18 janvier 2013 5 18 /01 /janvier /2013 13:40

 

Business et seigneurs 
de guerre (Jeune Afrique)

Et de cinq ! Cette fois, c’est au financier américain Philippe Heilberg de lorgner les terres agricoles africaines. Patron du fonds d’investissement Jarch Capital, cet ex-trader d’American International Group (AIG) et de Salomon Brothers prétend avoir obtenu une concession de 400 000 hectares sur les rives du Nil, dans le Sud-Soudan – soit une superficie équivalente à celle de l’émirat de Dubaï. Reconnaissant avoir négocié dans un cadre particulier, il a déclaré au Financial Times avoir conclu le contrat du siècle.
 
Dans le Sud-Soudan, région qui tenta de faire sécession avant de conclure un accord de paix avec Khartoum en 2005 et où le régime juridique du foncier reste flou, l’Américain s’est associé avec le fils de Paulino Matip. Chef d’état-major des forces armées sudistes, cet ex-seigneur de guerre qui combattit avec les rebelles de l’Armée populaire de libération du Soudan (SPLA) reste très puissant. Gabriel Matip, qui représente les intérêts de son père dans le consortium constitué par Jarch Capital, aurait négocié avec des chefs locaux la sécurisation des terres convoitées qui devraient être exploitées (biocarburants, céréales…) à travers des joint-ventures.
 
Philippe Heilberg, qui n’aurait pas de contrat de location des terres, s’est refusé à indiquer le montant de l’opération. Spécialisée dans le financement d’investissements en Afrique dans l’agriculture, les mines et l’énergie, Jarch Capital disposerait d’un permis d’exploration pétrolière de 240 000 km² dans le Sud-Soudan à la légalité tout aussi douteuse. Enveloppée d’une réputation sulfureuse, la société compte au sein de son conseil d’administration d’anciens responsables de la CIA et du département d’État. Après Daewoo, le saoudien Hadco, le Fonds d’Abou Dhabi et le qatari Zad Holding, Jarch Capital est le cinquième investisseur à vouloir mettre la main sur le potentiel agricole africain.
 

 

 

Un banquier new-yorkais mise sur l'éclatement du Soudan
Mathieu Perreault
La Presse

Un financier new-yorkais vient d'acquérir 400 000 hectares de terres au Soudan. En plus de constituer l'une des plus importantes transactions de ce type depuis la vente de l'Alaska au XIXe siècle, cette transaction fait partie d'une stratégie troublante: la firme Jarch Capital parie que le Soudan, et d'autres pays africains, sont sur le point de se morceler en plusieurs États.

Philippe Heilberg, président de Jarch Capital
Philippe Heilberg, président de Jarch Capital, s'allie en effet avec la famille Matip, qui contrôle le sud du Soudan par le biais de l'Armée populaire de libération du Soudan. Il estime que le sud formera bientôt un État indépendant et que cette famille jouera un rôle crucial dans l'éventuel gouvernement de ce nouveau pays.
 
«Nous pensons que le sud du Soudan sera bientôt formellement indépendant, et nous voulons être les premiers à y investir, explique M. Heilberg joint à New York. D'autres pays africains, comme le Nigeria ou l'Éthiopie, sont aussi appelés à éclater. Les frontières du continent ont été tracées par les puissances coloniales sans tenir compte de la démographie et des différents groupes culturels et linguistiques. Elles vont inévitablement changer.» La superficie louée par Jarch équivaut à 10 fois l'île de Montréal.
Cet intérêt des banquiers occidentaux pour l'Afrique n'est pas nouveau. Ce qui distingue M. Heilberg de ses prédécesseurs, cependant, c'est qu'il est très transparent dans ses intentions, contrairement aux financiers de l'ombre qui ont longtemps financé les guerres civiles africaines. «Je ne suis pas un saint, je suis là pour faire de l'argent, dit M. Heilberg. Mais je pense que la seule stratégie viable à long terme est de conclure des transactions qui bénéficient aussi à la population locale. Nous ne voulons pas enrichir un dictateur qui brade les ressources naturelles de son pays.»
 
La transaction - une location à très long terme - dévoilée par le quotidien britannique The Financial Times survient quelques mois après que le gouvernement de la Corée-du-Sud a annoncé la location pour un siècle de 1,3 million d'hectares à Madagascar, en guise de police d'assurance en cas de pénurie de nourriture similaire à la crise alimentaire du printemps dernier. M. Heilberg a lui aussi comme projet de faire de l'agriculture sur son domaine dans le sud du Soudan.
 
«Le prix des denrées alimentaires est nécessairement en hausse à long terme, dit M. Heilberg, qui a commencé sa carrière dans les minéraux, au sein de plusieurs banques prestigieuses. Il faudra plusieurs années avant que nos investissements en infrastructures, notamment des routes vers l'océan Indien, soient complétés. Nous sommes en Afrique pour y rester, parce que nous croyons en l'avenir du continent.»
 
Le financier new-yorkais entend notamment profiter de l'aide internationale au développement pour faciliter ses projets. Il est certes bien entouré: le Financial Times indique que le CA de Jarch compte notamment Joseph Wilson, ex-haut diplomate américain qui est plus connu comme le mari de l'espionne Valerie Plame.
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17 janvier 2013 4 17 /01 /janvier /2013 23:59

 

 

 

Andrew Gavin Marshall

 

Le 7 Janvier 2013

 

url de l’article original:

http://andrewgavinmarshall.com/2013/01/07/corporate-culture-and-global-empire-food-crisis-land-grabs-poverty-slums-environmental-devastation-and-resistance/

 

- Traduit de l’anglais par Résistance 71 -

 

Le pouvoir des entreprises est immense. La plus grosse des corporations au monde est la Royal Dutch Shell, qui n’est surpassée en richesse que par 24 nations sur terre. Des 150 plus grandes entités économiques au monde, 58% sont des grosses entreprises multinationales. Les entreprises sont totalitaires de manière institutionnelle, le résultat de la résistance du pouvoir à la révolution démocratique, qui fut accepté par la sphère politique, mais refusé par la sphère économique, ainsi empêchant une véritable société démocratique. Les corporations sont motivées par une religion appelée “profits à court terme”. La société entrepreneuriale, une société de capitalisme d’état, s’est épanouie aux Etats-Unis et a géré la transition de la société américaine au début du XXème siècle, de la même manière que les fascistes et les communistes gérèrent les transitions à travers l’Europe. Avec chaque guerre mondiale, la société américaine, son pouvoir politique et économique, a augmenté en influence globale et à la fin de la seconde guerre mondiale, cette société entrepreneuriale fut exportée partout dans le monde.

Ceci représente un empire. L’armée américaine, les agences de renseignement et l’appareil de sécurité de l’état opèrent avec l’intention de servir les intérêts des grosses entreprises américaines et maintenant de plus en plus transnationales et de l’état américain. Guerres, coups d’état, campagnes de déstabilisation, soutien de dictateurs, de tyrans, génocides et oppression sont les produits de l’interaction de l’occident avec le reste du monde.

Dans le même sens que “dieu fit l’Homme à son image”, les corporations ont refaçonné les sociétés en vue de leurs propres intérêts et avec la même arrogance. De grosses entreprises et des banques ont créé ou pris le contrôle de think tanks, de fondations (charitables), d’institutions éducatives, des médias, des relations publiques, de la publicité et des autres secteurs d’activité de la société. Par leur contrôle des institutions, elles étendent leurs idéologies de pouvoir, et les variances en leur sein, à la population, aux autres élites, à la classe “éduquée”, la classe moyenne, les pauvres et la classe laborieuse. Aussi loin que les idées exprimées soutiennent le pouvoir, c’est “acceptable”. Il est possible de critiquer, mais l’analyse institutionnelle n’est pas permise. Les idées qui s’opposent au pouvoir institutionnel sont “idéologiques”, “idéalistes”, “utopiques” et ultimement… inacceptables.

La culture de ces entreprises domine notre société occidentale. Etant de manière inhérente des institutions totalitaires, la culture et ses institutions, deviennent de plus en plus totalitaires. Ceci est la réponse du pouvoir économique privé pour détricoter les succès ayant eu lieu au cours de l’histoire humaine et qui sont venus par une croissance démocratique au sein de la sphère politique. Les corporations et les banques recherchent le contrôle et consument tout sur leur passage, afin de dominer sans partage et sans fin.

