11 juillet 2019 4 11 /07 /juillet /2019 16:16

 

 

Décorations florales colorées à l'entrée du Forum de la route de la soie pour la coopération internationale à Pékin, le 14 avril  2019. Photo : IC

Décorations florales colorées à l'entrée du Forum de la route de la soie pour la coopération internationale à Pékin, le 14 avril 2019. Photo : IC

Connue comme le plus grand projet d'infrastructure de tous les temps, l’initiative chinoise la Ceinture et la Route (Belt and Road Initiative ou BRI en anglais) a déjà déplacé des milliers de petits producteurs et menace d'en déplacer des centaines de milliers supplémentaires. Il causera aussi une irréversible perte de biodiversité et aggravera significativement la crise climatique mondiale. Plutôt que de répondre aux besoins des communautés affectées, le gouvernement chinois a récemment commencé le verdissage de ses investissements BRI. Qu'elles soient nationales ou internationales, les organisations de la société civile qui surveillent le développement des projets sur le terrain demandent au gouvernement chinois de rendre l'initiative la Ceinture et la Route plus transparente, d'écouter les personnes concernées et d'apporter de véritables solutions climatiques.
 
Le second Sommet de la Route et la Ceinture a eu lieu à Pékin, en Chine, du 25 au 27 avril 2019, deux ans après le premier sommet. Avec la participation de 38 chefs d'Etats venus des quatre coins du globe, du Secrétaire Général des Nations Unies António Guterres et de Christine Lagarde, la directrice générale du FMI, le sommet de cette année fut plus imposant que le premier.
 
Un communiqué de presse commun paru à l'issue du sommet affirmait, entre autres choses, que l'initiative la Ceinture et la Route (BRI) vise à faire progresser les chaînes de valeur mondiales et la connectivité de la chaîne logistique. On y lisait également que la BRI s'assurerait de la protection de l'environnement, de la biodiversité et des ressources naturelles, et s'occuperait des effets négatifs des changements climatiques.  
 
Revenons à aujourd'hui. Cela fait six ans que la BRI a été lancée et les critiques et préoccupations au sujet du programme phare du président chinois Xi Jinping sont de plus en plus nombreuses. Elles ont notamment trait aux questions liées à la dette et à la souveraineté nationales, à l'accaparement des terres, aux déplacements de populations, aux violations de droits humains dans les zones de conflit, aux impacts environnementaux, aux problèmes de santé publique et aux violations du droit du travail. Certains pays, comme la Malaisie et les Maldives, réévaluent actuellement leur participation à la BRI et aux investissements chinois.
 
Répondant aux critiques sur les impacts environnementaux de la BRI, le communiqué commun issu de ce deuxième sommet exposait une vision de haute qualité et durable pour la Ceinture et la Route, soulignant et faisant la promotion d'un développement vert et d'un financement vert. La Chine est en train d'élaborer des Principes d'Investissements Verts pour le Développement de la Ceinture et la Route afin d'essayer de "verdir" la BRI. Mais il n'est fait mention nulle part de l'accaparement des terres et de la perte des droits des communautés rurales et indigènes sur leurs territoires et de leurs moyens de subsistance dans le cadre d'une BRI "verte" et du développement continu des infrastructures et des corridors économiques, qui est hautement loué dans le communiqué.
 
À y regarder de plus près, le modèle d'une croissance économique axée sur les infrastructures tel que promu par la BRI est fondé sur l’accaparement de vastes superficies de terres et de territoires à convertir en couloirs économiques. Concernant l'agriculture, la BRI est censée stimuler les investissements chinois à l'étranger en agrobusiness ainsi que les dépenses d'infrastructure de base afin de faciliter l'augmentation du commerce agricole. Selon des officiels du Bureau de Coopération     Étrangère du Ministère chinois de l'Agriculture et des Affaires rurales, le pays compte à présent 657 projets agricoles dans différents pays de la BRI, pour une valeur d'environ 9,4 milliards de dollars, représentant une progression de 70 pour-cent par rapport à il y a seulement cinq ans. Cela implique forcément la perte de milliers d'hectares de terres agricoles qui seront nécessaires à la réalisation de ces projets, de moyens de subsistance traditionnels et de biodiversité, ainsi que de nombreux paysans déplacés. Au Pakistan, la BRI facilite l'expansion de blé hybride, qui remplace les variétés traditionnelles de blé des paysans, au profit d'entreprises chinoises d'intrants agricoles telles que Sinochem Group.
 
La majorité des projets agricoles développés dans le cadre de la BRI sont industriels. Le système agro-alimentaire actuel est d'ores et déjà responsable de près de la moitié des émissions globales de gaz à effets de serre. Des villageois du Myanmar rapportent que des milliers de camions entrent et sortent de l'Etat du Kachin avec des cargaisons de bananes. Cette région est ciblée comme zone d'expansion pour les plantations de bananes destinées à l'export vers la Chine, menant à l'expulsion des propriétaires indigènes qui dépendent de la terre pour se nourrir et pour vivre. L'approvisionnement en eau est également touché, vu que l'eau est polluée ou détournée des communautés pour irriguer les plantations chinoises. Certains rapports font également état d’un déclin de la qualité du sol dans les plantations chinoises, dû à des pratiques agricoles utilisant lourdement les intrants. En conséquence, les protestations contre les investissements chinois se sont multipliées au cours de l'année écoulée au Myanmar. Aux Philippines, les méga-projets financés par la Chine, tels que le projet de barrage New Centennial Water Source de Kaliwa auraient causé des accaparements de terres et des déplacements de communautés indigènes. 
 
En outre, tandis qu'elle s'engage à diminuer l'usage du charbon sur son territoire, la Chine est en train d'ouvrir neuf nouvelles mines et de construire plusieurs grandes centrales à charbon à l'étranger, via la BRI. Rien qu'au Pakistan, les investissements chinois dans le charbon ont dépassé les 10 milliards de dollars. Pendant ce temps, l'Indonésie travaille à une nouvelle proposition pour quatre projets de centrales à charbon qui seront financés par la Chine. Les projets énergétiques de la BRI se concentrent de manière disproportionnée sur les énergies fossiles.
 
