26 décembre 2012 3 26 /12 /décembre /2012 19:41
Série « Banques – Peuples : les dessous d’un match truqué ! » (3e partie)

 

Europe banque centrale

La première partie de la série, intitulée « 2007-2012 : 6 années qui ébranlèrent les banques » a été publiée le 20 novembre 2012, la seconde partie intitulée « La BCE et la Fed au service des grandes banques privées » a été publiée le 29 novembre 2012

 

Ne pas sous-estimer la capacité des gouvernants à mettre à profit une situation de crise

De manière régulière, les grands médias abordent les questions d’un possible éclatement de la zone euro, de l’échec des politiques d’austérité en matière de relance économique, des tensions entre Berlin et Paris, entre Londres et les membres de la zone euro, des contradictions au sein du conseil de la BCE, des énormes difficultés pour trouver un accord sur le budget de l’UE, des crispations de certains gouvernements européens à l’égard du FMI à propos du dosage de l’austérité. Tout cela est vrai, mais il ne faut surtout pas oublier un point fondamental : la capacité de gouvernants, qui se sont mis docilement au service des intérêts des grandes entreprises privées, de gérer une situation de crise, voire de chaos, pour agir dans le sens demandé par ces grandes entreprises. Le lien étroit entre les gouvernants et le grand Capital n’est même plus dissimulé. A la tête de plusieurs gouvernements, placés à des postes ministériels importants et à la présidence de la BCE, se trouvent des hommes directement issus du monde de la haute finance, à commencer par la banque d’affaires Goldman Sachs. Certains hommes politiques de premier plan sont récompensés par un poste dans une grande banque ou une autre grande entreprise une fois qu’ils ont accompli leurs bons offices pour le grand Capital. Ce n’est pas nouveau mais c’est plus évident et régulier qu’au cours de 50 dernières années. On peut parler de véritables vases communicants.

Considérer que la politique des dirigeants européens est un échec parce que la croissance économique n’est pas de retour, c’est en partie se tromper de critère d’analyse. Les objectifs poursuivis par la direction de la BCE, par la Commission européenne, par les gouvernements des économies les plus fortes de l’UE, par les directions des banques et des autres grandes entreprises privées, ce n’est ni le retour rapide à la croissance, ni la réduction des asymétries au sein de la zone euro et de l’UE afin d’en faire un ensemble plus cohérent où serait de retour la prospérité.

Parmi leurs objectifs principaux, il faut en souligner deux : 1. éviter un nouveau krach financier et bancaire qui pourrait se révéler pire que celui de septembre 2008 (les deux premières parties de cette série ont abordé cet objectif qui sera à nouveau développé dans la quatrième partie) ; 2. utiliser plusieurs armes (l’augmentation très importante du chômage, le remboursement de la dette publique, la recherche de l’équilibre budgétaire, le fouet de la quête de l’amélioration de la compétitivité des Etats membres de l’UE les uns par rapport aux autres et par rapport aux concurrents commerciaux des autres continents) pour avancer dans la plus grande offensive menée depuis la seconde guerre mondiale à l’échelle européenne par le Capital contre le Travail. Pour le Capital, il s’agit d’accroître encore la précarisation des travailleurs, de réduire radicalement leur capacité de mobilisation et de résistance, de réduire les salaires et différentes indemnités sociales de manière importante tout en maintenant les énormes disparités entre les travailleurs dans l’UE afin d’augmenter la compétition entre eux. D’abord, il y a les disparités entre les salariés d’un même pays : entre femmes et hommes, entre CDI et CDD, entre travailleurs à temps partiel et travailleurs à temps plein. A l’initiative du patronat et avec l’appui des gouvernements successifs (et en leur sein les partis socialistes européens ont joué un rôle actif), ces disparités se sont accrues au cours des 20 dernières années. Et puis, il y a les disparités entre les travailleurs des différents pays de l’UE. Les disparités entre travailleurs des pays du Centre et ceux des pays de la Périphérie à l’intérieur de l’UE sont le complément de celles se creusant à l’intérieur des frontières nationales.

Les profondes disparités entre les travailleurs des différents pays de l’UE

Les salaires des travailleurs du groupe de pays les plus forts (Allemagne, France, Pays-Bas, Finlande, Suède, Autriche, Danemark) sont le double ou le triple des salaires des travailleurs en Grèce, au Portugal ou en Slovénie, ils sont 10 fois plus élevés que les salaires des travailleurs de Bulgarie, 7 à 9 fois plus que les salaires roumains, lituaniens ou lettons |1|
. En Amérique du Sud, alors que les différences sont grandes entre les économies les plus fortes (Brésil, Argentine, Venezuela) et les plus faibles (Paraguay, Bolivie, Equateur…), la différence entre le salaire minimum légal est de l’ordre de 1 à 4, donc une disparité nettement plus faible qu’au sein de l’Union Européenne. C’est dire à quel point est forte la concurrence entre les travailleurs d’Europe.

Les grandes entreprises des pays européens les plus forts sur le plan économique profitent à fond des disparités salariales au sein de l’UE. Les entreprises allemandes ont choisi d’accroître fortement leur production réalisée dans les pays de l’UE où les salaires sont les plus bas. Les biens intermédiaires sont ensuite rapatriés en Allemagne sans payer de taxe d’import/export, pour y être assemblés puis réexportés principalement vers les autres pays d’Europe. Cela permet de diminuer les coûts de production, de mettre en concurrence les travailleurs allemands avec ceux des autres pays et d’augmenter la rentabilité de ces entreprises. De plus, ces biens assemblés en Allemagne et vendus sur les marchés extérieurs apparaissent bien sûr dans les exportations allemandes, dont une partie importante est en réalité le résultat de l’assemblage de produits importés. Les entreprises des autres pays forts de l’UE font certes de même, mais l’économie allemande est celle qui bénéficie proportionnellement le plus des bas salaires et de la précarisation du travail au sein de la zone euro (y compris à l’intérieur des frontières de l’Allemagne |2|) et de l’UE. En 2007, les excédents commerciaux de l’Allemagne étaient redevables à 83% de ses échanges avec les autres pays de l’UE (145 milliards d’euros vis-à-vis des autres pays de la zone euro, 79 milliards vis-à-vis de l’Europe hors zone euro, et 45 milliards avec le reste du monde) |3| .

Le modèle allemand comme produit de l’offensive néolibérale

Les patrons allemands, aidés par le gouvernement socialiste de Gerhard Schröder en 2003-2005, ont réussi à imposer des sacrifices aux travailleurs. L’étude En finir avec la compétitivité publiée conjointement par ATTAC et la Fondation Copernic résume ainsi les grandes étapes des atteintes aux conquêtes des travailleurs d’Allemagne et à leurs droits sociaux et économiques : « Les lois Hartz (du nom de l’ex-Directeur des Ressources Humaines de Volkswagen et conseiller de Gerhard Schröder) se sont échelonnées entre 2003 et 2005. Hartz I oblige les chômeurs à accepter l’emploi qui leur est proposé, même pour un salaire inférieur à leur indemnité chômage. Hartz II institue des mini-jobs à moins de 400 euros mensuels (exemptés de cotisations sociales salariées). Hartz III limite à un an le versement des allocations chômage pour les travailleurs âgés et en durcit les conditions d’attribution. Hartz IV fusionne l’allocation chômage de longue durée et les aides sociales, et les plafonne à 345 euros par mois. Aux lois Hartz s’ajoutent les réformes successives des retraites et du système d’assurance-maladie : retraite par capitalisation (retraites Riester) ; hausse des cotisations, report de l’âge légal de départ à la retraite (objectif 67 ans en 2017). » Les auteurs de cette étude soulignent : « L’ensemble de ces réformes a conduit à une impressionnante montée des inégalités sociales. C’est un aspect souvent oublié du ‘modèle allemand’ et cela vaut donc la peine de donner quelques chiffres détaillés. L’Allemagne est devenue un pays très inégalitaire : un avant-projet de rapport parlementaire sur la pauvreté et la richesse |4| vient d’établir que la moitié la plus pauvre de la société possède seulement 1% des actifs, contre 53 % pour les plus riches. Entre 2003 et 2010, le pouvoir d’achat du salaire médian a baissé de 5,6 %. Mais cette baisse a été très inégalement répartie : – 12 % pour les 40 % de salariés les moins bien payés, – 4 % pour les 40 % de salariés les mieux payés |5|. Les données officielles montrent que la proportion de bas salaires est passée de 18,7 % en 2006 à 21 % en 2010 et cette progression des bas salaires – c’est à souligner – se fait pour l’essentiel en Allemagne de l’Ouest. »

Selon la même étude, en 2008, le nombre de salariés a augmenté de 1,2 million par rapport à 1999, mais cette progression correspond à une augmentation de 1,9 million du nombre d’emplois précaires, et donc à une perte d’un demi-million d’emplois CDI à plein temps. Un quart des salarié(e)s occupent aujourd’hui un emploi précaire, et cette proportion (la même désormais qu’aux États-Unis) monte à 40 % chez les femmes. « Les emplois salariés précaires sont majoritairement (à 70 %) destinés aux femmes |6|. La proportion de chômeurs indemnisés a chuté de 80 % en 1995 à 35 % en 2008 et toutes les personnes au chômage depuis plus d’un an ont basculé vers l’aide sociale ».

Comme le note Arnaud Lechevalier, cette évolution s’inscrit « dans un contexte plus général d’érosion de la protection des salariés par les conventions collectives : la part des salariés couverts a baissé de 76 % à 62 % en dix ans et ces conventions ne concernaient plus que 40 % des entreprises allemandes en 2008. De plus, les syndicats ont dû concéder de multiples dérogations aux conventions collectives de branche au niveau des entreprises » |7|
.

Les arrière-pensées des dirigeants et des patrons européens

Quand on tente d’expliquer l’attitude actuelle des dirigeants allemands face à la crise de l’Eurozone, on peut émettre l’hypothèse qu’une des leçons qu’ils ont tirées de l’absorption de l’Allemagne de l’Est au début des années 1990, c’est que les disparités très fortes entre travailleurs peuvent être exploitées pour imposer une politique pro-patronale très forte. Les privatisations massives en Allemagne de l’Est, les atteintes à la sécurité de l’emploi des travailleurs de l’ex-RDA combinée à l’augmentation de la dette publique allemande due au financement de cette absorption (qui a servi de prétexte pour imposer les politiques d’austérité) ont permis d’imposer des reculs très importants aux travailleurs d’Allemagne, qu’ils soient de l’Est ou de l’Ouest. Les dirigeants allemands actuels se disent que la crise de la zone euro et les attaques brutales imposées au peuple grec et à d’autres peuples de la Périphérie sont l’occasion d’aller encore plus loin et de reproduire d’une certaine manière à l’échelle européenne ce qu’ils ont fait en Allemagne. Quant aux autres dirigeants européens des pays les plus forts et aux patrons des grandes entreprises, ils ne sont pas en reste, ils se félicitent de l’existence d’une zone économique, commerciale et politique commune où les transnationales européennes et les économies du Nord de la zone euro tirent profit de la débâcle du Sud pour renforcer la profitabilité des entreprises et marquer des points en terme de compétitivité par rapport à leur concurrents nord-américains et chinois. Leur objectif, au stade actuel de la crise, n’est pas de relancer la croissance et de réduire les asymétries entre les économies fortes et les faibles de l’UE. Ils considèrent en outre que la débâcle du Sud va se traduire par des opportunités de privatisations massives d’entreprises et de biens publics à des prix bradés. L’intervention de la Troïka et la complicité active des gouvernements de la Périphérie les y aident. Le grand Capital des pays de la Périphérie est favorable à ces politiques car il compte bien lui-même obtenir une part d’un gâteau qu’il convoitait depuis des années. Les privatisations en Grèce et au Portugal préfigurent ce qui va arriver en Espagne et en Italie où les biens publics à acquérir sont beaucoup plus importants vu la taille de ces deux économies.

La volonté de faire baisser les salaires

Revenons à la question des salaires. Selon Michel Husson, en Allemagne, le coût salarial unitaire réel a baissé de près de 10 % entre 2004 et 2008 |8|
. Dans le reste de l’Europe, pendant la même période, il a également baissé mais dans une proportion bien moindre qu’en Allemagne. C’est à partir de la crise de 2008-2009, qui affecte durement l’Eurozone, que l’on constate une chute très nette des salaires réels des pays les plus touchés. C’est ce que souligne Patrick Artus : « On constate dans les pays en difficulté de la zone euro (Espagne, Italie, Grèce, Portugal) une forte baisse des salaires réels » |9|. Patrick Artus déclare que la baisse des salaires correspond à une politique délibérée des dirigeants européens et il ajoute que, de toute évidence, cette politique n’a ni permis de relancer l’investissement dans les pays mentionnés, ni de rendre plus compétitive les exportations des mêmes pays. Patrick Artus écrit que les effets favorables : « des baisses de salaires sur la compétitivité donc le commerce extérieur ou sur l’investissement des entreprises ne sont pas présents ». Il ajoute que la baisse de salaire a deux effets clairs : d’une part, elle a augmenté la profitabilité des entreprises (donc, en termes marxistes, une augmentation du taux de profit par une augmentation de la plus-value absolue, voir encadré « L’ABC sur la plus-value absolue et relative ainsi que sur le salaire ») ; d’autre part, elle a diminué la demande des ménages, ce qui a renforcé la contraction de l’économie |10|. Cette étude réalisée par Natixis vient confirmer que le but des dirigeants européens n’est ni de relancer l’activité économique, ni d’améliorer la position économique des pays de la Périphérie par rapport à ceux du Centre. La baisse des salaires vise à réduire la capacité de résistance des travailleurs des pays concernés, augmenter le taux de profit du Capital et pousser plus loin le démantèlement de ce qui reste du welfare state construit au cours des 35 années qui ont suivi la seconde guerre mondiale (période qui a été suivie par le tournant néolibéral de la fin des années 1970-début des années 1980).

Dans le Rapport mondial sur les salaires 2012-2013 publié par l’Organisation internationale du travail en décembre 2012, les auteurs relèvent que dans les pays développés entre 2008 et 2012, « 1es salaires ont enregistré un double creux » (càd en 2008 et en 2011) |11| . C’est la seule région du monde avec le Moyen Orient où les salaires ont baissé depuis 2008. En Chine, dans le reste de l’Asie, en Amérique latine, les salaires ont augmenté. En Europe orientale, ils ont connu une certaine récupération après l’effondrement des années 1990. Ce rapport permet de confirmer que l’épicentre de l’offensive du Capital contre le Travail s’est déplacé vers les pays les plus développés.

