5 mai 2012 6 05 /05 /mai /2012 09:40

 

Deux articles pour faire connaître le sort des migrants d'Amérique du Sud vers les Etats-Unis. Inhumanité, menace contre la vie du prêtre qui essaye de leur donner un minimum de réconfort... tout cela se passe depuis des décennies jusqu'à aujourd'hui dans un silence médias honteux une fois de plus...

 

Menaces contre l'auberge des migrants de Ixtepec, Oaxaca

MEXIQUE. UN DÉFENSEUR DES DROITS DES MIGRANTS. ALEJANDRO SOLALINDE GUERRA

Mexique 18 avril 2012

UN DÉFENSEUR DES DROITS DES MIGRANTS MENACÉ

 Le père Alejandro Solalinde Guerra, un prêtre mexicain, a été menacé de mort en raison de son travail en faveur des droits des migrants. Sa vie est en danger. Le 15 avril 2012, Alejandro Solalinde Guerra, coordinateur du Centre pastoral d'aide aux migrants dans le sud-ouest du Mexique et directeur d'un refuge pour migrants dans la municipalité d'Ixtepec, dans l'État d'Oaxaca, a reçu environ 1 500 migrants arrivant à Ixtepec à bord d'un train de marchandises.

Alors qu'ils marchaient vers le refuge, deux hommes les ont interceptés et ont commencé à insulter les migrants. Lorsqu'Alejandro Solalinde Guerra leur a parlé en défendant les migrants, ils l'ont insulté à son tour et ont menacé de le tuer. 

Deux semaines auparavant, le 31 mars, le corps démembré d'un jeune homme habitant la région a été retrouvé près d'un bar situé à proximité des voies ferrées qui traversent Ixtepec. Des membres du Groupe de sauvetage urbain, qui rapporte notamment les accidents survenant dans cette ville et qui est lié aux autorités municipales, ont essayé d'accuser publiquement les migrants de ce meurtre. Alejandro Solalinde Guerra a affirmé à la famille de la victime que cela était faux. Alors qu'il accomplissait les rites funéraires pour le jeune homme tué, deux hommes se sont approchés de lui, apparemment avec l'intention de l'agresser, mais les proches de la victime les ont bloqués.

Le lendemain, Alejandro Solalinde Guerra a été informé qu'un assassin avait été engagé pour le tuer. La Commission interaméricaine des droits de l'homme a demandé aux autorités mexicaines de prendre des mesures pour protéger cet homme et les employés du refuge au vu des manœuvres d'intimidation et de harcèlement dont ils font l'objet en raison de leur travail de défense des droits des migrants.

Les récentes menaces ont été proférées alors que des discussions sont en cours entre les responsables du refuge et les autorités municipales au sujet de la mise en place effective de mesures de protection


Le père Alejandro Solalinde Guerra a été menacé à de multiples reprises pour avoir condamné publiquement le traitement réservé aux migrants tant par les bandes criminelles que par les autorités mexicaines. Des agents municipaux lui ont dit une fois que son refuge serait réduit en cendres s'il ne le fermait pas.

 Depuis ces dernières années, des responsables locaux et des personnes habitant la région, qu'on pense avoir des liens avec des criminels, organisent des manifestations contre les migrants et préparent des attaques visant le refuge. Chaque année, des centaines de milliers de migrants clandestins (sans documents de voyage officiels), en provenance d'Amérique centrale et d'Amérique du Sud, tentent de traverser le Mexique pour atteindre les États-Unis. Bon nombre d'entre eux sont arrêtés par les services mexicains de l'immigration et renvoyés dans leur pays d'origine. Une équipe d'Amnesty International s'est récemment rendue au Mexique pour enquêter sur les informations faisant état d'atteintes aux droits humains de ces migrants. Elle a alors découvert qu'un grand nombre de personnes avaient été enlevées par des bandes de malfaiteurs, parfois en collaboration avec des responsables locaux. En raison de l'impunité qui les caractérise, les atteintes commises contre les migrants – qui sont extrêmement vulnérables – ont augmenté, bien que le gouvernement se soit engagé à garantir le respect des droits de ces personnes.

Participer à l'action Urgente d'Amnesty International:
http://www.amnesty.org/es/library/info/AMR41/024/2012/fr

Source : Espoir Chiapas - Esperanza Chiapas

 

 

 

 

Mexique : des migrants dans l’enfer de la Bête


Ixtepec. Cette petite ville du sud du Mexique sert de point de passage obligé pour les migrants centraméricains en route vers les États-Unis. Ils y arrivent juchés sur le toit d’un train de marchandises qu’ils ont surnommé la Bestia, la Bête.

 
source : Sud Ouest
Envoyée spéciale au Mexique

Ce jour-là, ce train sans horaires sort de la nuit, précédé par de longs sifflements. Il est 5 heures du matin. Dans l'obscurité, on distingue des grappes d'êtres humains accrochés aux wagons. Certains sautent en marche, d'autres attendent l'arrêt. Principalement des hommes, mais pas seulement. Une petite fille traverse les voies, son sac à dos rose aux épaules.

Ça fait douze heures qu'ils s'aggrippent à ce train. Douze heures sans boire, sans aller aux toilettes, sans dormir. Marco a quitté le Guatemala cinq jours plus tôt. « J'ai dormi une demi-heure par-ci par-là. Sur le train, c'est trop dangereux, on peut tomber. » Chaque année la Bestia ampute, tue.

L'auberge du prêtre

Au bord des voies, comme à chacune des arrivées du train, le prêtre Alejandro Solalinde, 65 ans, attend les clandestins. Il les invite sans discontinuer : « Venez à l'auberge, il y a du café, de quoi manger, vous pourrez vous reposer. Bienvenue, bienvenue ! » Il distingue au premier coup d'œil un groupe d'Honduriens d'une bande de Guatémaltèques, trouve les mots justes pour les convaincre de ne pas rester sur les rails et d'aller se mettre à l'abri.

L'auberge est à 200 mètres de là. Quelques bâtiments en parpaings gris, une chapelle au toit de tôle ondulée, une cantine sommaire et quelques douches. Cinquante-deux établissements de ce type existent sur le territoire mexicain ; presque tous sont tenus par des religieux. De véritables havres de paix pour ces hommes et ces femmes toujours sur le qui-vive.

La traversée du Mexique est « un des voyages les plus dangereux du monde », révèle le rapport d'Amnesty International d'avril 2010. Les migrants l'appellent simplement « l'enfer ». En 2009, la Commission nationale des droits de l'homme du Mexique a recensé 9 758 enlèvements de migrants en six mois, soit 1 600 par mois. Un chiffre par définition non exhaustif.

Rançonnés

À l'auberge, les témoignages se succèdent, les histoires se répètent… Luis, Guatémaltèque de 26 ans, a été enlevé deux jours par des hommes armés. « Nous étions une dizaine, ils nous ont fait descendre du train en nous menaçant avec des armes, ils nous ont emmenés dans une maison isolée. Là, ils nous frappaient avec des morceaux de bois très lourds. Ils voulaient le numéro de nos familles pour leur soutirer de l'argent. » « Ils font faire des virements par Western Union, précise Guillermo, enlevé lui aussi. Ma famille a dû leur envoyer 2 000 dollars. » Soit 1 600 euros. Le jeune homme porte encore les traces des coups, ses cuisses et le bas de son dos sont bleus.

Avec une rançon de 2 500 dollars en moyenne, l'enlèvement de migrants « rapporte » 50 millions de dollars par an (37 millions d'euros). « Les cartels de la drogue se sont rendu compte que les pauvres pouvaient rapporter beaucoup d'argent, explique le prêtre. Les familles sont toujours prêtes à payer et, surtout, personne ne se préoccupe d'eux. C'est finalement moins problématique que d'enlever les grands industriels. »

Daniel n'a que 15 ans. Il a été kidnappé par trois hommes alors qu'il se reposait le long de la voie ferrée. « Ils m'ont emmené dans la montagne. Ils voulaient le numéro d'un membre de ma famille. Comme, au début, je n'ai pas voulu le leur donner, ils ont commencé à me frapper et ils m'ont dit : '' On va s'amuser avec toi.'' Ils m'ont violé pendant huit jours. » Comme beaucoup, terrorisé mais aussi hanté par l'idée d'être renvoyé dans son pays d'origine, il ne portera jamais plainte.

Amnesty International les a baptisés les « victimes invisibles ». Cette « invisibilité » permet à ce qui est devenu une « entreprise généralisée », selon la Commission des droits de l'homme, de se développer dans la plus totale impunité, voire avec la « collusion des autorités ».

La complicité des autorités

Alejandro Solalinde confirme : « Aucune institution ne fait quoi que ce soit pour aider les migrants. On a déposé plainte sur plainte depuis deux ans, aucune n'a abouti. Il n'y a jamais d'enquête, jamais aucun criminel arrêté. Et non seulement l'État ne fait rien, mais en plus il participe. » Des accusations fondées sur des milliers de témoignages, comme celui d'Evidio et Marta. Ce couple de Guatémaltèques s'est fait dépouiller sur le chemin par la police fédérale. « Ils nous ont fait descendre du train à coups de pied, ils nous ont jetés sur le sol, insultés, frappés. L'un d'entre eux m'écrasait le visage avec son pied. Ils nous ont pris tout ce que l'on avait. »

En dépit des dangers et des chiffres - seul un migrant sur dix atteint les États-Unis -, les migrants continuent d'affluer, d'essayer. Certains en sont à leur cinquième tentative. L'impossibilité de vivre dans leur pays d'origine les accroche à un rêve qu'ils ne peuvent concevoir impossible.

Par milliers, ils traversent clandestinement le pays pour aller aux États-Unis. Sur des trains de marchandises, ils sont attaqués par des bandes armées ou la police

mardi 1er juin 2010.

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5 mai 2012 6 05 /05 /mai /2012 08:54

 

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Vous trouverez sous le communiqué un article qui le replace dans son contexte, celui d'une guerre de "basse intensité"et de longue durée qui frappe inlasablement les encore plus inlasables résistants des luttes les plus exemplaires qui se déroulent en ce moment sur notre belle planète... et ce dans l'indifférence générale. Exemplaire :  des peuples se relèvent après avoir subi, comme nous des siècles de violences de l'Inquisition. Il le font grâce à la force d'une culture ancestrale qui n'a pas été éradiquée et réalise un syncrétisme culturel dont nous pourrions tirer bien des leçons si nous étions moins orgueilleux, moins persuadés malgré le flagrant échec de notre civilisation d'être les donneurs de leçons universelles.

Nous cherchons dans des replis identitaires un enracinement perdu, exode urbain et destruction de nos campagnes, de modes de vie ancestraux délaissés au profit de technologies trop vite développées et appliquées et dont nous mesurons à peine les résultat délétères, nous aurions donc beaucoup à apprendre de peuples qui refusent qu'on coupe leurs racines.

Ce n'est pas dans des identités théoriques que nous trouverons une réponse à nos mal-être mais bien dans un réel enracinement dans le Terre, le citadin est un homme perdu sans racines, et contrairement à ce que raconte le marxisme avec toutes les conséauences désastreuses que cela à entraîné, les véritables forces de changement se trouvent à présent parmi cette paysannerie qui s'ancre dans le local, et lutte pour défendre ses écosystèmes,  tout en proposant des modes d'agriculture qui s'inscrivent dans une démarche mondiale. L'Amérique Latine et le  mouvement indigène qui traverse ce continent sont au coeur de ces luttes. Prenons en de la graine, après tout d'eux nous viennent déjà les graines du maïs, les pomme de terre, les tomates et bien d'autres aliments passés dans notre quotidien après les légumineuses arabes.

 

Les Abejas dénoncent le retour des paramilitaires



Le 22 avril, à 14 ans et 4 mois du massacre d'Acteal, les membres de la Société Civile Las Abejas se sont réunis à Acteal, siège de l'Organisation, pour commémorer ce jour symbolique avec une cérémonie. Des personnes de divers pays étaient présentes: France, Allemagne, Etats-Unis, Irlande....

 

Ce mois-ci ils ont dénoncé la présence de fils des paramilitaires auteurs du massacre d'Acteal, libérés récemment, avec les armes que leurs pères avaient usées durant le massacre.

""Il existe une menace pour les survivants du massacre  et un risque pour toute la population civile victimes de la guerre de contre insurrection, car les fils des paramilitaires libérés, (pour en mentionner qu’un : le fils de Marianno Luna Ruiz d'Acteal) ont été vu le  avril à midi, marchant et se promenant tranquillement dans la communauté d'Acteal, avec les armes que leurs pères avaient usé durant le massacre Ce fait démontre l'existence du paramilitarisme dans les communautés de Chenalho que le gouvernement nie tant, mais aussi la réactivation de l'action paramilitaire Dans le sens coercitifs, les fils des paramilitaires libérés, marchent avec des armes car ils ont vu qu'assassiner et massacrer un peuple innocent est un travail pour le gouvernement et qui en plus est bien payé, enfin ont reçois des récompenses comme reconnaissance de servir le gouvernement"



Ils se sont également solidarisés avec la communauté de Cheran, où a été assassiné 2 paysans dans une embuscade à cause de leur lutte pour l'autonomie et la libre détermination des peuples.

"Mais le pire de tout, c'est que climat d'impunité qui se vit au Mexique, avec en plus l'action des administrateurs de la justice mexicaine, a permis l'ouverture d'une grande escalade de la violence, de massacres, d'assassinats, de rapt et d'embuscades con les lutteurs sociaux qui dénoncent les injustices, d'organismes de défense de droits de l'homme et d'organisation qui défendent leur terre et leur territoire. Des exemples ainsi il y en a beaucoup, pour mentionner un cas récent, l’embuscade qui s’est déroulée le 18 avril 2012, dans un lieu nommé El Puerto de la communauté de Cheran, Michoacan,  où furent assassinés deux paysans et où 2 autres furent blessés ; et cela pour défendre leur terre et leur territoire contre la coupe d’arbre clandestine et la dévastation des forets de Cheran. Cette embuscade sans aucun doute est le produit de plus des fins de l’état qui n’accepte pas l’autonomie et la libre détermination des peuples. »

Enfin, dans le cadre d'une action mondiale, ils ont exigé la libération du prisonnier politique Alberto Patishtan.