En tant qu'organisations de la société civile, nationales et internationales, qui surveillons activement l'implémentation du projet BRI sur le terrain, nous nous inquiétons du manque de consultation des communautés locales au sujet de ces projets. Cela conduit à une perte de terres, et montrent une incapacité des projets d'infrastructure et de connectivité de la chaîne d'approvisionnement à en faire bénéficier populations locales. À la place, nous sommes témoins d'effets négatifs sur les droits des communautés locales et sur leurs conditions de vie.
 
Nous appelons le gouvernement chinois à rendre l'Initiative la Ceinture et la Route plus transparente, car il n'existe aujourd'hui aucune information officielle fiable sur le montant exact des projets bilatéraux, les conditions de prêt, les normes et critères d'octroi, le financement et leurs effets généraux. Nous appelons les pays partenaires à rendre publiques toutes les informations ayant trait aux projets BRI relevant de leur juridiction. Tant la Chine que les pays partenaires devraient ouvrir les processus de consultation et demander l'avis des autres parties prenantes, afin que l'argent public ne soit pas gaspillé pour des projets indignes et destructeurs. Et aux gouvernements des pays de la BRI de conduire une étude d'impact adéquate et approfondie des projets de la BRI sur les droits humains.
 
Nous appelons également le gouvernement chinois et la communauté internationale impliquée dans le verdissement de l'Initiative de la Ceinture et la Route à prendre la mesure radicale qui consiste à écouter les personnes touchées par ces projets. S'ils le faisaient, ils soutiendraient les petits paysans et les communautés rurales comme urbaines avec des systèmes alimentaire, énergétique et de transport décentralisés, afin de parvenir à de véritables solutions climatiques et non à un écran de fumée verte devant l'Initiative la Ceinture et la Route.
 
Pour plus d'informations contactez :
Kartini Samon, GRAIN
Téléphone: +6281314761305
 
Publié par :
Asia Pacific Research Network (APRN)
Asia Peasant Coalition (APC)
GRAIN
Madhyam
People’s Coalition on Food Sovereignty (PCFS)
 
Source : GRAIN
Partager cet article
Repost0
10 juillet 2019 3 10 /07 /juillet /2019 11:32

par Matías Caciabue y Paula Giménez

3 juillet 2019

Augmentation de l'ingérence militaire étasunienne en Argentine

L'hécatombe économique du gouvernement néo-libéral de Mauricio Macri noie l'Argentine dans la mer des intérêts militaires et géopolitique de Donald Trump.

Sous le patronage des États-Unis, la Conférence des Armées Américaines a réalisé des exercice militaires à la Triple Frontière de l'Argentine, du Brésil et du Paraguay, et le responsable du Commandement Sud, Craig Faller, a visité Buenos Aires pour finaliser plusieurs accords et aligner l'Argentine contre la Russie, la Chine et le Venezuela

Augmentation de l'ingérence militaire étasunienne en Argentine

Chronique d'une Argentine occupée en « défense de l'environnement »

La protection de la biodiversité est devenue l'excuse pour la réalisation de pratiques d'occupation à la triple frontière entre Brésil, Argentine et Paraguay, cœur de la réserve aquifère Guarani.

La province Argentine de Misiones a été l'épicentre d'un « Exercice International d'Opération Inter-agences en Protection de l'Environnement et des Ressources Naturelles », organisé par la Conférence des Armées Américaines (organisation inter-américaine surgie après la révolution cubaine sous égide du Pentagone), l'Armée Argentine et le Sous-Secrétariat de Protection Civile de cette province.

Ceci est possible grâce aux nouvelles réglementations que le gouvernement de Mauricio Macri a imposé pour permettre l'articulation des institutions de protection citoyenne (pompiers, défense civile, entre autres), des forces de sécurité intérieures (police), des forces armées argentines, et leur actuel alignement néo-conservateur avec les forces étrangères.

Le nouveau cadre juridique, comme celui amené par la loi 27287 promulguée en 2016 sur le Système de Gestion des Risques, rompt la trame juridique dont se dota le pays au retour de la démocratie en 1983.

Les exercices se réalisèrent dans la localité de Puerta Libertad, aux environs du barrage Urugua-i, en présence de représentants des armées de 15 pays, parmi lesquels se détachaient celles du Canada, des USA et de l'Espagne.

Lors d'une entrevue avec le quotidien « El Independiante » de Misiones, le sous-secrétaire de Protection Civile de la Province, Enrique Parra, mis en évidence la centralité militaire dans ces prétendus exercices civiles : « Nous avons travaillé en d'autres opportunités avec les forces fédérales. Ce qui se passe, c'est que l'armée vient avec toute sa structure et nous allons nous incorporer à sa structure de travail ».

Le portail Infobae, spécialisé dans l'information de l'agenda néo-conservateur du pays, évalue la participation aux opérations à 450 civils et militaires. Pour sa part, la presse de Misiones détailla la réalisation de quatre grands exercices militaires qui, derrière la narration de la protection du milieu ambiant, paraissent être dirigés vers une préparation de l'action civile et militaire face à une éventuelle attaque militaire ou « terroriste ».

Le premier exercice simule une fissure du barrage de Urugua-i. La seconde simulation, la chute d'un avion en pleine selva de Mission. Le troisième traitait du naufrage d'une embarcation dans le lac Urugua-i et le dernier fut la simulation d'un accident de camion contenant des produits chimiques à risque.


 

« Terrorisme » international dans le pays ?

Depuis que Macri a assumé la présidence, en plus d'une opportunité, dans la presse hégémonique, il a été question de cellules dormantes de Hezbollah dans la zone de la Triple frontière - précisément la zone où se sont déroulés les exercices militaires - un fait qui n'a jamais pu être vérifié.

Au contraire de ce que publiait le matraquage médiatique, le Hezbollah est une organisation politico-militaire qui surgit au Liban en 1982 en réponse à l'invasion israélienne sur son territoire. Son statut d'organisation « terroriste » pour les USA apparut quand en 1983, en pleine guerre contre l'occupation israélienne et occidentale, par le biais d'attaques suicides, ils tuèrent 258 étasuniens dans un casernement de Marine des USA à Beyrouth.

Ce qui est étrange, c'est que après la guerre, le Hezbollah s'est transformé en un parti légalement constitué qui compte actuellement un nombres d’élus des plus importants au Parlement Libanais. Ce qui l’a conduit a faire partie, sans problèmes, du gouvernement de coalition du président chrétien, Michel Aoun.