La seule raison pour laquelle les corparations furent et sont capables d’être l’institution culturelle de référence aux XXème et XXIème siècles, est à cause de leur puissance économique. Celle-ci est dérivée de l’exploitation: des ressources, de l’environnement, du travail, des consommateurs. Elle est renforcée par la répression: le boulot de l’état dans la société de capitalisme d’état, venant avec des aides massives et des mesures de protectionnisme pour protéger corporations et intérêts financiers. Alors que le pouvoir entrepreneurial s’étendait dans le monde, la destruction rapide de l’environnement et des ressources s’accéléra et les puissances occidentales ont délocalisé la dévastation environnementale que nos sociétés de consommation requèrent, dans les pays du soi-disant tiers-monde. Nous consommons, ils souffrent; un mariage d’inconvénience que nous appelons “civilisation”. Les entreprises et l’état gardent le reste du monde dans un état de pauvreté et de répression notoire, essayant éternellement de bloquer l’inévitable révolution globale pour créer une société humaine qui agit… humainement. Nous étions occupés à acheter plein de trucs et nous ne pouvions pas être dérangés.

Maintenant, ce qui a été fait aux gens dont nous occupons maintenant le territoire, ou qui que ce soit dans le monde, est en train de nous être infligé de manière interne. Tout est à vendre ! Les corporations n’ont jamais fait autant de profits, elles engrangent les centaines de milliards et milliers de milliards de dollars en réserves de liquidité, argent qui n’est pas investi, attendant simplement que vos standard de vie aient été réduits de manière signifiante rendant ainsi votre force de travail et vos ressources bien meilleur marché et donc ultimement, toujours plus bénéficiable pour les mêmes. Ceci est appelé “austérité” ou “réformes structurelles”, des euphémismes politiques pour appauvrissement et exploitation.

Les corporations, les banques et les états ont causé ces dernières années une crise alimentaire massive, spéculativement montant les prix à des records de hausse chaque année depuis 2007. Avec quelques milliards de personne dans le monde vivant avec moins de 2 dollars par jour. La majorité de la population mondiale, dépense ses revenus en nourriture. L’augmentation des prix alimentaires, causés de manière spéculative (les gros joueurs dans ce domaine étant Goldman Sachs, Morgan Stanley et Barclays) a poussé des dizaines de millions de personnes dans toujours plus de pauvreté et plus de malnutrition. Environ un milliard (1/7 de la population mondiale) de personnes vivent dans des bidonvilles et ceci croît rapidement. D’énormes bidonvilles urbains sont développés depuis l’impérialisme des états occidentaux et des corporations et sont imposés au reste du monde, poussant les gens à l’exode rural et les amenant toujours plus nombreux dans les villes, soit à cause de la pauvreté induite ou contraints par les bombes et les violences armées. Le tout étant facturé aux sponsors du terrorisme de l’état occidental impérialiste. Nous avons soutenu et soutenons toujours de petites élites sans scrupules dans les pays que nous dominons ou avons dominé à travers le monde et maintenant nous venons juste de réaliser le cynisme de la règle d’une toute petite “élite” qui domine nos vies personnelles. Leur fonction sociale est celle du parasite: de sucer le sang de la société mondiale.

Les augmentations des prix alimentaires ont aidé à générer une énorme saisie des terres, l’occident (ainsi que les puissances du Golfe et d’Asie) s’appropriant de vastes zones de terres arables, ainsi que l’eau, de par le monde et ce pour une bouchée de pain. Cette saisie a été la plus notoire en Afrique, où ces dernières années, essentiellement des investisseurs occidentaux se sont accaparés des terres dont la superficie est proche de celle de l’Europe de l’Ouest. Ces terres contiennent non seulement de vastes richesses, comme l’eau, le Nil étant à vendre ! mais c’est également le lieu d’habitation de centaines de millions de gens et mondialement, il y a environ 2,5 milliards de personnes impliquées dans le fermage de petite envergure. Ceci est primordialement effectué au travers de terres communautaires, quelque chose que l’occident, avec son culte du “droit divin à la propriété privée”, ne comprend absolument pas. Ainsi dans la loi d’état et d’entreprise internationale, que nous avons créée, nous décrétons que la terre communautaire et utilisée doit devenir la propriété légale de l’état. Nos “investisseurs”: banques, hedge funds, fonds de pensions, entreprises multinationales et états, signent des accords avec des états corrompus du monde pour nous donner des contrats d’exploitation de 40 à 100 ans pour de vastes terres arables, payant peu ou parfois même  pas du tout de loyer. Ensuite, “les terrains vides”, comme nous les appelons, sont nettoyés (de leur ‘vide” soyons-en certains..), chassant les gens vivant sur ces terres depuis des générations et qui dépendent de la terre pour leur subsistance. Ces gens sont forcés de se déplacer vers les villes et finissent dans les nombreux bidonvilles prévus à cet effet.

Voilà ce que nous appelons “une utilisation productive de la terre”. Ensuite, bien sûr nous nous appliquons à la détruire, à évicérer l’environnement, à empoisonner, polluer, extraire, exploiter, piller et profiter de la manne; ou bien nous gardons la terre sans l’utiliser du tout, attendant juste qu’elle monte en valeur de profit. Même des universités américaines comme Harvard sont impliquées dans ce pillage des terres sans précédent en Afrique et ailleurs. Ceci constitue la plus grande saisie de terres de l’histoire depuis la “ruée sur l’Afrique” du XIXème siècle lorsque les Européens ont colonisé presque tout le continent. Quand nous utilisons la terre pour des “raisons productives”, nous disons que cela “va aider le climat” et “réduire les famines”. Comment ? Parce que nous allons produire de la nourriture et du biocarburant. Ce faisant, nous allons utiliser des quantités faramineuses d’engrais, de pesticides, d’insecticides, d’organismes génétiquement modifiés, nous allons faire usage d’une déforestation intensive, de la destruction de la biodiversité et implanter des techniques de fermage hautement mécanisées et lourdes en consommation de carburants. La nourriture que nous produisons, qui ne représente pas grand chose, car nous avons un plus grand intérêt dans le biocarburant, le commerce de bois précieux, les minerais, le pétrole, etc.. est ensuite exportée vers nos pays loin des pauvres qui baignent dans la misère et la famine. Ils perdent leurs terres, deviennent plus pauvres encore, avec en prime, une insécurité alimentaire croissante, la faim, la famine, la croissance des bidonvilles, l’augmentation de la mortalité, des maladies et de la violence. La pauvreté est la violence.

Voilà comment les états occidentaux, les corporations et les organisations internationales s’occupent du problème de la “faim”: en en créant encore plus. Et ironie du sort des plus sinistres, nous appelons tout cela avancer sur “la voie vers la durabilité”. Nous ne nous rendons pas bien compte que les intérêts du pouvoir ont une définition quelque peu différente de “durable”: ils combinent simplement les mots “durable” et “profitable” et l’appellent “durabilité”. Ce mot a déjà une signification pour la plupart des gens, nous n’avons fait que mal interprêter sa signification. Mais il y a des gens qui prennent ce concept très au sérieux, ceux qui font l’expérience des dégâts causés dans une société en banqueroute.

Nous sommes maintenant les témoins d’une grosse résistance à l’échelle mondiale, résistance essentiellement menée par les peuples indigènes, que ce soit en Afrique, en Amérique Latine, en Asie et maintenant en Amérique du Nord. Au Canada, le mouvement “Idle No More” commença avec quatre femmes autochtones de la province du Saskatchewan, qui ont décidées de se rencontrer et de discuter de leurs préoccupations au sujet de la “loi budgétaire” de Stephen Harper, le premier ministre, qui, entre autres, a réduit le nombre de rivières, de fleuves et de lacs protégés au Canada d’environ 2,5 millions (au 4 Décembre 2012) à quelque chose aux alentours de 62 (au 5 Décembre 2012). Maintenant, un très vaste mouvement de contestation, de plus en plus international et en expansion, mené par les natifs aborigènes du Canada, prend place. Il y a deux mois, cela commença avec quatre femmes qui ont eues une discussion…

Les nations indigènes du Canada sont en train de montrer aux Canadiens, et autres personnes dans le monde, comment résister au pouvoir. Ils ont eu pas mal d’entrainement. Pendant plus de 500 ans, nos sociétés occidentales ont opprimés et ont effacé les populations indigènes “à la maison” comme ailleurs. Les autochtones, comme toutes personnes opprimées, sont sur la ligne de front de la nature la plus répressive de notre société: Ils expérimentent et ont expérimenté l’exploitation, la dévastation environnementale, la domination et la décimation.. Avec les peuples natifs prenant la parole, pas seulement au Canada, mais à travers l’Amérique Latine, l’Afrique et ailleurs, il est plus que temps que nous autres en occident commencions à écouter. Il est toujours très important d’écouter ceux qui sont le plus opprimés; l’histoire de nos “victimes” est rarement écrite ou connue, du moins pas de nous. Les victimes elles se souviennent. Il est vraiment important que nous commencions à écouter.