« Au Mexique il y a deux justice, une pour les pauvres et une autre pour les riches. La première se fait en emprisonnant, séquestrant, assassinant et extorsionnant les lutteurs sociaux et les défenseurs des Droits de l’Homme comme ils ont enfermé injustement le compagnon Alberto Patishtan, prisonnier politique de la Voz del Amate. La seconde fonctionne en récompensant et offrants des postes publiques aux assassins. »


Lire le communiqué du 22 avril 2012:
http://espoirchiapas.blogspot.mx/2012/04/las-abejas-denuncian-la-presencia-de.html

Source : Espoir Chiapas - Esperanza Chiapas

 

MEXIQUE : ACTEAL, TERRORISME D’ETAT ET IMPUNITE
 

Le gouvernement mexicain, par l’intermédiaire de la Cour Suprême de Justice de la Nation, vient de faire libérer 20 des paramilitaires qui en décembre 1997 ont assassiné 45 indigènes tsotsil du Chiapas, en majorité des femmes et des enfants, appartenant à l’organisation catholique des « Abejas ».

Les membres des Abejas ont le tort de soutenir les revendications des zapatistes, avec lesquels la seule divergence porte sur l’organisation armée, que ces chrétiens fervents et pacifistes refusent.

Les victimes étaient en prière lorsque les paramilitaires ont surgi pour commettre le massacre. A quelques centaines de mètres, était déployé un détachement de l’armée fédérale mexicaine, sous les ordres d’un général.

Ce massacre a entraîné l’exode de plusieurs milliers d’habitants d’Acteal et des communautés voisines, et une forte insécurité, attisée par la présence des militaires.

Devant l’indignation nationale et internationale, et la pression de la population locale, la « justice »officielle avait dû opérer des arrestations. Mais les responsables au plus haut niveau, notamment le président de la République Ernesto Zedillo et le ministre de l’intérieur Emilio Chuayffet, n’ont jamais été inquiétés.

La stratégie de « guerre de basse intensité », incluant la création et l’utilisation de groupes paramilitaires, a été mise en oeuvre par le gouvernement mexicain en réponse aux exigences zapatistes de terre, de justice et de dignité. Les paramilitaires sont recrutés dans les villages indigènes. Payés, armés, entraînés et protégés par l’armée, ils sont également « récompensés » par l’usurpation des terres et des biens des familles qu’ils terrorisent et font fuir.

La libération des assassins, ordonnée sous le prétexte d’irrégularités dans les procédures pénales qui ont accompagné leur arrestation et leur condamnation, sème le désarroi, la colère et la peur chez les familles des victimes et les survivants.

Elle témoigne d’une volonté réitérée d’assurer l’impunité de ceux qui commettent des crimes d’Etat, au Mexique et ailleurs. Elle s’inscrit dans la continuité de ceux qui ont été récemment perpétrés contre des populations en résistance à Atenco, à Puebla ou dans l’Oaxaca, et fait craindre à un retour des pratiques des assassinats massifs (massacre de Tlatelolco en 1968) et de la « guerre sale » (enlèvements et exécutions clandestines opérées par l’armée, tortures et meurtres systématiquement impunis) des années 70 et 80.

Le message envoyé par le président Calderón et ses juges aux victimes d’Acteal ne s’adresse pas qu’aux victimes. Il vise également les zapatistes et tous ceux, nombreux au Mexique, qui résistent « en bas et à gauche », sur le terrain, aux politiques brutales de saccage et de destruction permettant à une poignée d’entreprises et d’individus de s’enrichir.

Il ne faut pas oublier que la « guerre de basse intensité », menée contre les zapatistes et les peuples indigènes, enseignée à l’Ecole des Amériques (1) de Fort Benning, aux USA, est une « invention » française. En outre, nos gouvernements vendent du matériel militaire à l’armée mexicaine, et des membres du RAID ont participé à la « formation » de policiers de ce pays. Cela explique probablement l’épais silence et la désinformation, dans la presse de chez nous, à propos de la violence de l’Etat mexicain.

Jean-Pierre Petit-Gras

(1) Les putschistes du Honduras, comme la grande majorité des dirigeants des dictatures militaires des années 70 et 80, y ont reçu une formation.

URL de cette brève 562
http://www.legrandsoir.info/+MEXIQUE-ACTEAL-TERRORISME-D-ETAT-ET-IMPUNITE+.html
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2 mai 2012 3 02 /05 /mai /2012 19:40

 

 


Le Chili est aujourd’hui un pays saigné à blanc. L’apparence de bien-être est trompeuse, comme en témoigne la montée en force des revendications sociales et des mouvements de protestations de larges franges de la population depuis l’année dernière.

La violation des droits des étudiants, le mépris envers les indiens Mapuches, et la répression brutale des manifestations en Patagonie, entre autres, nous rappellent l’époque de l’état de siège, où la violence était étouffée par la violence. Le gouvernement s’est engagé sur la voie de la criminalisation des manifestations et invoque la Loi de sécurité intérieure de l’État – elle date de la dictature d’Augusto Pinochet –, pour bâillonner toute revendication citoyenne.

 

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Siglo XXI

La vague des protestations étudiantes contre la privatisation de l’enseignement a secoué l’ensemble du pays. Le monde a pu connaître les revendications de ces jeunes et leur a exprimé son soutien et sa solidarité.

Ce mouvement de contestation a fait émerger des dirigeants étudiants comme Camila Vallejo, à la tête des jeunes générations d’une société qui se dit démocratique mais qui s’obstine à appliquer le modèle néolibéral hérité de l’époque de Pinochet (1973-1990). Les manifestations ont été sauvagement réprimées par les carabiniers (la police militarisée). Cependant, les étudiants continuent de revendiquer leur droit à un enseignement de qualité, gratuit et administré par l’État, et de réclamer l’arrêt des subventions gouvernementales à l’éducation à but lucratif et la simplification de l’accès aux crédits universitaires, entre autres. Des revendications qui supposent de profonds changements d’un système d’enseignement placé sous le diktat du profit privé.

D’après les données de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), au Chili, les frais de scolarité qui incombent aux étudiants et à leurs familles sont parmi les plus élevés au monde : environ 80%. Une famille avec deux enfants doit débourser en moyenne 2 000 dollars par mois. Ainsi, les jeunes doivent s’endetter pour pouvoir étudier, s’engager sur des crédits allant jusqu’à 60 000 dollars qu’ils devront rembourser pendant des années.

 


LUIS LOBOS, MEMBRE DU CONSEIL EXÉCUTIF DES JEUNESSES COMMUNISTES, CAMILA VALLEJO, LEADER EMBLEMATIQUE DE LA CONTESTATION ANTI LIBÉRALE ET VICE-PRÉSIDENTE DE LA FÉDÉRATION DES ÉTUDIANTS DU CHILI, LE MUSICIEN ET POÈTE CUBAIN SILVIO RODRIGUEZ ET KAROL CARIOLA, SECRÉTAIRE GÉNÉRALE DES JEUNESSES COMMUNISTES DU CHILI,  À CUBA, LE VENDREDI 6 AVRIL 2012. PHOTO : BLOG « SEGUNDA CITA » DE SILVIO RODRIGUE

Source : Siglo XXI


DES PLAIES OUVERTES

Le conflit étudiant n’a été que le détonateur de cette crise, le point de départ des manifestations quasi quotidiennes qui secouent ce pays prend sa source dans les inégalités sociales. À noter que l’OCDE a exhorté plusieurs fois le Chili à favoriser une distribution plus juste de la richesse.

La vague de mécontentement s’est étendue vers la Patagonie, réveillant d’anciennes revendications non satisfaites. Les habitants d’Aysen, à 1 600 kilomètres de la capitale Santiago, se sont insurgés contre les politiques d’exclusion du gouvernement et contre le coût élevé de la vie.

Ici, le gouvernement applique une tactique d’usure qui repose sur un leurre, comme un engagement avec une ouverture apparente au dialogue. Cette logique d’action rappelle à l’avocat Santiago Escobar

 

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« la doctrine de la guerre de faible intensité ». Autrement dit, « un mélange de l’usage contrôlé de la force avec des troupes spéciales de carabiniers, d’une présence de représentants civils censés donner une image de dialogue, et d’une vaste campagne médiatique à des fins psychologiques, où le recours à la Loi de sécurité intervient comme une manière de maîtriser les conflits sociaux sans les régler ».

Ces protestations réveillent aussi l’une des plaies les plus profondes du Chili : ses relations avec les peuples autochtones. Ce conflit remonte au XIXe siècle avec la promulgation d’une loi qui avait pour but de cantonner les populations indigènes dans des réserves afin de lancer la conquête des territoires du sud. L’État chilien fut constitué sur les territoires ancestraux des Indiens Mapuches à la suite d’une occupation militaire d’extermination. Aujourd’hui les Mapuches n’occupent que 5% de leurs territoires ancestraux.

 

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Avec la perte de leur autonomie territoriale et la marginalisation culturelle et religieuse, les Mapuches sont devenus des déplacés dans leur propre pays. À ces politiques d’assimilation et d’intégration culturelle forcée s’ajouta la spoliation par l’État chilien de leurs ressources naturelles.

On a pu observer ces dernières années une tendance qui a consisté, en guise de réponse aux demandes indigènes croissantes, à leur nier tout droit politique et à criminaliser les manifestations de protestation menées par les communautés et les organisations Mapuche. Ces communautés sont aujourd’hui reléguées au rang de terroristes. Ils sont à ce titre plus deux cent chefs de communautés, autorités traditionnelles, mères de familles, étudiants, simple paysans, incarcérés, inculpés, torturés, ou assassinés.

Dans un pays où la politique est subordonnée à l’économie et aux taux d’intérêt, les valeurs sociales, l’intégration territoriale et le patrimoine naturel et culturel sont réduits à peau de chagrin. Les conflits se font plus âpres et une entente par la voie du dialogue semble de plus en plus éloignée.

Par Laura Bécquer Paseiro source granma.cu - 2012-04-12

Transmis par Linsay

Via : Le revers de la médaille - Rouge Midi

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18 avril 2012 3 18 /04 /avril /2012 08:54

 

Karama

 

par Gustavo Esteva

Il y a longtemps, longtemps, quand nous étions jeunes et beaux, nous discutions passionnément la question de « l’autonomie relative de l’État ». Nous reconnaissions la nature de classe de l’État bourgeois, comme nous l’appelions alors pour affirmer notre identité idéologique, mais nous croyions qu’il était possible d’en faire notre instrument. Des catégories comme celle de « bonapartisme » venaient à merveille pour une analyse que nous prétendions fonder sur Marx.

Nous regardions avec obsession vers là-haut, vers l’État. Il fallait l’utiliser dès maintenant, sous pression. Et ensuite le prendre par n’importe quel moyen : une fois entre nos mains, il danserait sur la musique que nous jouerions. Même l’expérience des « socialismes réels » n’a pas réussi à nous faire mettre en doute la possibilité d’utiliser pour la libération des appareils et des dispositifs construits pour la domination.

Le néolibéralisme a détruit cette illusion. En dénudant cyniquement le caractère du régime politique construit par le capital pour s’imposer, il a rendu ridicule la fantaisie de le domestiquer. Le mouvement du 99 % a pris aussi rapidement parce que plusieurs décennies de lutte avaient préparé la scène où exhiber le « despotisme démocratique », comme Manolo Callahan caractérise aujourd’hui le régime dominant. Celui-ci n’est pas une démocratie, comme il le prétend, même pas sous la forme limitée de république représentative. Il est un dispositif de domination au service du 1 %.

Chez nous, le voile a commencé à se déchirer avec le coup d’État qu’a opéré Miguel de la Madrid le jour où il a pris ses fonctions. Avec la vieille classe politique, il paraissait possible de faire valoir les intérêts des gens. Associée idéologiquement au « nationalisme révolutionnaire », elle comprenait des dirigeants de très larges secteurs de la population, articulés au système. Ce qui, précisément, nourrissait notre illusion devenait un obstacle pour l’exercice néolibéral. Il fallait se défaire de ces gens-là.

À présent, il devient de plus en plus difficile de prétendre qu’on a été trompé. Considérer comme « démocratique » le despotisme actuel revient à reconnaître que cette façon tyrannique de gouverner laisse place à une application partielle de la loi et à un certain jeu des forces sociales. Mais cela est en train de se terminer. La capacité de traiter politiquement les conflits s’affaiblit. L’état d’exception qui se déclare peu à peu partout englobe des catégories toujours plus larges de personnes, qui sont mises légalement en marge de la loi… au nom de notre sécurité ! On a recours de manière croissante à la police et à l’armée pour calmer l’inquiétude populaire. Avec tout cela se produisent des confrontations qui ont déjà la forme de guerres civiles dans une centaine de pays, et cela secoue jusqu’aux fondements la configuration politique, légale et spatiale de l’ordre global moderne, l’ordre euro-atlantique.

« Actuellement, le continent est criblé d’innombrables petites guerres répugnantes, qui ne sont pas vraiment des guerres. Il n’existe pas de fronts ou de champs de bataille, il n’y a pas de claires zones de conflits ni de distinctions précises entre combattants et civils » (Jeffrey Gentleman, dans NYRB, 8/3/2012). Cette description ponctuelle et terrible de ce qui est en train de se passer en Afrique peut s’appliquer sans difficulté à bien des zones du Mexique et du monde.

Nous nous trouvons dans la quatrième guerre mondiale que les zapatistes annonçaient depuis déjà longtemps. Leur initiative a fait d’eux les précurseurs de tous les mouvements antisystémiques, et ils restent marque d’identité et source d’inspiration. Karama est le mot le plus important dans toutes les révolutions sociales du printemps arabe. Il veut dire dignité, le mot que les négociateurs gouvernementaux à San Andrés n’ont jamais pu comprendre, et que les zapatistes ont arboré comme clé de l’origine et signe central de leur lutte. C’est la dignité qui rend contestataires, rebelles et rêveurs les hommes et les femmes ordinaires qui aujourd’hui sont en mouvement, en marge et au-delà des leaders, des idéologies ou des partis.