En Argentine cette organisation fut accusée, de manière réitérée mais sans aucune preuve, des attentats contre l'Ambassade d'Israël et à la AMIA (1992 et 1994), et même d'être responsable de l'assassinat du procureur Alberto Nisman (alors que tout indiquait qu'il s'agissait d'un suicide)


 

Le  chef militaire rendit visite au ministre de la Défense argentin, le radical Oscar Aguad, et à la secrétaire de Stratégie et affaires militaires, Paola Di Chiaro

Le chef militaire rendit visite au ministre de la Défense argentin, le radical Oscar Aguad, et à la secrétaire de Stratégie et affaires militaires, Paola Di Chiaro

Le Commandement Sud étasunien visite l'Argentine

Par hasard ou par lien de cause à effet, les exercices militaires de Mission coïncident avec la visite de l'Amiral Craif Faller, Chef du Commandement Sud des Forces Armées des USA en Argentine, avant qu'il ne se dirige vers le Chili. L'objectif de cette tournée est de présenter la Chine, la Russie et le Venezuela comme des dangers pour les « démocraties » de l'hémisphère.

« Je crois qu'une alliance forte entre nos deux pays laissera hors de la compétition d'autres pays, y compris la Russie et la Chine », affirma le chef du Commandement Conjoint des forces armées nord-américaines qui assistent, contrôlent et interviennent en Amérique Latine.

Le Venezuela, comme scénario géopolitique central de la région, n'échappa pas à l'analyse du commandant étasunien, qui signala que la tâche du moment « est d'étudier les rapports des services de renseignement, apprendre et parvenir à une perception claire de la situation et de la complexité du désastre pour pouvoir ainsi planifier le lendemain. »

Le chef militaire rendit visite au ministre de la Défense argentin, le radical Oscar Aguad, et à la secrétaire de Stratégie et affaires militaires, Paola Di Chiaro (liée à l'influent Fulvio Pompeo), il était accompagné de Liliana Ayalde, une spécialiste en affaires latino-américaines du Département d’État qui officiait en tant qu'ambassadrice nord-américaine au Paraguay, lors du coup d'état contre Fernando Lugo, et au Brésil pendant l'impeachment (jugement politique) contre Dilma Roussef.

La présence de Craig Miller vient simultanément avec l’offre d'avions et de véhicules blindés aux Forces Armées Argentines. En d'autres termes, l'industrie militaire étasunienne fournit les armes et le Commandement Sud les entraînements.


 

Mot de la fin

En temps de période électorale, il semble que la stratégie officielle est de focaliser le débat sur le Venezuela et sur le Hezbollah et de cesser de parler de la faim, de la pauvreté, du chômage de millions d'argentins et d'argentines.

L'Argentine traverse une féroce récession provoquée par un projet économique qui ne vise que les bénéfices des oligopoles locaux (énergétiques, miniers), les entreprises TIC, les chaînes agroalimentaires, et « les marchés », autrement dit, la vingtaine d'acteurs financiers qui se remplissent les poches avec la « bicyclette financière » de bons et obligations, les LEBAC's et LELIQ's.

Ce projet économique ne se soutient que grâce à l'intervention directe du Fond Monétaire International (FMI) et au strict alignement du pays sur la stratégie néo-conservatrice de Donald Trump, avec qui Macri espère se réunir de manière bilatérale dans le cadre de l'Assemblée du G20 au Japon.

Pichetto, le sénateur péroniste, qui accompagne à présent Mauricio Macri dans la formule présidentielle pour les élections d'octobre, se prononça clairement : « Nos liens ne se tissent déjà plus avec des pays complexes du Moyen Orient, la Russie ou la Chine - avec qui je suppose qu'il garder des relations - nous devons nous situer résolument dans un profil occidental et revenir à notre relation historique avec les États-Unis. »

La poursuite de ce modèle économique, régit par la valorisation financière (dans laquelle gagne seulement ceux qui ont les moyens de faire « travailler »de grandes quantité de l'argent de la spéculation) exige ce pervers alignement géopolitique. Et c'est cet alignement qui rend obligatoire l'installation de bases étrangères (de la DEA, du Commandement Sud) sur notre territoire et l’accomplissement de ces ignominieux exercices militaires d'occupation.

Les forces populaires de Missiones ont depuis remis en question les mécanismes qui permettent l’entrée de forces armées étrangères dans le pays et elles ont dénoncé le fait que le Congrès de la Nation n'a pas été informé du déroulement de ce genre d’exercices militaires.

« Depuis un certain temps cette tendance [politique] est venue en utilisant des arguments comme les désastres naturels, la prévention du narcotrafic et le terrorisme afin de permettre une plus grande ingérence politique et militaire de la part des USA », affirma Jorge Almada, militant du Front de la Patrie de Misiones, à la presse de la province, où il annoncera aussi la formation de « Trinchera Soberana », une multi-sectorielle qui a convoqué diverses mobilisations populaires contre la militarisation du territoire.


 

Chercheurs argentins de CLAE-FILA (Centre Latino-Américain d’études Stratégiques)

 

Source originale en espagnol Resumen Latinoamericano

Traduction Anne Wolff


 

Augmentation de l'ingérence militaire étasunienne en Argentine

Note de la traductrice :

Cet accroissement de la présence militaire US en Argentine trouve sa place dans ce qui est (re)devenu une occupation régionale du territoire par les USA qui vise d’une part les ennemis : Venezuela, Chine, Russie, mais également une prise de contrôle des ressources naturelles, ici la ressource aquifère du lac Guarani, 4ème réserve d’eau mondiale, alors que la surconsommation mais surtout les irréversibles pollutions qui résultent de la fracturation hydraulique (fracking) dans l’extraction des hydrocarbures, polluent de manière irréversible une grande partie des ressources aquifères des USA, provoquant pour la population des pénuries d’eau. Un phénomène qui ira en s’aggravant. Des forces militaires US surveillent aussi le lac Guarani depuis le Paraguay. On remarquera également le rôle joué (conseils, entraînement, fourniture d’armes et autre matériel militaire) par les Forces Armées US dans la militarisation de la répression des protestations sociales et populaires dans la région, en Colombie, au Honduras, ... Un pays où de nombreuses voix s’élèvent comme un avertissement : « Nous sommes le laboratoire de la reprise en main de la région par les USA ». Ici, Les marines débarquent en Argentine : zoom sur l'invasion militaire nous voyons que des soldats US et d’autres, Israéliens, sont venus à l’automne dernier entraîner tant les effectifs militaires que les Forces de Police d’Argentine afin de lutter contre l’ « ennemi intérieur ».