Comment pouvons-nous espérer changer ou savoir quoi et comment changer nos sociétés si nous n’écoutons pas et n’apprenons pas de ceux qui ont l’expérience du pire de celles-ci ? Les peuples indigènes sont en train maintenant de nous donner une leçon de lutte démocratique. Si nous continuons sur notre voie actuelle, les communautés indigènes vont être complètement éliminées et les puissances qui gèrent notre société auront réussi à compléter un génocide commencé il y a 500 ans.

Nous devons donc nous poser la question: Ne devrions nous pas maintenant écouter ces gens, apprendre d’eux et les rejoindre dans la lute commune pour la justice et l’idée d’une société humaine ou… sommes-nous toujours trop occupés à acheter des trucs inutiles ?

Il serait peut-être temps que tous ensemble nous disions: Idle  No More, Plus Jamais Inactif !

Source :
Resistance71 Blog

 

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17 janvier 2013 4 17 /01 /janvier /2013 22:37

 

C'est là, chiffres à l'appui, la compétitivité a pris le pas sur l'humanité

 

Une crise aux multiples dimensions : profits et bonus pour quelques uns, chômage et baisse des salaires pour beaucoup d’autres

13 janvier par Jérome Duval


Celles et ceux qui espèrent un changement de politique de la part de nos gouvernements sociaux-libéraux ou néolibéraux à la solde des grandes institutions financières, des marchés et des grandes entreprises vont être déçus : même au bord de l’abîme, nos décideurs resteront inflexibles, la boussole rivée sur l’austérité tant l’attirance pour un taux de profit maximal est forte et la croyance aveugle en la sacro-sainte croissance immuable.
Nous savons pourtant par expérience - et à l’encontre de la théorie du ruissellement qui veut que la croissance se répercute mécaniquement du haut vers le bas des couches sociales - qu’un retour à la croissance du PIB |1| ne bénéficie pas à la grande majorité de la population. Il suffit pour cela de regarder l’extrême pauvreté persistante en Afrique et dans les pays émergeants. Mais qu’importe, les grandes institutions font et refont sans cesse de nouveaux pronostics de croissance, tels d’inlassables bulletins météo de l’âge capitaliste, sans égard pour l’inégalité sur laquelle elle se fonde.

M. Draghi, personnalité de l’année ou culte de l’arrogance ?

Le 14 Décembre 2012, le président de la Banque centrale européenne M. Draghi, interrogé par le Financial Times sur la souffrance sociale infligée pas les cures d’austérité qu’il impose avec le FMI et l’UE en Europe, estime qu’ "abandonner maintenant (les politiques d’austérité), comme certains le suggèrent, reviendrait à gâcher les immenses sacrifices faits par les citoyens européens". Malgré l’échec retentissant de ces politiques, le président de la BCE, sacré "personnalité de l’année |2|" par le même quotidien de référence financière pour avoir « grandement contribué à l’apaisement des marchés financiers en zone euro » , ne tient pas à décevoir et veut donc poursuivre la voie néolibérale tracée par Friedman (destruction totale de l’Etat social, privatisation…) quel qu’en soit le coût humain. La perte de souveraineté des Etats à la solde des créanciers ne l’inquiète pas puisqu’il dit œuvrer pour son rétablissement : "Les pays avec un endettement et des déficits élevés devraient comprendre qu’ils ont perdu leur souveraineté sur leurs politiques économiques depuis longtemps dans un monde globalisé. Travailler ensemble dans une union orientée vers la stabilité signifie en fait regagner de la souveraineté |3|". Ainsi, nous regagnerions de la souveraineté dans une Union européenne qui a récemment reçu le prix Nobel de la paix sous les applaudissements de l’OTAN ? De quoi nous inquiétons-nous puisque l’on veille si bien sur nous ? Rappelons si besoin est, que le nouveau traité MES (mécanisme européen de stabilité) prévoit une totale immunité pour les actions prises dans ce cadre avec le droit qui lui est conféré de superviser les budgets de chaque Etat membre et d’infliger des amendes à ceux qui ne respectent pas les directives…de la BCE ; que de nouveaux gouvernements en Italie et en Grèce sont arrivés au pouvoir sans élection sous l’œil bienveillant de la BCE et de l’UE ; que dès mars 2012, les missionnaires de la Troïka (BCE-UE-FMI) se sont installé de manière permanente dans les ministères à Athènes pour fouiller dans les comptes publics. « Souveraineté » dites-vous M. Draghi ? En tout cas pas celle des peuples.

Salaires en baisse, chômage en hausse

Contrairement à ce qu’avance M. Draghi, tout indique pourtant qu’un virage radical est plus que nécessaire et urgent. Un récent rapport de l’OIT (Organisation internationale du Travail, Rapport mondial sur les salaires 2012/13) confirme l’aggravation de l’inégale répartition des richesses produites, la part revenant au Capital continuant d’augmenter au détriment de celle revenant au Travail : « La tendance mondiale a entraîné un changement dans la distribution du revenu national, la part des travailleurs baissant tandis que les parts du capital dans le revenu augmentent dans une majorité de pays. ». Au niveau mondial, « Les salaires moyens mensuels ajustés pour tenir compte de l’inflation – ce qu’on appelle les salaires moyens réels – ont augmenté globalement de 1,2 pour cent en 2011 ». Si on ne tient pas compte de la Chine, « les salaires moyens réels n’ont augmenté que de 0,2 pour cent au niveau mondial en 2011 ». En Europe et au Moyen Orient les salaires ont baissé depuis 2008 alors qu’ils ont continué d’augmenter pendant la crise en Amérique latine et en Asie. Les pays européens, sous recommandation du FMI, réduisent les salaires réels alors que cela diminue la demande des ménages et contracte l’économie. En 2011, ils sont en baisse de 0,6% en zone euro, les travailleurs britanniques ont vu leurs rémunérations fondre de 3,5%, en Espagne elles ont chuté de 2% et de 1,6% en Irlande et en Italie. En Grèce, où le chômage frappe désormais plus du quart de la population active, les travailleurs ont vu leur salaire réduit de 6,2% en 2011 |4|. Le cas de la Grèce est important puisqu’il ouvre la voie au reste de l’Europe en commençant par sa périphérie. Le 3 décembre 2012, une étude menée par deux syndicats grecs, ADEDY et GSEE, a révélé que le pouvoir d’achat des Grecs avait été divisé par deux pendant les deux dernières années, un Grec sur deux vit en deçà du seuil de pauvreté |5|. Revenant sur le rapport de l’OIT cité plus haut, d‘une manière globale, « Entre 1999 et 2011, l’augmentation de la productivité du travail moyenne dans les économies développées a été plus de deux fois supérieure à celle des salaires moyens. » Comme l’explique Eric Toussaint, cet écart permet l’augmentation du taux de profit de la classe capitaliste |6|.

Dans un rapport précédent paru le 15 décembre 2010, l’OIT précisait déjà : « En Europe centrale et orientale, la croissance des salaires réels a baissé, passant de 6,6 pour cent en 2007 à 4,6 pour cent en 2008 et à −0,1 pour cent en 2009 |7|. » La chute est vertigineuse !

Toujours selon l’OIT, le monde compte 30 millions de chômeurs en plus depuis le début de la crise en 2008 et parmi ceux qui ont un emploi, 900 millions de personnes perçoivent moins de 2 dollars par jour. Et c’est en Europe là aussi que l’on trouve les plus fortes augmentations du taux de chômage : selon Eurostat, au sein de l’Union européenne entre 2008 et 2012, ce taux est passé de 7,1% en 2008 à 10,6% au dernier trimestre 2012. En Espagne, le taux de chômage a bondi de 13,2% en octobre 2008 à 20,5% en octobre 2010 puis à 26,2% en octobre 2012. A Chypre et au Portugal il s’est élevé de plus de 3 points en un an, de juin 2011 à juin 2012 il est passé de 8% à 11,7% et de 12,7% à 15,9% respectivement. En Grèce il a doublé en 2 ans passant de 13,9% en octobre 2010 à 26% en septembre 2012 (il était de 7,8% en octobre 2008), 56% des 15-24 ans n’avaient pas de travail en septembre 2012, contre 22% en septembre 2008 |8|.

