et Marne, Hélène Lipietz est notamment membre de la Commission des Lois (voir son site).

[3Cette proposition de loi socialiste est issue d’un rapport (consultable ici) rédigé dans le cadre d’une mission d’information chargée d’évaluer les effets de la loi de fond sur la contrefaçon datant de 2007.

[4Avec une exemption pour le « petit agriculteur » (entendu comme celui qui ne cultive pas d’espèces végétales sur une surface supérieure à celle qui serait nécessaire pour produire 92 tonnes de céréales).

[5En 2007 déjà, une nouvelle loi sur la contrefaçon avait fait de la semence produite à la ferme une contrefaçon. A l’époque, le groupe socialiste avait initialement soutenu, avec des élus communistes, écologistes et centristes, un amendement qui excluait de la loi les semences de ferme. Ils avaient retiré leur amendement à la suite de la promesse du ministre de l’époque, Hervé Novelli, de reconnaître le droit des agriculteurs de produire leurs semences et de ne pas le considérer comme une contrefaçon dans une future loi. Or, la loi de 2011 a maintenu le caractère délictueux des semences de ferme.

 


 

 

source Semences : pourquoi les écologistes ont voté la loi sur les contrefaçons - Basta !

 

et aussi

 

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19 novembre 2013 2 19 /11 /novembre /2013 12:31

 

 

 

Le Réseau Semences Paysannes est reconnu d'intérêt général.

Collectif Semons La Biodiversité

 

 

 

 

 

 

COMMUNIQUE DE PRESSE – Paris le 13 novembre 2013.

Loi contrefaçon :
La lutte contre la contrefaçon va t-elle nier les droits des agriculteurs ?

Le 20 novembre, les sénateurs discuteront et voteront en séance publique une proposition de loi « tendant à renforcer la lutte contre la contrefaçon », un sommet dans la recherche de profit absolu. Il n’est plus ici question de vendre et d’acheter. Il s’agit, pour les firmes, de s’approprier le savoir acquis au quotidien par les paysans d’aujourd’hui et d’hier.

En 10 000 ans d’agriculture, on ne s’était jamais posé la question. Les paysans ont semé et choisit, saison après saison, les graines qu’ils allaient replanter. De la même manière, les éleveurs ont sélectionné leurs reproducteurs. C’est leur métier. C’est ce qui fait aujourd’hui de l’agriculture un domaine riche de savoirs, ce qui nous a permis de conserver la diversité du vivant. C’est un patrimoine universel qui n’a pas de prix.

On le croyait en tout cas, jusqu’à ce que certains décident de se désigner comme propriétaires de ce patrimoine. C’est donc au nom de la « propriété intellectuelle » que quelques industriels feront payer, de façon systématique, les paysans qui ne faisaient alors que leur métier.

Cette proposition de loi, et l’arsenal juridique déjà existant, piègent de fait les paysans. Ressemer des semences, donc les reproduire, sera une contrefaçon. Le paysan pourra alors voir sa récolte simplement saisie par les services de l’État. Pour éviter tout problème, il devrait donc, chaque année racheter ses semences ou payer des royalties. Le fonctionnement sera le même en élevage pour les mâles reproducteurs. Et il n’y a pas d’échappatoire ! Tout paysan qui ne pourra présenter les factures de ses semences, de ses animaux ou de ses préparations naturelles sera considéré, a priori, comme étant dans l’illégalité. L’industrie se retrouve donc seule à avoir le droit de poursuivre le travail engagé par les paysans depuis des millénaires !

Cette loi, en criminalisant le métier même de paysan, nie leur savoir, et bafoue leur liberté. Elle porte aussi l’appauvrissement irrémédiable de la biodiversité. C’est cette responsabilité que nos élus portent en ce moment. Et il est de notre devoir de le leur rappeler.

Une lettre ouverte a été adressée à l’ensemble des sénateurs français : Lisez et diffusez autour de vous et à vos élus notre proposition d’amendement et notre argumentaire. Pour télécharger cette lettre ouverte merci de cliquer ici.