Voir Alerte l'invasion militaire silencieuse US en Amérique Latine se précise et s'accélère pour une approche régionale de cette invasion et Galapagos: De patrimoine de l’humanité à porte-avions des USA? (juillet 2019) pour la similitude des méthodes utilisées par les gouvernements de droite d’Équateur et d’Argentine, une occupation militaire autorisée par l’exécutif – sans consultation ni notifications faites aux organes législatifs - et prétextes avancés : protection de l’environnement, lutte contre la drogue mais aussi contention de l’avancée des influences chinoises et russes dans la région,. Et bien sûr le « cas Venezuela », pays pour lequel est plus probable une intervention militaire proxy que celle directe des forces étasuniennes, du moins dans un premier temps.

Et nous ne devons jamais perdre de vue le rôle crucial jouée par cette militarisation dans la répression de l’ « ennemi intérieur » : les populations organisées qui protestent contre la misère grandissante, les paysans et populations natives qui refusent les expulsions et les transformations mortifères du milieu ambiant, de leur territoire, de notre planète.

N’oublions pas la déclaration faite par John Kerry, en 2013, alors qu’il était Secrétaire d’État d’Obama :“L’hémisphère occidental [terme à connotation colonialiste utilisé aux USA pour désigner l’Amérique Latine. NdT] est notre cour-arrière, il est d’une importance vitale pour nous. Avec une grande fréquence, beaucoup de pays de la région sentent que les USA ne leur portent pas assez d’attention et dans certaines occasions, c’est très certainement la vérité. Nous devons nous rapprocher vigoureusement, nous avons planifié de le faire. »

 

Honduras, militarisation du Bas Aguan, terre de luttes populaires, natives et paysannes

Honduras, militarisation du Bas Aguan, terre de luttes populaires, natives et paysannes

A cette même époque, Giorgio Trucchi met en évidence la militarisation de l’Amérique Centrale imposée par Washington au nom de la lutte contre « les drogues » :

De la remilitarisation de l'Amérique Centrale 1

De la remilitarisation de l'Amérique Centrale 2

De la remilitarisation de l'Amérique Centrale 3

De la remilitarisation de l'Amérique Centrale 4

Partager cet article
Repost0
8 juillet 2019 1 08 /07 /juillet /2019 10:34
Illustrations Alai

Illustrations Alai

Les USA ont toujours voulu s’approprier des Îles Galapagos (qui appartiennent à l’Équateur) invoquant la politique de Bon Voisin et la Doctrine de Monroe. Pendant la seconde guerre mondiale, ils ont occupés manu militari l’Archipel pendant 7 ans. À présent, le gouvernement de Lénine Moreno a conclu un accord avec les USA - dont le contenu est gardé secret - qui permettrait aux militaires étrangers d’utiliser l’aéroport de l’Île San Cristobal.

C’est au mois de juin que les équatoriens ont appris l’intention du gouvernement de Lenin Moreno de permettre aux forces militaires étasuniennes d’utiliser les Îles Galapagos, le ministre de la Défense du Pays Andin, Oswaldo Jarrin, avait alors déclaré que « les Galapagos sont un porte-avion  naturel ». L’indignation des citoyens équatoriens et la préoccupation mondiale ont été immédiates.

Lors d’une conférence de Presse avec les médias étrangers, le ministre a confirmé que dans les Îles Galapagos des avions étasuniens Orion P3 et Awaks, mèneront des opérations dans le cadre de la lutte contre le narcotrafic et de la pêche illégale, en assurant que depuis ces îles, ils peuvent assurer « permanence, réapprovisionnement et facilité d’interception ». Il ajoute qu’en raison de ces opérations l’aéroport de l’Île de San Cristobal sera agrandi et que les USA vont se charger d’améliorer les conditions, spécialement de ré-approvisionnement. Dans le but de calmer les voix qui questionnent cette manière de livrer le pays, il conclut en indiquant que « chaque opération sera escortée par des officiers équatoriens. »

 Tant Jarrín que Norman Wray, président du Conseil de Gouvernement du Régime Spécial des Galapagos, ont affirmé qu’il n’y aura pas d’installation d’une base militaire étrangère et que donc la Constitution ne sera pas enfreinte. Pour éviter justement que se renouvelle une situation comme l’usage de la Base de Manta par des Forces étasuniennes, la Constitution approuvée par le peuple équatorien en 2008, dit dans son article 5 :  « L’Équateur est un territoire de paix. L’établissement de bases militaires étrangères ou d’installations étrangères à fins militaires ne sera pas autorisé. Il est interdit de céder des bases militaires nationales à des forces armées ou de sécurité étrangères ».

L’article de la constitution est très clair, il signale que ne seront autorisés ni l’établissement de bases étrangères, ni celle « d’installations étrangères à des fins militaires ». Cela recouvre le projet prévu aux Galapagos : s’il ne s’agit pas d’une base au sens classique, il s’agit, sans nul doute, d’installations étrangères (avions, équipement de réapprovisionnement, personnel militaire, etc. ) dans un aéroport équatorien. En plus dans ce cas, serait cédée une base à des forces armées ou de sécurité étrangères comme le stipule l’article 5 de la Constitution.

A son tour, le président Lenin Moreno a manifesté via un tweet, que « la surveillance aérienne est une activité conjointe entre plusieurs pays pour prendre soin de ce patrimoine mondial ». Ce qui revient à dire que pour prendre soin de ce patrimoine le concours des USA est requis, mais aussi la coopération élargie avec les gouvernements de Pérou, Chili et Colombie, « pour adopter une posture régionale face à ce genre de menaces », comme le signale Norman Wray. En termes géopolitiques, ceci signifie que l’Équateur se soumet à la géostratégie militaire des USA qui vise le contrôle de l’Amérique du Sud et de tout le Pacifique Sud-Américain en fonction de leurs intérêts et objectifs impériaux, centrés actuellement vers une intervention au Venezuela, le combat du narcotrafic, les migrations – en particulier en Amérique Centrale, et la contention de la Russie et de la Chine.