Ni ici ni sur le reste de la planète, nous n’en sommes arrivés au point où il est déjà devenu impossible ou inutile d’en appeler à la loi ou au cadre institutionnel. Les urnes, par exemple, peuvent encore être une tranchée dans des batailles spécifiques. Ce qui n’a aucun sens, c’est de penser qu’elles peuvent être un chemin de transformation. Le changement de dirigeants ne suffit même pas à faire face à l’urgence actuelle.

Étant donné que le système démocratique n’est plus capable de répondre à l’urgence et de conduire la transformation ; étant donné que les sujets qui nous accablent ne peuvent plus attendre ; étant donné que l’illusion selon laquelle les appareils d’État peuvent se mettre au service de l’émancipation s’est évanouie, c’est l’heure de l’action directe organisée, l’action des hommes et des femmes ordinaires qui affirment leur dignité pour créer la nouvelle société dans le ventre de celle qui se meurt.

Tout cela, à mon avis, devra être abordé à la fin de la semaine, à Cuernavaca, lors de la réunion nationale du Mouvement pour la paix dans la justice et la dignité (MPJD), pour essayer de le mettre à jour et de le faire résonner en sympathie avec les vents qui soufflent dans le monde d’en bas.

Gustavo Esteva
La Jornada,
Mexico, 16 avril 2012.

Source  : la voie du jaguar

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14 avril 2012 6 14 /04 /avril /2012 21:48

 

 

http://www.lavoiedujaguar.net/local/cache-vignettes/L500xH95/Mural_Taniperla-d17b8.jpg

 commune autonome Ricardo Flores Magón, Chiapas

mardi 10 avril 2012, par Checo Valdez (Date de rédaction antérieure : avril 2004).

Sergio Valdez Ruvalcaba, « Checo » Valdez, enseignant-chercheur à l’UAM (Université autonome métropolitaine) de Mexico, s’efforce de promouvoir la peinture murale communautaire participative. Il a créé de nombreuses fresques, tant au Mexique qu’à l’étranger, mais celle qui sort du lot est bien Vie et rêves de la vallée Perla. Pour avoir coordonné la réalisation de ce mural, il a été arrêté le 11 avril 1998 à l’aube, avec les autorités communales autonomes et des observateurs internationaux et mexicains, au lendemain de l’inauguration — il y a quatorze ans — à Taniperla de la commune autonome Ricardo Flores Magón, et incarcéré durant dix-sept mois.

La CGT — anarchosyndicaliste — d’Espagne, jumelée avec la commune autonome Ricardo Flores Magón, a réalisé cet entretien avec « Checo » Valdez.

Je crois que le professeur que vous êtes est devenu du jour au lendemain un activiste politique bien malgré lui. Comment cette idée de peindre la fresque vous est-elle venue ?

Il y a eu deux moments : le premier quand le professeur Antonio Paoli nous a demandé à nous trois, professeurs de communication graphique, de concevoir une affiche et des brochures pour un événement organisé par des indigènes sur l’éducation et les droits de l’homme. Cette nécessité et la curiosité de connaître un peu la culture tseltal, nous a amenés à explorer un terrain à Taniperla. En même temps, nous avons participé au campement civil pour la paix du Centre des droits humains Fray Bartolomé de las Casas, comme observateurs. Nos activités ont consisté à nous entretenir avec des personnes qui désiraient exposer certains types de violations des droits humains, prendre des notes et témoigner par la photo du fréquent passage de voitures et patrouilles de l’armée, etc.

Un jour, un représentant des responsables (autorités de la commune) me demanda de les aider à faire un panneau pour identifier la commune autonome rebelle Ricardo Flores Magón.

Le second moment remonte à la réalisation du panneau, durant laquelle une commission de responsables de la commune m’a demandé de conseiller un groupe pour la réalisation d’une « grande peinture » à l’occasion de l’inauguration de leur commune. Avec ces inquiétudes et ces idées, je suis retourné à Mexico, pour travailler aux préparatifs et acquérir les ingrédients nécessaires, mais aussi afin de rafraîchir et élargir mes connaissances en matière de fresque et élaborer le plan de travail pour une expérience aussi novatrice et intéressante.

À Ricardo Flores Magón vous n’avez pas été le professeur qui donne un cour magistral, mais au contraire la fresque a plutôt été l’œuvre des Indiens eux et elles-mêmes, œuvre que vous avez coordonnée. Quel a été le processus qui a mené à la peinture de la fresque ?

Je suis retourné à Taniperla le 15 mars et on a convoqué les personnes qui devaient y participer. Pour moi, il s’agissait d’obtenir la meilleure représentativité des habitant(e)s de la commune Ricardo Flores Magón, on a demandé que le groupe intègre des personnes de différentes communautés, hommes et femmes d’âges différents. Le groupe n’a jamais été le même puisque les participants se relayaient chaque jour. Mon apprentissage a commencé rapidement et de façon inattendue et j’ai dû m’adapter pour suivre un processus de création collective, avec des participants changeants. Tous les membres du groupes étaient tseltales, bilingues, des paysans et des paysannes peu scolarisés, constituant la base civile des zapatistes, sans la moindre formation artistique. Âgés de seize à soixante-deux ans. Quarante-deux personnes d’au moins douze communautés de la commune autonome Ricardo Flores Magón (qui intègre cent douze communautés). Pour arriver à Taniperla, certaines de ces personnes ont marché vingt minutes de la communauté la plus proche et d’autres jusqu’à huit heures pour la plus éloignée.

Durant la gestation de la fresque, nous avons travaillé pendant douze jours dans le campement civil pour la paix, sous la curiosité de la communauté et les regards des enfants à travers les multiples fentes entre les planches des maisons et sous la méfiance des non-zapatistes de Taniperla (un cinquième), pour la majeure partie favorables au Parti révolutionnaire institutionnel.

La réalisation de la fresque proprement dite a occupé douze autres journées ; désormais, en plus de la curiosité et de la méfiance, nous avons dû affronter les regards impudents et les caméras de l’armée mexicaine, patrouillant fréquemment à pied, en voiture et en hélicoptère, des soldats venus du poste militaire basé à quelques centaines de mètres du village. L’intimidation était constante. Ainsi vivent depuis dix ans les indigènes rebelles « base civile d’appui », qui ne sont pas armés, mais qui sont ceux qui résistent quotidiennement à cette guerre appelée avec euphémisme « de basse intensité » ou « situation de non-guerre ».

Et une fois achevée, le 9 avril 1998, la fresque a été détruite et vous avez été arrêté. Comment tout cela s’est-il passé ? Pour quelle raison ? Qui vous a accusé ?

À 8 heures du soir le vendredi 10 avril, en pleine cérémonie et durant les discours, au plus fort de la fête, le maître de cérémonie, après avoir évoqué la belle façon dont nous nous amusions, a annoncé en espagnol que la fête se terminerait dans une heure puisque les musiciens avaient « un autre engagement » et qu’il n’y avait pas d’argent pour les payer. Puis il le dit en tseltal, ajoutant que c’était un ordre, selon ce que nous traduisit Antonio Paoli. Tranquillement, mais dans un flot continue, les assistants prirent leurs véhicules et sortirent de Taniperla.

Dans le même temps, les visiteurs étrangers (dix-sept personnes), les métis mexicains (vingt personnes), nous fûmes convoqués à une réunion dans le campement civil pour la paix où on nous mit au courant qu’à Monte Libano (à une demi-heure en voiture, où il y avait un important poste militaire) arrivaient des effectifs de différents corps de police et de l’armée et que cela indiquait une opération imminente, probablement contre Taniperla. On nous invitait à repartir avec l’autobus qui passe en milieu de soirée (le seul qui relie Taniperla à Ocosingo, la ville la plus proche, à cinq heures de route). Je déclinai l’invitation.

Nous avons organisé des tours de garde et ainsi a commencé l’attente des événements, puisqu’on ne pouvait rien faire de plus.

À 4 heures du matin, j’ai été réveillé, je croyais que c’était pour accomplir mon tour de garde, mais en fait il s’agissait de l’arrivée d’une dizaine de véhicules qui rompirent le silence de la nuit avec pertes et fracas et des rayons de lumière. En effet l’opération était menée contre Taniperla. À ce moment, nous ne le savions pas, mais ce fut le début d’une campagne pour « démanteler » quelques-unes des trente-deux communes autonomes rebelles.

Armé de mon magnétophone, je me mis au bord du chemin, juste en face du campement civil pour la paix pour effectuer mon reportage des événements : les premiers camions passaient... certains avec des agents en uniforme bleu, d’autres en tenue de camouflage, d’autres en noir, beaucoup avaient mis leur capuche... tous avaient l’arme à la main... des fusils de diverses sortes... suivaient des fourgons de la police, et également des militaires et des camions avec des chargements de toute sorte... Un policier civil attrape mon magnétophone et essaye de me le prendre en me bousculant fortement et en criant : « Sur quelle fréquence émets-tu, salaud ? Quelle est la portée de ton appareil ? »... Je m’oppose à ce vol : « C’est celle d’un magnétophone, froussard ! » Finalement, il me l’arrache et le détruit en donnant des coups de crosse avec son fusil, il me conduit à une camionnette pick-up de la police judiciaire de l’État, ils nient que je sois arrêté, mais ne me laissent pas partir... Au milieu des bousculades, cris et coups montent d’autres « non-détenus », des paysans et Luis Menéndez, défenseur des droits de l’homme et membre du Centre des droits de l’homme Fray Pedro Lorenzo de la Nada.

Au milieu d’une grande pagaille, depuis la camionnette dans laquelle nous nous trouvions, durant plusieurs heures nous fûmes les témoins d’un grand théâtre de terreur, au cours de laquelle ils détruisirent et incendièrent la cuisine communautaire, l’auditorium, la pancarte de la commune, la fresque, la bâche souhaitant la bienvenue dans la nouvelle commune... les affiches suggestives et tout ce qu’ils considéraient comme « zapatiste ».

Ensemble avec mes compagnons d’infortune, les sept Indiens et Luis Menéndez, nous fûmes emmenés dans un centre de la police sans qu’il ne fût procédé à aucune identification, on ne nous permit pas de parler avec l’avocat et on nous empêcha de communiquer. Tard dans la nuit, on nous transféra à San Cristóbal de Las Casas, à présent dans un centre de détention, mais également en nous empêchant de communiquer, dans une cellule en béton de trois mètres sur quatre, avec un urinoir bouché, rempli de cochonneries. Ils ajoutèrent un détenu, blessé à coups de machette dans une rixe. Vers 2 heures du matin, nous fûmes localisés par les membres du Centre des droits de l’homme Fray Bartolomé de Las Casas et d’autres personnes solidaires, qui nous apportèrent de la nourriture et des couvertures.

Le lundi, déjouant la vigilance des militant(e)s des droits de l’homme, nous fûmes sortis sans ménagement vers 5 heures du matin et emmenés à Tuxtla Gutiérrez, dans un centre de détention de la police judiciaire régionale, où nous restâmes plusieurs heures sans pouvoir communiquer, jusqu’à ce que la Commission des droits de l’homme de l’État du Chiapas nous localise. Dans l’après-midi, nous fûmes transférés dans la prison de Cerro Hueco, le lendemain le groupe des prisonniers en relation avec le zapatisme nous accueillit dans sa cellule, il était connu sous le nom de La Voix de Cerro Hueco, et on nous informa que sept autres personnes avaient été arrêtées à Taniperla, tous des défenseurs des droits de l’homme. Le mercredi, on nous a lu à nous les neufs détenus un procès-verbal, véritable tissu de fausses charges : rébellion, association délictueuse, usurpation de fonctions, vol avec violence, spoliation et destruction de propriété privée.

Comment avez vous vécu cette expérience, faisant de vous tout d’un coup un artiste injustement incarcéré ? On pense à l’idée d’un art révolutionnaire qui menace de changer le monde ?

De par sa nature, l’art, comme la connaissance et la vérité, quand on ne les contrôle pas, sont une menace pour le pouvoir, qui est mû par l’ambition et fondé sur la stérilité, l’ignorance et le mensonge. Quant au fait de me considérer comme un artiste, cela me fait rougir car c’est une appréciation discutable, en tout cas je préfère être qualifié de créatif. Mieux encore je me considérerais comme un professeur incarcéré pour avoir exercé ce que vous savez : apprendre, expérimenter et enseigner.

Et l’expérience de la prison, ce fut dur ?

Mon expérience a duré plus d’un an, en réalité dix-sept mois, bien sûr cela n’a pas été une expérience voulue, mais cela m’a donné l’opportunité de connaître directement beaucoup d’aspects du tissu social ; des aspirations, des sociopathies, des valeurs, des cultures, des capacités, des carences, des faiblesses et des forces, de la population des prisons, des prisonniers et des gardiens, et de moi-même y compris.

Le centre de réadaptation sociale n° 1, c’est ainsi qu’ils appellent officiellement cette université de la délinquance et passage obligé des boucs émissaires. C’est une partie d’un ensemble de prisons situées dans le Cerro Hueco, de Tuxtla Gutiérrez, au Chiapas, et il accueille les prisonniers en attente de leur procès, ce qui fut notre situation. Grâce à l’existence d’une organisation de prisonniers politiques, La Voix de Cerro Hueco, notre condition fut moins dure, d’abord parce que cela nous a évité d’être dispersés dans des cellules distinctes dominées par des délinquants de toute sorte, en revanche nous n’avons pu échapper à l’entassement. La prison a été construite pour accueillir trois cents prisonniers. Quand nous sommes arrivés, la population dépassait le chiffre de mille deux cents personnes, ce à quoi il faut ajouter deux cents proches, épouses et enfants, qui vivaient quotidiennement dans la prison pour soutenir leurs prisonniers.