L’ABC sur la plus-value absolue et relative ainsi que sur le salaire |12|Lorsque l’ouvrier (ou l’ouvrière) commence à travailler à l’usine au début de sa journée, il incorpore une valeur aux matières premières (ou aux biens intermédiaires qu’ils assemblent). Au bout d’un certain nombre d’heures, il ou elle a reproduit une valeur qui est exactement l’équivalent de on salaire quotidien ou hebdomadaire. Si il ou si elle s’arrêtait de travailler à ce moment précis, le capitaliste n’obtiendrait pas un sou de plus-value mais dans ces conditions-là, le capitaliste n’aurait aucun intérêt d’acheter cette force de travail. Comme l’usurier ou le marchand du Moyen-âge, il « achète pour vendre ». Il achète la force de travail pour obtenir d’elle un produit plus élevé que ce qu’il a dépensé pour l’acheter. Ce « supplément », ce « rabiot », c’est précisément sa plus value, son profit. Il est donc entendu que, si l’ouvrier ou l’ouvrière produit l’équivalent de son salaire en 4 heures de travail, il ou elle travaillera non pas 4 mais 6, 7, 8 ou 9 heures. Pendant ces 2, 3, 4 ou 5 heures « supplémentaires », il ou elle produit de la plus-value pour le capitaliste en échange de laquelle il ou elle ne touche rien. L’origine de la plus-value, c’est donc du surtravail, du travail gratuit, approprié par le capitaliste. « Mais c’est du vol », va-t-on s’écrier. La réponse doit être : « oui et non ». Oui du point de vue de l’ouvrier ou de l’ouvrière ; non, du point du capitaliste et des lois du marché. Le capitaliste n’a en effet pas acheté sur le marché « la valeur produite ou à produire par l’ouvrier ou par l’ouvrière ». Il n’a pas acheté son travail, càd le travail que l’ouvrier ou l’ouvrière va effectuer (s’il avait fait cela, il aurait commis un vol pur et simple ; il aurait payé 25€ pour ce qui vaut 50€). Il a acheté la force de travail de l’ouvrier ou de l’ouvrière. Cette force de travail a une valeur propre comme toute marchandise à sa valeur. La valeur de la force de travail est déterminée par la quantité de travail nécessaire pour la reproduire, càd par la subsistance (ou sens large du terme) de l’ouvrier, de l’ouvrière et de leur famille. La plus-value prend son origine dans le fait qu’un écart apparaît entre la valeur produite par l’ouvrier/ière et la valeur des marchandises nécessaires pour assurer sa subsistance.La valeur de la force de travail a une caractéristique particulière par rapport à celle de toute autre marchandise : elle comporte, outre un élément strictement mesurable, un élément variable. L’élément stable, c’est la valeur des marchandises qui doivent reconstituer la force de travail du point de vue physiologique (qui doivent permettre à l’ouvrier ou à l’ouvrière de récupérer des calories, des vitamines, une capacité de dégager une énergie musculaire et nerveuse déterminée, sans laquelle il serait incapable de travailler au rythme normal prévu par l’organisation capitaliste de travail à un moment donné). L’élément variable, c’est la valeur des marchandises, à une époque et dans un pays déterminé, qui ne font pas partie du minimum vital physiologique. Marx appelle cette part de la valeur de la force de travail, sa fraction historico-morale. Cela veut dire qu’elle n’est pas fortuite. Elle est le résultat d’une évolution historique et d’une situation donnée des rapports de force entre le Capital et le Travail. A ce point précis de l’analyse économique marxiste, la lutte des classes, son passé et son présent, devient un facteur co-déterminant de l’économie capitaliste.Le salaire est le prix de marché de la force de travail. Comme tous les prix de marché, il fluctue autour de la valeur de la marchandise examinée. Les fluctuations du salaire sont déterminées notamment par les fluctuations de l’armée de réserve industrielle, càd du chômage.Pour obtenir le maximum de profit et développer le plus possible l’accumulation du capital, les capitalistes réduisent au maximum la part de la valeur nouvelle, produit par la force de travail, qui revient aux travailleurs et travailleuses sous forme de salaires. Les deux moyens essentiels par lesquelles les capitalistes s’efforcent d’accroître leur part, càd la plus-value, sont :

La prolongation de la journée de travail, la réduction des salaires réels et l’abaissement du minimum vital. C’est ce que Marx appelle l’accroissement de la plus-value absolue.

L’augmentation de l’intensité et de la productivité du travail sans augmentation proportionnelle du salaire. C’est l’accroissement de la plus-value relative.

Mise en perspective de l’offensive du Capital contre le Travail

Ce que vivent les salariés et les allocataires sociaux de Grèce, du Portugal, d’Irlande et d’Espagne aujourd’hui a été imposé aux travailleurs des pays en développement à la faveur de la crise de la dette des années 1980-1990. Au cours des années 1980, l’offensive a également visé les travailleurs en Amérique du Nord à partir de la présidence de Ronald Reagan, en Grande-Bretagne sous la férule de Margaret Thatcher, la Dame de fer, et chez ses émules sur le vieux continent. Les travailleurs de l’ex-bloc de l’Est ont également été soumis au cours des années 1990 aux politiques brutales imposées par leurs gouvernements et le FMI. Selon le rapport Rapport mondial sur les salaires 2012-2013 publié par l’OIT (mentionné plus haut) : « En Russie, par exemple, la valeur réelle des salaires s’est effondrée dans les années 1990 à moins de 40% de la valeur qu’ils avaient et il a fallu une autre décennie pour qu’ils retrouvent leur niveau initial » |13|
. Ensuite, d’une manière certes nettement moins brutale que celle qui a affecté les peuples du tiers-monde (des pays les plus pauvres jusqu’aux économies dites émergentes), l’offensive a pris pour cible les travailleurs d’Allemagne à partir de 2003-2005. Les effets néfastes pour une partie significative de la population allemande se font sentir encore aujourd’hui même si les succès des exportations allemandes |14| limitent le nombre de chômeurs et qu’une partie de la classe ouvrière n’en ressent pas directement les conséquences. L’offensive qui s’est accélérée depuis 2007-2008 a donc démarré au niveau mondial au début des années 1980 |15|. L’OIT centre son analyse sur une période plus courte (1999-2011) et les données sont claires : « Entre 1999 et 2011, l’augmentation de la productivité du travail moyenne dans les économies développées a été plus de deux fois supérieure à celle des salaires moyens. Aux Etats-Unis, la productivité du travail réelle horaire a augmenté de 85% depuis 1980, tandis que la rémunération horaire réelle n’a augmenté que de 35%. En Allemagne, la productivité du travail a augmenté de presque un quart sur les deux décennies écoulées tandis que les salaires mensuels réels n’ont pas bougé » |16|. C’est ce que Karl Marx appelait l’augmentation de la plus-value relative (voir encadré).

Et plus loin : « La tendance mondiale a entraîné un changement dans la distribution du revenu national, la part des travailleurs baissant tandis que les parts du capital dans le revenu augmentent dans une majorité de pays. Même en Chine, pays où les salaires ont approximativement triplé durant la décennie écoulée, le PIB a augmenté plus rapidement que la masse salariale totale – et la part du travail a donc baissé. » |17| Cette tendance lourde au niveau mondial est la manifestation de l’augmentation de la plus-value extraite du Travail par le Capital. Il est important de noter que pendant une bonne partie du 19e siècle la forme principale d’augmentation de la plus-value est passée par l’accroissement de la plus-value absolue (baisse des salaires, augmentation des heures de travail). Progressivement, dans les économies les plus fortes, au cours de la deuxième moitié du 19e s. et tout au long du 20e s. (sauf pendant le nazisme, le fascisme et sous d’autres régimes dictatoriaux qui ont imposé des baisses de salaires), elle a été remplacée ou dépassée par l’augmentation de la plus-value relative (augmentation de la productivité du travail sans que les salaires suivent dans la même proportion). Après plusieurs décennies d’offensive néolibérale, l’accroissement de la plus-value absolue redevient une forme importante d’extraction de la plus-value et s’ajoute à la plus-value relative. Alors que pendant des décennies, les patrons ont essentiellement augmenté la plus-value relative, principalement grâce aux gains de productivité du travail, depuis 2009-2010, ils parviennent à augmenter la plus-value absolue : en baissant les salaires réels et dans certains cas en augmentant le temps de travail. Ils utilisent la crise pour combiner l’augmentation de la plus-value relative à l’augmentation de la plus-value absolue. Cela donne une indication de l’ampleur de l’offensive en cours.

Toujours davantage de travailleurs dans le collimateur

Dans un document de la Commission européenne intitulé « Le deuxième programme économique d’ajustement pour la Grèce » et datant de mars 2012 |18|, il est clairement mis en évidence qu’il faut poursuivre la réduction des salaires. Le tableau 17 de la page 41 montre que le salaire minimum légal en Grèce est le quintuple du salaire minimum moyen en Roumanie et en Bulgarie (pays voisins de la Grèce), le triple de la Hongrie et des républiques baltes, plus du double du salaire minimum en Pologne et en République tchèque ; il est supérieur au salaire minimum en Espagne et au Portugal. L’objectif est de rapprocher la Grèce des pays où les salaires sont les plus « compétitifs », donc les plus bas. Evidemment, si les salaires poursuivent leur chute radicale en Grèce comme le veut la Troïka et le patronat, il faudra que les salaires en Espagne, au Portugal, en Irlande et aussi dans les pays les plus forts suivent la même tendance, et ce de manière accélérée.

Ceux qui sont aux commandes en Europe servent une logique grâce à laquelle les patrons européens parviennent à augmenter la quantité de plus-value qu’ils extraient du travail des salariés d’Europe et cherchent à marquer des points dans la bataille commerciale avec les concurrents asiatiques ou nord-américains.

Ces dirigeants sont prêts à pousser dans leur dernier retranchement les syndicats européens en réduisant fortement la marge de négociation dont ils ont disposé pendant des décennies.

Le Capital marque des points supplémentaires contre le Travail

Dans plusieurs pays de l’UE, au cours de leur offensive contre les conquêtes sociales, les gouvernants et la Commission européenne ont réussi à réduire radicalement la portée des conventions collectives interprofessionnelles. C’est le cas des pays de l’ex-bloc de l’Est, c’est aussi le cas de la Grèce, du Portugal, de l’Espagne, de l’Italie, de l’Irlande… Dans plusieurs pays, ils ont également réussi à faire baisser le salaire minimum légal et le montant des retraites. Ils ont réussi à réduire radicalement la protection contre les licenciements et à augmenter l’âge de départ à la retraite.

L’aggravation de la crise des pays de la périphérie de la zone euro

Au cours de 2012, la crise s’est aggravée en Grèce, en Irlande, au Portugal, en Espagne, en conséquence des politiques d’austérité brutale appliquées par des gouvernants complices des exigences de la Troïka. En Grèce, la chute cumulée du PIB depuis le début de la crise atteint 20%. Le pouvoir d’achat d’une grande majorité de la population a baissé de 30 à 50%. Le chômage et la pauvreté ont littéralement explosé. Alors qu’en mars 2012, tous les grands médias ont relayé le discours officiel qui affirmait que la dette avait été réduite de moitié |19|, selon les estimations officielles rendues publiques fin octobre 2012, la dette publique grecque qui représentait 162% du PIB à la veille de la réduction de dette de mars 2012 atteindra 189% du PIB en 2013 et 192% en 2014 |20|
. Cette information ne fait pas partie des titres de la grande presse de masse. Au Portugal, les mesures d’austérité sont d’une telle violence et la dégradation économique est si grave qu’un million de Portugais ont manifesté spontanément le 15 septembre 2012, chiffre qui n’avait été atteint que le 1er mai 1974 pour fêter la victoire de la Révolution des œillets. En Irlande, dont les médias parlent beaucoup moins, le chômage a pris des proportions énormes, conduisant 182.900 jeunes âgés de 15 à 29 ans à quitter le pays depuis que la crise a éclaté en 2008 |21|. Un tiers des jeunes qui avaient un emploi avant la crise s’est retrouvé au chômage. Le sauvetage des banques a représenté jusqu’ici plus de 40 % du PIB (près de 70 milliards d’euros sur un PIB de 156 milliards en 2011) |22|
. Le recul de l’activité économique a atteint 20% depuis 2008. Le gouvernement de Dublin a réaffirmé qu’il supprimerait 37 500 postes de travail dans le secteur public d’ici 2015. En Espagne, le taux de chômage atteint 50% chez les jeunes. Depuis le début de la crise, 350.000 familles ont été expulsées de leur logement à cause des impayés de dette hypothécaire |23|
. En un an, le nombre de familles dont tous les membres sont sans emploi a augmenté de 300 000 pour atteindre un total de 1,7 million, soit 10% de toutes les familles d’Espagne |24|. La situation se dégrade de manière continue dans les pays de l’ancien bloc de l’Est membres de l’UE, à commencer par ceux qui ont adhéré à l’Eurozone.

En somme, partout dans le monde, le Capital s’est lancé dans une offensive contre le Travail. C’est en Europe que, depuis 2008, l’offensive prend la forme la plus systématique en commençant par les pays de la Périphérie. Alors que les banques (et le capitalisme en tant que système) sont les responsables de la crise, elles sont systématiquement protégées. Partout, le remboursement de la dette publique est le prétexte invoqué par les gouvernants pour justifier une politique qui s’en prend aux droits économiques et sociaux de l’écrasante majorité de la population. Si les mouvements sociaux et, parmi eux, les syndicats veulent victorieusement affronter cette offensive dévastatrice, il faut prendre à bras le corps la question de la dette publique afin d’enlever au pouvoir son argument principal. L’annulation de la partie illégitime de la dette publique et l’expropriation des banques pour les intégrer à un service public de l’épargne et du crédit sont des mesures essentielles dans un programme alternatif à la gestion capitaliste de la crise.