Le luxe ne connait pas la crise

Pendant ce temps, le secteur du luxe, dont les marques européennes représentent 70% du marché global, se porte à merveille avec une croissance de plus de 10% enregistrée en 2010-2011. LVMH , le numéro un français et géant mondial du luxe, a enregistré 3,06 milliards d’euros de bénéfices en 2011, un record historique. Pour profiter de la croissance du secteur, le groupe LVMH |9| a même lancé sa marque Cheval Blanc pour conquérir l’hôtellerie de luxe. Son grand patron Bernard Arnault, première fortune de France, empochait la même année 10,8 millions d’euros |10|, soit 821 années de Smic |11| (l’année d’avant, en 2010, il avait déjà perçu 9,7 millions). M. Arnault, a vu sa fortune progresser en 2012 pour atteindre 29,7 milliards de dollars. Signalons au passage que le joaillier Bulgari, filiale de LVMH depuis 2011, est soupçonné de fraude fiscale par le gouvernement italien, pour avoir dissimulé près de 70 millions d’euros de revenus imposables en utilisant des sociétés basées en Irlande et au Luxembourg.

Même au-delà du secteur du luxe, les grands patrons s’en sortent bien malgré la crise : alors qu’en 2011, l’indice boursier de la place de Paris a perdu 17% de sa valeur, la rémunération moyenne des patrons du CAC 40 s’est élevée à 4,2 millions d’euros la même année, en hausse de 4% par rapport à 2010, année où les rémunérations avaient déjà flambé de 33% |12|.

En Espagne, Amancio Ortega, patron de l’entreprise de textile Inditex propriétaire de Zara, Pull & Bear, Massimo Dutti ou Bershka, est devenu le 3ème homme le plus riche du monde, aidé par la propulsion en bourse des titres Inditex qui ont fait un bond de +66,7% en 2012. Selon le classement élaboré par Bloomberg |13| en 2012 , sa fortune a augmenté de 62,9% par rapport à 2011, soit 22,2 milliards de dollars (16,8 milliards d’euros) de plus pour atteindre 57,5 milliards de dollars (43,5 milliards d’euros). Selon ce même classement, la richesse globale des 100 plus grosses fortunes du monde a progressé de 241 milliards de dollars en 2012 pour atteindre 1.900 milliards de dollars, bien plus que le montant de la dette externe publique de tous les pays en développement (1647 milliards de dollars en 2010). Ce montant du patrimoine des 100 personnes les plus riches de la planète représente plus de 5 fois la dette publique grecque, plus de 2 fois la dette publique espagnole et plus de 14 fois le montant de l’aide publique au développement (APD) que les Etats s’étaient engagé en 1970 - sans y parvenir depuis - à porter à 0,7% de leur revenu national brut (RNB).

Enfin, en dépit des beaux discours de M. Obama appelant à limiter les bonus de Wall Street, ceux-ci se maintiennent à un haut niveau : malgré une importante baisse en 2008 (voir tableau ci-dessous), ils ont de nouveau fortement augmenté en 2009. Depuis le début de la crise sur la période 2007-2011, les banquiers et courtiers de Wall Street ont enregistré 115,6 milliards de dollars de bonus.

La crise ne semble décidément pas avoir les mêmes conséquences pour tout le monde…

Evolution des bonus de Wall Street 1985 – 2011 (en milliards de dollars) :


Notes

|1| Le Produit Intérieur Brut (PIB), notion capitaliste par essence, est censé mesurer la création de richesse. Pourtant il ne mesure pas le travail des femmes au foyer ni le travail informel et ne tient pas compte de la dégradation écologique engendrée par cette croissance économique. Ainsi, le PIB considère l’effet d’un tsunami ou d’un accident de la route comme une contribution positive à la croissance du fait des transactions qu’il induit.

|2| Financial Times, 13/12/2012, FT Person of the Year : Mario Draghi, http://www.ft.com/intl/cms/s/0/8fca... Cette nomination vient récompenser l’action de la BCE qui avait fourni pour une durée de 3 ans plus de 1000 milliards d’euros au faible taux d’intérêt de 1% à quelques 800 banques en manque de liquidité via le LTRO (Long Term Refinancing Operation) entre décembre 2011 et février 2012.

|3| Austérité : Draghi appelle les Etats à ne pas relâcher leurs efforts, AFP 14/12/2012. http://lexpansion.lexpress.fr/econo...

|4| Nous parlons des salaires réels au-delà de la fonction publique et non du revenu disponible brut des ménages qui aurait baissé de 17% en Grèce entre 2009 et 2011.

|5| Greek salaries far below EU average, 5 décembre 2012, http://www.ekathimerini.com/4dcgi/_...

|6| Eric Toussaint, La plus grande offensive contre les droits sociaux menée depuis la seconde guerre mondiale à l’échelle européenne, 23 décembre 2012, http://cadtm.org/La-plus-grande-off...

|7| Rapport mondial sur les salaires 2010/11, p.2, http://www.ilo.org/wcmsp5/groups/pu...

|8| Toutes les données sur le taux de chômage sont tirée de Eurostat.

|9| Le géant mondial du luxe LVMH est propriétaire de Louis Vuitton, Céline, Givenchy, Bulgari ou encore Guerlain.

|10| Salaires fixes, variables et/ou exceptionnels, stock-options, actions gratuites, dividendes et avantages annexes en milliers d’euros.

|11| L’Observatoire des inégalités, http://www.inegalites.fr/spip.php?p...

|12| Rapport du Cabinet Proxinvest, http://www.proxinvest.com/index.php..., et http://lexpansion.lexpress.fr/entre...

|13| Bloomberg Billionaires Index, http://topics.bloomberg.com/bloombe...

 Source :
CADTM - Une crise aux multiples dimensions : profits et bonus pour quelques uns, chômage et baisse des salaires pour beaucoup d'autres

Via :
Mes coups de coeur

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16 janvier 2013 3 16 /01 /janvier /2013 17:23

 

De cette implacable machine de guerre que constitue le système idéologique mécaniste, l’industrie minière fait partie à part entière. L’extractivisme tel qu’il se pratique est à remettre e questions sur toute la ligne.

Pour introduire l’article Le Canada, plaque tournante de l’industrie minière… et de ses magouilles que je vous invite à lire sur LA VIDURE | Naître dans une explosion et finir en implosion!     j’ai choisi de vous présenter l’autre bout de la lorgnette, un zoom sur le terrain. Des articles  exemplaires en ce sens qu’avec quelques variantes nous retrouvons toujours les mêmes figures de l’expulsion, de l’exploitation et de la répression.

D’un côté nous avons le monde des transnationales qui posent leur sièges là où c’est le plus intéressant pour eux, c’est ce bout de la lorgnette que nous présente Gaëtan Pelletier,  Un article édifiant qui nous permet de mieux comprendre en quoi les transnationales n’ont de patrie que leur propre intérêt et en quoi cet intérêt diverge d’avec celui de l’humanité, et bien plus que cela.

De l’autre côté, sur le terrain, nous avons les habitants expulsés de leur terre, réprimés, assassinés, torturés, harcelés, enlevés, emprisonnés, menacés lorsqu’ils se révoltent. Nous avons droit aussi à l’apparition de cités « modèles » dans lesquelles des personnes dépossédées de leur territoire sont regroupées comme du bétail devenu inutile, voir par exemple Mexique - Villes rurales durables: "Droits violés, paysans urbanisés" Un article, une situation parmi tant d’autres, des dizaines et des centaines, voire des milliers d’autres, petits foyers de cette guerre qui se généralise, la main mise sur l’ensemble des ressources de la planète et l’élimination des populations locales dépossédées. Heureusement, il y a la résistance et elle s’organise, mais ne semble toujours que très peu atteindre l’Europe qui semble aveugle et sourde à la réalité du monde, au prix payés par d’autres pour permettre aux européens de devenir des crétins repus à l’égoïsme assassin. Aveugles et sourds aux risques que cette situation présente pour eux demain.