Dans la cellule, en fait une galère de sept mètres sur dix, de La Voix de Cerro Hueco, il n’y avait pas même un grabat, et tous dormaient sur des cartons. Lors de notre arrivée, nous étions au total vingt-trois, mais progressivement, du fait des opérations ultérieures de la campagne de « démantèlement » des communes autonomes, nous arrivâmes au nombre de soixante-douze prisonniers, plus une épouse et des enfants. Luis et moi étions les seuls non-Indiens. Il y avait des Tseltales, des Tojobales, des Tsotsiles et des Choles, les principaux groupes ethniques rebelles parmi les sept ou huit qui vivent au Chiapas depuis les temps immémoriaux.

Pendant que vous étiez incarcérés, vous étiez isolés ou vous aviez des nouvelles des suites de l’« affaire Taniperla » ?

Au début, j’ai cru que notre affaire serait l’objet d’une attention peu soutenue, que toutes les deux ou trois semaines, nos proches viendraient nous rendre visite. Nous nous sommes trompés. Pendant toute la durée de notre détention, nous avons reçu des visites et des témoignages de solidarité. Des collégiens, des professeurs, des commerçants, celles et ceux qui luttent, des artistes, des universitaires, à titre individuel ou en groupes. Des organisations diverses : de droits de l’homme, d’anciens combattants, religieuses, syndicales, politiques, artistiques, intellectuelles, etc. La liste est longue et très diversifiée. Ce n’est pas le lot de la plupart des prisonniers politiques au Mexique, qui sont condamnés à l’anonymat.

Peu de temps après notre arrivée, nous avons commencé à recevoir des nouvelles d’initiatives les plus diverses autour de l’« affaire Taniperla » : des déclarations publiques d’observateurs nationaux et étrangers expulsés pour certains d’entre eux du Chiapas, du pays pour d’autres ; des rassemblements, des manifestations, des lettres de soutien d’organisations sociales, politiques, académiques, culturelles, syndicales, du Mexique, d’Espagne, du Canada, d’Argentine, d’Italie, de France, du Guatemala...

En ce qui me concerne, si j’avais bien conscience d’être prisonnier, je ne me sentais aucunement isolé ; y compris la revue de satire politique El Chamuco m’ouvrit fraternellement ses pages et publia des caricatures alors que je n’en avais plus fait depuis quinze ans, exposant certaines situations des événements dans lesquels j’étais impliqué d’une certaine manière.

Et cela évoquait la fresque et ses reproductions à travers le monde ?

En fait au bout de trois ou quatre semaines, Antonio Paoli nous apporta cent exemplaires de la reproduction de la fresque de Taniperla imprimée en sérigraphie. À partir des photographies d’un amateur anonyme, Victor, mon collègue, réussit à la reconstituer et le comité de soutien de l’UAM (Université autonome métropolitaine de Mexico) sortit une première édition de quatre mille exemplaires, avec la double proposition de les diffuser pour acheter du maïs et du riz au profit de Taniperla, qui continuait à être occupée par la police et l’armée, avec les hommes absents qui, menacés par les policiers, les soldats et les paramilitaires, étaient réfugiés dans les montagnes, et les femmes, les enfants et les anciens subissaient pendant ce temps accusations et menaces, sans pouvoir sortir de leurs maisons pour récupérer du bois afin de cuisiner leurs aliments précaires.

Au bout de deux ou trois mois, nous avons commencé à recevoir des nouvelles d’une reproduction exécutée par des étudiants sur un mur de l’UAM ; une autre là même, peinte sur une toile par un artiste et ses disciples ; une autre par un collectif de solidarité avec le Chiapas à Barcelone ; également, à Saragosse, par des membres de la commission Chiapas de la CGT espagnole ; en Italie, en Argentine, aux États-Unis, au Brésil, en Belgique, en Uruguay, en Allemagne, au Canada, en France. Certaines sont dues à l’initiative d’observateurs expulsés, d’autres à des comités déjà existants, quelques-unes davantage par des groupes solidaires qui ont intégré la lutte à l’occasion de cette affaire. Ce fut un concert improvisé, spontané et vigoureux. Au total, on s’achemine vers trente reproductions dans dix-sept ou dix-huit villes de onze pays et, qui sait, au mieux quelques-unes de plus ?

Si la destruction de la fresque, comme partie intégrante de ce théâtre de terreur, cherchait à l’effacer de la mémoire des habitants de la commune, c’est tout le contraire qui fut obtenu en provoquant sa reproduction à des dizaines de milliers d’exemplaires sous les supports les plus divers : calendriers, cartes postales, couvertures de revues et de livres, tasses, boîtes d’allumettes, Internet, etc., en réaffirmant de façon exponentielle son caractère de moyen de communication sociale, dans une dimension aussi large que profonde et qu’inattendue, la faisant passer de l’environnement rural des vallées du Chiapas à l’échelle nationale et internationale ; la transformant en un référent d’une période historique du mouvement zapatiste, en matière à différents travaux académiques, et en motif de multiples actions de solidarité nationales et internationales.

On ne peut être que très satisfait. Quand quelqu’un crée quelque chose, une œuvre d’art, qu’il lui donne vie, mais comment se sent-on quand, après avoir été détruite, cette œuvre ressuscite tant de fois et en tant de lieux différents ?

La vérité, c’est qu’il s’agit de quelque chose d’insolite qui provoque un profond sentiment de fraternité entre libertaires, qui transcende les frontières et les langues, crée et fortifie des liens de toutes sortes. C’est un chant qui s’adresse à l’humanité tout entière.

Propos recueillis par la commission de solidarité Chiapas de la CGT espagnole

El mural comunitario
« Checo » Valdez parle, en espagnol, de la fresque Vie et rêves de la vallée Perla

Site dédié à la fresque de Taniperla : El Mural Mágico

Source : La fresque de Taniperla, commune autonome Ricardo Flores Magón, Chiapas - la voie du jaguar

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9 avril 2012 1 09 /04 /avril /2012 21:55

 

De passage par La Unión

dimanche 8 avril 2012, par Vero et Patxi

Nord-ouest de la Colombie, région d’Urabá.

La communauté de paix San José de Apartadó, en résistance depuis 1997, construit un mode de vie alternatif et autonome en zone de guerre.

Cette guerre chronique est liée au contrôle d’une région riche en ressources naturelles (eau, charbon, terres fertiles) que le gouvernement colombien destine aux multinationales. Par ailleurs, la guérilla des FARC y est fortement implantée [1]. La violence des affrontements entre armée et guérilla s’est fortement accentuée au début des années quatre-vingt-dix provoquant le déplacement forcé des paysans. Les groupes paramilitaires, agissant conjointement avec la force publique, ont alors pour objectif de terroriser la guérilla par population interposée. Les massacres de civils augmentent en nombre et en cruauté. Les victimes sont démembrées et il est parfois impossible de récupérer les corps.

Pour résister à ces déplacements forcés, les paysans de la commune de San José de Apartadó s’organisent dès 1996. En tant que population civile, ils élaborent une proposition de communauté neutre en s’appuyant sur les traités internationaux. Mille trois cent cinquante paysans affirment alors leur droit à ne collaborer ni avec l’État ni avec la guérilla en signant la déclaration publique de communauté de paix le 23 mars 1997. L’adhésion à cette communauté est libre et régie par cinq principes : participer au travail communautaire ; refuser l’impunité ; ne pas participer à la guerre de manière directe ou indirecte ; ne pas porter d’arme ; ne pas fournir d’informations à aucune des deux parties en conflit.

Aucun des acteurs armés ne respectera cette déclaration de neutralité. En quinze ans, plus de deux cents membres de la communauté ont été assassinés par l’armée, les groupes paramilitaires et dans une moindre mesure, la guérilla des FARC. En 2005, suite aux massacres de Mulatos et La Resbalosa [2] puis à l’implantation forcée d’un poste de police au sein du village de San José de Apartadó [3], la communauté de paix rompt tout lien avec la justice et l’État colombien.

Malgré de nombreuses difficultés, la communauté de paix construit son propre chemin sans relâche. La détermination dans la lutte et l’accompagnement international [4] ont permis à une grande partie des paysans déplacés de revenir travailler leurs terres. La communauté a pu acquérir des terres en propriété collective. Développer un système d’éducation autonome. Expérimenter des cultures d’autosubsistance. Mettre en place la commercialisation du cacao communautaire.

L’existence même de la communauté de paix est un caillou dans la botte du gouvernement colombien. Les massacres, les assassinats, les blocages alimentaires, la diffamation, tous les coups sont permis pour en venir à bout. Pourtant, ici, personne n’a l’intention ni de se taire ni de se résigner.

Au bout d’une piste poussiéreuse, on descend à San Josesito de la Dignidad, porte d’entrée de la communauté de paix. C’est notre deuxième passage. Nous sommes là pour assister aux quinze ans de résistance de la communauté, qui seront fêtés le 23 mars. D’ici là, nous emprunterons les chemins menant aux différents hameaux de la communauté de paix San José de Apartadó.

Sur le chemin de La Unión

Partir pour La Unión c’est partir pour le jardin d’Eden. Marcher pendant plus d’une heure, le long d’une rivière paisible. S’envelopper de vert. Par-ci, par-là, des fleurs comme des touches de couleurs. Des fruits aux noms imprononçables mais tellement délicieux, qu’on attrape à pleine main comme un gout d’enfance. Quelques maisons isolées. Pas un être humain à la ronde. Juste le souffle du vent. On s’attendrait presque à voir surgir Adam et Eve. On ne croise que le silence. Et se sentir comme à l’origine du monde. Mais tout cela n’est qu’illusion, le décor trompeur. Ici, la terre a saigné. Des hommes, des femmes, des enfants ont été assassinés. Leur seul et unique tort était de vouloir vivre sur une terre qui pouvait nourrir leur famille. D’ailleurs, très vite, les mots d’un compagnon nous ramènent sur terre. Presque innocemment, il nous montre un chemin ordinaire et il nous dit : « Là, ils ont tué mon frère. Il avait dix-sept ans. » Brutal retour à la laideur du monde... Au loin, le son d’un hélicoptère se fait entendre. L’armée jette ses hommes dans la selva. Comme dans un jeu vidéo. Mais ici, la guerre est bien réelle et les armes tout autant. Le jardin d’Eden se transforme en jardin des horreurs.

La Unión, pas plus d’une trentaine de maisons pelotonnées autour de son kiosque. Par-ci, par-là, quelques maisons colorées. Rouge. Bleu. Rose. Vert. Comme pour redonner des couleurs à la résistance. Partout des enfants. Partout des animaux. Qui se frôlent dans un joyeux tohu-bohu. Et de la musique, du vallenato [5], à plein tube. Qui donne envie de danser. De chanter à tue-tête. Du bonheur immédiat. À portée du cœur.

Pourtant, même dans les moments les plus simples, la guerre se rappelle à eux. Comme ce soir-là où les hommes jouaient aux cartes. Un tapis vert, quelques pesos [6] posés juste pour pimenter le jeu. On pourrait se croire dans un tripot clandestin. À la seule différence que l’alcool est interdit dans la communauté. Ils compensent en fumant. Cigarette sur cigarette. Les hommes sont concentrés. Et soudain la radio qui s’élève : « Guérillero, démobilise-toi, ta famille t’attend », suivi d’une musique mélodramatique. Une propagande toute simple. L’armée, la guérilla, les paramilitaires. Partout. Tout le temps. Comme un cauchemar. Obsédant. Mais la musique revient et la vie reprend ses droits.

Ici, vivent des paysans opiniâtres. Qui refusent de quitter leur terre et qui ont choisi le choix de l’autosubsistance. Malgré les menaces. Malgré la peur. Ils résistent. Le groupe étant leur force. Par le collectif, ils ont réussi à créer un système alternatif à la société de consommation.

Ils ont, entre autres, planté de la canne à sucre sur les terres communautaires. Deux ou trois familles se regroupent pour produire leur propre sucre en un ou deux jours de travail. Ce samedi-là, Chicorico, Javier et un de ces fils coupent la canne. La cadence est rapide. L’ambiance détendue. Ils plaisantent. On sent le plaisir de travailler ensemble. Plus tard dans la matinée, Bernardo charge la mule. Très vite, on broie les cannes pour en extraire le jus. Pour le purifier, le jus est chauffé dans de grandes cuves. On passe du jaune sale au jaune clair. Dans la lumière, le sucre liquide, appelé « miel » ressemble à une coulée d’or. Des hommes de la communauté ne font que passer. Comme une balade dominicale. Des commentaires. Des rires. Une communauté tout en vie. Les femmes arrivent et participent au processus. Une grand-mère saisit la casserole avec une autorité toute naturelle. Pour cette petite-fille qui la regarde. Oublier les livres, les grandes théories. Juste reproduire les gestes. Repartir à l’assaut de la mémoire de la terre. Ils n’ont aucun besoin de descendre au commerce du coin pour acheter des fruits et des légumes. La terre est leur grand magasin. Par leur travail de chaque jour, ils peuvent avoir du riz, des frijoles [7], du maïs, des bananes, de la yuca [8], quelques avocats, du cacao et des fruits à profusion, goyave, papaye, mangue.

Avec les animaux, cochons, poulets, ils ont de la viande. Les poules leur donnent des œufs. Les vaches du lait. L’autosubsistance est un choix politique et pragmatique. Ils sont les maitres de leur propre alimentation. Saine et naturelle comme ils aiment à le répéter avec fierté.

Cette volonté d’autosubsistance est née en 2003 suite aux blocages alimentaires de la zone. La vente du cacao procurait de l’argent. Cependant, sous prétexte d’appuyer la guérilla, la nourriture achetée au village était systématiquement saisie par l’armée. Ils se retrouvaient avec de l’argent qu’ils ne pouvaient manger. Hérésie du monde capitaliste en pleine selva. Après plusieurs réunions, l’assemblée communautaire décida de créer un centre agricole pour expérimenter ce nouveau choix de vie.