Fin de la troisième partie

Éric Toussaint

Notes

|1| Voir Le Monde des 22 et 23 janvier 2012 sur la base d’Eurostat.

|2| En Allemagne, en septembre 2010, selon Le Monde du 17 mai 2011, 7,3 millions de travailleurs gagnaient à peine 400 euros par mois. Dans ce pays, le nombre de travailleurs à temps partiel a augmenté de 46% entre 2000 et 2010 tandis qu’en France il augmentait de 17%.

|3| OCDE, International Trade by Commodity Statistics (SITC Revision 3) mentionné dans ATTAC et Fondation Copernic, En finir avec la compétitivité, Paris, octobre 2012, http://www.france.attac.org/article…

|4| Lebenslagen in Deutschland. Entwurf des vierten Armuts- und Reichstumsberichts der Bundesregierung, projet du 17 septembre 2012, http://gesd.free.fr/arb912.pdf

|5| Karl Brenke et Markus M. Grabka, « Schwache Lohnentwicklung im letzten Jahrzehnt », DIW Wochenbericht, n° 45, 2011, http://gesd.free.fr/brenke11.pdf

|6| Source : destatis.de (Office fédéral allemand de statistique).

|7| Arnaud Lechevalier, « Un modèle qui ne fait guère envie », Alternatives économiques, n° 300, mars 2011, http://gesd.free.fr/allmodel.pdf cité par ATTAC et Fondation Copernic

|8| Voir Michel Husson, Economie politique du « système-euro », juin 2012, http://cadtm.org/Economie-politique… ou http://hussonet.free.fr/eceurow.pdf

|9| Patrick Artus, « La baisse des salaires dans les pays en difficulté de la zone euro est-elle utile ? », Flash Economie n°289, 18 avril 2012.

|10| Patrick Artus : « il ne reste que les effets sur la demande des ménages, d’où une forte contraction de l’activité dont le seul effet positif est de réduire le déficit extérieur » (puisque les importations diminuent). Par ailleurs Patrick Artus montre avec des graphiques à l’appui que la profitabilité des entreprises a augmenté dans les 4 pays étudiés

|11| OIT, Rapport mondial sur les salaires 2012-2013, Genève, décembre 2012, http://www.ilo.org/wcmsp5/groups/pu…

|12| Le contenu de cet encadré consiste en une utilisation libre et arrangée d’extraits de Ernest Mandel, Introduction au marxisme, Edition Formation Léon Lesoil, Bruxelles, 2007, p. 59, p. 68, p. 66 et 67.

|13| OIT, Rapport mondial sur les salaires 2012-2013, Genève, décembre 2012

|14| L’Allemagne a connu une croissance économique portée par ses exportations alors que la plupart de ses partenaires de l’UE et, en particulier, de la zone euro ressentent durement la crise. Vu que dans toute l’UE, on assiste à la baisse de la demande des ménages décrite plus haut, à laquelle s’ajoute une réduction de la demande publique, les débouchés pour les exportations allemandes se réduisent nettement. L’effet boomerang sur l’économie allemande est déjà en cours.

|15| Voir Eric Toussaint, « Au Sud comme au Nord, de la grande transformation des années 1980 à la crise actuelle », septembre 2009.

|16| OIT, Rapport mondial sur les salaires 2012-2013, Résumé analytique, Genève, décembre 2012, p. VI-VII

|17| OIT, Rapport mondial sur les salaires 2012-2013, Résumé analytique, Genève, décembre 2012, p. VII. Le même rapport souligne également l’augmentation de l’écart entre les salaires les plus élevés et les salaires les plus bas dans chaque pays.

|18| Voir European Commission, Directorate General Economic and Financial Affairs, “The Second Economic Adjustment Programme for Greece”, Mars 2012, http://ec.europa.eu/economy_finance…

|19| Le CADTM a dénoncé dès le départ l’entreprise de propagande de la Troïka et du gouvernement grec. Voir « Le CADTM dénonce la campagne de désinformation sur la dette grecque et le plan de sauvetage des créanciers privés », publié le 10 mars 2012. Voir également Christina Laskaridis, « La Grèce a déjà fait défaut aux conditions des créanciers ; leur crainte est de voir celle-ci imposer ses propres conditions », publié le 31 mai 2012.

|20| Financial Times, 1er novembre 2012, première page.

|21| Financial Times, 1 octobre 2012.

|22| Financial Times, 29 décembre 2011, p. 2.

|23| Miles Johnson, « Suicides spark call for Madrid to halt evictions by banks », Financial Times, 13 novembre 2012, p. 2.

|24| Tobias Buck, « Spain’s deepening lack of hope takes its toll », Financial Times, 6 novembre 2012, p. 4.

Source : Mondialisation

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23 décembre 2012 7 23 /12 /décembre /2012 11:51

 

 

 

 

 Par CAS Madrid

Grecia: "Estar desempleado equivale a la muerte"

Les mesures d’austérité successives ont laissé des centaines de milliers de grecs sans emplois privé de sécurité sociale, une situation de désespoir à laquelle tente de pallier un réseau clandestin de médecins.

Le Docteur Kostas Syrigos, chef du plus grand service de cancérologie de Grèce, pensait avoir tout vu, mais jamais il n’avait vu un cas comme celui de Elena, une femme au chômage à qui on avait diagnostiqué un cancer du sein, un an avant qu’elle se présente devant lui. Pendant ce temps, le cancer avait grandi jusqu’à atteindre la taille d’une orange et il avait traversé la peau, laissant une plaie suppurante qu’elle nettoyait avec des serviettes en papier. « Quand nous l’avons vu nous sommes resté sans voix » raconte le Dr Sygiros, chef du service d’oncologie de l’Hôpital Général Sotiria, dans le centre d’Athènes. « Tout le monde pleurait. Des choses ainsi sont décrites dans les livres de théorie, mais on ne les voit jamais, parce que jusqu’ici chaque personne souffrant de maladie dans ce pays pouvait obtenir de l’aide. »

 

Depuis que la crise   de la dette s’est déchaînée, en Grèce, la vie a pris un tournant. Mais dans peu de domaines le changement a été aussi drastique que dans celui de la santé. Il y a peu, la Grèce disposait d’un système sanitaire normal. Les personnes qui perdaient leur emploi recevaient une assistance sanitaire et des revenus de chômage pendant une durée d’un an, mais les gens continuaient à recevoir une assistance médicale dans les hôpitaux s’ils ne pouvaient payer, y compris après qu’ils ne perçoivent plus d’allocation de chômage.

 

Les choses ont changé en juillet 2011 quand la Grèce a signé un accord de prêt complémentaires avec afin d’éviter le naufrage financier. A présent, ainsi que le stipule l’accord : les grecs doivent payer de leur poche toutes les dépenses quand ils cessent de percevoir des allocations. 

 

“Quand être sans emploi équivaut à la mort.”


Plus de la moitié du million deux cent mille grecs sans emploi depuis une longue durée sont privés de soins médicaux, un chiffre dont on s’attend à ce qu’il augmente fortement dans un pays avec un taux de désemploi de 25% et une économie moribonde, comme l’affirme Savas Robolis, directeur de l’Institut du travail de la Confédération Générale des Travailleurs Grecs.

 

A cause des changements toujours plus nombreuses sont les personnes qui se voient obligées de chercher de l’aide hors du système traditionnel. Elena, par exemple, fut conduite au Dr. Sygyros par un groupe de médecins d’un mouvement clandestin qui a surgi pour assister ceux qui n’ont pas de couverture sociale. « En Grèce, aujourd’hui même, être privé d’emploi est équivalent à la mort » commente le Dr Sygiros, un homme à la prestance impressionnante et au ton sévère qui s’adoucit quand il parle de la difficile situation de patients atteints du cancer.

 

Cette situation est nouvelle pour les grecs et sans doute également pour l’Europe. Le changement est particulièrement sinistre en ce qui concerne l’assistance oncologique avec ses traitements prolongés et coûteux. Quand un cancer est diagnostiqué chez une personne sans couverture, on fait simplement  omission d’elle » affirme le Dr Sygiros. « Elle ne peut accéder ni à la chimiothérapie, ni à la chirurgie, ni même aux médications adaptées », explique-t-il.

 

Le système sanitaire est de plus en plus déficient et ne pourra qu’empirer si le gouvernement retire encore 1 500 millions d’Euros de subsides, ce qui est la proposition du nouveau plan d’austérité qui vise à garantir de nouveaux prêts. Avec les coffres de l’état vide, les fournitures sanitaires viennent à manquer, comme les [stents ?] ou les seringues.

 

Une initiative avec date de caducité


Les hôpitaux et les pharmacies demandent à présent le prix plein pour les médicaments, un prix qui pour  les patients atteints de cancer peut se chiffrer en dizaines de milliers d’Euro, des sommes dont la plupart d’entre eux ne disposent pas. Face à la détérioration du système le Dr Sygiros et plusieurs compagnons décidèrent d’agir.

 

Au début de cette année, ils créèrent un réseau clandestin -  pour aider les patients atteints de cancers ou d’autres maladies et ne bénéficiant pas de sécurité sociale - qui fonctionne en dehors des réseaux officiels et utilise les médicaments en surplus que donnent des pharmacies, quelques entreprise pharmaceutique, voir les familles des patients décédés. En Grèce, quand on découvre qu’un médecin aide un patient sans couverture en utilisant des médicaments de l’hôpital, il est obligé de les payer de sa propre poche.

 

“Nous sommes une sorte de réseau de Robin des Bois” commente le Dr Giorgos Vichas de la Clinique Sociale Métropolitaine dans les environs d’Athènes. Vichas est un cardiologue qui a fondé le mouvement clandestin en janvier. « Mais cette opération à une durée limitée », signale-t-il. « Il viendra un moment, où, à cause de la crise, les gens ne pourront plus rien donner. C’est pour cela que nous faisons pression sur l’Etat pour qu’il assume ses responsabilités. »

Pendant qu’il parle, apparaît Elena, avec un turban gris autour de la tête et une blouse flottante. Elle vient chercher les médicaments qui doivent l’aider à supporter les conséquences de la chimiothérapie que lui a administré récemment le Dr. Sygiros.

 

 Faire renaître l’optimisme

 

Elena nos raconte qu’elle s’est retrouvée sans sécurité sociale quand elle a perdu son travail de professeur pour pouvoir s’occuper de ses parents qui souffraient eux aussi de cancer et d’un oncle malade. Quand ils moururent la crise financière était déjà bien installée en Grèce, avec ses 58 ans, il lui fut impossible de retrouver du travail.

Elle raconte qu’elle s’effraya quand on lui diagnostiqua le même type de cancer du sein qui tua sa mère. On lui dit que le traitement couterait au moins 30 000 euros, or elle ne pouvait compter sur aucun d’argent de famille. Elle tenta de vendre un petit terrain, mais personne ne l’acheta.

 

Le cáncer grandit, mais elle ne put compter sur aucun traitement jusqu’à il y a quelques mois, quand elle arriva à la clinique clandestine du Dr Vichas après avoir appris son existence par le bouche à oreille. « Si je ne pouvais venir ici, rien ne serait fait » affirme-telle. « En Grèce, par les temps qui courent tu dois signer un contrat avec toi-même par lequel tu t’engages à ne pas tomber malade. »

 

Elle raconte qu’elle est consternée de voir la démission de l’état grecs d’un pilier de la protection de la société. Mais le fait qu’un groupe de médecins et de grecs normaux se soient organisés pour mettre la main là où l’état s’est retiré donne de l’espoir dans ces heures sombres. « Ici, il y a toujours quelqu’un pour se préoccuper de vous » commente Elena.

 

D’après le Dr Vichas, il est possible que la thérapie la plus puissante ne soit pas tant les médicaments que l’optimisme que ce groupe de Robin des Bois amène à ceux qui avaient presque renoncé. « Avec la crise, nous devons apprendre à être plus unis » affirme-t-il.

« C’est cela la résistance, ajoute-t-il parcourant du regard les volontaires et les patient qui se regroupent autour de la clinique. « Ce sont une nation et un peuple qui vont se relever grâce à l’aide que s’apportent les uns et les autres. »

 

Source :
Grecia: "Estar desempleado equivale a la muerte"

Traduction Anne Wolff

 

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5 décembre 2012 3 05 /12 /décembre /2012 20:36

 

Encore un p'tit coup sur le clou ... préventif et introductif des coups tordus qui se profilent à l'horizon... voir aussi ce qui concerne eurogenfor, cette force européenne antiémeutes qui nous attend au tournant.

 

 

L’Allemagne se prépare-t-elle à combattre ses citoyens ?
 

L’Allemagne se prépare manifestement à combattre ses citoyens. Dans le plus grand secret se construit sur une surface de 232 km2, qui était déjà l’un des plus grand terrain d’exercice militaire d’Allemagne, Altmark, en Saxe-Anhalt, le plus important Centre d’exercice européen pour l’entraînement à la lutte contre les émeutes  (CRC).

Au centre de l’intérêt se trouve l’entraînement à la répression de soulèvements populaires. Pour atteindre la plus grande réalité possible, on y construit une ville fantôme de plus de 500 bâtiments, couvrant une superficie de 6 km2 pour un budget de plus de 100 millions d’euros. Ce projet comprendrait des installations industrielles, une connexion à une autoroute fictive et un aéroport avec 1700 mètres de piste d’herbe. La Bundeswehr, armée allemande, qui est le maître d’ouvrage, s’apprête à commencer cette année encore la construction de cette ville fantôme.

Mecanopolis

Cliquer sur la carte pour l’agrandir

Source : Vertraulicher Schweizer Brief

 

Camp antimilitariste du 12 au 17 Septembre 2012 au « GÜZ1 Altmark » Allemagne -
Discussions et actions contre le centre d'entraînement au combat de la Bundeswehr et de l'OTAN.
[télécharger PDF]

Ennemi derrière la fenêtre. Couverture, orientation, tir. Rapide comme l'éclair, le simulateur de duel laser informe les combattants de qui a tiré et qui a été touché, qui continue à s'entraîner et qui reste étendu dans la steppe de Saxe-Anhalt. L'armée allemande et les soldats de pratiquement toutes les armées de l'OTAN s'entraînent au GÜZ-Altmark; ils y apprennent comment assiéger et occuper un village en Afghanistan, au Kosovo, ou – d'après des analyses de l'OTAN sur les guerres à venir - dans n'importe quelle ville du globe. C'est pour cela qu'en 2012 commencera sur le terrain du GÜZ la construction d'une ville de 500 bâtiments pourvue d'un aéroport et d'un métro, pour s'entraîner à la guerre dans les quartiers résidentiels, dans les rues d'un centre historique, dans les bidonvilles, les zones industrielles ou les centres commerciaux.

« Cette ville pourrait se trouver n'importe où sur la planète. » - Chef opérationnel du GÜZ

La Bundeswehr, l'OTAN et l'UE veulent faire du GÜZ un lieu central pour préparer les interventions dans la guerre qu'ils mènent à un niveau global, il s'agit donc pour nous de faire du camp un lieu central des luttes antimilitaristes. Tous ceux qui veulent contrer la militarisation des sociétés sont donc les bienvenus. Nous voulons saisir cette occasion pour discuter de nos différentes analyses et propositions, pour élaborer une stratégie contre leur stratégie, et expérimenter quelques pratiques de sabotage de la guerre. Parce que c'est là où la guerre commence qu'on peut l'arrêter.

Nous faisons actuellement l'expérience de la manière dont, à tous les niveaux, se construit le processus d'inclusion de la guerre dans le quotidien. Des situations de fait sont créées – plus d'inverventions des armées, plus de morts en Méditerranée, plus de soldats en armes dans les rues – et d'immenses efforts sont déployés pour légitimer la gestion militaire des crises. Les guerres qui sont menées en notre nom devraient nous paraître aussi naturelles et inévitables que la tempête. Après un séisme, on envoie en guise de sauveteur des policiers militaires qui, l'urgence passée, retrouvent leur vrai visage : ils imposent l'interdiction de se rassembler et font la chasse aux pillards. Et puisque les armées sont aujourd'hui gérées comme des entreprises, nous devrions être les clients satisfaits du service public de la violence d'Etat. Dans le jargon spécialisé, la sécurité est désormais vendue comme une « prestation de gouvernance » pour laquelle nous devrions savoir, de temps à autre, sacrifier l'une ou l'autre de nos libertés.