 


De l’autre côté, sur le terrain, une fois que les transnationales se sont débarrassées des populations locales, dont peut-être un jour on retrouvera les corps dans des charniers anonymes, parce que ces sociétés ont à leur service les organisations paramilitaires ad-hoc, parfois les services de répressions nationaux et les alliés des opérations conjointes des « Opérations Spéciales », des USA et nations alliées officiellement, elles aussi apatrides de fait. La collectivité paysanne qui s’oppose au vol de son territoire fait partie par définition des insurgés, qui contreviennent aux intérêts des « Etats-Unis », nouvelle cible privilégiée de la guerre totale. Une fois ce « problème » réglé,  (les habitants mis hors d’état de « nuire ») avec plus ou moins de dégâts et de souffrance pour le » problème », il s’agit de mettre les esclaves au travail… un exemple ci-dessous, mais j’en ai lu beaucoup d’autres similaires, malheureusement beaucoup sont en espagnol. Mais pour compléter le sujet vous pouvez consulter cet article (dont j'airepris les photos ci-dessus) qui vous montre Campo Rubiales de l’intérieur, le même titre, et un contenu complémentaire de l'article présenté ci-dessous Colombie : les damnés du pétrole

 

 

Source Le Canada, plaque tournante de l’industrie minière… et de ses magouilles

 

 

mercredi 19 octobre 2011

Campo Rubiales : Les damnés du pétrole
Du 10 au 14 octobre se déroulait dans le département du Meta une caravane itinérante dont l'objectif était d'atteindre Campo Rubiales et Campo Quifa et les installations pétrolières de l'entreprise canadienne Pacific Rubiales Energy pour aller à la rencontre des travailleurs. Mobilisés depuis juin dernier, ils dénoncent la précarité de leur embauche mais aussi leurs conditions de vie dans les camps de travail de l'entreprise. Quant aux communautés alentours, la richesse de leur terre leur échappe en dépit de leur proximité avec des exploitations générant près de 25 % de la production nationale de pétrole.

L’action a associé plus d’une cinquantaine d’organisations sociales nationales et internationales. Elle a aussi permis l’entrée dans la zone des représentants nationaux et départementaux de l’Union Syndicale Ouvrière de l’industrie pétrolière (USO) et de la Confédération Unie des Travailleurs (CUT) alors que le droit syndical y est particulièrement bafoué. Campo Rubiales et Campo Quifa sont situés au cœur du Meta, dans une zone particulièrement isolée. La superficie totale de ces deux zones avoisine les 1 900 km2. À Campo Rubiales, 14 000 travailleurs sont dispersés sur les différents sites d’exploitation. En dépit de la présence de villages de colons et de communautés autochtones, la zone est fermée et l’accès par la route est strictement contrôlée par un personnel privé. Une autorisation délivrée par Pacific Rubiales ou ses entreprises sous-traitantes est nécessaire et l’on prend les empreintes et les photos de chaque entrant, qu’il soit travailleur ou habitant. L’entrée de la caravane dans la zone voulait aussi signifier un acte symbolique de récupération de la souveraineté nationale sur ces territoires laissés au contrôle de la multinationale.






Le mouvement a commencé fin juin et les moments forts en ont été la déclaration de grève et d’assemblée permanente du 18 juillet puis une nouvelle entrée en grève du site de Campo Rubiales le 20 septembre. En plus d'une demande de hausse des salaires, il s’attache à dénoncer le mode d’embauche. La mise sous contrat des travailleurs s’appuie sur un système d’entreprises sous-traitantes permettant d’amplifier la flexibilisation que le droit du travail colombien connaît déjà depuis l’importation des thèses néolibérales dans le pays au début des années 1990. Les contrats de travail sont de 28 jours et comprennent trois semaines continues de travail pour une semaine de repos en dehors du site. En sortant du site, les travailleurs ne savent jamais s’ils pourront obtenir un nouveau contrat. Cette flexibilisation des conditions de travail soumet les travailleurs à une pression permanente, alors que nombreux sont ceux qui enchaînent les contrats mensuels et les mois de travail sur le site. Elle permet aussi de contrôler toute contestation, le contrat n’étant pas renouvelé quand le travailleur énonce son désaccord. Lors de la caravane, nous avons d’ailleurs pu noter que la peur de perdre son emploi était permanente pour ces ouvriers, notamment chez les transporteurs qui, quand nous les avons visités, témoignaient volontiers mais refusaient toute prise d’enregistrement. Les manifestations de solidarité se sont d’ailleurs succédées tout au long de la semaine. Et l’adhésion à l’USO n’en est pas moins importante, le syndicat revendiquant plus de 5 000 adhérents pendant les grèves, des centaines d’autres ayant pris leur carte au moment de la caravane. Mais l’exercice syndical est profondément limité. Quand l’un de ces adhérents est repéré, son contrat n’est pas reconduit le mois suivant. Ainsi, de façon plus générale, Pacific Rubiales et entreprises sous-traitantes ont activement entravé les mobilisations en ne reconduisant pas les contrats de plus de 4 000 des employés présents pendant les grèves.

L’autre thème central de la mobilisation concerne les conditions de vie de ces travailleurs, littéralement parqués dans des campements où la promiscuité est permanente, les sanitaires souvent défaillants et la nourriture parfois avariés. Après de longues journées de travail, le plus souvent supérieures à douze heures continues, les ouvriers ne disposent d’aucun espace décent de repos et de distraction. Les dortoirs sont installés sous d’immenses tentes sans espace privé, dans des containers inhospitaliers ou dans des pièces sans fenêtres de moins de 15 m2 où quatre lits occupent tout l’espace.

 


 

Enfin, dernières observations et non des moindres, les habitants présents sur les zones d’exploitation, qui souvent travaillent aussi pour Pacific Rubiales, vivent dans une pauvreté extrême, dans des maisons aux murs de plastique ou aux planches récupérées et dont le sol est de terre (voir reportage photos). L’accès à l’eau est des plus précaires et génère des problèmes sanitaires et l’électricité souvent absente ou produite grâce à un groupe électrogène individuel, quand, dans l’installation pétrolière voisine, les éclairages fonctionnent à plein régime. La situation certainement la plus dramatique est celles de ces communautés autochtones. Les conditions de vie y sont encore plus précaires, les enfants souffrant de malnutrition et du lot de maladies qui y est associé, tandis que l’acculturation gagne chaque jour plus de terrain dans des communautés plongées dans l’apathie.

Bref, l’existence d’une extrême pauvreté à quelques centaines de mètres d’installations ultramodernes a de quoi choquer. La dénonciation peut paraître ici bien classique, une multinationale qui exploite les richesses d’un pays en bafouant le droit du travail et en ignorant les populations locales. Elle n’en est pas moins bien réelle et actuelle.

À son entrée en fonction en 2010, le président Juan-Manuel Santos avait annoncé axer sa politique de développement sur l’exploitation des ressources minéro-énergétiques. Un système de rente pétrolière est initialement prévu pour permettre la redistribution dans les municipalités d’une partie de l’exploitation. Or, le clientélisme est encore très fort en Colombie, d’autant plus dans un département comme le Meta, connu pour avoir été l’une des bases fortes du paramilitarisme. Comme nous avons pu le noter lors de la visite dans les villages, les populations locales vivent encore sous un régime de peur. Elles ne touchent concrètement aucun pourcentage de la rente pétrolière, quand elles ne sont pas menacées pour avoir osé la réclamer. Ainsi, les richesses de la terre continuent-elles à s’évader de leur région, et plus largement de Colombie.


Pour plus d'information (en espagnol), voir le site de l'USO et la déclaration produite à la fin de la caravane
Voir aussi l'interview de l'un des ouvriers licenciés, Edwin Sánchez.

Et les articles suivants :
La Caravana Humanitaria y Laboral finaliza su jornada en Campo Rubiales reunida con los trabajadores en el lugar donde tienen sus carpas.

Alrededor de 200 personas de la Caravana Humanitaria llegan a la vereda el Puerto Triunfo, donde está el pozo Quifa que explota la Pacific Rubiales hace 13 años

Hoy arranca una caravana humanitaria en solidaridad con las reivindicaciones laborales y sociales en los pozos petroleros de Puerto Gaitán (Meta)

Source, un blog francophone qui n'est plus en activité mais qui recèle quelques trésors pour ceux que la Colombie réelle intéresse : Colombia Tierra Herida: Campo Rubiales : Les damnés du pétrole

 

Et toujours au sujet de Pacific Rubiale...  http://www.tlaxcala-int.org/article.asp?reference=8771  


Colombie : Le pétrole de Puerto Gaitán est teinté de sang ouvrier

USO Unión Sindical Obrera de la Industria del Petróleo

 

Dans l'après-midi du 11 Décembre 2012, dans la municipalité de Puerto Gaitán, près des bureaux de la société TERMOTECNICA, des tueurs à gages ont assassiné le travailleur MILTON ENRIQUE RIVAS PARRA, qui travaillait pour la compagnie en tant qu'opérateur et électricien. Milton avait reçu la veille des menaces de mort, venant d’un homme lui affirmant qu’il allait être assassiné, parce  qu’il était un des leaders de l'Assemblée permanente des travailleurs -qui revendiquent leurs droits depuis plusieurs mois- et un membre du syndicat USO.