Avec cet exemple, on saisit bien la force de la communauté qui transforme chaque coup en projet de vie. Malgré lui, le gouvernement colombien a permis la mise en place d’une économie alternative et solidaire. Et chaque jour, à La Unión, on peut croiser des hommes et des femmes fiers de ce choix de vie et prêts à lutter pour le préserver. Sans arme. Sans violence. Juste avec leur inébranlable conviction à travailler une terre qui leur appartient.

Parcourir le centre agricole avec Javier, le coordinateur, c’est saisir au plus près l’intelligence et la force de cette communauté de paix. Au milieu du chaos des armes, elle continue de travailler et d’innover. Sur une trentaine d’hectares, ils ont créé un laboratoire d’espèces et de semences. Là, des plantes médicinales contre les piqûres de serpents. Ici, des plantes aromatiques. Plus loin, des plants d’oignons. Dans un autre coin, des plants de yuca qui peuvent donner en trois mois au lieu de huit. Des frijoles. Rouges. Blancs. De toutes sortes. Des bambous pour faire les meubles ou tout objet divers. Les feuilles de canne servent à faire les toits des maisons. Les arbres sont vite transformés en planches pour les constructions. Ici, la nature est utilisée dans toute sa richesse et jamais elle ne fait défaut à ces tenaces paysans. Des cacaotiers à perte de vue dont ils vendent les fruits pour alimenter le fonds communautaire. Ce fonds permet, entre autres, d’aider les personnes malades qui ne pourraient sans cela avoir recours à des médicaments de première nécessité.

Le centre agricole est également pensé pour préserver les semences originelles des plants transgéniques. Pour ne causer aucun dommage ni à la terre ni à leur santé. Chaque mois, ils organisent des ateliers d’échange de savoirs. L’objectif est de partager les connaissances sur les plantes, découvrir des nouvelles semences, proposer de nouvelles expérimentations, être au plus près des besoins des familles. Un laboratoire à même le champ en pleine ébullition d’idées et de projets. Une recherche d’autonomie qui se fait pas à pas, coup après coup.

Vivre dans la communauté de paix, c’est vivre chaque jour des petits bouts d’humanité. Qui font grandir à l’intérieur de soi. Comme cette rencontre avec Ovidio, vingt-neuf ans, qui nous amène dans son champ en haut de la montagne. On pourrait se croire au sommet du monde. C’est beau à couper le souffle. Il nous montre ses plantations. Caresse les feuilles des frijoles. Presque des gestes d’amant. Il parle de lutte, d’espoir. Son positionnement politique est clair. Il sait pourquoi il lutte. Il sait contre qui il se bat. Il énonce avec détermination que la communauté ne veut aucun acteur armé. Personne. Ils savent bien que les armes ne sont pas en faveur de la paix. Les armes sont faites pour détruire. Les armes ne résolvent rien et ne protègent personne. La seule arme de la communauté c’est le machete [9], pour travailler. Ils arrêteront de lutter quand ils auront obtenu le respect comme communauté, quand il y aura un gouvernement qui valorise et qui respecte les paysans.

La lutte a fait de ces simples paysans des experts en loi. Ils ont écouté les inepties de la justice colombienne, ils sont allés chercher dans les articles de loi, ce qui pouvait les protéger. Et ainsi ils peuvent dire à un militaire qu’il n’a pas le droit d’être sur la zone en s’appuyant sur la loi.

Sur le chemin vers la communauté, il y a souvent des retenes [10]. Les militaires, en toute illégalité demandent leurs papiers, notent leurs noms sur des listes. Listes qui parfois se retrouvent dans les mains des paramilitaires... Lors de ces arrestations illégales, les membres de la communauté osent parler droit et justice. Pour eux, ce n’est pas du courage ni de l’héroïsme. Juste rappeler à l’État que la Constitution politique est faite pour être respectée.

Par la force des choses, ils ont aussi appris l’économie. Découvert la cupidité d’un monde globalisé. La force de cette communauté, c’est de faire de simples paysans des sujets pensants sur la réalité géostratégique de leur terre. Ils sont parfaitement conscients de l’attractivité de leur territoire. Partout des projets destinés aux grandes multinationales. Juste en face de nous, dans cette sierra magnifique, ils veulent développer une mine de charbon et obliger les paysans à vendre ou à quitter leur terre.

Presque dans un cri, Ovidio dit : « Nous en tant que communauté, nous avons grandit ici, c’est notre terre et s’il nous faut mourir ici, nous mourrons. La terre est à nous. Et je crois que personne ne va vendre. Je lutte depuis que je suis enfant. Alors pourquoi vendre si nous avons lutté quinze ans. Non ! Nous n’avons pas besoin d’argent, nous avons besoin de respect. »

Simplement s’assoir sur un tronc et se laisser porter par sa voix. Sombre et envoutante. L’entendre dire et répéter : « Je suis dans la communauté depuis quinze ans et je ne la quitterai pas. Je suis très clair avec les idées de la communauté. Beaucoup de personnes sont tombées et m’ont enseigné à lutter. Ce sont des exemples clairs. Comme j’ai appris d’eux, d’autres apprendrons de moi. Nous luttons pour un nouveau futur. C’est pour cela que ça vaut la peine. C’est un carnaval. Une ronde. »

Juste contempler la nature qui s’offre à nous et se prendre à y croire. Ses paroles nous contaminent. Son enthousiasme nous transporte. Juste rester là. Dans l’illusion de ce décor enchanteur. Pourtant, sa voix révèle aussi ses blessures. Comme une discrète fêlure qui donne envie de hurler. Mais il suffit de le regarder et très vite, on renonce à une colère qu’on sait stérile. Clairement, pour ce paysan déterminé à résister, la violence ne sert à rien et la paix est un vrai choix de vie. Difficile, mais vital dans un monde de plus en plus déshumanisé. Un monde brutal et individualisé où les solidarités se délitent. Ici, il retrouve la force du groupe, la simplicité de la communauté paysanne, la dignité du labeur de la terre.

Avant de partir, dans un souffle, le paysage comme seul témoin, il dit : « Nous voulons vivre en paix, vivre tranquilles. » Une prière presque pour lui-même. Il semble avoir oublié notre présence. Il se retourne et nous sourit du coin des yeux. On redescend comme on revient d’un rêve. Joli moment suspendu entre ciel et mots. Et ceux de Prévert se rappellent à nous : Quelle connerie la guerre !!!

P y V
Antioquia, Colombie,
mars 2012.

P.-S.

Site Internet de la communauté de paix San José de Apartadó : cdpsanjose.org

Notes

[1] Les FARC sont implantées sur ce territoire depuis les années soixante.

[2] Assassinat de huit personnes dont Luis Eduardo Guerra, leader historique et représentant légal de la communauté ainsi que trois enfants (dix ans, cinq ans et dix-huit mois).

[3] Les principes de la communauté de paix sont incompatibles avec la présence d’un poste de police au milieu de la population civile. La communauté se déplace alors à 1 kilomètre du village pour construire San Josecito de la Dignidad.

[4] Les organisations Peace Brigade International, Fellowship Of Reconciliation et Operazione Colomba assurent une présence internationale dans la communauté de paix.

[5] Musique populaire colombienne.

[6] Monnaie colombienne.

[7] Haricots rouges, aliment de paysage du paysan.

[8] Manioc.

[9] Sabre utilisé quotidiennement par les paysans dans les travaux des champs.

[10] Barrages militaires et/ou policiers.

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3 mars 2012 6 03 /03 /mars /2012 19:09
Colombie : Manifeste pour la paix, jusqu'à la dernière goutte de nos rêves


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Il existe dans le cœur de l'Amérique un refuge humain enlacé à trois cordillères, bercé par d'exubérantes vallées, des forêts touffues, et baigné par deux océans. Des sources et des fleuves impétueux convertissent ses terres en merveilles de fertilité, débouchant au sud dans l'Amazonie - ce qui convertit la Colombie en objet de grandes convoitises. Et c’est là que commence le martyre d'un peuple : dans la cartographie de la cupidité d'une poignée d'hommes. La Colombie, bien qu'elle ait tout pour rendre une vie digne possible à la totalité de ses 48 millions d'habitants, doit subir une élite qui perpétue la violence coloniale, ancrée dans un pouvoir local qui offre les richesses du pays au pouvoir transnational et condamne le peuple à une sanglante histoire de spoliations.
 
Nous avons déjà oublié combien de générations n'ont jamais connu un semblant de paix, ni de volonté des dirigeants pour permettre que cette terre héberge enfin, une démocratie réelle -non une pantomime macabre de rituels électoraux vidés de toute substance démocratique par l'extermination de l'opposition politique. À force de répression incessante pour étouffer tout germe de dignité, les gouvernants ont cherché à nous forcer à enfouir douloureusement nos cris d'humanité pétrifiée.
1. L’empathie sociale, premier pas vers une paix véritable
Nous avons décidé de conjuguer le sentiment de notre peuple à la première personne du pluriel, parce que nous sommes pluriels, et parce que nous faisons de l'empathie sociale le premier pas vers une véritable paix: le sentiment de notre peuple clame justice dans la voix de ses exilés, spoliés, appauvris, exclus, disparus, emprisonnés, muselés, torturés, assassinés. Et nous décidons d'être ‘nous-mêmes’ aussi avec nos prisonniers et nos morts, parce que si la violence d'une élite intolérante a cherché à effacer leurs idées et leurs rêves en les éliminant physiquement ou en les séparant de nous au moyen de méprisables grilles, en nous leur soif de justice et de dignité demeure vivante en nous. 
2. Terreur mise en place par les latifundistes au profit du grand capital
Nous sommes 68% de Colombiens à vivre dans la pauvreté, nous sommes huit millions à errer dans les rues dans l'indigence. Nous sommes plus de 5 millions à avoir été déplacés violemment par les forces de répression officielles ou paramilitaires qui collaborent fidèlement avec l’armée. Nous avons été soumis à la terreur mise en place par les latifundistesen faveur du grand capital transnational, au détriment de nos conditions de survie et de dignité, au détriment de la souveraineté alimentaire et de la paix. Les massacres, bombardements, aspersions et empoisonnements du sol et de l'eau provoquent nos marches endeuillées de déguerpissement forcé. Nous autres, les paysans, afro-descendants et indigènes qui avons essayé de vivre sur les terres de nos ancêtres, avons été exilés. Nous crevons de douleur, car la limite de résignation devant la souffrance a été dépassée. Lorsque nous protestons, nous subissons l'extermination, ou nous sommes soumis à l'ostracisme et au silence qu'impose la terreur d’État.
3. Ouvrir les espaces de tolérance à la revendication sociale pour parler de paix
Nous sommes huit mille prisonniers politiques dont tous les droits humains sont violés, huit mille prisonniers politiques qui crions au milieu de l'indifférence de cette société muselée et poussée à l'aliénation, qui crions, sous les tortures aberrantes, que la dignité ne s'arrache pas comme on arrache les ongles, que les grilles n'empêchent pas les rêves d'exister. L'institution carcérale, que nous dénonçons comme camp d'extermination de la revendication sociale, arrive même à nous refuser l'assistance médicale comme forme de torture, nous poussant à la mort. L'organisation sociale, la pensée critique, l'étude de l'histoire et de la société colombienne ont été proscrites. En tant que défenseurs des droits humains, syndicalistes, intellectuels critiques, artistes engagés avec leur environnement, environnementalistes, leaders communautaires ou paysans, nous sommes considérés,comme des criminels et des « terroristes ».
Nous sommes des défenseurs de la paix, et on nous fait taire car nous n’acceptons pas que des dizaines de milliers d'enfants meurent annuellement, en Colombie, de dénutrition, de manque d'eau potable et de maladies curables; car nous réclamons une éducation gratuite conçue pour la souveraineté ; car nous réclamons que la santé soit un droit et non une marchandise ; car nous élevons nos voix contre le pillage de nos ressources. L'État mène une guerre contre la pensée et l'empathie: les forces de l'ordre officielles ou paraétatiques nous assassinent sans que nous ayons même empoigné les armes. Une infinité de voix gisent dans les fosses communes, autant d'autres sont éparpillées sur le sol, entre les flaques de sang que laissent les tueurs à gages payés pour éliminer toute voix dissidente.
4. Guerre sale, la  guerre dont on ne parle pas
Nous autres civils, sommes en train d'être décimés par la guerre sale: le terrorisme d'État fait aussi partie de la guerre, cette partie que les médias de masse n’évoquent jamais et qui, pourtant, représente le flot le plus impétueux du bain de sang. La clé de la paix est d'exiger que cesse, de la part de l’État, la pratique de l'extermination de la participation politique civile, car lorsque cette participation politique se retrouve systématiquement mise à l’écart, les moyens de la revendication sociale deviennent armés.
Nous ne sommes pas “la démocratie la plus ancienne de l'Amérique Latine”, parce que nous ne l'avons pas connue. On nous oblige à nous taire pour être complices de la sanguinaire « Sécurité », qui n'est rien d'autre que celle nécessaire aux multinationales pour pratiquer le pillage sans avoir à écouter la juste revendication populaire ; une « sécurité » qui se traduit par la violation de la souveraineté alimentaire pour la majorité.
5. L'interventionnisme des USA, qui soutient la guerre, est un danger régional
Ceux-là mêmes qui ont changé une partie des Colombiens appauvris en chair à canon pour protéger les intérêts des multinationales et d'une minorité créole permettent l'installation de la menace impérialiste contre nos frères de la région. Nous avons été condamnés à renoncer à la souveraineté que nous avions héritée des campagnes de libération du XIXe siècle et nous assistons à l'installation de bases militaires US à partir desquelles s'imposent les doctrines d'anéantissement des droits humains et l'utilisation du narcotrafic comme outil supplémentaire de domination. En vertu de l'immunité qui leur est octroyée par l'État colombien, les USaméricains jouissent d'une impunité totale pour les crimes qu'ils peuvent commettre en Colombie. Les USA justifient leur interventionnisme au prétexte de la « lutte contre le narcotrafic » alors qu'en réalité celui-ci vient remplir leurs propres coffres et vient renforcer le gouvernement et ses structures narco-paramilitaires tout en criminalisant le paysan qui cultive la feuille de coca, tout en sachant que celle-ci n'est pas la cocaïne.
6. La paix, ce n'est pas dégrader l'opposant à l'extrême
Les gouvernants qui posent, exhibant des mains coupées, et qui partent en éclats de rire jubilatoires à côté de cadavres sont les mêmes qui veulent nous changer tous en partisans enthousiastes de l'extermination. Ce sont les mêmes qui ont fixé des tarifs à la vie, suscitant les mal nommés « faux positifs » qui ne sont rien d'autre que des assassinats de civils pour mettre en œuvre les montages militaro-médiatiques de la guerre psychologique : cela en utilisant les cadavres pour l'exhibitionnisme nécrophile qui cherche à dégrader l'opposant en le présentant dans des sacs noirs, comme des morceaux de viande. Nous disons que les Colombiennes et les Colombiens ne sont pas des morceaux de viande et nous dénonçons cette stratégie de la terreur d'État qui rend malade la société tout entière, en avilissant l'éthique.