Mais les Galapagos ne seront pas le seul « porte-avions » d’une force aérienne étrangère dans le pays, il y en aurait deux autres : celui de Guayaquil et à nouveau celui de Manta. Selon le journal « El Comercio » du 19 juin, « une fois que les aéronefs seront opératifs depuis les Galapagos, l’idée du gouvernement est de créer le dit « Triangle de Sécurité », que les Îles forment avec avec Manta et Guayaquil. Cela se met en place, en ce moment l’Orion P3 et l’Awac volent déjà depuis le Port Principal et ils peuvent également le faire depuis la capitale de la province de Manabi  [Portoviejo]».(1)

En effet, dès septembre 2018, les avions d’intelligence étasunienne ont opéré depuis Guayaquil, pour des « voyages de reconnaissance », des prises de photographies et des détections » , selon le ministre Jarrín.

Jarrín, qui chapeaute le réalignement et la soumission de l’Équateur aux USA, a une longue carrière militaire et est connu pour sa position ouvertement pro-étasunienne.

Il a débuté sa carrière militaire en 1966 et a occupé de hautes charges à l’intérieur des Forces Armées. Le 15 janvier 2003, il avait été nommé Chef du Commando Conjoint des Forces Armées par le président Lucio Gutiérrez alors en fonction, une charge qu’il abandonna le 18 juin de la même année en raison de rumeurs de déstabilisation du Gouvernement National.(2)

Le journaliste Kintto Lucas, dans son livre « Ecuador cara y cruz, tome 2 » informe de l’étroite relation qui existait entre le général Jarrín et le chef du Commandement Sud des USA, James Hill, et comprenait des randonnées dans la selva équatorienne et des réunions à Miami, au cours desquelles étaient abordée la question de la « sécurité à la frontière colombo-équatorienne », Hill argumentait alors que « la position de son gouvernement était de régionaliser les Opérations du Plan Colombie ».

Après le renversement de Gutiérrez, le président Alfredo Palacio, le désigna comme ministre de la Défense le 19 août 2005, fonction qu’il occupa jusqu’au 29 août de 2006. En une occasion, au sujet des luttes des mouvements sociaux qui réclamaient l’attention de l’État, Jarrín parla de former « une force de paix pour l’Équateur » et signala que « l’État va avoir besoin d’un pouvoir extérieur afin de contrôler la paix et l’ordre, de reconstruire la nation et (que) probablement à l’avenir nous aurons un Haïti en Équateur ».(3)

Puerto Baquerizo, île San Cristóbal.  Foto: ETG

Puerto Baquerizo, île San Cristóbal. Foto: ETG


 

 Toujours les mêmes arguments

La présence militaire étasunienne annoncée dans l’Archipel des Galapagos est le résultat des accords de coopération conclus entre l’actuel gouvernement d’Équateur et les USA, en particulier dans le domaine militaire. Les USA prétendent se réinstaller dans le pays andin, après une décennie de prise de distance, avec le même argument utilisé pour installer la base de Manta : le prétexte de la lutte contre le narcotrafic.

Il faut se rappeler que le 2 août de 2018, le Ministre de la Défense informa que les USA disposait d’une Officine de Coopération de Sécurité (OCS) en fonction, résultat d’un accord entre USA et Équateur, selon le Ministre Jarrín : « par disposition présidentielle et autorisation des Ministères des Affaires Étrangères et de la Défense. »

D’après le département de la Défense des USA, les OCS, font partie de l’Agence d’Assistance de Sécurité de la Défense, et leur rôle est de réaliser des actions qui « promeuvent les intérêts de sécurité spécifiques des USA, incluant toutes les activités internationales de coopération en matière d’armement et d’activités d’assistance de sécurité ».

 Utilisant la « coopération » en guise de justification, les forces militaires étasuniennes sont de retour en Équateur dix ans après en avoir été expulsées, quand le gouvernement de Rafael Correa décida de ne pas renouveler la Convention avec les USA pour l’usage de la Base de Manta (signé en 1999 et en vigueur jusqu’à 2009), après la mobilisation et à la demande de plusieurs organisation sociales.

Par la médiation de cette Convention, les USA avaient installé un Poste d’Opérations Avancées (FOL sigle en anglais : Forward Operating Location), qui alla beaucoup plus loin que ce qui était convenu. Les actions arbitraires des militaires étasuniens durant leur présence à Manta, sont toujours présentes dans les mémoires : bateaux équatoriens coulés par des frégates étasuniennes ; contrôle de la migration ; affectation de l’activité des pêcheurs  ; contrat signé avec la compagnie DynCorp, qui avait immédiatement été dénoncée pour activités illégales en relation avec le système d’embauche de mercenaires d’autres pays ; entre autres.

 Ce qui est essentiel, c’est que la base de Manta, selon les paroles du commandant de la FOL, Javier Delucca, était considérée comme stratégique pour le Plan Colombie, puisque de là ils surveillaient le conflit colombien. Il a également affirmé que le rôle de la Base de Manta avait été déterminant pour le bombardement de Angostura, (province équatorienne de Sucumbíos) par des militaires colombiens en coopération avec les USA en 2008. Bombardement dans lequel mourut le dirigeant des Farc, Raúl Reyes, en même temps que 25 guérilleros et des civils qui se trouvaient dans le campement guérillero.

A présent l’histoire se répète. Dans le cas de la Base de Manta, le Ministère des Affaires Étrangères et le Ministre de la Défense étaient initialement parvenus à un accord avec l’Ambassade des USA. Toute la négociation et l’accord étaient restés secrets, jusqu’à ce que la pression populaire exige que le Congrès National se prononce à ce sujet.

Aujourd’hui il se produit la même chose en ce qui concerne les Galapagos. En plus, malgré les déclarations des plus hautes autorités du gouvernement d’Équateur qui ont annoncé que les USA procéderaient en coopération (avec l’Équateur) dans les Îles Galapagos, le Département de la Défense US dément disant qu’il n’y a pas eu d’accord signé avec le gouvernement d’Équateur pour l’utilisation de l’aéroport des Galapagos et qu’il n’y a pas de négociations formelles en ce sens (4). Qui devons-nous croire ? Tout cela met en évidence la nécessité de ce que soit révélé exactement ce que le gouvernement équatorien a accordé aux USA dans le dos des citoyens et de l’Assemblée Nationale.