Milton était un membre de notre syndicat dans le département du Meta, il avait travaillé pour l'entreprise JM au service de Pacific Rubiales. Il s'est distingué par son leadership et son soutien aux luttes des travailleurs dans la région.

Cette situation douloureuse s'inscrit dans le contexte vécu par les travailleurs de la municipalité de Puerto Gaitán, qui subissent l'implantation d'un projet d'exploitation pétrolière dans le cadre de la soi-disant "Locomotive minière et énergétique" du président Santos. Ce projet, mené par l'entreprise Pacific Rubiales, a engendré d'importantes violations des droits syndicaux, des droits du travail, mais aussi, comme nous le voyons aujourd'hui, une violation systématique du droit à la vie, à l'intégrité et à la liberté. Ces situations ont d’ailleurs été dénoncées tant par le syndicat USO que par le sénateur Alexander López et par de nombreuses organisations nationales et internationales, qui ont pu corroborer les faits.

Nous tenons pour responsables le gouvernement national et les compagnies pétrolières qui sont présentes dans la région, de l’homicide de notre compagnon Milton, et nous demandons que la vérité soit faite sur cet infâme assassinat.

Nous demandons au gouvernement national de fournir à l'ensemble des dirigeants et des travailleurs de l'USO toutes les garanties nécessaires pour l'exercice de leurs droits dans le département du Meta.

Nous demandons à la communauté nationale et internationale de condamner l'assassinat d'un travailleur membre de l'USO, et de faire pression sur le gouvernement national.

Nous invitons l'ensemble du pays à lancer une campagne afin que la Colombie reprenne possession des champs de pétrole de Puerto Gaitán, et afin que soit expulsée du territoire colombien la multinationale Pacific Rubiales, qui est coupable de graves violations de droits humains.
 
Conseil Exécutif national et Commission nationale des droits humains et de la paix de l'USO
Bogotá, DC, le 11 décembre 2012.

Ecrivez aux autorités colombiennes en utilisant ce formulaire

 

 

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7 janvier 2013 1 07 /01 /janvier /2013 18:05

 

 

Sorti en octobre dernier

"Hold-up sur l'alimentation.
Comment les sociétés transnationales contrôlent l’alimentation du monde, font main basse sur les terres 
et détraquent le climat"

« Le système alimentaire mondial subit une crise profonde. Des centaines de millions d’êtres humains souffrent chaque jour de la faim et leur nombre augmente plus vite que la population mondiale, alors que la production de nourriture est largement suffisante pour nourrir l’humanité. Le changement climatique, exacerbé par un système alimentaire industriel marqué par le gaspillage et la pollution, risque d’aggraver fortement les choses. Dans le même temps, dans les pays pauvres, les grandes entreprises s’emparent de millions d’hectares de terres agricoles, accaparent les ressources en eau et déplacent les communautés rurales.

Hold-up sur l’alimentation examine les forces qui poussent le monde dans cette crise. Il met l’accent sur la manière dont les grandes entreprises organisent et contrôlent la production alimentaire et sa distribution et montre comment elles détruisent les systèmes alimentaires locaux. Les informations et les analyses contenues dans ce livre doivent fournir des outils et inciter à arracher le système alimentaire des griffes des grandes entreprises pour le confier aux communautés locales. Cet ouvrage rassemble une grande partie des recherches et des articles les plus récents de GRAIN. Il est divisé en trois sections : l’agrobusiness, la crise climatique et l’accaparement des terres. »

Ouvrage collectif de GRAIN. Co-édition CETIM et GRAIN. 176 pages, 10 €.

GRAIN est une petite organisation internationale qui soutient la lutte des paysans et des mouvements sociaux pour renforcer le contrôle des communautés sur des systèmes alimentaires fondés sur la biodiversité.

Source : UtopLib - Utopies libertaires

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5 janvier 2013 6 05 /01 /janvier /2013 09:03

 

Parmi ces phénomènes  qui apparaîtraient de manière diffuse sans la vigilance des mouvements paysans, les expulsions des habitants de terre qui seront dévolues au capital transnational, celles qui sont ainsi confisquées au nom du « développement soutenable » démontrent  ce qu’il en est en réalité de ce concept odieux.

Dans l’équation qui articule les différents facteurs des différentes manières d’habiter  la planète en fonctions des ressources et de la démographie, le choix du capitalisme vert est celui du sacrifice de la plus grande partie de l’espèce humaine sur l’autel du Profit.  De même que la Compétitivité Optimale implique des conditions de travail synonymes d’esclavage, dont nous pouvons observer la progression au quotidien, de même les modes de production-consommation des mêmes pour se perpétuer nécessitent une réduction drastique de la population de la planète… c’est moins visible à l’œil nu – encore que personnellement j’observe autour de moi l’agonie de la misère  et les chroniques d’autodestruction induites : « Ils nous tuent à petit feu » (écho de paroles partagée).

Ici on expulse pour installer des éoliennes, là pour planter des arbres et ailleurs encore ce sont les culture vivrières qui font place au "biocarburants"...

Dépossédés de leur territoire des personnes dépérissent, que ce soit dans les rues de nos villes ou dans les montagnes de Colombie, ici où là, ce sont les mêmes assassins qui sévissent.

Stérilisations forcées ; crimes commis par les paramilitaires au service du capital transnational ; personnes privées de leurs moyens d’existence qui meurent en silence ;Irak, Libye, aujourd'hui la Syrie pays décimés par la guerre ;  victimes longues durées des conséquences  des guerres sales ou de l'alimentation pathogène, la Grèce assassinée… ; ... ;  ... le Génocide se déroule sous nos yeux Nous ferons-nous complices, fusse implicitement en acceptant le choix de projet de monde qui le justifie, sachant que d'autres choix sont possibles qui permettent à chacun de vivre dans des conditions de dignité ?

 

Un "fait divers" parmi beaucoup trop d'autres :

 

Arbre, mon ennemi !

samedi 19 septembre

Le Mécanisme de Développement Propre (MDP), mis en place par le protocole de Kyoto, permet aux entreprises d’émettre du carbone si elles plantent des arbres en compensation.

En Ouganda, les effets pervers de ce marché de dupes commencent à se voir : une société néerlandaise prévoit de reboiser 25 000 hectares sur le territoire de l’ethnie Benets, mais sans les Benets. Chassés par des gardes forestiers armés, ils ont dû laisser derrière eux leurs terres et leurs biens pour qu’une nouvelle centrale thermique aux Pays-Bas puisse empester en toute bonne conscience.

in Siné Hebdo

Via :
[Altermonde-sans-frontières] Arbre, mon ennemi !

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28 décembre 2012 5 28 /12 /décembre /2012 00:19

 

La crise à laquelle nous faisons face aujourd'hui est au-delà de sa composante économique une crise de civilisation. En effet, depuis quelques années le capitalisme semble engager un combat insensé. La crise financière de 2008 a constitué la preuve irréfutable que cette divinité factice appelée capital était dans l'incapacité de se reproduire automatiquement et de créer de la valeur par elle-même . Si la plupart des économistes s'accordent sur le fait que le système s'est totalement grippé depuis les années soixante dix, certains considèrent que la financiarisation de l'économie ne constitue qu'un combat d'arrière garde, un palliatif servant à prolonger artificiellement la vie d'un mode de production en complète décomposition. Cependant, un bon nombre de penseurs voient le phénomène sous un autre angle. Pour eux la généralisation de la spéculation financière constitue un système subtil de transfert massif du capital par le biais de la dette. Dans l'incapacité de se reproduire, le capital joue son va-tout et lance un hold-up à l'échelle mondiale pour s'accaparer de l'ensemble des biens publics et privés. C'est cette fuite en avant qui depuis deux décennies plonge l'hyperclasse dans une paraphrénie fantastique, un délire mégalomaniaque fait d'obsession accumulatrice et de tentation totalitaire.