On entend s'élever les clameurs des voix qui demandent la paix et la justice sociale pour le plus grand nombre : une paix qui doit naître du débat commun.
7. Une négociation politique, des changements structurels, une remise en question du modèle économique
La solution que réclame le peuple colombien est politique : mettre en œuvre des changements structurels de fond qui éliminent la situation de spoliation, d'inégalité et d'exclusion qui a donné lieu aux multiples formes de résistance. Il est urgent de réaliser une véritable réforme agraire, il est urgent que cesse la pratique de l'État d'exterminer l'opposition politique, il est urgent de démanteler la stratégie paramilitaire, d'arrêter de livrer le pays en concessions à des multinationales (des multinationales minières demandent aujourd’hui 40% du territoire), de mettre fin à la soumission à la botte US. Il s'agit de redessiner les bases du modèle de développement de la société colombienne : le fait qu’elle soit une économie dépendante, conçue comme un libre service, avec un développement endogène nul, est la racine de la guerre.
Il ne s'agit pas de négocier superficiellement ni de négocier des prébendes pour la « réinsertion » des insurgés, car cela ne conduirait qu'à réinsérer des milliers de femmes et d'hommes au sein du cauchemar de la faim qui s'accroît tous les jours dans les ceintures de misère des villes. Il ne s'agit pas non plus de négocier une « réinsertion » pour avaliser le fait qu'ensuite des milliers de « réinsérés » désarmés soient exterminés, comme cela s'est produit plus d'une fois dans l'histoire de la Colombie. Nous en appelons à la responsabilité sociale et historique : nous ne voulons pas cautionner un autre génocide monstrueux et nous ne pouvons pas non plus souhaiter que le paysan spolié se résigne à l'indignité.
8. Redéfinir les parties en conflit avec une vision intégrale, pour marcher vers la paix
La paix n'est pas un accord uniquement entre le gouvernement et la guérilla, parce que les parties prenantes dans ce conflit vont au-delà de cette définition étroite qui ne cherche qu'à enlever au conflit son caractère essentiellement social et économique : les parties prenantes c'est nous, tous les Colombiens ; nous considérons aussi que les multinationales qui bénéficient de la spoliation en fomentant des massacres et des déplacements de population sont partie prenante au conflit ; de même que les USA qui interviennent constamment dans nos affaires. L'un des points cruciaux du problème est le commerce gigantesque que le complexe militaro-industriel US et européen réalise avec le gouvernement colombien : l'achat d'engins de destruction est financé par le budget public et par une dette extérieure croissante que l'on fait supporter illégitimement au peuple colombien tout entier.
9. Pour la paix et la justice sociale jusqu'à la dernière goutte de nos rêves
Nous ne croyons pas à des accords qui se baseraient uniquement sur la remise des armes, parce que ce qui soutiendrait une paix véritable en Colombie ce serait que les rapaces renoncent à leur rapacité, cessent le saccage des ressources de la Colombie qui va de pair avec la spoliation et le génocide de sa population. Pour parvenir à la paix il faudrait que les latifundistes, les multinationales, l'institution militaire désactivent leur appareil paramilitaire ; et que cessent définitivement les machinations de la justice militaire et autres stratagèmes de la machinerie lugubre d'impunité qui perpétue l'horreur. Les dépenses militaires sont considérables : plus de 12 milliards de dollars par an ; pour parvenir à la paix, nous réclamons que cette somme soit investie dans la santé, l'éducation, le logement, le développement endogène.
Nous voulons pouvoir participer au débat politique large, à la construction sociale sans être assassinés ; nous voulons que cesse l'extermination de la revendication sociale, que les prisonniers politiques soient libérés, que cessent les disparitions forcées... Ce sont quelques pas à accomplir.
Notre intention est de les rapprocher du rêve d'un peuple qui, à force de terreur, a tardé à naître. Nous lançons un appel à l'opinion publique internationale pour qu'elle se solidarise avec le peuple colombien et qu'elle l'accompagne dans un processus de négociation politique du conflit social et armé. Nous considérons que le conflit est avant tout social et qu'il devient armé du fait de l'intolérance politique de l'État et que le principal facteur de poursuite de la guerre en Colombie est le maintien sous perfusion, par les USA, de l'appareil de l'État.
Au cœur de l'Amérique, au son des tambours, des flûtes, des accordéons, l'âme d'un peuple danse ; ce peuple préserve, dans la polychromie de sa peau, des millénaires d'histoire ; il conserve les savoirs cachés, susurrés par les forêts. Un peuple pleure sur les tombes éparpillées sous les latitudes silencieuses de son pays. Le cœur de la Colombie bat au rythme d'une géographie pleine de cascades chantantes, d'une multitude de nuances de vert ; elle se fait escarpements, elle s'étale, elle se cache dans ses forêts, elle plonge, abyssale et océanique ; rien en elle n'est avarice, elle est toute abondance ; son peuple réclame de pouvoir vivre dignement dans ce paradis que quelques-uns prétendent s'approprier : « pour la paix, jusqu'à la dernière goutte de nos rêves ! »
 
Février 2012, à partir de l'empathie essentielle, l'équipe de collaborateurs de La Pluma
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Premières signatures
Monde
Atilio A. Boron, politólogo argentino
Santiago Alba Rico, escritor, España
Franck Gaudichaud, Catedrático. Francia
Bernard Duterme, Sociólogo, director del Centro Tricontinental (CETRI) basado en Louvain-la-Neuve, Bélgica
Fausto Giudice, escritor y traductor. Miembro fundador de Tlaxcala, la red de traductores por la diversidad lingüística
Michel Collon, periodista, Bélgica
Luis Casado, escritor, Editor de Politika, Chile, colaborador de La Pluma
PAIZ (Partido de Izquierda) Chile
Salvador Muñoz Kochansky, Presidente PAIZ (Partido de Izquierda). Chile
Camilo Navarro, Sociólogo. Miembro Dirección PAIZ. Chile
Luis Alberto Jaqui Muñoz. Administrador Público. Universidad de Santiago de Chile (Ex UTE). Coordinador Nacional Estudiantil PAIZ (Partido de Izquierda). Chile
Silvia Cattori - Periodista suiza
Carlos Aznárez, periodista, director de Resumen Latinoamericano, Argentina
José Bustos, periodista argentino residente en Francia, colaborador de La Pluma
Manuel Talens, novelista, traductor y articulista, miembro fundador de Tlaxcala, la red de traductores por la diversidad lingüística.
Renán Vega Cantor, historiador. Profesor titular de la Universidad Pedagógica Nacional, de Bogotá, Colombia. Premio Libertador, Venezuela, 2008
Miguel Ángel Beltrán V., Profesor del Departamento de Sociología de la  Universidad Nacional de Colombia y perseguido político
Víctor Montoya, escritor boliviano
Carlos (Koldo) Campos Sagaseta de Ilúrdoz, Poeta, dramaturgo y columnista, Republica Dominicana
Ossaba, Artista Plástico, Colaborador de La Pluma. Francia
María Piedad Ossaba, periodista, directora de La Pluma. Francia
Lilliam Eugenia Gómez, Ph.D. Eco-Etología, IA. Colaboradora de La Pluma Colombia.
Álvaro Lopera, Ingeniero químico, Colaborador de La Pluma Colombia.
Juan Diego García, Doctor en Sociología, Colaborador de La Pluma. España
Marta Lucía Fernández, filósofa, Colaboradora de La Pluma. Colombia.
Jorge Eliécer Mejía Diez, abogado colombiano, colaborador de La Pluma. Bélgica
Lía Isabel Alvear. Ingeniera Agrónoma. Colaboradora de La Pluma. Colombia.
Rafael Enciso Patiño, Economista Investigador. Colaborador de La Pluma. Venezuela
Matiz, artista colombiano. Colaborador de La pluma. Bélgica
Éric Meyleuc poeta, escritor, hombre de teatro y militante sindical. Francia
Salvador López Arnal, colaborador de rebelión y El Viejo Topo.
Elio Ríos Serrano, médico, ambientalista y escritor. Maracaibo, Venezuela
Gilberto López y Rivas, Profesor-Investigador Instituto Nacional de Antropología e Historia, Cuernavaca, Morelos, México
Pedro Vianna, poeta, escritor, hombre de teatro y militante asociativo. Francia
Cristina Castello- Poeta y periodista argentina residente en Francia
André Chenet. Poeta y editor de revistas. Francia
Sandrine Féraud. Poeta. Francia
Cédric Rutter, periodista. Bélgica
David Acera Rodríguez, actor. Asturias (España)
Sinfo Fernández Navarro, Traductora Rebelion.org. Madrid
Susana Merino, Traductora Rebelión. Buenos Aires, Argentina
Agustín Velloso, profesor de la UNED. Madrid
Rosina Valcárcel, escritora, Lima, Perú
José Antonio Gutiérrez D. analista político solidario con los movimientos populares de Colombia
Carlos Casanueva Troncoso, secretario general Movimiento Continental Bolivariano 
Dick Emanuelsson, Reportero Suecia-Honduras
Mirian Emanuelsson, Reportera Suecia-Honduras
José Rouillon Delgado  Sociólogo-Educador Lima-Perú
Martín Almada, Defensor de los Derechos Humanos de Paraguay.
Graciela Rosenblum, presidenta Liga Argentina por los Derechos del Hombre, Argentina
Annalisa Melandri, periodista. Italia 
Sandra Marybel Sánchez, miembro del Colectivo de Periodistas por la Vida y la Libertad de Expresión. Honduras
Miguel Segovia Aparicio, Poeta; Barcelona, España
Badi Baltazar, escritor. Bélgica
Antón Gómez-Reino Varela, Tone. Activista social. Galicia
Winston Orrillo, Premio Nacional de Cultura del Perú
Azalea Robles, periodista, poeta.
Myriam Montoya, Poeta. Francia
Jaime Jiménez, abogado colombiano
Enrique Santiago Romero, abogado, ex director del CEAR. España
Hernando Calvo Ospina, periodista y escritor colombiano. Francia
 Ramón Chao, periodista y escritor gallego. Francia
Jaime Corena Parra, Físico, Ingeniero Industrial y Doctor en Didáctica de las Ciencias. Venezuela
Fernando Reyes U., Economista. Venezuela
Sergio Camargo, escritor y periodista colombiano. Francia
Colectivo Regional de apoyo a Vía Campesina y Salvación agropecuaria. Colombia
Campaña Permanente por la Libertad de lxs Prisionerxs Políticxs Colombianxs, Capítulo Cono Sur
Juan Cristóbal, poeta peruano y periodista
Cristóbal González Ramírez. Periodista y profesor universitario retirado  y pensionado. Colombia
Antonio Mazzeo, periodista, escritor, Italia 
Mario Casasús,  periodista, México
Mario Osava, Periodista, Brasil
Félix Orlando Giraldo Giraldo, Médico. Colombia
Polo Democrático Alternativo-Seccional Suiza.
ARLAC-Suiza
Mónica Alejandra Leyton Cortes .Estudiante; Miembro del Colectivo Soberanía y Naturaleza. Colombia
Eliecer Jiménez Julio-Periodista-Suiza
Ángela Peña Marín socióloga MsC en educación Ambiental, Colombia
Marta Eugenia Salazar Jaramillo, comunicadora social, Colombia
 Diana María Peña Economista, Colombia
Adolfo León Gómez; Economista; Colombia
Héctor Castro, abogado. Francia
 