Passés les murs de la métropole, on n'a jamais demandé aux apparences de faire illusion plus que l'instant d'un coup d'oeil, et encore jeté de loin. Et si l'on peut s'appuyer sur ce type de regard, c'est qu'il a, en Occident, sa tradition. La doctrine des Nations Unies « Responsibility to Protect » (R2P) sert ainsi à justifier des « interventions humanitaires ». La version Niebel2 de la politique de développement autorise l'attribution de moyens directement aux intérêts allemands et à la coopération avec l'armée. Tout cela fleure bon le vieux chauvinisme colonial. On se félicite de protéger la vie nue des peuples pour pouvoir ignorer plus facilement leur droit à l'autodétermination. Le maintien d'un ordre économique qui ne présente pour la plupart aucune perspective assure ainsi lui-même la permanence de la demande pour ce genre de protection.

Entretemps, l'UE se met en ordre de bataille et « harmonise » ses lois et ses procédures. Pour l'heure, les Etats ne s'entendent pas encore sur tous les points. Pour l'heure, la militarisation n'est pas partout aussi avancée que dans le Val de Suse en Italie, où des paras tout juste revenus d'Afghanistan sont déployés contre les manifestants; en même temps, l'armée en Espagne a déjà servi à briser la grève des aiguilleurs du ciel. En Allemagne, en revanche, nombreux sont ceux qui prétendent toujours que la guerre n'est pas vraiment là. Pourtant, les va-t'en-guerre allemands ne sont pas les derniers à pousser à la mise en place internationale de la guerre intégrée en version 2.0. Il est temps que l'on s'organise au-delà des frontières contre les attaques par lesquelles l'ordre dominant tente de se sauver. La question des « Failed States » se pose aujourd'hui partout fondamentalement, et pas juste en Afrique – c'est à nous de la retourner contre l'establishment, de reprendre nos vies en main.

Normalité civilo-militaire

Plus les événements sont déterminés par la guerre, plus il devient clair que la lutte contre la guerre et la militarisation ne concerne pas seulement la pure survie de quelques-uns, mais la vie de tous. Même s'il y a de nombreuses différences dans la réalité sociale, tout au moins dans les formes et les dimensions de la violence qui s'y exerce, il y a une chose que toutes les facettes de la militarisation ont en commun : toute perspective d'autodétermination et d'émancipation doit céder à la gestion permanente de la misère. Et comme de tels durcissements des conditions de vie ne peuvent être imposés et maintenus que par la force, il faut logiquement répandre l'acceptation et la légalisation de la violence dans les conflits, acceptation dont on peut regretter qu'elle reste encore liée à la conformation patriarcale de la société.

Une société sur le pied de guerre doit être mise dans la disposition de penser que la violence n'est pas seulement inévitable, mais désirable ou même héroïque – à condition qu'elle soit exercée par les forces de l'ordre. Pour la justifier, il est toujours nécessaire de masquer les divergences dans les points de vue, dans les approches ou dans la définition des problèmes. Des structures complexes doivent être perçues comme des oppositions binaires, pour qu'à la fin ne demeure qu'une solution : la guerre. Par la construction de telles oppositions, la violence d'Etat se donne pour le seul moyen effectif de résoudre les conflits sociaux ou internationaux. Il y a seulement la Démocratie ou la Dictature islamiste, la femme ou l'homme, les sauvages ou l'Occident, la civilisation ou la barbarie, l'ordre ou le chaos. Certes, le monde réel, avec tous ses entrelacs, ses chevauchements, ses interdépendances, sert bien aux militaires à justifier des dépenses de plus en plus massives; mais dans la conduite de la guerre, il perturbe. Là, il faut des vrais mecs.

La violence sexualisée et la guerre vont toujours main dans la main. La contre-insurrection militarisée n'y fait pas exception. Des hordes de mecs armés qui se battent pour démolir le titre à la propriété ou à la souveraineté d'autres mecs. Parce que de tels titres sont toujours aussi des titres à disposer de „nos femmes“ dans le même temps où l'on prétend les protéger, les humiliations, le viol des femmes et la violence sexualisée contre les prisonniers masculins se reproduisent tous les jours, dans toutes les zones de guerre du globe. Les rapports de domination sont entremêlés avec l'ordre binaire des genres comme avec le militarisme. Tirons-en la seule conclusion possible : les rôles genrés et l'armée, il faut les attaquer, les affaiblir et les dissoudre !

L'asymétrie ? Mais c'est pas une mauvaise idée, ça !

Pour construire une résistance efficace, il faut d'abord comprendre ce que nous avons à faire avec les nouvelles guerres. Non pas pour produire des rapport d'experts que personne ne lit, mais des savoirs partagés. Qu'est-ce qui a changé depuis la guerre froide ? En quoi nos analyses se différencient-elles de celles des militaires ? Y a-t-il vraiment une menace cachée derrière les „menaces asymétriques „ par quoi on légitime la guerre contre les populations? Y a-t-il vraiment une insurrection cachée derrière toutes ces stratégies de contre-insurrection ? Comment nous positionnons-nous dans la guerre en cours ? Qu'opposons-nous à la logique ami/ennemi, nous qui voyons bien, malgré notre profond mépris pour la guerre, la nécessité de combattre ? Comment la stratégie de l'OTAN de la guerre en réseau, de la sécurité globale se manifeste-t-elle au niveau planétaire? Les tactiques sont-elles différentes selon les groupes visés ?

Pour beaucoup au sein de l'UE, l'abolition des limites concernant le champ d'intervention des forces armées fait l'effet d'une nouveauté, les populations n'y étant désormais plus épargnées par l'exercice de la violence militaire. La guerre nous rend-elle tous egaux ? Ou est-ce seulement au moment d´y mourir que la guerre nous rend tous pareils, le vieux principe „diviser pour mieux régner“ restant en vigeur ? Quel est le rôle de la contre-insurrection dans tout cela ? Est-ce une tactique de déploiement ou un leitmotiv de gouvernance ? Pour éviter de fausses analyses, il faut veiller, lorsque nous cherchons à appréhender leur stratégie, à ne pas nous égarer dans une pensée militarisée. Les militaires ne sont pas capables de mettre en oeuvre tout ce dont ils rêvent. Sur quoi s'appuie leur perspective cybernétique de mobilisation de toutes les sphères de la société pour la guerre ? Les questions éthiques que cette perspective nie en bloc n'ont-elles vocation à resurgir que par opportunité tactique? A quel point les militaires eux-mêmes sont-ils dépassés par leurs propres exigences, et demeurent-ils prisonniers de la vieille idéologie de leur supériorité de naissance ? Ou tout cela n'est-il que du show, comme les femmes en uniforme et les coopérations avec l'Union Africaine ?

Il est certain que nous évoluons sur un terrain miné de contradictions : d'un côté, nous sommes tous globalement soumis au même principe de guerre, de l'autre il y a toujours quelque part une „vraie“ guerre ; dans certains endroits on meurt, dans d'autres non – et ça fait une différence radicale. Nous non plus, nous ne pouvons pas échapper à cette contradiction. Ainsi il est vrai que „nous autres Occidentaux“ sommes privilégiés, que plus de portes nous sont ouvertes qu'à d'autres, qui sont nés ailleurs. Mais c'est précisément au moment où la guerre fait à son tour son entrée chez nous que l'on va voir jusqu'à quel point nous sommes sérieux lorsque nous parlons de l'abolition des privilèges. Car alors la question n'est plus de proclamer verbalement combien nous en avons honte, mais de les mettre en jeu, en les utilisant comme part d'un autre Nousun Nous qui lutte à l'échelle mondiale pour la libération. Ce qui fait également une différence, et qui n'est pas rien dans notre rapport à l'autre.

Drapeaux flottants sur la colline du général

Alors qu'est-ce qu'ils nous laissent savoir ? Il y a d'abord ce texte stratégique de l'Otan „Urban Operations in the Year 2020“. Comme, partout dans le monde, de plus en plus d'humains vivent dans les villes et s'y appauvrissent, il sera donc nécessaire de remédier aux déficits en capacités d'intervention en milieu urbain. Et comme les militaires ne réfléchissent pas sur les causes et les manières d'empêcher un tel appauvrissement, les émeutes sont simplement conçues comme des défis à relever. En plus de leurs particularités architecturales, c'est surtout le déploiement dans les zones habitées qui fait problème à l'armée : du fait que les combattants sont durs à distinguer de la population, il y a rapidement des victimes civiles (abréviation de l'Otan: CDs), qui provoquent des manifestations; bref : des déploiements inefficaces, voire même avortés ! Ainsi le militaire veut s'approcher et rentrer dans la société, aussi bien avec des universitaires en service commandé qu'avec des unités „robustes“, équipées avec des „armes à létalité réduite“ pour „contrôler les foules“.

Dans “Towards a Grand Strategy for an Uncertain World”, l'Otan conclut dès 2008 que l'unique chemin pour dépasser ces dangers se trouve dans une „approche globale et conjointe, qui inclut des ressources militaires et non-militaires.“ En 2010, la „Nato Research Commission“ juge les résultats peu encourageants, la souveraineté des Etats et les difficultés de coopération empêchant une réalisation efficace. Leur conseil: trouver de „nouvelles voies de collaboration pragmatique en dessous du niveau stratégique“. S'agit-il d'une nouvelle stratégie ou d'un pis-aller ? Le terme de „sécurité en réseau“ devrait-il nous rassurer, en nous procurant le sentiment d'être informés alors même que l'on ne nous donne aucune information ? Y a-t-il à s'inquiéter de ce que l'on nous dise que des choses vont être mises en réseaux entre des commissions ad hoc, des commandos interservices, des bases de données, des congrès policiers et autres exercices conjoints, sans jamais nous dire CE QUI va être mis en réseau? Est-ce que la collaboration des universités, de la Poste et des ONGs ou la privatisation des tâches militaires changent quoi que ce soit dans le processus de décision ? Ou est-ce que la collaboration civil-militaire n'est qu'un nouvel emballage pour le vieux fantasme d'un Etat policier totalitaire ?

„Sécurité en réseau“ ou la contre-insurrection en civil

Ordinairement utilisée comme synonyme d'anti-émeute dans les discussions en Allemagne, la contre-insurrection pourrait bien être un concept général de gouvernement, dans lequel il ne s'agirait pas de régler des conflits, mais de faire perdurer l'état d'exception à perte de vue, dès lors qu'il aura été mis en place. Parce que la déstabilisation d'une société produit la légitimation de son contrôle militaro-policier en continu - jusqu'à l'installation de protectorats – dans le même temps où elle vous dispense de présenter au débat public des alternatives. Ce qui prend l'apparence, en Iraq ou en Afghanistan, d'un manque de plans pour un ordre d'après-guerre ou d'une incapacité à les imposer, pourrait être le coeur même de la chose : la contre-insurrection comme gestion de crise permanente, qui s'inscrit dans la durée. Car tant que la crise persiste, il ne reste plus de temps pour les changements sociaux; et il est plus facile de faire accepter les restrictions imposées à la liberté de circulation, le paternalisme et l'oppression.

La contre-insurrection vise à sédater la société. A l'opposé de ce que suggère le mot, la répression ouverte est loin d'être toujours le moyen retenu. Pour elle, le plus important, plutôt que de faire taire ceux qui entreprennent de lutter, c'est que tous les autres ne voient pas de sens dans ce qu'ils disent. Comme la perception est son premier terrain de combat, certaines questions sont censées ne même pas surgir. Et la diffusion des „armes à létalité réduite“ montre qu'il ne s'agit pas de „résoudre“ les conflits, mais plûtot de contrôler leur éclosion, et, là où c'est possible, de l'éviter carrément. Analyse coûts-avantages, calcul de risques, comme dans l'assurance. Comme la contre-insurrection dérive de la créativité des insurrections, et se trouve par là toujours à la traîne, elle tente de compenser ce déficit par des études méticuleuses, la violence, des appareils énormes et la prévention. Restructurer des quartiers, intimider des sympathisants, isoler les ennemis, créer des images de l'ennemi, pour que la population prenne ses distances et se désarme d'elle-même. La „COIN“ (COntre-INsurrection en jargon Otan) veut s'imprimer sur un public dépolitisé et passif, et c'est en ce sens qu'elle est constructive. En même temps, comme stratégie de pur maintien du pouvoir, elle reste aussi mortelle et réactionaire que les guerres du colonialisme, dans lesquelles elle a été développée. Comme modèle de gouvernance, elle représente l'extinction du politique : l'arrêt de tout débat public sur les causes de la situation actuelle, la fin de la recherche de perspectives un tant soit peu différentes. L'oubli organisé.

Pourtant la contre-insurrection reste une épée à double tranchant. Un système qui a besoin de se préparer à combattre des insurrections, admet implicitement qu'il n'est plus question d'apporter des corrections à une machine qui, par ailleurs, tournerait sans heurts. Le fait que des insurrections surviennent effectivement est secondaire. Mais le fait qu'elles puissent avoir lieu, qu'elles soient considérées par le pouvoir comme possibles, suffit à attirer l'attention sur les raisons de se soulever. Sur le point aveugle, sur l'empereur nu. Peut-être que si l'on parle tant de la sécurité, c'est pour ne pas parler de la contre-insurrection ? Parce que les cartes pourraient changer de mains à tout instant. Car quoi qu'il arrive, dans le combat contre l'insurrection, résonne le fait que la question est bien de se libérer d'un certain regime – et, que dans le futur, ce sera bien plus qu'une poignée de radicaux qui vont reprendre la lutte.

Partageons nos expériences de lutte

A l'heure où tout est censé devenir un front, nous ne pouvons plus considérer l'opposition à la militarisation et à la guerre comme le domaine réservé du mouvement pacifiste et des antimilitaristes. C'est parce que la militarisation durcit les conditions de toute lutte d'émancipation, que nous pensons que vous devriez tous venir discuter des questions que soulève ce camp! Nous trouvons nécessaire d'avoir les échanges les plus vastes possibles si l'on veut construire une résistance efficace. Face à l'accélération globale de la militarisation des sociétés, nous considérons que l'invitation doit être, en bonne logique, aussi internationale que possible. Nous traduirons cet appel en toutes les langues que nous pourrons, et nous contacterons toutes les personnes potentiellement intéressées. Nous organiserons ensemble la traduction sur place; d'une manière ou d'une autre, cela a toujours bien fonctionné.

Afin de mettre fin à la mise en forme du monde pour la guerre

Il s'agit pour nous, avec le camp au GÜZ, de discuter ensemble des stratégies militarisées de maintien de la domination et de trouver leur talon d'Achille. Dans le principe comme dans la pratique. C'est parce que nous prenons la liberté de toujours nous poser la question „Quelle vie voulons-nous vivre ?“, parce que nous refusons l'idée d'une humanité qui demande soit le contrôle, soit le sang, et parce que nous ne nous retrouvons pas dans le mot d'ordre „Il n'y a pas d'alternative“, que nous croyons possible d'assécher la mer au principe de guerre sous toutes ses formes, de ne pas tomber dans le piège de l'introjection paternaliste („Qu'est-ce qui est le mieux pour l'Afghanistan ? “), et d'empêcher les militaires de réquisitionner à leurs fins la moindre parcelle de notre monde et de nos vies. Et cela pratiquement, s'entend. Cela nous conduit à la deuxième orientation importante de notre camp.