Voila que le système s'affole de nouveau. Des relents fascistes emplissent de plus en plus l'atmosphère et nous replongent dans le cauchemar des années trente. Voila qu'encore une fois un avatar de l'utopisme totalitaire né des Lumières envahit la planète. A l'image du jacobinisme ou encore du nazisme, le néoconservatisme s'inscrit dans une pensée chiliaste. il se croit  ainsi investi d'une mission universelle qui assurera à l'humanité paix et prospérité au terme d'une bataille apocalyptique contre les forces du mal. Presque tous les philosophes de l'histoire du 19ème siècle ont succombé au charme de cette marche triomphaliste de l'histoire sous la férule de l'homme blanc. Marx et Engels se sont laissé prendre eux aussi au piège  de la mission civilisatrice d'un Occident impérialiste, considérant que le colonialisme permettait aux sociétés précapitalistes de sortir de leur inertie et de rejoindre l'histoire. On ne peut qu'être scandalisé par la teneur des écrits d'Engels à propos de la guerre coloniale menée contre l'Algérie de l'émir Abdelkader. Son discours n'avait rien à envier aux thèses racistes d'un Gobineau. Il faut cependant rendre justice à Marx qui à la fin de sa vie a complètement changé de point de vue et s'est élevé contre la barbarie du colonialisme. Toutefois, cette prétention à vouloir réaliser la fin de l'Histoire dans l'Histoire en en forçant le sens, a pris des formes terrifiantes et a produit les pires des totalitarismes tout au long du XXème siècle. Le rationalisme né des Lumières, en substituant la transcendance de la raison à la transcendance du divin, a fini par édifier à son tour sa propre Église. Nietzsche fustigeait déjà toutes ces « religions de substitution » que sont le culte de l’État, l'adoration de l’Histoire et la religion de la science. Délivré du joug de l'église, le sujet au lieu de se libérer tombe dans l'auto-adoration avec ses différentes manifestations : individualiste, anthropocentriste, nationaliste et ethnocentriste. C'est cet égo démesuré s'appuyant sur une avancée technique de l'Europe qui alimentera toutes les formes de spoliations, d'exactions et de mépris exercés contre le reste de l'humanité et qui atteint aujourd'hui son stade paroxystique. La pensée européenne reste dominée dans toutes ses nuances par ce rationalisme subjectif et égocentré. L'authenticité allemande si chère à Thomas Mann ou à Oswald Spengler et la modernité conquérante romane et anglo-saxonne étaient malgré leur divergences prises dans le tourbillon de cette même auto-adoration. Il est à remarquer cependant que la thématique de "l'authenticité" totalement disparue pendant la guerre froide refait aujourd'hui surface même dans des pays à tradition universaliste tels que la France. Elle ne cesse de se propager en réaction à l'agressivité du mondialisme unipolaire anglo-saxon.


Lire la suite :
L'agonie tourmentée du progrès - Chien Guevara


 

 

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11 décembre 2012 2 11 /12 /décembre /2012 12:20

 

Un article ancien, un sujet déjà évoqué ici et sur lequel je compte bien revenir. Parce qu'il est toujours d'actualité à cette manière qui nous est devenue familière... toujours la même chose..; toujours de pire en pire. Même si ce n'est pas que cela! les résistances aussi s'organisent et tissent des liens entre elles.

 

 

La Frontière de la mort

 

En six ans, il y a eu 255 femmes de 15 à 22 ans qui ont été violées, torturées, assassinées et abandonnées en bordure du désert de Ciudad Juarez. Il s’agit dans pratiquement tous les cas de crimes sexuels. Ciudad Juarez est une ville frontière, située en face de sa jumelle américaine El Paso, dont les usines de montage, les «maquiladoras» qui emploient 250 000 ouvrières, constituent la principale activité. Les maquiladoras sont les filiales des entreprises les plus puissantes du monde, on en compte pas moins de 378: General Electric, Thomson RCA, DuPont, etc. exportent chaque année plus de 60 milliards de dollars. Pour la plupart, leurs employées sont célibataires, elles viennent des États les plus pauvres du Mexique, arrivent seules car les maquiladoras ne donnent jamais de travail aux hommes sauf pour les postes de superviseurs, de contrôleurs, de surveillants ou de direction. Les salaires sont partout les mêmes: environ 10 dollars par jour. Ciudad Juarez est donc une ville où la proportion de femmes dans la population est bien supérieure à la normale. Elles sont la proie du machisme naturel des Mexicains qui se sentent ici tout puissant. Casa Amiga, une association qui aident les jeunes femmes en difficulté de Ciudad Juarez, signale qu’il y a eu 4 540 plaintes de déposées pour viols cette année (12 par jour), que le nombre va en augmentant et que jamais personne n’est arrêté. Comme la justice est inexistante, tout est permis.

Pour les meurtres, le constat est identique. En six ans, la police et la justice ne sont parvenus à résoudre que quelques cas. Avec cette nouvelle macabre découverte et la pression d’une opinion publique en colère, la police vient néanmoins d’arrêter deux hommes qui ont avoué leurs forfaits. Une justice que les parents des victimes trouvent trop expéditive, craignant que la justice n’ait fabriqué des coupables pour faire baisser la tension. Pendant un temps, la police a cru que ces meurtres étaient le fait de bandes de délinquants : «los Rebeldes» et «Los Ruteros» ont été accusés d’être les auteurs matériels des quelques homicides sans que la justice ne puisse rien prouver. Puis elle a cherché un maniaque qui aurait assassiné en série car 108 homicides présentent des caractéristiques similaires. Le FBI américain a même, un temps, été appelé à la rescousse, sans succès. Les enquêteurs suivent de nouvelles pistes : on parle de vidéo Snuff, du porno-hard avec viols et assasinats réels, de messes noires de sectes sataniques, de trafic d’organes ou de bandes de jeunes démoniaques drogués. Mais les associations comme Casa Amiga qui enquêtent sur ces assassinats ont une tout autre idée. Elles estiment que les maquiladoras ont forgé une culture du non respect de la femme. A Ciudad Juarez, les conditions de vie des ouvrières relèvent de l’esclavage : elles sont logées dans des quartiers de misères pratiquement dans le désert où les températures oscillent entre moins 10 degrés l’hiver et plus de 40 degrés l’été. Lorsqu’elles se font embaucher, les maquiladoras leur donnent les palettes de bois inutilisées sur lesquelles arrivent les produits. Ils servent de structures pour faire les murs des cabanes. Les ouvrières sont payées une misère, traitées comme du bétail. Les lois sociales font sourire, les syndicats sont interdits et quand les ouvrières sont trop usées pour être rentables, vers 25 ans, elles sont remplacées par des plus jeunes. Pour se faire embaucher, elle ne doivent montrer qu’un acte de naissance, l’employeur, peu regardant, engage souvent au-dessous de l’âge obligatoire de 16 ans. Si elles tombent enceintes, on ne les licencie pas – ce serait trop cher – on les oblige, c’est classique, à porter des caisses lourdes jusqu’à ce qu’elles démissionnent. (Certaines entreprises vont jusqu’à exiger les preuves mensuelles que les jeunes femmes ne sont pas enceintes). Du reste, les journalistes sont personae non gratae et il faut mille ruses pour entrer dans ces usines de montage. L’État mexicain qui mise sur ces entreprises maquiladoras pour son développement économique, fait tout pour satisfaire les multinationales implantées dans la région et n’est d’aucun secours pour ces travailleuses. La police et la justice, malgré les changements politiques se révèlent tout aussi inefficaces. Pour les associations humanitaires, les maquiladoras considèrent les femmes comme « un produit jetable ». C’est terrible à dire, mais cette mentalité explique en partie les conditions propices à ces assassinats multiples et à leur impunité.

 

Source : La Frontière de la mort | Mondialisation

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19 novembre 2012 1 19 /11 /novembre /2012 19:37

 

  par Tomjo

 

Une prise de conscience collective, un brin d’espoir… la vie vaut mieux que des emplois. Dans le reportage description de conditions de travail qui sont celles d’un univers carcéral à haute toxicité… Mais que valent les vies des personnes quand s’imposent les impératifs de la compétitivité ? Question éthique, et comme toute question de ce type, la réponse est un axiome qui fonde nos logiques.


La mort à Tarente

Depuis Virgile et Les Géorgiques, Tarente était un lieu commun des poètes. Un jardin au bord de mer. Des fruits, des fleurs et des dauphins. En 60 ans, la société industrielle a fait de cette ville des Pouilles un enfer : la plus grande aciérie d’Europe, l’Ilva, une base de l’OTAN, une banlieue mortifère. 70 000 morts prématurées en vingt ans - du cancer, surtout. la poussière d’acier de l’Ilva, qui sature la ville.

TomJo, rédacteur à La Brique, un journal lillois, en a pourtant ramené un reportage qui n’est pas complètement lugubre ni désolé.