Le collectif "Semons la Biodiversité" et l'Association Terre et Humanisme

Contacts Presse :

Guy Kastler, délégué général du Réseau Semences Paysannes : 06 03 94 57 21

Michel Metz, membre d'Attac : 06 19 79 53 69

Emilie Lapprand, animatrice de la veille juridique semences, Réseau Semences Paysannes :

05 53 84 91 92

 

 

Source : Loi contrefaçon : La lutte contre la contrefaçon va t-elle nier les droits des agriculteurs ?

 

Divers autres textes (exemple La lutte contre la contrefaçon va t-elle nier les droits des agriculteurs ? -- Collectif Semons la Biodiversité )  sur ce thème ajoutent une partie concernant le rôle des douaniers qui dit  ceci

 

Pour piéger les agriculteurs présumés contrefacteurs, ou ceux ayant oublié de remplir leurs obligations d’enregistrement ou de certification, la compétence des services des douanes sera élargie pour agir au niveau national.

 

 

Ces derniers seront autorisés à se déguiser en délinquants selon deux techniques ainsi décrites dans la proposition de loi :

  • "L’infiltration" :

"cette procédure, qui requiert l’autorisation préalable du procureur de la République, consiste, pour un douanier doté d’une fausse identité, à s’installer dans le rôle de trafiquant pour collecter des renseignements utiles à la réalisation d’investigations fondées sur le code des douanes (visite domiciliaire, placement en retenue douanière des personnes ayant commis un flagrant délit douanier puni d’une peine d’emprisonnement) afin de notifier des infractions douanières et de procéder à la saisie des marchandises de fraude."

 

 

 

Je n'ai pas réussi à déterminer si cette partie était vraie ou non, mais elle en tout cas tout à fait plausible. Je le mets donc ici, parce que si elle est vraie, elle implique un débat à elle seule...

Mais subsidiaire par rapport à une loi qui touche les racines de notre existence et les fondations même de notre liberté… le totalitarisme… un totalitarisme encore inimaginable, il y a bien peu.

Un autre  texte qui fait apparaître le caractère mondial de cette appropriation du monde, alors qu’un peu partout de nouvelles lois sur les semences sont produites qui ont la même caractéristique privative des droits les plus naturels, les plus fondamentaux et qui touchent tant les producteurs de nourriture que les mangeurs. Chaque jour, un peu partout dans le monde de nouvelles personnes, paysannes ou non, s'élèvent contre cet abus, ce crime de lèse vie.

Une autre exemple :

 

Lois sur les semences en Amérique Latine :
Une offensive qui se poursuit et une résistance qui s’intensifie et se multiplie

par GRAIN

 

Introduction

Les tentatives des grandes sociétés d’agrobusiness d’imposer la privatisation des semences continuent d’être déployées partout sur la planète. Derrière leurs tentatives, elles poursuivent un objectif clair : s’approprier un monopole sur les semences et rendre illégale la pratique historique et millénaire de conserver et de reproduire les semences. L’Amérique latine n’est pas à l’abri de ces attaques.

Bien que les lois UPOV soient actuellement le fer de lance de cette agression, on assiste en réalité à une avalanche de lois, de décrets et de règlements, notamment le brevetage d’événements biotechnologiques, les normes sanitaires, les normes de commercialisation, les lois sur la certification, divers registres, des règlements tributaires, les soi-disant « bonnes pratiques agricoles, » les programmes de recherche, les politiques de mise sur pied de marchés de semences et plus encore.

Déjà en 2005, nous disions : « Si nous les examinons aujourd’hui, nous constatons que les lois sur les semences ne sont que répressives. Elles traitent de ce que les agriculteurs ne peuvent pas faire. Elles imposent quelles sortes de semences ne peuvent pas être vendues, ne peuvent pas être échangées et dans certains cas ne peuvent même pas être utilisées. Tout cela au nom de la régulation du marché et de la protection des producteurs de denrées alimentaires ! Dans ce sens, les lois sur les semences vont de pair avec les régimes de droits de propriété intellectuelle (DPI) comme les droits des sélectionneurs de plantes et les brevets. Ces deux sortes de législations — les règlements de commercialisation et les droits de propriété – se renforcent l’une l’autre. ».