Qui peut penser doit agir !

Le GÜZ est un des principaux lieux en Allemagne où se prépare la guerre. Avec ses transports d'armes réguliers, les prévisibles chantiers pour bâtir le nouveau site d'entraînement au combat urbain, ses installations laser high-tech et bien d'autres occasions, le GÜZ nous offre l'opportunité de mettre pratiquement des bâtons dans les roues d'une machine de guerre, et d'apprendre à le faire. Des unités de toute l'armée allemande s'entraînent au GÜZ pendant 14 jours avant d'être déployées, en Afghanistan ou ailleurs. Elles voyagent avec leurs propres machines lourdes, leur propre équipement, leurs propres armes. Le GÜZ est immense, et presque sans clôture. Le planning des entraînements militaires est complet, il n'y a pas de place pour les délais. Nous voulons démontrer en pratique que c'est là où la guerre commence que nous pouvons l'arrêter. En ce sens, toutes les formes d'action qui perturbent, sabotent ou bloquent le déroulement des exercices en cours, seront pour nous les bienvenues !

Pour toutes ces raisons, nous vous appelons à venir participer au camp antimilitariste au GÜZ-Altmark du 12 au 17 septembre 2012 et à combattre avec nous pour un monde meilleur !

 

1GefechtsÜbungs Zentrum : Centre d'Entraînement au Combat.

2Du nom de l'actuel ministre allemand du Développement Economique

Source : appel - la guerre commence içi | War Starts Here Camp

Via : appel - la guerre commence içi | War Starts Here Cam


 

 

 

 

 

 

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20 novembre 2012 2 20 /11 /novembre /2012 11:53

 

Une prise de température. Non que je m’imagine qu’une grève générale, même massivement suivie dans tous les pays d’Europe aurait pu changer quoi que ce soit, sinon d’accélérer la mise en place des formes du contrôle et de la répression.

La « refondation » et la « reconquête » de notre monde passe moins par des formes de lutte et d’affrontement direct avec les forces de l’ordre que par cette multiplicité diversifiée et toujours croissante d’expériences de vie qui font exister un autre monde au quotidien. La refondation ne passe certainement par l’acte de quémander des emplois (et donc des patrons) à ceux-là même qui ont amplement prouvé que seul leur importait le Profit.

Prise de température donc d’un état de rapports de force dans différents pays d’Europe, mais à terme ce qui nous intéresse vraiment ce ne sont pas les rapports de lutte mais bien ceux de coopération qui se construisent entre les différents  pôles (noyaux, centre de résonance…) de ce monde possible en deveinir.

Ce n’est que parce que nous sommes plongés bien à contrecœur dans un monde en guerre, et plus seulement économique – en témoigne la militarisation des polices locales entraînées aux méthodes de contrinsurrection – que nous avons à nous soucier de rapports de contrôle et de répression en tant qu’ils représentent une menace pour toute dissidence en général, et en particulier pour ceux qui pratiquent la « simplicité heureuse ».

De nouvelles formes de luttes voient à présent le jour, motivées par d’autres raisons, d’autres valeurs que cette quête du droit à pouvoir être l’employé modèle d’une entreprise responsable, un mythe qui a fait long feu, voir par exemple La mort à Tarente (Une prise de conscience collective, un brin d’espoir… la vie vaut mieux que des emplois.)

 


Des manifestations de masse en Espagne, au Portugal, en Italie pour protester contre l’austérité et le chômage

 

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Des centaines de milliers de travailleurs sont descendus mercredi 14 novembre dans les rues d’un certain nombre de pays européens pour manifester contre un chômage en forte augmentation et les mesures d’austérité dictées par l’Union européenne et le Fonds monétaire International.

Des grèves générales en Espagne et au Portugal ont paralysé le transport public en occasionnant la fermeture de nombreuses entreprises et écoles. Les compagnies aériennes ont été touchées par le débrayage et des centaines de vols ont été annulés. Les syndicats des deux pays ont affirmé que des millions de travailleurs ont participé aux grèves.

La grève a officiellement débuté à minuit en Espagne, mais les manifestants étaient déjà descendus dans les rues mardi soir. A Madrid, des manifestants en colère se sont heurtés à la police dans bon nombre d’endroits.

La police a attaqué des piquets de grève au dépôt de bus de Madrid où des travailleurs tentaient d’empêcher les bus de sortir du dépôt. Dans le centre de la capitale, la police anti-émeute a tiré des balles en caoutchouc et matraqué les manifestants pour dégager la Plaza de Cibeles.

Lors d’un affrontement antérieur, la police a repoussé à coups de matraque des centaines de jeunes manifestants pour empêcher qu’ils ne bloquent l’avenue Gran Via avoisinante. Des manifestants ont réagi en scandant « Abus de pouvoir » et « Plus d’éducation, moins de policiers ». Selon des porte parle officiels, la police a arrêté 82 manifestants dans tout le pays et 34 personnes ont été soignées pour leurs blessures.

Au Portugal, les manifestants sont descendus dans les rues aux premières heures du matin en brandissant des banderoles dénonçant l’Union européenne, le Fonds monétaire international (FMI) et la Banque centrale européenne (BCE). Selon les chiffres publiés mercredi, le chômage a atteint un taux de record de 15,8 pour cent dans le pays et l’on s’attend à ce qu’il continue de monter dans les mois à venir.

Les grèves ont littéralement immobilisé le métro de Lisbonne et de nombreuses écoles ainsi que des bureaux étaient fermés toute la journée au public. Les déplacements en ferries et en trains dans le pays étaient fortement réduits.

En Italie, les syndicats ont limité l’action de grève à une série de grèves tournantes de quatre heures étalées sur la journée et qui ont néanmoins entraîné la fermeture d’écoles, de ports et de nombreuses usines.

Des manifestations comptant des dizaines de milliers d’étudiants et de travailleurs se sont déroulées à Rome, à Turin et à Milan où des employés des transports publics, des conducteurs de train et des employés des hôpitaux ont rejoint les étudiants dans la rue. Dans le centre-ville de Rome, des dizaines de jeunes manifestants qui ont tenté de briser un cordon policier ont été attaqués par la police au moyen de gaz lacrymogène et de véhicules blindés.

De violents affrontements entre les manifestants et la police ont également été signalés à Turin et à Milan. Les protestations des travailleurs en colère ont eu lieu en Italie un jour à peine après que deux ministres du gouvernement avaient dû être évacués par hélicoptère d’une réunion en Sardaigne tandis que des manifestants bloquaient les routes de l’île en incendiant des voitures.

Mardi également, un homme qui a menacé de se taillader les poignets pour protester contre l’impossibilité de sa fille à trouver un emploi a interrompu le discours prononcé à Naples par la ministre du Travail, Elsa Fornero. A Naples, des manifestants s’étaient déjà heurtés lundi à la police.

La Confédération européenne des syndicats (CES) avait appelé à faire grève et à protester pour essayer de faire retomber la pression et de contenir la colère grandissante parmi les travailleurs notamment dans les pays d’Europe méridionale qui ont été les plus fortement dévastés par la politique d’austérité dictée par les banques et l’Union européenne.

Alors que les protestations en Espagne, au Portugal et en Italie ont été marquées par de vastes manifestations de colère, il était évident que la bureaucratie syndicale européenne cherchait délibérément à démobiliser les travailleurs dans le reste de l’Europe.

En Grèce, relativement peu de gens ont été impliqués dans les protestations. La principale centrale syndicale du pays a limité les actions à tout juste trois heures. Seuls quelque 3.000 personnes ont participé à un rassemblement sur la place Syntagma à Athènes.

La semaine dernière, des centaines de milliers de personnes ont manifesté en Grèce contre le cinquième plan d’austérité dicté par l’UE. Le pays a été paralysé suite à une série de grèves. Depuis lors, les syndicats oeuvrent pour restreindre le mouvement de grève et démoraliser les travailleurs. Ils ont mis fin aux grèves menées par les balayeurs de rue et les agents des centrales électriques qui avaient débrayé contre les réductions des salaires, et ont limité à tout juste quelques heures les grèves dans les autres secteurs industriels.

Les travailleurs sont actuellement en train d’occuper les mairies d’un certain nombre de villes grecques afin d’empêcher que les responsables du gouvernement local ne fassent parvenir au gouvernement central à Athènes des listes de travailleurs du secteur public à licencier. Malgré cette défiance, le gouvernement a déjà commencé à licencier 2.000 fonctionnaires.

La manifestation qui a eu lieu à Athènes était dominée par des partisans de diverses organisations pseudo-gauches telles SYRIZA et Antarsya. Pour l’essentiel, les travailleurs ont refusé de participer à l’action symbolique de mercredi.

En France aussi, il n’y a eu que peu de soutien pour les 130 manifestations annoncées par la Confédération générale du Travail (CGT). Les rassemblements qui ont eu lieu étaient principalement composés de bureaucrates syndicaux et de leurs partisans parmi des groupes pseudo-gauches tels Lutte ouvrière (LO) et le Nouveau Parti anticapitaliste (NPA).

Aucun des cinq principaux syndicats français – CGT, CDFT, FSU, Solidaires, Unsa – n’ont appelé à faire grève. Le rassemblement à Paris n’a attiré qu’une foule relativement petite de 5.000 travailleurs du public. Les travailleurs industriels sont restés en grande partie absents. Il n’y a pas eu de slogans anti-gouvernementaux ou de banderoles pour protester contre la fermeture de l’usine automobile PSA d’Aulnay qui coûtera 10.000 emplois à la région parisienne.

3.000 personnes seulement ont défilé à Nantes, ville de l’Ouest de la France, traditionnellement à gauche. A Rennes, seuls 800 personnes ont protesté et à Marseille, la deuxième plus grande ville de France, seuls quelques milliers ont manifesté. Environ 1.800 personnes ont défilé à Lyon.

Le président français, François Hollande, a déclaré lors d’une conférence de presse mardi que les manifestations « ne vont pas mettre en cause notre politique, mais plutôt la soutenir. »

En Allemagne, les syndicats n’ont pas mobilisé leurs membres en solidarité avec les travailleurs européens. Le rassemblement de la Confédération des syndicats allemands (DGB) à Berlin a été marqué par l’absence de banderoles syndicales. Quasiment toutes les 200 personnes qui s’étaient rassemblées à la Porte de Brandebourg à Berlin étaient des membres du parti La Gauche (Die Linke), d’Attac ou d’autres groupes de « gauche » petits bourgeois. Après un discours superficiel prononcé par un membre du syndicat de la fonction publique Verdi qui a de façon démagogique appelé à en finir avec le capitalisme de casino, la foule s’est rapidement dispersée.

A Londres, les responsables de la Confédération syndicale britannique (TUC) ont réaffirmé leur défense du capitalisme en remettant une lettre à la Commission européenne pour se plaindre de ce que les mesures imposées par l’UE, le FMI et la BCE « entraînaient l’ensemble de l’Europe dans une stagnation économique… et étaient loin de rétablir la confiance dans les marchés financiers. »

Article original, WSWS, paru le 15 novembre 2012

Source :
Des manifestations de masse en Espagne, au Portugal, en Italie pour protester contre l’austérité et le chômage | Mondialisation

 

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9 juillet 2012 1 09 /07 /juillet /2012 07:17

 

Ben les petits gars, voilà qui semble fort intéressant. Ne nous laissons pas abuser plus longtemps... Coup d'état institutionnel réussi au Paraguay ; celui par mise d'un pays en ingouvernabilité échoué en Bolivie, les services de sécurité Venezueliens ont repéré des francs-tireurs infiltrés depuis la Colombie, quand on sait à quel point les "Etats-Unis"veulent la peau de Chavez -et pour cause - pas rassurant. Les nombreux échos qui me viennent d'Amérique Latine,  sont aussi des appels à relayer ce message : "L'empire s'apprête à intensifier sa reprise de mainmise sur le continent Sud, faite le savoir, rompez le silence"

La Syrie plongée dans le chaos par des fous armés par l'Empire, la Corne de l'Afrique devenue champ de bataille de la guerre USA-Chine, et le Mali plongé dans l'horreur....le programme de "domination du spectre total" répand ses foyers de guerre partout sur la planète

Mais nous aussi Européens avons doit à nos coups d'état. Comme je l'ai fait maintes fois remarquer, ses valets sont pour l'Empire des pions sacrifiable une fois qu'ils ont rempli leur rôle. Nous voyons bien aux continuités des politiques, que les alternances gauche-droite, républicains-démocrates, ne sont là que pour maintenir des fictions de démocratie et la division des peuples sur des questions fictives ou secondaires...  En Belgique, cela fait un moment que - quand ils arrivent à se constituer et se maintenir- nos gouvernements, fait de bric et de broc, n'ont que fort peu avoir avec une quelconque volonté des électeurs... d'ailleurs de plus en plus défaillante...

Et nous pouvons constater à présent que l'Europe a droit, elle aussi à ses coups d'état. Fondés dans des accusations de corruption, d'incompétence ou de défaillance de l'état national. Ils doivent permettre la mise en place de cette gouvernance économique technocratique (au service de qui on sait), destinée à devenir le modèle d'une gouvernance unifiée de l'Union Européenne.

Et contrairement à ce que prétendent certains qui s'enferment dans un nationalisme absolu et contre productif... ce n'est pas l'Europe des Régions le vrai problème... il est tout à fait possible d'imaginer une Europe des Régions solidaires, coopérants entre elles dans des alliances multipolaires ouvertes aussi vers d'autres continents, une Europe des Peuples ouverte, interactive ; non le problème c'est une Europe, quelle soit des nations ou des régions, affaiblie et divisée pour faciliter la mise en place d'une dictature technocratique.

Et donc soyons vigilants, les coups d'états européens sont des coups d'état technocratiques qui prennent  prétexte de la corruption d'un gouvernement, de son incompétence ou de sa faiblesse, dans ce jeu de domino qui consiste à installer nation par nation une dictature européenne, jusqu'à ce que la dictature technocratique unifiée nous enferme dans son monde unique de la pensée unique, tout profit pour quelques-uns, la misère et l'univers carcéral de la société souscontrôle pour les autres.

 

 

L’ancien premier ministre roumain est blessé par balle quelques heures après avoir été condamné à une peine de prison

 

 

 

Mondialisation.ca, Le 6 juillet 2012



Le 20 juin, l’ancien premier ministre de la Roumanie, Adrian Nastase, a été transporté à l’hôpital de Bucarest avec une blessure par balle au cou. Quelques heures plus tôt il avait été condamné à deux ans de prison par la cour suprême pour abus de pouvoir et financement illégal des partis. Ce jugement est sans appel.