Tout près de l'aéroport de San Cristobal se trouve le lieu connu comme La Loberia.  Foto: ETG

Tout près de l'aéroport de San Cristobal se trouve le lieu connu comme La Loberia. Foto: ETG

 Le fragile milieu ambiant mis en danger

Il faut se rappeler que l’Archipel des Galapagos, situé à 1000 kilomètres de la côte équatorienne, a été déclaré Patrimoine Naturel de l’Humanité en 1978 par l’UNESCO, parce qu’il remplissait 4 critères qui semblent n’avoir aucune importance pour ceux qui dirigent les politiques de défense : - receler des phénomènes naturels extraordinaires ou des aires de beauté naturelle ; - être un exemple remarquable de l’histoire de la Terre ; - avoir certaines caractéristique et processus géo-morphologiques et géologiques ; - être un exemple de processus écologiques et biologiques du cours de l’évolution des écosystèmes et de la diversité biologique et d’espèces menacées. Rappelons-nous que le chercheur anglais Charles Darwin a fondé sa théorie de l’évolution des espèces sur les observations qu’il avait réalisées aux Galapagos.

Il a été reconnu que, en raison de son isolement et après des millions d’années d’évolution, l’Archipel des Galapagos possède un écosystème unique au monde, lequel se verrait sérieusement menacé s’il se convertissait en « porte-avions » pour les militaires étasuniens, comme l’affirme le gouvernement équatorien.


 

L’ex-ministre du Milieu Ambiant et actuelle membre de l’Assemblée de la Révolution Citoyenne, Marcela Aguiñaga (dans le programme de Telesur EnClave Politica du 20-06-2019) alerte au sujet des risques d’affectation du milieu ambiant à San Cristobal, autant à cause de l’agrandissement de l’aéroport qu’à cause des opérations nocturnes prévues. Elle signale que chaque opération de cette nature requière une étude d’impact ambiantal, concernant le bruit, les ordures et déchets qui auraient un impact sur la population et les espèces qui habitent les îles, d’autant plus que l’aéroport est situé à proximité d’un centre de population et d’un lieu où vivent les loups marins, connu comme La Loberia.

Si San Cristobal est utilisé comme centre de ravitaillement d’avion, Aguiñaga se demande comment va être transféré le combustible à 1000 kilomètres de distance, en quelle quantité et quels sont les plans de contingence. Question qui se pose avec d’autant plus d’acuïté si on considère qu’il avait été décidé de réduire l’usage des combustibles fossiles dans les Îles. L’idée de zéro combustibles fossiles pour les Galapagos est née justement après une catastrophe écologique causée par le naufrage du Jessica en face du Port Baquerizo Moreno en 2001, lors duquel s’échappèrent quelques 240 000 galons de combustibles, générant un grave problème ambiantal qui affecta plusieurs espèces.(5)

La membre de l’Assemblée conclut que cette décision du gouvernement met en risque la réserve de la biosphère, la réserve marine d’une grande importance mondiale, et le droit des populations à vivre dans un milieu ambiant sain. Pour cela Aguiñaga annonce que l’Assemblée a demandé que comparaissent les Ministres de la Défense et du Milieu Ambiant afin d’informer du contenu des accords et des impacts et plans de contingence prévus.

Combat contre le narcotrafic

 Un des arguments invoqué pour l’installation du porte-avions étasunien au Galapagos est qu’il servira pour combattre la menace des maffias du narcotrafic et du crime organisé, qui utilisent les routes de l’Océan Pacifique pour transporter la drogue dans des bateaux rapides et sophistiquées ainsi que dans des avionnettes. Le général retraité Carlos Moncayo argumente qu’il « est nécessaire d’établir une coopération avec une autre nation, comme les USA, qui disposent de la capacité opérationnelle pour affronter le crime organisé et le narcotrafic », ajoutant que l’amélioration de l’aéroport est un bénéfice pour les opérations militaires propres à l’Équateur et non pas étasuniennes. (6)

A ce sujet on peut exprimer les considérations suivantes  :

Premièrement. Il faut commencer par préciser l’approche qui doit guider la lutte anti-drogues, indubitablement un fléau qui cause chaque année des milliers de morts et de graves problèmes pour les personnes qui les consomment. Les USA ont une vision répressive, focalisée sur la question de l’offre et transfèrent la lutte en dehors de leurs frontières, avec toutes les conséquence que cela entraîne. Une autre approche considère que le problème des drogues est, avant tout, un problème de santé publique et d’éducation. En 2016 les USA comptaient 27 millions d’addicts, quelques-uns d’entre eux disposant d’un haut pouvoir d’achat, prêts à payer n’importe quel prix pour acquérir la drogue. Tant que ne se réduira pas la demande, il sera difficile de faire diminuer l’offre. L’Assemblée Générale des Nations Unies qui a abordé le thème de la drogue en 2016 et formulé des recommandations pour réduire l’offre et la demande, signale qu’il est nécessaire de prendre des mesures autant dans les pays qui produisent la drogue que dans les pays consommateurs. (7)

 Deuxièmement.. La lutte contre la drogue a été utilisée par les USA comme prétexte pour renforcer leur position de contrôle et de domination géostratégique du continent. Après la chute du mur de Berlin (1989) et l’implosion de l’Union des Républiques Soviétiques Socialistes (1991), sous la tutelle de la puissance du Nord, se redéfinirent les agendas des Forces Armées de la région. La « lutte contre le péril communiste » qui en grande partie fut la raison d’être des Forces Armées Latino-Américaines fut remplacée. Premièrement par la « lutte contre la drogue » et ensuite, après l’attentat des Tours Jumelles (11septembre 2001), par la « lutte contre le terrorisme ». Le combat contre les drogues interdites se convertit en problème de sécurité nationale et impliqua de manière croissante les Forces Armées. Le résultat de ces interventions dans plusieurs pays, comme le Mexique ou la Colombie, sont désastreux, comme en témoigne les chiffres des assassinat, déplacés, disparus, torturés.