Argentine
Aurora Tumanischwili Penelón, FeTERA FLORES (Federación de trabajadores de la energía de la República Argentina en CTA)
Guillermo López., FeTERA FLORES (Federación de trabajadores de la energía de la República Argentina en CTA)
Ingrid Storgen, Responsable del colectivo Amigos por La Paz en Colombia.
Marta Speroni, Militante por los DD.HH.
Igor Calvo, Militante de base del FNRP Honduras
Aline Castro, Red por ti América, Brasil.
María Rosa González, Comunicadora Social Alejandro Cabrera Britos, Delegado general, ATE, Senasa Martínez, Dilab en CTA
Carlos Guancirrosa, Agrupación Enrique Mosconi
Carlos Loza, Junta Interna de ATE, AGP (Asociación General de Puertos en la Central de Trabajadores de La Argentina, CTA)
Eduardo Espinosa (Asociación de Trabajadores del Estado, en CTA), Ministerio de Desarrollo Humano de la Provincia de Buenos Aires
Carina Maloberti, Consejo Directivo Nacional - ATE-CTA
Convocatoria por la Liberación Nacional y Social, Frente Sindical, Argentina:
Agrupación Martín Fierro ( Varela - Alte. Brown - Matanza - Mar del Platay Neuquen )
Agrupación "Germán Abdala" - ATE-Ministerio de Trabajo de la Nación,
Movimiento de Trabajadores Desocupados Flamarión-Rosario, Democracia Popular-Rosario, Comunidad Campesina de Tratagal-Salta, Biblioteca Popular Fernando Jara-Cipoletti-Río Negro, Unión de Trabajadores de la Provincia de Chubut.
Europe
RedHer Europa (Red europea de Hermanadas y Solidaridad con el pueblo colombiano)
Tribunal Internacional de Opinión Sur de Bolivar, Paris, Francia
La Confederación General del Trabajo del Estado Español (CGT).
Colectivo Coliche, La Rioja. España
El Comité de Solidaridad Internacionalista de Zaragoza. España
PASC Projet Accompagnement Solidarité Colombie. Canadá
CO.S.A.L. XIXÓN(Comité de Solidaridad con America Latina de Xixon)
ASSIA (Acción Social Sindical Internacionalista).Estado Español
Komite Internazionalistak de Euskal Herria-País Vasco
Comitato di Solidarietà con i Popoli del Latino America Carlos Fonseca (Italie)
Colectivo Iquique de la Universidad de Zaragoza. Estado español
Colombie
RedHer Colombia (Red de Hermandad y Solidaridad con Colombia)
Aca - Asociación Campesina De Antioquia
Acader - Asociación Campesina Para El Desarrollo Rural- Cauca
Afasba - Asociación De Familias Agromineras Del Sur De Bolívar y Bajo Cauca Antioqueño
Alianza De Mujeres De Cartagena: "Nelson Mándela"
Amar – Arauca
Ascatidar – Arauca
Asedar – Arauca
Asoagros - Asociación De Agrosembradores. Valle
Asociación Agroambiental Y Cultural De Taminango – Nariño
Asociación Agrominera Del Rio Saspí – Nariño
Asociación De Arrierros De La Montaña De Samaniego – Nariño
Asociación De Mujeres Y Familias Campesinas Sanpableñas - Cima Nariño
Asociación Movimiento Campesino De Cajibío – Cauca
Asociación Agroambiental Y Cultural De Arboleda – Nariño
Asojer – Arauca
Asonalca – Arauca
Asoproa – Antioquia
Cabildo Indígena del Sande Nariño
Cabildo Indígena de Betania Nariño
Cecucol - Centro Cultural Las Colinas. Valle
Ced Ins - Instituto Nacional Sindical
Cima - Comité De Integración Del Macizo Colombiano
Cisca - Comité De Integración Social Del Catatumbo
Cna – Choco
Cna - Coordinador Nacional Agrario
Cna Huila
Colectivo Icaria – Antioquia
Colectivo Orlando Zapata – Antioquia
Colectivo Soberanía Y Naturaleza
Colectivo Surcando Dignidad – Valle
Comité De Integración Del Galeras - Ciga Nariño
Confluencia De Mujeres Para La Acción Pública
Confluencia De Mujeres Para La Acción Pública – Antioquia
Confluencia De Mujeres Para La Acción Pública – Atlántico
Confluencia De Mujeres Para La Acción Pública – Centro
Confluencia De Mujeres Para La Acción Pública – Eje Cafetero
Confluencia De Mujeres Para La Acción Pública – Nororiente
Confluencia De Mujeres Para La Acción Pública – Suroccidente
Comité De Derechos Humanos De La Montaña De Samaniego – Nariño
Consejo Comunitario Del Remate Rio Telembi Nariño
Coordinador Nariñense Agrario
Corporación "Somos Mujer y Nación"
Corporación Aury Sará Marrugo
Corporación Jurídica Libertad – Medellín
Corporación Sembrar
Corporación Social Nuevo Día – Medellín
Cospacc - Corporación Social Para El Asesoramiento Y Capacitación Comunitaria
Cut  - Subdirectiva Arauca
Escuelas Agroambientales De La Unión – Nariño
F.C.S.P.P. - Fundación Comité De Solidaridad Con Los Presos Políticos
Fcspp - Seccional Valle
Fedeagromisbol - Federación Agrominera Del Sur De Bolívar
Fedejuntas – Arauca
Frente De Mujeres Populares De Bolívar
Fundación De D.H Joel Sierra – Arauca
Fundación Del Suroccidente Y Macizo Colombiano - Fundesuma Nariño
Fundación Territorios Por Vida Digna – Cauca
Fundación Tomas Moro –Sucre
Kavilando – Antioquia
Lanzas Y Letras – Huila
Movimiento De Mujeres De Los Pueblos De Nariño
Movimiento Juvenil De Nariño
Movimiento Juvenil Macizo Joven De Nariño
Mujeres Sobre Ruedas
Nomadesc - Asociación Para La Investigación y Acción Social
Organizaciones Sociales De Arauca
Periódico Periferia – Medellín
Pup – Poder y Unidad Popular
Proceso Nacional Identidad Estudiantil- Palmira
Proceso Nacional Identidad Estudiantil-Cali
Red  De Jóvenes Populares De Cartagena
Red De Agrosembradores De La Cordillera Nariñense
Red De Chigreros De Guachavez – Nariño
Red De Familias Lorenceñas "Las Gaviotas" – Nariño
Red Proyecto Sur - Huila
 
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28 février 2012 2 28 /02 /février /2012 17:10

 

 

"Temps de la profondeur,
temps sans syllabe,
où je ne suis qu’un son
en marche vers la fatigue."


"Tiempo de la hondura,
tiempo sin sílaba,
cuando soy sólo un sonido
en tránsito a la fatiga."

Angye Gaona 

 

http://4.bp.blogspot.com/-0ZlfvHO7iBk/Ty0laMMIqpI/AAAAAAAABxM/-OjjmlLOHos/s300/Political-Prisoners.gif


Un blog consacré à la poète et résitante colombienne emprisonnée Angye Gaona ou la liberté à tires-d'ailes: Le massacre colombien

Le massacre colombien
Dan KOVALIK
 
 
Depuis longtemps on croyait que le Guatemala détenait la première place sur le continent américain pour les massacres de masse de notre époque moderne – 200 000 victimes dans les années 1980, assassinées dans 94% des cas par l’État avec le soutien de Washington et en alliance avec les escadrons de la mort. Il s’avère hélas que la Colombie a pulvérisé ce record, et, comme le révèle Wikileaks, les États-Unis en sont parfaitement bien informés.
Dans un câble du 19 novembre 2009, titré « 2009-2010 International Narcotics Control Strategy Report » (« Rapport stratégique sur le contrôle international des narcotiques 2009-2010 »), l’ambassade des États-Unis à Bogotá reconnaît, comme un fait marginal, l’horrible vérité : ont été enregistrées 257 089 victimes des paramilitaires d’extrême-droite. Et, comme Human Rights Watch l’a signalé dans son rapport annuel 2012 sur la Colombie, ces paramilitaires continuent d’agir main dans la main avec les militaires soutenus par les États-Unis.
Même pour ceux qui connaissent la Colombie ce chiffre est sidérant. La première fois que j’avais vu un tel chiffre c’était dans le livre « Cocaïne, Death Squads, and the War on Terror » (« La Cocaïne, les escadrons de la mort et la guerre contre le terrorisme »), dont j’ai parlé sur ce site il y a quelque temps, et qui cite un journaliste indépendant affirmant qu’environ 250 000 victimes ont été tuées par le para-État colombien. Dans ce livre il est précisé que ce chiffre a été escamoté parce que des victimes ont été envoyées dans des charniers ou dans des fours crématoires de type nazi.
On peut maintenant savoir que depuis au moins deux ans les États-Unis savent tout de ces crimes. Cela n’a rien changé à la politique états-unienne envers la Colombie – ce pays recevra ces deux prochaines années plus de 500 millions de dollars d’aide pour son armée et sa police – et cela n’a pas empêché le gouvernement Obama de défendre, et d’obtenir, le Traité de libre-commerce avec la Colombie l’an passé.
Et, comme pour le Guatemala dans les années 1980, la violence a touché de façon particulière les populations indigènes – fait également reconnu par l’ambassade états-unienne dans les câbles révélés par Wikileaks. Cette violence à l’encontre des indigènes continue même d’augmenter. L’ambassade états-unienne le reconnaît dans un câble du 26 février 2010 titré « Violence Against Indigenous Shows Upward Trend » (« La Violence à l’encontre des indigènes en augmentation »). En raison de cette violence 34 groupes indigènes se trouvent au bord de l’extinction ; cette violence peut donc être qualifiée de génocidaire.
Ce câble de 2010 explique que « pour la deuxième année consécutive les assassinats d’indigènes ont augmenté », une augmentation de 50% en 2009 par rapport à 2008. Le câble explique en outre que « les indicateurs de la violence à l’encontre des indigènes se sont encore aggravés en 2009. Selon l’Organisation nationale indigène de Colombie (ONIC) les déplacements ont augmenté de 20% (de 3212 à 3649), les disparitions forcées ont augmenté de plus de 100% (de 7 à 18), et les menaces ont augmenté de plus de 3000% (de 10 à 314). L’ONIC signale également une augmentation dans le recrutement forcé de mineurs par tous les groupes armés illégaux, mais sans fournir de chiffre sur ce point ».
L’ambassade signale d’une part que les FARC reconnaissent elles-mêmes être responsables de certains cas de violence à l’encontre des indigènes et admet d’autre part que c’est l’État colombien et ses alliés paramilitaires qui sont les principaux responsables de cette violence.
L’ambassade, sur la base d’une étude publiée par l’anthropologiste Esther Sánchez – étude financée le gouvernement états-unien –, note que les militaires et les paramilitaires ciblent les indigènes parce qu’ils sont « souvent perçus comme des collaborateurs des FARC parce qu’ils cohabitent dans les mêmes territoires » ; et c’est précisément la présence de militaires colombiens sur les territoires indigènes qui « apporte le conflit dans le jardin des indigènes », ce qui représente une menace pour leur existence. Or l’ambassade rejette l’idée d’un retrait de l’armée colombienne des territoires indigènes, précisant que cette demande formulée par la tribu awa est « inapplicable ».
« Inapplicable », explique l’ambassade, parce que ce territoire doit être contrôlé puisqu’il abrite de nombreuses richesses. L’ambassade états-unienne reconnaît explicitement que « les investissements de capitaux dans les hydrocarbures » ainsi que dans le caoutchouc et le palmier à huile – c’est-à-dire exactement les investissements qui expliquent les décisions militaires de Washington et le Traité de libre-commerce – mènent directement à la violence contre les indigènes. Il en va ainsi, explique l’ambassade, parce que les peuples indigènes « n’abandonneraient probablement pas leurs terres considérées sacrées dans leurs identités culturelles ». Bref ils n’ouvriront pas volontairement la porte à l’exploitation capitaliste.
Tout cela montre que les États-Unis et la Colombie continuent de défendre des options militaires et de mener des politiques économiques qui, de l’avis même des États-Unis, conduisent à un génocide. En fait l’ambassade états-unienne elle-même reconnaît que le génocide est absolument nécessaire pour parvenir à ces objectifs.
Cela signifie que les États-Unis mentent quand ils prétendent s’intéresser aux droits humains. Les États-Unis ont l’aplomb d’exclure Cuba du Sommet des Amériques en raison des droits humains ; mais c’est le pays qui accueil ce Sommet – la Colombie – qui en toute objectivité devrait être mis à l’index pour ses résultats singulièrement mauvais en terme de droits humains. En vérité ce sont les États-Unis eux-mêmes qui devraient être dénoncés parce qu’ils soutiennent le brutal régime colombien. Mais comme les États-Unis dominent le monde, cela aussi semblera « inapplicable ».
Daniel Kovalik
Traduction : CPCP

Source: Le Grand Soir

 

 

Ne recueille plus de larmes, cœur tendre.
Et si un enfant prisonnier pleure, tu le diras,
et si un homme est torturé, tu le diras.
Ce n’est pas le moment de rentrer la colère, te dis-je.
C’est l’heure de forger et de faire luire le tranchant."

        Angye Gaona, extrait du poème tendre tissu
        Traduction: Pedro Vianna



Message à Stephane Hertsmans:

        Cher Stefan,

    Je n'ai jamais rencontré physiquement Angye. Par contre j'avais commencé à lire sa poésie grâce aux traductions en cours de Pedro Vianna que je lui avais demandé pour le prochain numéro de la revue La Voix des Autres qui paraîtra en mars prochain.

    Les poèmes d'Angye Gaona dégagent une force peu commune où l'imagination porte très haut et très loin l'éclairage de la conscience humaine. Le piège qui est en train de se refermer sur elle nécessitera la mobilisation du plus grand nombre. Des poètes du monde entier (entre 1 500 et 2000) ont à ce jour répondu à l'appel que Cristina et moi avions lancé au début du mois janvier. Pour le moment, nous ne pouvons que mettre le gouvernement colombien devant ses responsabilités en attendant le procès. En cas de condamnation définitive je ne doute pas que des associations internationales pour la défense des droits des êtres humains prendront le relais. Pour l'instant, il importe que le message circule de villes en villes, de pays en pays et que nous écrivions au juge (par courrier) et aux ambassades de Colombie (par e-mail). Ce qui est étonnant avec Angye c'est que, malgré les pressions qu'elle subit, elle conserve une joie de vivre phénoménale. Bien sûr, elle passe par des périodes de découragement profond, qui y résisterait à sa place? La mobilisation internationale en sa faveur lui apporte un surplus d'énergie et de confiance dans son combat pour la liberté et la dignité humaine. Elle se sait investie d'une responsabilité écrasante qui dépasse sa seule personne. Aujourd'hui, à travers elle, la poésie en ce qu'elle a de plus libérateur, de plus urgent, déborde irrésistiblement les frontières-prisons de l'ignominie auxquelles nous sommes tous, à quelque degré que ce soit, confrontés. Angye n'est pas un cas particulier et en cela elle incarne un symbole lumineux de notre action commune pour "changer la vie" en nous désenclavant des limites infernales qui nous sont chaque jour davantage imposées.