 

Selon les comptes rendus dans les médias, l’ancien premier ministre a écouté le verdict avec calme. Lorsque les policiers sont arrivés chez lui pour l’emmener à la prison, Nastase a demandé de pouvoir disposer d’un peu de temps pour prendre des livres dans sa bibliothèque. C’est à ce moment, a dit la police qu’il a tenté de se tuer avec un pistolet.

 

Quelques jours plus tard, toutefois, des doutes sont apparus sur cette histoire de suicide. Le quotidien allemand Frankfurter Allgemeine Zeitung a fait remarquer que Nastase qui est droitier et un chasseur expérimenté possédant un permis de port d’arme, aurait tenté de se suicider de la main gauche.

 

Parmi un certain nombre d’autres incohérences, l’on a remarqué que bien qu’il ait été emmené à l’hôpital par une ambulance, il n’avait pas de pansement au cou au moment de son admission. L’hôpital est dirigé par un collègue et membre du parti social-démocrate de Nastase qui est également soupçonné de corruption.

 

Le verdict contre Adrian Nastase doit être vue dans le cadre de la crise politique actuelle en Roumanie. Début février, le gouvernement de centre-droit du premier ministre Emil Boc (Parti démocrate-libéral, PD-L) fut contraint de démissionner après des semaines de protestations et de manifestations de masse contre le programme d’austérité brutal du régime.

 

Durant son mandat de trois ans et demi, le gouvernement Boc a imposé le plus rigoureux des plans d’austérité de toute l’Europe. Bien qu’en Roumanie le salaire moyen ne dépasse pas 350 euros par mois, le gouvernement a réduit les salaires dans la fonction publique de 25 pour cent et augmenté la taxe à la valeur ajoutée de 19 à 24 pour cent. Plus de 200.000 fonctionnaires ont perdu leur emploi depuis 2009.

 

Le gouvernement Boc avait pris le pouvoir fin 2008, d’abord sous la forme d’une coalition avec les sociaux-démocrates du PSD. Dix mois plus tard, toutefois, le PSD retirait tous ses ministres du gouvernement après que des querelles portant principalement sur le ministère de l’Intérieur ont éclaté au sein du gouvernement. Boc a imposé le renvoi du ministre de l’Intérieur Dan Nica pour attribuer le poste à l’un de ses compères. Le ministère de l’Intérieur était chargé d'organiser les élections présidentielles en novembre 2009 et le PSD craignait que Boc ne truque le scrutin. Après le départ du PSD du gouvernement, Emile Boc a poursuivi sur la base d’un gouvernement minoritaire PD-L.

 

C’est à ce moment-là que la Direction nationale anticorruption (DNA) a formulé des accusations contre le président de longue date du Parti social-démocrate, Adrian Nastase. Les autorités l’ont accusé de « trafic d’influence ou d’abus de pouvoir en tant que président du parti pour avoir organisé un symposium de l’industrie du bâtiment appelé ‘Le Trophée de la Qualité’ dans le but de lever des fonds pour sa campagne présidentielle. »

 

Cette conférence était organisée par une agence de l’Etat. Les entreprises et les institutions ont donné des fonds s’élevant à 1,6 millions d’euros qui ont ensuite été consacrés à la campagne électorale de Nastase en 2004. « Le Trophée de la Qualité » a été un procès très long impliquant les interrogatoires d’un millier de témoins. C'était le premier de trois procès à l’encontre de l’ancien premier ministre Nastase et qui vient de s’achever la semaine passée.

 

Nastase est une figure bien connue de la scène politique roumaine. Il fait partie du groupe d’anciens staliniens qui, après la chute de Nicolae Ceauseşcu, ont proclamé leur conversion à l’économie libérale. En 1989, il était un fervent partisan de Ceauseşcu, occupant le poste d’ambassadeur de Roumanie en Chine. Un an plus tard, il devint porte-parole du Front du Salut national (FSN) et secrétaire du parti pour les relations internationales. Le FSN était constitué de fidèles de Ceauseşcu issus de l’armée, du service secret et de l’ancien Parti communiste roumain.

 

En mai 1990, il devint ministre des Affaires étrangères, fonction qu’il occupa de 1990 à 1992. Entre décembre 2000 et décembre 2004, il fut premier ministre. Son gouvernement prépara la voie à l’entrée de la Roumanie dans l’Union européenne en imposant un programme d’attaques massives contre le niveau de vie, tout en permettant dans le même temps à une infime élite de s’enrichir considérablement.

 

Peu de temps avant sa destitution en 2004, le gouvernement Nastase vota un décret annulant des dettes de 400 millions d’euros envers l'Etat de deux raffineries de pétrole privées de l’Est de la Roumanie. Le principal propriétaire des raffineries, anciennes propriétés d’Etat, était Cornelius Iacobov, un membre influent du PSD. Aux côtés d’autres membres du parti et de partenaires d’affaires, Iacobov contrôlaient les deux raffineries qui furent privatisées en 2001 et vendues largement en dessous de leur valeur. Elles furent ensuite délibérément poussées au bord de la faillite alors que de vastes sommes d’argent étaient versées dans les caisses privées d’entreprises fictives.

 

La tentative actuelle de l’ancien premier ministre et dirigeant social-démocrate d’éviter une peine de prison n’est pas la première.

 

Nastase est déjà sorti indemne de deux autres affaires. Le 5 mai 2010, la DNA avait accusé Nastase d’avoir accepté, lui et son épouse Daniela Nastase agissant en complice, des pots-de-vin et de l’argent extorqué d’un chantage. L’affaire « Zambaccian » reposait sur les accusations selon lesquelles Nastase avait reçu environ 630.000 euros, soit directement soit au moyen d’intermédiaires.

 

Il a aussi tiré profit de marchandises importées de Chine et de l’exploitation des travailleurs impliqués dans la construction et la rénovation de ses propriétés à Bucarest et dans le village de Cornu.

 

Après l’audience, Nastase fut condamné à deux ans de prison ayant été reconnu coupable de chantage. Il fut acquitté dans l’affaire des pots-de-vin.

 

Un autre dossier controversé est celui de « La Tante Tamara » qui fut bouclé le 15 décembre 2011. Nastase fut acquitté, de même que deux autres inculpés, Ristea Priboi et Ioan Milinescu. En novembre 2000, Melinescu, membre de l’Office national pour la prévention et le combat du blanchiment d’argent (ONPCSB) avait contacté Nastase et Priboi les informant que l’institution enquêtait sur Daniela Nastase après qu’une somme de 400.000 dollars avait subitement apparu sur son compte bancaire. Pour empêcher que l’enquête ne progresse, Nastase aurait nommé Melinescu président de l’institution.

 

Un examen des circonstances concernant les 400.000 dollars placés sur le compte bancaire de Daniela Nastase a soulevé des questions quant à la légalité de la transaction. L’ancien premier ministre a déclaré que la somme provenait des revenus d’une vente de bijoux, de tableaux et autres objets précieux possédés par la tante âgée de 91 ans de Daniela Nastase, Cernasov Tamara, qui vivait seule dans un bloc d’appartements à Bucarest. Il n’y a aucune preuve toutefois que la Tante Tamara ait effectivement possédé les objets en question.

 

L’actuel premier ministre sortant, Victor Ponta (PSD), a depuis rendu visite à son « malheureux » prédécesseur à l’hôpital et a dit par la suite que Nastase était un « martyr ».

 

Ponta est aussi actuellement accusé d’allégations de plagiat et de corruption. Après sa victoire électorale au début de l’été, Ponta avait promis de diriger « le gouvernement le plus honnête… que la Roumanie ait jamais connu. » Maintenant, il est accusé, entre autres, d’avoir plagié la moitié de sa thèse de doctorat en droit, à partir de passages d’autres publications scientifiques.

 

Dans une autre affaire, un membre du groupe parlementaire social-démocrate, Catalin Voicu, a été condamné pour corruption à cinq ans de prison sans sursis par la cour suprême. Il avait mis en place un réseau criminel fondé sur la corruption, l’intimidation et l’extorsion.

 

De vastes structures de corruption de type mafieux se sont développées en Roumanie sous les yeux des commissaires et des représentants du Fonds monétaire international (FMI). La campagne actuelle contre la corruption est toutefois étroitement liée à la tentative d’imposer un soi-disant gouvernement d’experts qui pourra imposer bien plus efficacement les coupes sociales exigées par l’UE et le FMI.

 

 

Article original, WSW, paru le 29 juin 2012


 Articles de Diana Toma publiés par Mondialisation.ca

 Articles de Markus Salzmann publiés par Mondialisation.ca

 

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3 juillet 2012 2 03 /07 /juillet /2012 16:58

 

25 juin par Renaud Vivien


La dette de l’État belge ne cesse d’augmenter. Elle atteindra cette année 98,9% de son Produit Intérieur Brut (PIB) et avoisinera les 100% en 2013. Pour Luc Coene, gouverneur de la Banque nationale de Belgique (BNB), cette augmentation est due au « sauvetage » de la Grèce, l’Irlande, le Portugal et l’Espagne |1|. Son impact sur la dette publique belge s’élève à 11,6 milliards d’euros. Pour le gouverneur de la BNB, cette augmentation serait donc imputable à ces États indisciplinés qui ne savent pas gérer leur économie et que la Belgique et ses partenaires européens doivent aujourd’hui sauver. Or, les faits disent tout à fait autre chose.

Rappelons, tout d’abord, que la crise des dettes publiques en Europe est largement d’origine privée. Une partie importante de l’augmentation des dettes souveraines est la conséquence du sauvetage des banques. A titre d’exemple, la dette publique de l’Irlande est passée de 25% de son PIB en 2007 à 96% en 2010. L’Espagne figurait aussi parmi les meilleurs élèves de la zone euro en 2007 avec une dette publique qui ne représentait que 36% de son PIB. Ce qui était largement inférieur à la limite des 60% du PIB fixée par les critères de Maastricht.

Soulignons ensuite que les plans de « sauvetage » coordonnées par la Troïka (Commission européenne, Banque centrale européenne et Fonds Monétaire International) auquel participe la Belgique ne bénéficient pas aux États mais aux banques. Ces « aides » sont en réalité des prêts empoisonnés assortis de mesures d’austérité anti-sociales qui servent principalement à renflouer les banques privées alors que ces dernières sont largement responsables de la crise. Bien loin d’être solidaire, la Belgique participe donc à des prêts illégitimes qui profitent encore aux banques, violent les droits des peuples et la souveraineté des États.

Bien que les dirigeants européens nous martèlent qu’aucune réforme structurelle n’a été imposée en échange du prêt destiné à sauver Bankia et recapitaliser les autres banques, l’Espagne est dans le viseur de la Troïka. En effet, ce prêt européen alourdit automatiquement la dette publique espagnole et augmente la probabilité que le pays passe dans les prochaines semaines sous la tutelle de la Troïka lorsque que le pays ne pourra plus emprunter sur les marchés financiers. Actuellement, ce taux avoisine les 7% ; ce qui rend déjà la situation insoutenable. Le risque est donc élevé que l’Espagne soit rapidement contrainte de faire appel à la Troïka qui, certes, lui prêtera à un taux d’intérêt moins élevé que les banquiers privés mais en profitera pour imposer à la population des politiques d’austérité brutales à l’instar de la Grèce, de l’Irlande et du Portugal.

Si l’État belge voulait réellement faire preuve de solidarité avec ces pays comme il le prétend, il devrait annuler ses créances sur la Grèce, le Portugal, l’Irlande et l’Espagne car ici et ailleurs ce n’est pas aux populations de payer la facture laissée par le secteur bancaire.

Une telle mesure d’annulation en plus d’être juste est parfaitement réaliste. La Belgique pourrait largement compenser le coût de cette annulation en refusant elle même de payer sa dette illégitime envers les institutions financières tout en garantissant l’épargne des citoyens. Rappelons que les sauvetages de Fortis, KBC, Ethias et Dexia (à deux reprises) ont lourdement aggravé le poids de la dette publique, l’augmentant de 26 milliards d’euros, soit davantage que l’ensemble des prêts accordés par la Belgique dans le cadre des plans d’ « aide » européens.

Le fait que ces banques remboursent (progressivement et quand elles le veulent contrairement aux États qui sont tenus par un échéancier !) les prêts qui leur ont été accordés par l’Etat pour les sauver n’est pas suffisant. Leur dette envers la population est bien plus importante car elles portent une lourde responsabilité dans la crise socio-économique en Belgique. Primo, elles sont à l’origine de la crise financière qui s’est répercutée dans l’économie réelle entraînant la fermeture d’entreprises, la destruction d’emplois, etc. Secundo, le sauvetage par les pouvoirs publics a eu pour conséquence de plomber les finances publiques, d’augmenter la dette et ainsi d’accroître les pressions de la Commission européenne pour renforcer l’austérité qui frappe principalement les classes populaires.

Aujourd’hui, cette politique austérité anti-sociale appliquée par le gouvernement belge se traduit notamment par la réforme des allocation de chômage qui va exclure 27 000 personnes à partir du 1er janvier 2015 pour une économie budgétaire de seulement 51 millions d’euros... Une somme ridiculement faible comparée aux pertes fiscales enregistrées annuellement par l’État à cause des cadeaux fiscaux octroyés aux ménages les plus riches et aux grandes entreprises comme Arcelor-Mittal, Elecrabel, Delhaize, etc. Entre 2001 et 2009, le taux effectif moyen d’imposition des sociétés a diminué de moitié en raison d’une série de mécanismes de déductions fiscales (notamment les fameux intérêts notionnels) mis en place par l’ancien Ministre des finances Didier Reynders. Conséquence logique : l’État enregistre chaque année des pertes colossales qu’il compense en s’endettant auprès des marchés financiers. Pour la seule année 2010, le manque à gagner pour l’État était de 19,5 milliards euros. Le gouverneur de la BNB serait bien avisé de souligner l’impact de ces cadeaux fiscaux sur l’augmentation de la dette publique belge...

Pour le CADTM, les dettes publiques issues des sauvetages bancaires et des cadeaux fiscaux sont illégitimes car elles ne servent pas l’intérêt général. Leur remboursement doit donc être rapidement remis en cause vu les montants importants que l’État consacre au remboursement des seuls intérêts sur la dette. En 2012, ce montant s’élève à 13,3 milliards d’euros et devrait passer à 15,4 milliards en 2017, mettant ainsi en péril les missions de service public de l’État. Pour mettre la pression sur le gouvernement, démarrons le plus vite possible l’audit citoyen de la dette mais aussi des créances de la Belgique (envers les pays européens et des pays du Sud) afin d’identifier la part illégitime qui doit être annulée sans condition.