Troisièmement Dans la complexe lutte contre la drogue, quelques analystes affirment qu’il faut mettre en œuvre une stratégie intégrale, qui consiste entre autres points, à s’attaquer au contrôle des précurseurs utilisés pour raffiner le cocaïne et autres drogues illicites, dont beaucoup sont fabriqués par les pays développés ; au contrôle du blanchiment de l’argent produit par le trafic et la vente de drogues interdites qui dans sa majorité aboutit dans des paradis fiscaux et les banques des pays riches ; affronter le problème comme un thème de santé publique et d’éducation ; ne pas écarter la possibilité de la légalisation de certaines drogues interdites pour que l’état et la société disposent d’une meilleure faculté de contrôle et d’intervention dans ce domaine ; prendre en main la substitution des cultures de coca avec l’aide de l’état , combattant la pauvreté, offrant des services et la participation aux paysans.

Foto: ETG

Foto: ETG

 A quoi servent les bases ?

Le rôle des bases militaires des USA tant en Amérique Latine que dans le reste du monde dans le cadre de « la guerre contre les drogues » doit être débattu parce qu’il suscite biens des doutes. En Colombie, par exemple, les 7 bases militaires que les USA ont installées dans le pays et les centaines de millions de dollars investis depuis les débuts du Plan Colombie en 2000 n’ont assurément pas servis à diminuer ni la production, ni le trafic de la cocaïne et des autres drogues interdites. L’ONU nous a appris dans le Rapport Mondial sur les Drogues que la production mondiale de cocaïne en 2017 a atteint 1.976 tonnes, soit une augmentations de 25 % par rapport à 2016. Dans ce contexte, la Colombie, avec plus de 200.000 hectares semés de cocas, produit 70 % de la production mondiale de cocaïne d’une grande pureté.(8) On pourrait dire la même chose d’Afghanistan où la production et le trafic de l’héroïne ont augmenté depuis que les USA et les pays de l’OTAN l’ont envahi en 2001, après l’écroulement des Tours Jumelles à New York.(9)

Les bases peuvent s’appeler FOL ou porte-avions, ce qu’il faut analyser, c’est le rôle qu’elles jouent et leurs objectifs. La chercheuse mexicaine Ana Esther Ceceña, affirme que les USA ont deux objectifs généraux : garantir le maintien du capitalisme et la prééminence des USA ; se garantir la disponibilité de toutes les richesses du monde comme base matérielle du fonctionnement du système, assurant le maintient de leurs hiérarchies et dynamiques de pouvoir... » (10)


 

 Après le remplacement ou l’affaiblissement des gouvernements progressistes et parallèlement au démantèlement des organismes régionaux comme l’Union Sud-Américaine des Nations (UNASUR), le gouvernement de Donald Trump a repris l’initiative et a établi des accords militaires avec les gouvernements de droite du Brésil, d’Argentine, d’Équateur et du Guatemala qui lui ont permis de déployer une nouvelle présence militaire, qui se joint aux contingents qui sont déjà présents au Honduras, à Panama, Cuba (Guantanamo), Curaçao, au Pérou, au Paraguay et en Colombie.

Parmi les « dangers » et « menace» pour son pays, le Commandement Sud mentionne Cuba, le Venezuela, la Colombie, le narcotrafic, les réseaux illicites régionaux et transnationaux, une plus grande présence de la Chine, de la Russie et de l’Iran en Amérique Latine et Caraïbe et parle d’aide à déployer face à des désastres. D’après le journaliste cubain, Raúl Capote Fernández, « l’objectif de l’empire est d’augmenter la présence militaire dans la région afin d’assurer ses intérêts hégémoniques dans l’hémisphère, de consolider un front contre le Venezuela et de perpétuer sa domination sur les immenses ressources de l’Amérique Latine et Caraïbe ».(11)


 

 

L'archipel des Galapagos, un patrimoine naturel de l'humanité

L'archipel des Galapagos, un patrimoine naturel de l'humanité

 Les USA ont toujours eu un œil sur les Galapagos

La prétention des USA de s’emparer des Îles Galapagos à des fins militaires et stratégiques n’est pas nouvelle. Depuis qu’elles ont été intégrées à l’Équateur, en 1832, tant les USA que les autres puissances coloniales, comme la France et le Royaume Uni ont tenté de s’emparer des Îles sous divers prétextes et motifs, comptant pour cela avec la collaboration de plusieurs gouvernements équatoriens.

Le président Juan José Flores proposa au Royaume Unis de les leur vendre pour apurer la dette contractée pendant la lutte pour l’indépendance ; plus tard le président conservateur Gabriel Garcia Moreno en 1861 les proposa à la France qui mettrait les Galapagos et la région amazonienne de l’Équateur sous protectorat. Heureusement ces initiatives n’aboutirent pas.

En 1883 le sénat des USA déclara les Galapagos « terre de personne » et proclama qu’il existait de sérieux doutes concernant la souveraineté équatorienne sur les Îles.(12) La résolution fut prise après que les USA aient envoyé en Amérique du Sud le Commissaire George Earl Church avec plusieurs missions, et parmi elles celle de démontrer que les Galapagos n’appartiennent pas à l’Équateur. Face à cela, le gouvernement équatorien, par l’intermédiaire du Ministre des Affaires étrangères Antonio Flores Jijón présenta une protestation officielle, mais les prétentions des USA de s’emparer de l’archipel ne cessèrent pas.

En 1910, pendant le gouvernement de Eloy Alfaro, les USA offrirent à l’Équateur 15 millions de dollars pour 99 ans de séjour dans les Îles. Alfaro soumit la proposition qui était attractive pour le développement du pays au débat national, et finalement, elle fut écartée.

Après la construction du Canal de Panama qui permit d’unir les océans Pacifique et Atlantique, œuvre initiée par la France au 19ème siècle et conclue par les USA au début du 20ème siècle, les Îles devinrent d’un grand intérêt stratégique pour la surveillance, le contrôle et la défense du nouveau canal.

Pendant la première guerre mondiale (1914-1918), les USA déployèrent un grand contingent militaire dans la mer Caraïbe pour défendre le canal de Panama mais ils devaient consolider leurs défenses dans l’Océan Pacifique, d’autant plus quand les navires allemands et japonais se mirent à rôder du côté des Galapagos. A cette fin, ils exercèrent de fortes pression sur le gouvernement de Léonidas Plaza Gutiérrez pour obtenir la vente ou la location des Îles Galapagos, parmi « leurs offres alléchantes, ils offrirent de solutionner les problèmes de l’instable Trésor National » (13).