Si quelque chose a changé depuis, c’est que les stratégies de privatisation se sont multipliées et sont devenues plus radicales et ambitieuses. Mais les entreprises et les gouvernements ne s’attendaient pas à ce que les résistances nationales et régionales se multiplient en même temps.

Qu’est-ce que l’UPOV ?

L’Union internationale pour la protection des obtentions végétales (UPOV) est une organisation intergouvernementale dont le siège social est à Genève (Suisse). L’UPOV a été établie par la Convention internationale pour la protection des obtentions végétales. La Convention a été adoptée à Paris en 1961 et a été révisée en 1972, 1978 et 1991. Selon sa propre définition, « la mission de l’UPOV est de mettre en place et promouvoir un système efficace de protection des variétés végétales afin d’encourager l’obtention de variétés dans l’intérêt de tous. » Dans le langage de l’UPOV, « protection » signifie privatisation.

L’histoire de l’UPOV montre une expansion permanente et apparemment sans limites des droits des entreprises semencières accompagnée d’une réduction également permanente et sans limites des droits et libertés des agriculteurs et paysans. La Convention originale accordait des droits de propriété uniquement sur les variétés qui auraient été développées par l’auteur de la demande de privatisation, concédait à peu de choses près un droit exclusif de commercialisation des variétés privatisées et n’établissait aucune sanction spécifique. Après les transformations successives de 1972, 1978 et 1991, l’UPOV donne maintenant un droit de propriété sur des variétés « découvertes » et accorde des droits monopolistes sur la production, la commercialisation, l’exportation et l’importation, en plus de permettre aux entreprises de demander la confiscation des cultures, des plantations, des récoltes et des produits dérivés de la récolte. De même, elle établit que les entreprises peuvent exiger des sanctions pénales, y compris des peines de prison.

Aujourd’hui, on tente d’imposer la Convention UPOV 91 partout sur la planète sous le prétexte de « protéger » les variétés. Cependant, la démonstration a été abondamment faite que l’UPOV 91 nie les droits des agriculteurs aux plans tant spécifique que général en empiétant sur leur droit de conserver les semences pour la culture et en permettant aux sociétés privées de s’approprier la biodiversité de manière à exercer un contrôle commercial total sur les semences et les connaissances des communautés. De plus, les critères de protection des obtentions de l’UPOV encouragent l’uniformité des semences, aggravant du même coup l’érosion de la biodiversité. L’uniformisation est extrêmement dangereuse, car elle mène à la perte des récoltes et à une plus grande insécurité alimentaire. Finalement, la privatisation des semences nuit à la recherche et à l’échange de connaissances.

En Amérique latine et les Caraïbes, l’Argentine, la Bolivie (État plurinational de), le Brésil, le Chili, la Colombie, le Costa Rica, l’Équateur, le Mexique, le Nicaragua, le Panama, le Paraguay, le Pérou, la République dominicaine, Trinidad et Tobago et l’Uruguay sont membres de l’UPOV. Parmi ces pays, le Costa Rica, le Panama, la République dominicaine et le Pérou sont les seuls qui appliquent à l’heure actuelle l’UPOV 91.



Le puits sans fond de l’ambition des entreprises semencières

Les lois sur les semences que l’on cherche maintenant à imposer sont une application intégrale et souvent élargie de l’UPOV 91. Par conséquent, (...) Lire la suite dans le document pdf ci-joint

PDF - 351.5 ko
Lois sur les semences en Amérique latine : une offensive qui se poursuit et une résistance qui s’intensifie et se multiplie

Grain.

El Correo. Paris, le 15 novembre 2013.

 

 

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