Tribune publiée sur le site de de la RTBF le 25 juin 2012

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29 juin 2012 5 29 /06 /juin /2012 08:28

 

Quand je le dis que je ne crois plus au réveil de l'Europe... cela fait des mois que je suis l'évolution de la situation dans ce pays, qu'elle me rappelle très fort ce que j'ai pu rencontrer à Bruxelles dans des milieux directement touchés par la misère : quand bien même ils leur serait possible de mettre en oeuvre le dynamique d'une solidarité active qui en même temps serait une lutte contre le système qui les écrase, le gens petit à petit s'effondrent, se replient sur eux-même, s'extravertissent dans la hargne, le racisme.. sombrent dans le désepoir et la dépression... il y a bien quelques exceptions mais elles sont rares...isolées. quelle différence avec le Peuple du Honduras qui décide - a trois ans du coup d'état d qui a renvoyé le pays dans la dictature militaire et le terrorisme d'état -de célébrer l'évènement comme celui qui marque la naissance d'une conscienc populaire, une conscience de lutte créative et dynamique. Mais que faut-il donc faire pour que l'Europe se réveille et en fasse autant ???

 

 

GRECE : "Chaque jour est pire que la veille...

Il n'y a plus d'espoir"

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Dimitris Christoulas, pharmacien à la retraite de 77 ans, est devenu le symbole de la crise grecque. Mercredi 4 avril, à 9 heures du matin, à l'heure de pointe, l'homme s'est tiré une balle dans la tête sur la très emblématique place Syntagma d'Athènes, théâtre de toutes les manifestations contre l'austérité, en face du Parlement, symbole d'une politique de rigueur aveugle aux souffrances du peuple.

Avant de se suicider, Dimitris Christoulas a crié : "Je n'en peux plus, je ne veux pas laisser de dettes à mes enfants."

Le désespéré a aussi laissé une éloquente lettre :

"Le gouvernement a réduit à néant mes possibilités de survie, qui

étaient fondées sur une retraite honorable pour laquelle j'ai payé

seul toute ma vie [...] Je ne trouve pas d'autre solution pour une

fin digne, avant que je commence à chercher dans les poubelles

pour me nourrir."

 

Peu après, un millier d'inconnus se sont réunis auprès de l'arbre où il a mis fin à ses jours pour dénoncer "un meurtre d'Etat". L'ensemble de la classe politique grecque a réagi, certains pour dénoncer les mesures d'austérité inhumaines, d'autres l'instrumentalisation d'un drame personnel.

Le nombre de dépressions explose

Depuis le début de la crise, le nombre de suicides en Grèce, qui était l'un des plus faibles d'Europe, explose. Il aurait augmenté de plus de 40% en un an. L'ONG Klimaka, qui a mis en place une ligne téléphonique d'urgence pour les désespérés, a vu le nombre d'appels doubler en un an et se multiplier par quatre depuis sa création, en 2007.

Le nombre de dépressions explose.

"Mon cabinet privé ne désemplit pas, dit le psychiatre Orestis Giotakos, qui est aussi chef du département psychiatrique de l'hôpital militaire d'Athènes. La Grèce n'était pas prête à faire face à cette hausse des maladies mentales. Et, au lieu d'augmenter, le budget des hôpitaux psychiatriques a été réduit de 40%, comme celui de tous les hôpitaux ".

Trois millions de nouveaux pauvres

Dimitris, 50 ans, donne un coup de main à la soupe populaire de la mairie d'Athènes. Silencieux et honteux, des centaines de Grecs, hommes et femmes, de tout âge, souvent encore bien habillés, se pressent dans la queue, deux fois par jour, pour recevoir un repas chaud. "Je suis comme eux, j'ai perdu mon travail il y a un an", avoue Dimitris.

La crise qui frappe la Grèce a fait exploser le chômage, qui atteint 22% de la population active. Les nouveaux pauvres sont apparus et, avec eux, des sans-abri. Le nombre de SDF aurait ainsi augmenté de plus de 25% depuis 2009, l'année où la crise a frappé le pays.

Près de 28% des Grecs, soit plus de 3 millions de personnes, vivraient près du seuil de pauvreté, selon Eurostat. Pour faire face à cette vague de nécessiteux, la société se mobilise.

Ainsi la puissante Eglise orthodoxe distribue aujourd'hui plus de 250.000 repas par jour à travers tout le pays.

"Quand vous perdez votre travail, vous devenez fou"

Peintre en bâtiment, Dimitris ne trouve plus que quelques journées de travail par mois, et au noir : "C'est payé de 20 à 25 euros par jour, sans assurance, sans rien." "Mais, ajoute-t-il, amer, les immigrés travaillent pour 15 euros."

Dimitris n'a rien contre les étrangers : "En Grèce, on les aime bien. Mais quand vous perdez votre travail, vous devenez fou." Le vote pour l'extrême-droite, la droite néonazie ou "nationale", a ainsi explosé lors des élections du 6 mai.

Un vote de désespoir : "Chaque jour, dit Dimitris, est pire que la veille. Il n'y a aucun espoir."

Comme beaucoup, il songe à s'expatrier.

A quelques centaines de mètres de là, la clinique de Médecins du Monde (MDM) est submergée par des immigrés, mais aussi - et c'est nouveau -, par des Grecs ruinés qui viennent se faire soigner gratuitement. "Nous avons dû mettre en place une distribution de nourriture quand nous nous sommes aperçus que, souvent, nos patients n'avaient pas assez à manger, dit Christina Samartzi, de Médecins du Monde. Parfois, reprend-elle, ils n'ont même pas de lait à donnera leurs enfants."

Nouvel Observateur

 

Cri du Peuple : http://www.mleray.info/article-grece-chaque-jour-est-pire-que-la-veille-il-n-y-a-aucun-espoir--107503575.htm

Via : canempehepasnicolas

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23 juin 2012 6 23 /06 /juin /2012 15:58

 

 

 

Proclamation d’intérêt général

 

Les réseaux sociaux d’Amérique centrale se prononcent au sujet de la signature imminente de l’Accord d’Association avec l’Union Européenne.

Réunis dans la ville de Guatemala le 4 juin de la présente année (2012), déléguées et délégués des réseaux sociaux de la région d’Amérique Centrale et du Mexique, face à la signature imminente de l’Accord de l’Association entre la région de Centre Amérique  et l’Union Européenne déclarent :

 

1.      Cet ’accord se signe dans un contexte de crise profonde de l’économie mondiale, et plus spécialement celle que vivent les pays européens, ainsi que des conditions d’asymétrie, de vulnérabilité, d’exclusion et de fragilité des économies d’Amérique Centrale. Dans ces conditions il serait contreproductif de signer un nouvel accord de libre-échange basé sur les principes néolibéraux d’ouverture commerciale et de déprotection sociale. Il est évident que ce nouveau traité impliquerait l’impossibilité pour les pays Centre Américains s’établir leur propre processus d’intégration et de définir leurs propres stratégies de développement économique et social, ainsi que l’a déjà démontré un accord en vigueur avec les Etats-Unis,  connu comme le CAFTA, qui subordonne l’intérêt des peuples centraméricains à des intérêts étrangers.

2.     Nous observons avec une forte préoccupation que l’accord changerait les relations traditionnelles entre les deux régions en matière de coopération et de dialogue politique pour le développement. Canalisant les flux de la coopération externe pour le développement vers les mécanismes du marché, l’appui aux entreprises et le renforcement des compétences des états en matière de viabilité de l’accord Commercial de L’ADA. Il est préoccupant aussi que dans l’accord de Dialogue Politique, les consultations et la participation de la société civile organisée – qui jusque-là avait la possibilité d’intervenir dans ces domaines – soient restreintes. Nous constatons en plus un recul en matière de droits humains, droit du travail et droit de l’environnement, sapant ce qu’ont été historiquement les relations entre l’Union Européenne et l’Amérique Centrale. Et nous constatons un recul dans la consolidation des processus démocratiques et de la participation des peuples.

3.     Nous manifestons notre rejet de la signature de cette convention et par-dessus tout le Honduras, à trois ans du coup d’état, qui a provoqué jusqu’à ce jour de graves violations des droits humains. L’UE met en évidence, qu’elle place l’aspect commercial, par-dessus l’aspect des droits humain et la construction d’un système démocratique dans lequel se cherche le bien-être des peuples.

 

 

 

Face à cette situation, les réseaux centraméricains déclarent :

-       L’Accord d’Association avec l’Union Européenne, est un autre Traité de Libre-Echange subordonné aux règles du marché qui ne favorisent que les intérêts des grandes entreprises transnationales européennes et subordonnent le dialogue politique et la coopération à ce même marché.

-       Nous réaffirmons notre position de résistance et de rejet indiscutable à l’Accord d’Association qui sans doute aucun, approfondirait la pauvreté, la migration, la violence, l’inégalité et la dépendance des peuples centraméricains, comme ce fut déjà cas avec d’autres traités.

-       Nous voulons qu’avant la ratification s’établisse un large processus de débat et de discussion avec la société civile centraméricaine afin de discuter des  effets possibles que recèle ce type d’accord. C’est seulement en discutant et en confrontant  les différents points de vue  existants que peut se construire un modèle économique soutenable et une relation stratégique entre nations qui bénéficie réellement aux peuples de la région.

-       Nous exigeons des Congrès nationaux qu’ils réalisent un processus de consultation citoyenne au sujet de ce traité avant de le ratifier.

Pour terminer, nous affirmons que ce traité s’ajoutera aux accords qui sous la marque de G-20 et de Rio +2O serons pris par les gouvernements de l’Union Européenne et autres pays du monde qui favoriseront les transnationales et au détriment des intérêts des peuples.

 

En la ville de Guatemala, les représentants des réseaux sociaux centraméricains.

Vía Campesina.

Centro América por el Diálogo –CAD-

Alianza Social Continental –ASC-

Asociación Latinoamericana de Organizaciones de Promoción –ALOP-

La Iniciativa Mesoamericana de Comercio Integración y Desarrollo Sostenible –Iniciativa CID-

Red Centroamericana de Monitoreo del Libre Comercio.

Red Latinoamericana de Comercio Comunitaria –RELACC/RENICC-

La Red Latinoamericana sobre Deuda, Desarrollo y Derechos – LATINDADD-

Plataforma Interamericana de Derechos Humanos –PIDHH-

Plataforma Sindical Común Centroamericana.

Foro Mesoamericano de los Pueblos.

 

4 de junio de 2012.

 

Source : Redes Sociales de Centroamérica se pronuncian sobre la inminente firma del Acuerdo de Asociación con la Unión Europea


Traduction Anne Wolff


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14 juin 2012 4 14 /06 /juin /2012 14:33

 

 
Giancarlo Scottuzzi*

jeudi 14 juin 2012, par Comité Valmy


Voir en ligne : L’OTAN prépare une vaste opération d’intoxication en Syrie Thierry Meyssan

Milan, 11 juin 2012

Les révélations du journaliste français Thierry Meyssan sur l’imminence d’une manipulation médiatique en Syrie, propulsive d’un coup d’Etat à l’avantage des Etats-Unis et de leurs alliés, sont crédibles. Elles proviennent d’une source saine et digne de foi. Meyssan a été le premier à dévoiler que derrière les attentats du 11 septembre 2001 se trouvait le gouvernement des Etats-Unis ; parmi les premiers il a démasqué les révolutions colorées mises en scène, partout où c’était possible, par les Etats-Unis ; il a été le premier à documenter la manipulation médiatique qui a poussé les électeurs des pays made in usa (italiens compris) à saluer la néo-colonisation de la Libye comme une guerre de libération du tyran ; avant-dernière reconnaissance à Meyssan : il a annoncé dès l’origine comment la révolte anti-Assad est un stratagème virtuel dont on abreuve la presse embedded de l’Occident, journaux et télés italiennes au premier rang des plus grands ivrognes. A l’aune du bon sens, un brin de crédibilité personnelle : Meyssan, qui depuis des années gérait à Paris un portail international de contre information (Réseau Voltaire), a été contraint de s’enfuir, pour se réfugier au Liban1) , pour la bonne raison que les services secrets français 2) s’étaient employés, avec leurs collègues étasuniens, à le liquider.

La crédibilité qu’elle mérite étant attribuée à la nouvelle du coup médiatique annoncé en Syrie, je crois urgent, pour la gauche révolutionnaire italienne, de se poser deux questions.

La première : est-il possible que le peuple souverain –demain en Syrie, après-demain en Italie- soit jobard au point de prendre pour argent comptant tout ce que la télévision lui sert ? Est-il possible qu’il obéisse aux impulsions du petit écran (et du papier imprimé qui le singe), au point d’être disposé à abjurer, devant des images inédites, tout ce qu’il a sédimenté pendant des années d’autres images télévisées et surtout, espérons, de lectures et de déductions personnelles ?

Deuxième question : si la réponse à la première question est affirmative, c’est-à-dire si non seulement les humeurs, mais jusqu’aux convictions profondes et supposées maturées et graves (comme l’accord pour une guerre !) dépendent de quelques heures (cumulées en quelques minutes de ci de là, dans les interstices d’une quotidienneté focalisée ailleurs) d’exposition au petit écran, comment pouvons-nous espérer éviter, nous communistes révolutionnaires, qu’après-demain une manipulation médiatique ne nous attribue qui sait quelles infamies et ne convainque donc le peuple qu’il y a lieu de nous liquider aussi ?

La réponse à la première question (les italiens sont-ils des jobards ?) est évoquée dans les sous-titres qui suivent, synthèse extrême d’un Livre noir de la démocratie en Italie, qu’un jour ou l’autre il faudra bien que quelqu’un se décide à écrire.

Berlusconi.

Il est arrivé en politique, il s’est fait élire, il a gouverné et continue à co-gouverner (il est le pilier central du gouvernement Monti) en totale illégalité. Une loi de l’Etat (au cas où le bon sens distillé par la Constitution n’aurait pas suffi) interdit aux titulaires de concessions publiques, et à plus forte raison de concessions télévisuelles, de se présenter aux élections. Berlusconi en possédait trois, sur les trois plus grosses privées. Arrivé au gouvernement il les a gardées, en y rajoutant l’utilisation de celles publiques. Mieux : il a étendu ses propres tentacules médiatiques à des centaines de petites et moyennes télévisions privées, en les subordonnant par des accords commerciaux de type colonial. Eh bien ? Le golpe de Berlusconi n’aurait-il pas été un coup d’état médiatique ? Quelque parti politique a-t-il fait preuve de résistance ? Personne. Pas même le gouvernement dit de gauche (auquel ont participé aussi Rifondazione et le Pdci, ceux-là même qui aujourd’hui prétendent en appeler aux révolutionnaires…) n’a jamais osé dénoncer un conflit d’intérêt (entre le Berlusconi empereur médiatique et le Berlusconi politique) qui est la négation de la démocratie italienne.