      Je ne pense pas que le régime colombien cèdera facilement car elle représente un réel danger pour lui. Malgré cela, il lui sera difficile de laisser se propager trop de vérités flagrantes quant à sa véritable nature, surtout en cette période où le sens même de nos démocraties suscite de nombreux débats et réflexions. Je ne doute pas un seul instant qu'elle retrouvera sa liberté d'action rapidement, qu'elles qu'en soient les embûches. Je vous salue bien amicalement,

                            André Chenet

Source : DANGER POESIE: Angye Gaona ou la liberté à tires-d'ailes (recueil n°1)

 

http://1.bp.blogspot.com/-2yY5ee3gbzs/TyRW9sTb7RI/AAAAAAAABw0/gZ1_GYk-t7o/s320/angye+2.jpg

 L'ange de la Liberté

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23 janvier 2012 1 23 /01 /janvier /2012 23:38

 


A l’occasion d’un précédent article, nous esquissions une présentation de la politique commerciale de l’Union européenne. Le constat ? Lors des négociations, la Commission européenne roule pour les grandes entreprises européennes, dont les intérêts sont défendus becs et ongles au détriment des considérations écologiques, sociales, démocratiques.

La conclusion récente d’un accord de libre-échange entre l’Union européenne et la Colombie lève définitivement le voile sur les pratiques commerciales de l’UE. Les droits de l’homme, le développement durable des pays du sud, la lutte contre la pauvreté, et tous les nobles principes dont se prévaut la Commission apparaissent désormais plus que jamais comme des voiles de fumée, qui dissimulent mal la brutalité de la politique commerciale européenne.

Avril 2011

Un climat « favorable aux affaires » : le modèle colombien

La Colombie fait partie de ces « bons élèves », dont les politiques économiques sont régulièrement applaudies par le FMI [1] - au point qu’on s’étonne que le gouvernement colombien n’ait d’ores et déjà décoré M. Strauss-Kahn pour ses bons offices, comme le fit Ben Ali en 2008 [2].

Il faut dire que, de longue date, la Colombie s’est avéré un pays accueillant pour les multinationales ; d’abord états-uniennes, puis européennes. Chiquita Brands, Coca-Cola, Drummond, Nestlé, qu’il s’agisse d’agro-alimentaire ou d’extraction minière, les dollars et les euros sont toujours les bienvenus - surtout lorsqu’une partie retombe dans les poches d’une classe politique corrompue [3]. Le secret de fabrique de la « bonne gouvernance » ?

Certes, certes, il demeure quelques « détails » : assassinats de représentants syndicaux (la Colombie étant de très loin le pays le plus dangereux au monde pour les syndicalistes), droit du travail bafoué, déplacements ou disparitions forcées de paysans : il est désormais de notoriété publique [4] que la Colombie fait bonne figure parmi les champions des violations des droits de l’homme.

Néanmoins, très sensible aux efforts du gouvernement Uribe pour faire régner une atmosphère « business friendly » en Colombie [5], la Commission européenne n’a pas manqué de s’interroger : pourquoi ne pas envisager de resserrer les liens commerciaux entre l’Union européenne et un pays si « respectable », et dont les politiques économiques sont si « raisonnables » ?

Une question tout à fait pertinente, au moment où les négociations entre les Etats-Unis et la Colombie sont au point mort, achoppant notamment sur la dépénalisation des violations aux libertés syndicales actuellement en vigueur dans le pays. Les frilosités yankees seraient-elles l’occasion, pour les VRPs des multinationales européennes de damer le pion à leurs principaux concurrents ? Hardi ! Après 3 ans de négociations, la Commission paraphait en mai 2010 le nouvel accord de libre-échange avec la Colombie et le Pérou, qui doit encore être validé par le Conseil et le Parlement européen.

Il faut dire que pour nos petits représentants de commerce, l’économie colombienne présente des opportunités alléchantes. Le sol de la Colombie regorge de matières premières (notamment du charbon) qui font l’objet d’une lutte acharnée entre multinationales de l’extraction pour le contrôle et l’accès. La Colombie par ailleurs représente des opportunités d’investissement très intéressantes dans le domaine des agro carburants.

Dans le domaine des services, l’accord devrait permettre une ouverture toujours plus large à l’investissement privé des services publics (déjà largement privatisés : universités, santé, transports – avec le fameux (et inabordable) transmilenio, etc.). Enfin, les dispositions sur la propriété intellectuelle devraient permettre aux grands groupes pharmaceutiques européens de se mettre à l’abri des pâles copies, génériques à moindre coût.

Bien sûr, il y aura toujours des esprits chagrins pour rappeler qu’en Colombie, l’exploitation du sol (pour les agro-carburants, dont la palme, la canne à sucre poussent dans d’immenses champs) et du sous-sol (pour le charbon principalement) par les multinationales européennes et états-uniennes s’accompagne de l’expropriation puis le déplacement forcé de milliers de familles de paysans [6] « facilités » par les groupes de « bandes criminelles » (ex paramilitaires). Les mêmes qui, pour quelques dollars de plus, font disparaître les délégués syndicaux qui n’auraient pas encore pris goût au « dialogue social » [7].

Bien sûr, ces mêmes esprits chagrins ajouteront que les droits syndicaux sont a fortiori bafoués (un pistolet sur la tempe, c’est toujours plus facile de dissuader d’éventuelles hardiesses syndicales). Que le droit du travail est une chimère pour plus de la moitié des colombiens, plus d’un tiers à Bogota [8]. Que les gigantesques mines de charbon, exploitées sans aucun égard pour l’environnement, polluent les rivières et les nappes phréatiques. Que les réseaux routiers et de transports se dessinent en fonction des besoins de l’industrie minière. Que la privatisation déjà largement engagée des services tels que la santé, l’éducation, contribuent à faire de la Colombie un des pays les plus inégalitaires du monde [9].

Fort heureusement, le pragmatisme des VRPs de la Commission ne s’arrête pas à ce genre de détails. Ainsi, ils reconnaissent que le précédent Président, Alvaro Uribe, n’était certes, somme toute, pas tout à fait un genre de bienfaiteur de l’humanité, et qu’il a peut-être eu une ou deux fois la main lourde [10]. Mais ils font de son successeur, Jean-Manu Santos, une figure de pondération, bien sur lui : un mec sympa, promis juré. Sauf que le dit Santos n’est autre… que l’ancien ministre de la Défense du gouvernement précédent, et proche d’Uribe, qui lui a passé la main.

Contrairement à ce qu’affirmait la campagne de relation publique lancée en 2010 auprès du Parlement européen, Santos est loin d’être un saint, et ce malgré son travail d’image [11]. Sur le plan des violences syndicales, par exemple, rien n’a changé en Colombie : en 2010, 46 syndicalistes colombiens ont été assassinés [12]. En fait, la campagne de lobbying au sein du Parlement européen a même été dénoncée par la Confédération syndicale internationale et la Confédération européenne des syndicats [13].

Cette tentative visait à faciliter les négociations commerciales entre la Commission et la Colombie, et la conclusion d’un accord largement décrié, entre autres, pour toutes les casseroles que traîne le gouvernement colombien. De fait, la conclusion d’un tel accord reviendrait à accorder à celui-ci une forme de légitimité sur la scène internationale ; ce au moment où les violations récurrentes des droits syndicaux, des droits du travail, les exécutions et les déplacements forcés dont le gouvernement s’était rendu complice, avaient contribué à le rendre infréquentable.

En dernier lieu, en vertu des dispositions du traité de Lisbonne, ce seront le Conseil européen et le Parlement européen qui se prononceront sur cet accord controversé [14]. S’il passe, cet accord de libre-échange pourra faire office de nouvelle glorieuse médaille sur la boutonnière des VRPs de la direction générale du commerce de la Commission européenne... et accessoirement, une véritable honte pour l’Union européenne.

Eric Scavennec

PS : Un grand merci à Maria Victoria Forero et Gustavo Ruben Triana Suarez, du CUT (Central Unitaria de Trabajadores de Colombia), à qui nous exprimons notre solidarité dans leurs luttes.

Pour en savoir plus sur la coalition française de lutte contre l’accord entre l’Union européenne, la Colombie et le Pérou, c’est par ici.

[1] En 2009, le FMI vante ses « fortes performances macroéconomiques », avec une « croissance solide », une dette publique en baisse et une inflation contenue ; lire : http://www.leparisien.fr/flash-actu...

[2] lire sur le site du CADTM : http://www.cadtm.org/Strauss-Kahn-d...

[3] lire sur wikipedia : http://fr.wikipedia.org/wiki/Scanda...

[4] du moins si l’on en croit les enquêtes de la Confédération Syndicale Internationale, du Haut Commissaire des Nations Unies pour les Réfugiés et du rapporteur spécial de l’ONU sur les exécutions extrajudiciaires

[5] D’après une enquête de la Confédération Syndicale Internationale, la Colombie est le pays le plus dangereux au monde pour les syndicalistes. En moyenne pendant les 23 dernières années, un syndicaliste a été assassiné tous les trois jours (lire CSI – Confédération Syndicale Internationale (2010) Annual Survey of violations of Trade Unions rights. Colombia. http://survey.ituc-csi.org/+-Colomb...). Ces assassinats de syndicalistes se déroulent dans un climat d’impunité, le gouvernement colombien, sous la présidence d’Alvaro Uribe comme sous la présidence de son successeur Juan Manuel Santos

[6] Selon le Haut Commissaire aux réfugiés des Nations-Unies, source : UNHCR (2011) Global Appeal 2011 Update http://www.unhcr.org/ga11/index.html

[7] Lire : Colombie : ces multinationales qui profitent du crime sur le site d’Amnesty International : http://webcache.googleusercontent.c...

[8] Rapport de la Fondation pour l’éducation supérieure et le développement (www.fedesarrollo.org) – NDT.

[9] http://www.fse-esf.org/spip.php?pag...

[10] Comme la fois où il a couvert des massacres de civils, hâtivement déguisés en guerrilleros ; lire : http://torture.blogs.liberation.fr/...

[11] lire : http://www.elcorreo.eu.org/?Juan-Ma...

[12] selon la CSI : http://www.ituc-csi.org/colombie-le...

[13] lire : http://www.justiceforcolombia.org/n...

[14] Une coalition d’organisations européennes tente néanmoins de faire reconnaître l’accord comme n’étant pas exclusivement commercial, ce qui suppose qu’il soit ratifié par les parlements nationaux. Cela pourrait permettre de faciliter le rejet de l’accord. Plus d’information ici : http://aitec.reseau-ipam.org/spip.p...

 

Source : Un climat « favorable aux affaires » : le modèle colombien - Les Dessous de Bruxelles

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8 décembre 2011 4 08 /12 /décembre /2011 17:45

Jean-Pierre PETIT-GRAS

  Mardi 6 décembre, une délégation de 18 représentants du mouvement mexicain pour la paix dans la justice et la dignité, fondé par le poète Javier Sicilia, se rendait à Santa María Ostula, sur la côte pacifique du pays, lorsque leur véhicule a été intercepté par des paramilitaires armés de fusils nord-américains R-15.

Ceux-ci ont relâché peu après les membres du mouvement pour la paix, mais ont retenu leur accompagnateur, J. Trinidad de la Cruz Crisoforo. Plus connu comme don Trino, ou « el Trompas », Trinidad de la Cruz, 73 ans, était l’une des autorités traditionnelles de la communauté indigène nahua d’Ostula.

Il avait été particulièrement actif lors de la récupération par les habitants du village d’un millier d’hectares de terres communales, qui leur avait été volées au milieu des années 1960 par un groupe de propriétaires et de trafiquants locaux. Cette récupération avait eu lieu suite à des décennies de tentatives infructueuses par la voie légale.

C’est que pour l’Etat, si prompt à châtier le voleur de pain ou le revendeur de marijuana, il est scandaleux que des indiens, paysans et pêcheurs, puissent vivre dans des contrées aussi belles. Sur ces plages bordées de cocotiers, les promoteurs immobiliers, désireux de blanchir au plus vite un argent dont ils ne savent que faire, multiplient les projets de marinas et autres complexes touristiques.

Quelques jours avant l’enlèvement de don Trino, des membres de la Marine Nationale, de la Police Fédérale et du Gouvernement de l’Etat du Michoacan dirigé par Leonel Godoy Fangel, avaient assuré les activistes du Movimiento por la Paz de Javier Sicilia que leur mission d’observation bénéficierait de la protection de ces différentes forces lors de son séjour à Ostula. Celles-ci venaient de se retirer lorsque l’interception s’est produite. Tout était donc parfaitement réglé.

Le corps de don Trino, torturé et lardé de coups de couteau, a été retrouvé 24 heures à peine après l’enlèvement. Les chefs des assassins, Prisciliano Corona Sanchez, Iturbe Alejo et Margarita Pérez, sont parfaitement connus. Ils ont déjà organisé le meurtre, en octobre, de Pedro Leyva, un autre représentant du village, et de 25 autres comuneros assassinés (plus 4 disparus) en un plus de deux ans. Don Trino a donc été tué par les hommes de main des trafiquants Prisciliano Corona et Margarita Pérez, mais avec l’évidente complicité des autorités militaires, policières et politiques du Michoacan et de l’Etat fédéral.

Le tout au nom du développement, de l’emploi et d’une modernisation qui fera de la région un disneyland de plus, artificiel et stérile. Don Trino, el Trompas, avait reçu un petit groupe de Toulousains et de Belges sur la terre de Xayakalan, à peine récupérée, au cours de l’été 2009. Aujourd’hui, il reste les yeux pour pleurer, comme on dit.

Ce sont des larmes de tristesse et de rage. Mais pas d’impuissance, car les Indiens de la côte nahua du Michoacan, comme les Yaqui du Sonora, les Wixarika du Jalisco, les P’urépecha de Cheran, les Meph’a du Guerrero, les Binniza ou les Triqui de l’Oaxaca, les Maya et Zoque zapatistes du Chiapas, toutes ces nations, tribus et peuples en ont vu d’autres, en 500 ans de domination et d’extermination. Et rien de ce qui leur arrive aujourd’hui, alors que le capitalisme industriel se rue sur tout ce qui peut assurer sa survie, ne les empêchera de nous transmettre leur parole : au lieu de financer ceux qui nous détruisent, avec votre consommation d’objets inutiles et votre tourisme aveugle, essayez de retrouver le contrôle et la jouissance de vos propres terres et territoires, et de la vie que vous y menez.

 

Jean-Pierre Petit-Gras 8 déc 2011

 

Source; Mexique : qui a tué don Trino ? par Jean-Pierre PETIT-GRAS

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