Il y a une différence entre les ouvriers de l’Ilva, à Tarente, et ceux d’Arcelor-Mittal, à Florange, en Lorraine. A Tarente, des habitants et des ouvriers, menés par un "Comité de citoyens et travailleurs libres et conscients", se battent contre l’emploi, pour la fermeture de l’usine. Vous avez bien lu : ces gens pensent que leur vie vaut plus que l’emploi. Scandaleux, non ? Ce n’est pas à Là-bas si j’y suis, l’émission quotidienne du Front de Gauche sur France Inter, qu’on entendrait des syndiqués tenir des discours aussi révoltants.

Justement, ces ouvriers se battent aussi contre les syndicats. Quand leurs dirigeants nationaux sont venus à Tarente, cet été, le 2 août 2012, des ouvriers les ont hués, chassés, et ont pris la tribune. C’est que les syndicats se battent pour l’Ilva, pour l’usine et l’emploi, dont ces ouvriers ne veulent plus. Les syndicats se battent pour le salaire et, parfois, pour l’amélioration des conditions de travail des ouvriers. Non pour la disparition de la classe ouvrière. S’il y avait eu des syndicats d’esclaves, ils auraient combattu de toutes leurs forces l’abolition de l’esclavage. Or, la meilleure chose qui puisse arriver à la classe ouvrière, c’est de disparaître. Pour devenir quoi ?

A Tarente, certains pensent l’après-Ilva, les activités à venir, le gagne-pain, restaurer la vieille ville et les ruines grecques, retourner à la mer... Dans le Manifeste du Parti communiste, Marx et Engels critiquent ces briseurs de machines qui attaquent "non seulement les rapports bourgeois de production", mais "les instruments mêmes de production" ; "ils anéantissent les marchandises étrangères en concurrence, ils cassent les machines, ils mettent le feu aux usines, ils cherchent à reconquérir la position périmée de l’ouvrier du Moyen-Age."

Il n’y a rien de plus périmé aujourd’hui que la société industrielle, dont les ravages menacent l’humanité jusque dans sa survie, sinon les souteneurs du parti industriel : libéraux ou communistes.

Nous n’avons d’autre avenir que sur la ruine de la société industrielle.

Nous, luddites et libertaires, nous sommes du côté de l’avenir.

Pièces et main d’oeuvre

Pièces et Main d'oeuvre

(Pour lire le reportage de TomJo, cliquer sur l’icône ci-dessous.)

A lire aussi :
- "Réindustrialisons" : quand "Là-bas si j’y suis" défend le cancer français, Pièces et main d’oeuvre, 6/04/12

- Défense du cancer français : séquelles, Pièces et main d’oeuvre, 10/04/12

- Le cancer de l’industrie - Syndicalisme et chimiothérapie, Pièces et main d’oeuvre, 1/05/12

- Défense et illustration du cancer picard - De la contribution du mal industriel à la richesse du pays, TomJo, 4/06/12

- Des ouvriers contre le crime industriel, Pièces et main d’oeuvre, 16/08/12


La mort à Tarente
Version prête à circuler
74.5 ko

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9 juin 2012 6 09 /06 /juin /2012 18:10

 

Exhumé des archives de SERGE ADAM des faits pas si lointains qui montrent (pour ceux qui en douteraient encore) que l'Amérique  Centrale n'a pas le monopole de la collusion entre politiques et crimes oragnisés. C'est interpellant tout de même tous ces trucs récurrents qui se retrouvent un peu partout sur la planète... Je ne sais pourquoi cette histoire de Ministre corrompu qui se fait opportunément enlever m'en rappelle une autre, où un autre ministre se fait "enlever" alors que lui et son groupuscule de catho d'extrême-droite sont pas loin d'être convaincus d'avoir complotés (si, si...) contre la sûreté de l'état... aprés s'être enrichi en bradant Bruxelles.... avec ses hommes de pailles qui rachetaient à bas prix ce qui prendrait beaucoup de valeur et que ces petits copains se sucraient au passage... Que tout cela est glauque, mais bien réel pourtant.... 

 

 

 

lundi 1 novembre 2010

Crime organisé et Parti politique au Québec
Un chef des Hells Angels arrêté

L'un des Hells Angels les plus puissants au Québec, Normand Marvin « Casper » Ouimet, a été arrêté lundi à Montréal.


Il était recherché ici et à l'étranger depuis l'opération ScharQc d'avril 2009 pour 22 meurtres reliés à la guerre des motards. Pour des raisons de sécurité, aucun détail ne sera donné sur les lieux où il est détenu.

Accusé d'avoir infiltré le secteur de la construction, il avait notamment pris le contrôle de plusieurs entreprises de maçonnerie de la région de Montréal où il investissait l'argent illicite du crime organisé.

Il ne reste plus que 19 motards en cavale depuis l'opération ScharQc qui avait pour but de mettre un terme aux activités criminelles de l'organisation des Hells Angels du Québec.

D'après des informations de Marie-Maude Denis

Source Radio Canada

Mafia, Parti Libéral du Québec, Front de Libération du Québec (FLQ)

Petit rappel d'Histoire

Le 26 novembre 1966, les policiers du renseignement qui assistaient discrètement aux noces de Vito Rizzuto à Toronto n'arrêtèrent pas le père de la mariée qui attendait la fin de la cérémonie dans sa voiture. L'homme était pourtant recherché par les autorités italiennes pour le meurtre de Giusppe Spagnolo (syndicaliste de gauche italien). En revanche, ils notèrent la présence d'invités très particuliers. Parmi eux : Frank D'Astie et, surtout, Paolo Violi.

D'Asti âgé de 52 ans,travaillait sous les ordres de Nicolas Di Iorio, un des lieutenants de Vic Cotoni. Il dirigeait le Victoria Sporting Club, la plus importante maison de jeux de l'organisation dans le Grand Montréal. Il était très actif dans le trafic de drogue et se distinguait par l'Étendue de son réseau politique. D'Asti et Di Iorio faisaient l'objet d'une intense surveillance policière. Tranquillement,mais surement ils tissaient des liens solides avec le Parti libéral du Québec. En 1969, ils appuieraient financièrement les tentatives de Pierre Laporte de devenir chef du Parti libéral. Ils le soutiendraient encore après sa défaite, dans l'espoir qu'il soit nommé ministre de la Justice et qu'il mette le holà aux incessantes perquisitions de la police dans leurs night-clubs et leurs tripots. Laporte fut plutôt nommé ministre de la Main D'Oeuvre et de l'Immigration, mais il occupa le deuxième poste en importance au gouvernement après le premier ministre Robert Bourassa. Quand des membres du Front de libération du Québec (FLQ) le kidnappèrent, en octobre 1970, ils écrivirent un manifeste, qui sera lu à la télévision de Radio Canada, ou ils affirmaient que l'élection des libéraux avait marqué la victoire de Vic Cotroni. D'Asti offrit ses services au secrétaire de Laporte pour retrouver son patron, mais c'était chose vaine:le ministre fut « exécuté » (ou tout simplement un accident) peu après.

Source, Mafia inc., Grandeur et misère du clan sicilien au Québec, page 69
de André Cédilot et André Noël, aux Éditions de l'Homme 2010

Le ministre Pierre Laporte était sur écoute, révèle un livre

Dans les mois qui ont précédé la crise d'Octobre 1970, le conseiller du premier ministre Robert Bourassa allait régulièrement dans les locaux de la Sûreté du Québec pour écouter les enregistrements de conversations entre l'entourage du ministre Pierre Laporte et la mafia, révèle un ancien policier dans une autobiographie.

L'enlèvement de M. Laporte, alors ministre du Travail, a bien entendu mis un terme aux enquêtes policières sur ces relations mafieuses, indique Claude Lavallée, qui était alors spécialiste de l'écoute électronique à la SQ.

«Cet événement signifiait l'échec de notre patiente enquête sur la corruption de l'homme politique par la pègre, qui devait prochainement mener - j'en étais convaincu - à l'inculpation du ministre du Travail», écrit M. Lavallée dans son livre Révélations d'un espion de la SQ (Éditions de l'Homme).

«En revêtant le rôle d'otage, de victime, Pierre Laporte devenait automatiquement inattaquable, pensais-je. En effet, qui aurait le culot de le poursuivre en justice, après une telle épreuve? J'avais le sentiment que les ravisseurs venaient justement de nous ravir un «sujet» qui aurait mis au jour un grand scandale. Je ne pouvais évidemment pas savoir que cet enlèvement se conclurait par la mort tragique du ministre.»

Source La Presse


Un monument à la mémoire de Pierre Laporte inauguré à Saint-Lambert

Via : SERGE ADAM
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