Europe

Les éléments constitutifs d’un Etat sont : le territoire, l’autorité législative, le bras armé. L’Italie les a cédés tous les trois à un sur-Etat appelé Union Européenne, à l’Otan et aux Etats-Unis. La plus grande base militaire italienne (Aviano) est territoire des Etats-Unis. Il y a là des centaines d’armes atomiques que seuls les Etasuniens peuvent déclencher. À Vicence (à la caserne Ederle, made in usa) a pris ses quartiers le premier contingent de la Police européenne, qui obéit exclusivement à la Commission Européenne, dont nous allons parler à présent. Le parlement italien peut continuer à faire des lois, certes, pourvu qu’elles ne viennent pas contrecarrer celles émanant de la Commission Européenne. Non, ce n’est pas une erreur : les lois européennes ne sont pas promulguées par le soi-disant parlement européen, qui n’a aucun pouvoir législatif, mais rien qu’un droit de veto limité sur les lois, qui sont le fruit exclusif de la Commission Européenne.

Laquelle n’est même pas une expression du Parlement Européen, mais bien celle des potentats économiques et des gouvernements européens. Les soi-disant « députés européens » (comme le furent et continuent de l’être certains des dirigeants de la soi-disant gauche italienne) sont des marionnettes aux mains de la Commission. Les ministres économiques italiens et la Banque d’Italie peuvent pontifier sur le petit écran autant qu’ils veulent et proclamer toutes les mesures et réformes qui leur passent par la tête : mais concrètement ils comptent autant que les prunes du proverbe, parce qu’une politique économique se fonde sur la gestion des moyens de paiement, sur le pouvoir de battre monnaie, alors qu’en Italie on n’émet pas un euro sans la permission de la Banque Europe, bras financier de l’omnipuissante Commission.

Tout ce transfert de pouvoirs de l’Etat italien à la Commission Européenne est formalisé par une nouvelle Constitution Européenne (pudiquement rebaptisée Traité Européen). C’est écrit noir sur blanc : le peuple italien n’est souverain de rien du tout, si ce n’est de choisir parmi des dizaines de chaînes télévisées toutes distributrices de la même bouillie intoxicante.

Résultat : quelqu’un, parmi les partis présents au parlement italien ou parmi ceux qui, malgré eux, ne sont pas arrivés à y entrer, s’est-il jamais opposé à ce coup d’Etat européen aux détriments de la démocratie italienne ? Quelqu’un a-t-il osé prétendre soumettre à référendum une Constitution Européenne qui phagocyte celle italienne ?

Guerres

La Constitution de la République Italienne (celle en vigueur avant d’être violentée par la Constitution Européenne) est limpide : les forces armées doivent servir exclusivement pour défendre l’Etat. Concept sacré, répété depuis soixante-dix ans, chaque 25 avril, par le Chef de l’Etat jusqu’au moindre président d’ANPI 3) de quartier, comme si c’étaient les fantômes des nazis qui menaçaient la démocratie fondée sur la Constitution. Pendant ce temps les gouvernements pro-Usa construisaient des porte-avions, qui ne servent pas à protéger un pays, mais à porter les avions et la guerre dans des pays lointains. Ils étaient tellement conscients, ces gouvernements, de violer la constitution qu’ils en baptisaient le premier porte-avions, le Garibaldi, « croiseur tutto ponte », sinon le signifiant aurait trahi l’inconfessable signifié. Au lancement du second porte-avions, le Cavour, l’intoxication médiatique avait désormais suffisamment immunisé le peuple pour l’entarter.

Désormais le troisième coup d’état médiatique italien, guerrier (après le télévisé et l’européen), était arrivé à bon port : des années de faux reportages, de fausses nouvelles, d’images manipulées, de connivences des soi-disant partis de gauche, avaient fait croire aux Italiens que la Yougoslavie était un nid d’ethnies barbares qui se massacraient entre elles et qui, si on ne les calmait pas, allaient contaminer même l’Italie de leurs barbaries. Ainsi le peuple italien, rassemblé devant les journaux de régime tout comme leurs grands-parents à Piazza Venezia exaltant les guerres du Duce, donna sa confiance aux gouvernements successifs, ceux d’une soi-disant gauche compris : l’Italie partit aussi en guerre sous la férule de Prodi et de D’Alema.

Et alors : a-t-on jamais vu, devant tant de barbarie médiatique et guerrière, s’élever le moindre vagissement de résistance à part celui, purement symbolique et inefficace, de rares intellectuels à faible audience et poids dérisoire sur le petit théâtre médiatique ?

Depuis les années 90’, la majorité des Italiens est dénervée d’autonomie critique. Elle croit tout ce qu’on lui montre et ce qu’on lui fait lire, pourvu que ce soit des images et des lectures divertissantes et simplistes.

Venons-en au présent et à la Syrie : la réponse à la première question (les Italiens vont-ils avaler la fable sur la révolution syrienne ?) est : oui.

Quant à la deuxième question (que faire, nous communistes révolutionnaires, pour affronter la vague barbare ?), la réponse nous renvoie à l’urgence de nous organiser. Pendant que nous sommes quelques milliers à lire des sites à la Losurdo et à la Meyssan, des millions de téléspectateurs tètent la fable des soldats d’Assad prenant des enfants comme boucliers humains. Demain ils s’enflammeront pour les pseudos héros révolutionnaires syriens fauchés par les rafales des troupes gouvernementales, et se presseront sur une Piazza Venezia virtuelle –où ils ont hier encensé Berlusconi et l’Europe über alles- pour applaudir l’énième guerre coloniale.

Et nous, continuerons-nous à nous contenter de défouler notre dédain en emails et débats entre intimes, version moderne de la bouteille à la mer ?

En somme : prenons le bulletin du front syrien pour ce qu’un communisme militant exige : décidons-nous à le fonder, ce Parti Communiste Italien, ou bien sous peu, quand Obama aura déchaîné la Cyberwar annoncée (qui lui permet de censurer et manipuler tout ce qu’Internet et ondes télévisées diffusent), nos défoulements, une fois griffonnés, nous devrons nous les passer de main en main, si ce n’est les manger.

* Giancarlo Scotuzzi est journaliste ; retraité à Milan, il a travaillé dans plusieurs organes de presse et notamment dans l’ex journal coopératif de la région de Brescia (Bresciaoggi) avant de fonder le journal en ligne Il Cronista. Son travail de journaliste lui a valu les déboires judiciaires et professionnels inévitables en Italie pour qui s’oppose et résiste à l’empire médiatique berlusconien.

Publié sur le blog de Domenico Losurdo mardi 12 juin 2012, sous le titre :
Il golpe in Siria e quelli in Italia

http://domenicolosurdo.blogspot.fr/2012/06/un-intervento-di-giancarlo-scotuzzi.html

Traduit de l’italien par Marie-Ange Patrizio

1) Puis Venezuela, et à présent Syrie, NdT
2) Après l’arrivée au pouvoir de N. Sarkozy 3) Associazione Nazionale Partigiani d’Italia : association des anciens résistants de la seconde guerre mondiale, http://www.anpi.it/resistenza-e-partigiani/

Source : COMITE VALMY

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13 juin 2012 3 13 /06 /juin /2012 10:42

 

Un article que je relaye parce qu'il fourmille d'infos qui devraient être de notoriété publique. Il devrait nous pousser à nous interroger sur ce qui se décide au parlement européen, qui décide, et qui laisse faire. Sur la justification des plantureuses rétributions des députés mais aussi de tout le personnel de ce qui ressemble bien à un grand Babel de l'élitisme transatlantique... beaucoup de question peu de réponses puisque le plus souvent tout cela se cache derrière ce symbole qui couvre de son ombre monolothique la réaité concrète des processus décisionnaires "Bruxelles" à dit, "Bruxelles "a décidé... voici un article qui nous montre en tout cas qui n'a ni dit, ni décidé grand chose dans ce "Bruxelles" occulte, sans renoncer pour autant à bénéficier de rétributions démesurées issues de la poche des contribuables qu'ils prétendent défendre.

 

Parlement Européen : Mélenchon et Le Pen parmi les 20 députés les plus absents

 

hemicycle-parlement-europeen.jpg

 

Marine Le Pen et Jean-Luc Mélenchon, en dépit de tout ce qui les sépare idéologiquement, ont des points communs. Outre que la présidente du Front National et le patron du Parti de Gauche s’affrontent pour conquérir la onzième circonscription du Pas-de-Calais, à l’occasion des élections législatives, ils sont tous deux députés européens (l’une depuis 2004, l’autre depuis 2009) et tous deux pulvérisent les records d’absentéisme. « Ce sont des courants d’air. Si l’un d’eux quitte l’Assemblée, personne ne le remarquera », s’amuse un fonctionnaire du Parlement « Ils ont réussi à trouver des emplois fictifs très bien payés », se marre Daniel Cohn-Bendit, le co-président du groupe Vert au Parlement européen. « Je n’ai jamais entendu le son de leur voix », ajoute Guy Verhofstadt, l’ancien premier ministre belge et patron du groupe libéral : « je ne savais même pas qu’ils avaient été élus ».

 

 

Il est vrai que les chiffres sont accablants (1). Lors des sessions plénières (12 par an à Strasbourg, du lundi soir au jeudi soir, et 4 supplémentaires à Bruxelles du mercredi au jeudi), Marine Le Pen et Jean-Luc Mélenchon sont parmi les 20 députés (sur 754) les plus absents : 56,5 % de taux de présence pour la première, 61 % pour l’autre, ce qui leur permet, en restant juste au-dessus de la barre des 50 %, de ne pas perdre la moitié de leur indemnité de 304 euros par jour de présence. Dans le passé, il est vrai, des députés ont fait pire : ainsi François Hollande, eurodéputé entre juillet et décembre 1999, a affiché un taux de présence de 22 %.

 

 

 

Être présent à Strasbourg n’est pas qu’une simple formalité : à la différence du Parlement français, le vote ne peut pas être délégué. En trois ans de présence à Strasbourg, Le Pen et Mélenchon n’ont donc pas eu l’occasion de faire beaucoup entendre leur voix : 9 interventions en plénière pour la première, 4 pour le second (en juillet, septembre et octobre 2009). Certes, ce dernier peut se prévaloir d’avoir mis son nom sur 25 propositions de résolutions contre 0 pour Le Pen. Surtout, il affiche un score impressionnant de 351 « explications de vote » contre 13 pour la patronne du FN. Il faut juste savoir qu’il s’agit dans la quasi-totalité des cas de déclarations écrites jointes dans les 14 jours au procès-verbal de séance… Même en matière de questions écrites, les deux députés ne se sont pas foulés : 2 pour Le Pen, 18 pour Mélenchon (108 pour son collègue communiste Patrick Le Hyaric, à titre d’exemple).

 

 

Mais, participation aux débats, propositions de résolutions ou explications de vote, tout cela n’est pas le vrai travail du parlementaire : outre le vote, c’est la rédaction de rapports législatifs qui compte (soit comme rapporteur officiel, soit comme coordinateur de son groupe politique). Or ni Le Pen, ni Mélenchon n’ont attaché leur nom à une quelconque activité législative. Il est vrai que pour obtenir des rapports, il vaut mieux faire partie d’un groupe politique important, ceux-ci étant répartis en fonction de ce critère (les conservateurs et les socialistes se payent la part du lion). Le FN siégeant sur le banc des non-inscrits, il n’a quasiment droit à rien, ce qui excuse partiellement Le Pen. En revanche, le Parti de Gauche siège à la GUE (gauche unitaire européenne) et, à ce titre a droit à un certain nombre de rapports. « Ils sont donnés par les groupes politiques à un député qui le demande et qui a de l’influence au sein de sa commission afin d’arracher un compromis », explique un fonctionnaire.

 

 

C’est au sein des commissions parlementaires qu’a lieu le travail des députés : « il faut s’investir dans ce travail ingrat et peu visible, car c’est le moyen de faire avancer les idées que l’on défend », affirme Catherine Trautmann, la présidente de la délégation française du PS. Le communiste Francis Wurtz, qui a pris sa retraite en 2009, à force de travail et de présence, avait ainsi acquis une influence sans aucun rapport avec le poids de la GUE au sein du Parlement. Or, rares sont ceux qui se souviennent avoir vu le vice-président de la commission des affaires étrangères qu’a été Mélenchon de juillet 2009 à octobre 2011. Sur 133 réunions de cette commission, il n’a signé le procès-verbal de présence que 16 fois. Et Marine Le Pen ne s’est montrée que deux fois à la Commission emploi qui s’est pourtant réunie 65 fois. Avec une telle présence, aucune chance d’arracher le moindre rapport…

 

 

Pour beaucoup d’eurodéputés, Marine Le Pen, c’est « la fille qui accompagne son père au restaurant des parlementaires à Strasbourg, toujours à la même table depuis 2004 » (date de sa première élection), raconte la verte Allemande Franziska Brantner. Mais Jean-Luc Mélenchon, « dans l’ordre des députés absents, est quand même moins pire que les Le Pen : on l’a vu s’intéresser à certains sujets comme les questions économiques et monétaires ou les relations avec l’Amérique Latine », tient à souligner un fonctionnaire. « On a eu des contacts avec lui », confirme Catherine Trautmann. Mais aucun des deux n’a jamais songé à utiliser le Parlement européen comme tribune, « à la différence des europhobes britanniques, comme Nigel Farage, ou polonais qui sont là pour déglinguer le truc », note l’écologiste José Bové, vice-président de la commission agriculture. Ce refus de s’engager étonne les députés allemands (dont le taux de présence est souvent de 100 %) pour qui il est inimaginable de ne pas faire le job pour lequel on a été élu, comme le souligne Franziska Brantner.

 

 

« Pour Le Pen, encore plus que pour Mélenchon, le Parlement est juste un moyen de disposer de moyens importants », poursuit Bové. Outre un salaire de 6200 euros net (7957 euros brut) par mois, s’ajoutent 304 euros par jour de présence et 4299 euros de frais généraux dont l’utilisation n’est pas contrôlée… Sans compter des droits à retraite (3,5 % du revenu brut par année de mandat). Enfin, comme tous les eurodéputés, ils touchent 22.000 euros par mois pour payer leurs assistants. Ce qui a permis à Marine Le Pen d’embaucher comme « assistant local » son compagnon et numéro 2 du FN, Louis Aliot, par ailleurs avocat et conseiller régional de Languedoc-Roussillon…

 

 

« Jean-Luc Mélenchon et Marine Le Pen ont fait le choix de ne pas se battre sur le terrain européen », note Catherine Trautmann. José Bové qui, comme Mélenchon, a mené le combat du « non » à la Constitution européenne en 2005, s’étonne de ce choix : « il s’est présenté aux élections européennes en prétendant incarner le non de gauche et il se prépare à déserter pour rejoindre l’Assemblée nationale. Je ne comprends pas ce refus de mener la bataille européenne à un moment majeur. Il n’a pas investi le Parlement comme un lieu de confrontation politique, car, pour ce bon Jacobin, le combat central est en France. En fait, son seul lien avec l’Europe, c’est son blog ».

 

Les coulisses de Bruxelles 

 

Cri du Peuple : http://www.mleray.info/article-parlement-europeen-melenchon-et-le-pen-106844214.html 

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