L’équatorien Octavio Latorre, un des plus renommé des chercheurs de l’archipel, prétend que les USA « on tout préparé dès 1920 pour une occupation des Îles, sur base du fait accompli et la politique de Bon Voisin, en réalité la Loi du Plus Fort » (14). On peut ajouter que les USA ont agit sous le principe de la doctrine de Monroe synthétisé par la phrase « l’Amérique pour les (nord) Américains » énoncé dans le cadre de la lutte pour avec les anciennes puissances coloniales européennes.

Après que le dictateur équatorien Federico Páez ait géré en 1935 l’échec d’un emprunt aux USA, le président Roosevelt suggéra la possibilité de convertir les Îles Galapagos « en un parc national pour protéger sa faune et sa flore, dont la propriété reviendrait à tous les pays membres de l’Union Panaméricaine, parmi eux, les USA » (15). Le but était d’empêcher l’usage militaire de l’Archipel par « un quelconque pays ennemi ».

 Prenant comme prétexte la seconde guerre mondiale, les USA occupèrent militairement les Îles Galapagos, construisant une grande base sur l’île Baltra (aussi appelée Seymour Sud) et eurent une présence sur les îles Isabela, Española, entre autres. Ils établirent également une base sur la péninsule de Salinas, territoire continental équatorien.

Le 12 décembre 1941, 36 marines étasuniens débarquèrent aux Îles Galapagos afin d’y construire un dépôt de combustible, sans qu’il existe aucun accord formel avec l’Équateur. (16) Cela se produit 5 jours après l’attaque japonaise de la base hawaïenne des USA à Pearl Harbor qui fut l’événement qui motiva la déclaration de guerre faite par les USA au Japon.

Des mois plus tard (le 13 septembre 1941) le gouvernement équatorien présidé par Carlos Alberto Arroyo del Rio (17), par l’intermédiaire de l’ambassadeur à Washington, Colón Eloy Alfaro avait signé un document secret par lequel l’Équateur permettait que l’aviation militaire et navale des USA effectue des vols depuis leurs bases en Amérique Centrale jusqu’aux Îles Galapagos.

C’est seulement après l’occupation de fait des Galapagos par les USA que furent signés les accords entre la puissance du Nord et l’Équateur pour permettre la construction de bases étrangères à Salinas et aux Galapagos.

Le 24 janvier 1942, les représentants des Forces Armées des USA et l’Équateur souscrivirent un accord de coopération par lequel il était permis au « général commandant la Défense des Caraïbes d’occuper les terrains de la paroisse de Salinas et d’y construire des installations militaires » et il pourrait « également installer des bouées dans les eaux territoriales de la même juridiction, et utiliser les eaux pour l’amerrissage d’avions ou l’ancrage de navires » (18)


 

Le 2 février 1942 un autre accord est signé entre l’ambassadeur Colón Eloy Alfaro et le secrétaire d’État des USA Cordek Hull par lequel les gouvernements d’Équateur et des USA conviennent d’établir des « opérations à caractère de défense continentale en eaux et territoire de l’autre. » « Se servant de cette autorisation, mais sans avoir un statut précis et concret à ce sujet, ni une référence directe aux Îles, ni même une notification, les USA avaient occupé avec une base militaire l’île Seymour Sud (ou Baltra), et installé des stations de surveillance en d’autres lieux de l’Archipel » affirme l’écrivain Alfredo Luna Tobar. (19)

Le gouvernement de Arroyo del Rio céda les Galapagos aux USA « en accomplissement et conformité avec les pactes multilatéraux en vigueur, coopérant avec efficacité à la défense continentale, et donnant une preuve effective de solidarité américaine », selon ses propres paroles. Il le fit de manière gratuite « pour qu’il soit démontré que nous agissons sous l’impulsion d’un idéal et non avec le but mercantiliste de faire commerce avec le territoire national » et de manière temporaire « autrement dit, tant que dure le conflit belliqueux mondial et uniquement pour cette durée, les bases devront être restituées à la fin de cette conflagration, sans affecter notre souveraineté. » (20)

La guerre mondiale s’acheva en 1945 mais les militaires étasuniens restèrent aux Galapagos jusqu’en 1948. Le 1er juillet 1946 eu lieu un acte officiel de restitution des Îles aux autorités équatoriennes, cependant les militaires des USA y séjournèrent de fait jusqu’en décembre 1948.

Les USA non seulement n’ont pas payé le moindre dollar pour occuper les Îles Galapagos, en plus quand ils se sont retirés, ils se défirent ou détruirent « des tonnes d’objets en tous genres et qualités » invoquant une clause secrète qui disait « à restituer telle que vous l’avez reçue ». Au lieu d’offrir l’infrastructure et la machinerie à l’Équateur, un pays qui leur avait facilité l’accès aux îles sans condition, les avions étasuniens larguèrent des falaises des îles ou dans la mer une grande quantité de matériel de la base en bon état comme les équipements hospitaliers, radios, pièces de rechanges d’avions et d’automotrices, vaisselle, etc. (22) Ils firent quelque chose d’équivalent à la base de Salinas, dont ils avaient délogés plus d’une centaine d’habitants auxquels ils donnèrent des indemnisations dérisoires. (23)

Mais ce qui oui resta sur l’île ce furent les passifs ambiantaux. On n’a pas connaissance d’une étude d’impact sur le milieu ambiant que laissa le passage des militaires des USA par les Galapagos, mais il est facile de déduire que la construction de la piste aérienne de Baltra, le bruit constant et les atterrissages d’avion tuant les iguanes, la production quotidienne d’ordures et de déchets de plus de 10 000 effectifs qui y ont transité pendant cette période, ont affecté la flore et la faune des Îles.


 

 Pour finir

Les annonces des autorités équatoriennes relatives à la présence militaire étrangère dans l’Archipel des Galapagos essayent de minimiser les impacts que cela aura et de tranquilliser les citoyens, mais il y a des inquiétudes concernant la parole officielle surtout à cause des contradictions et du secrétisme qu’il y a autour de tout ce qui concerne ce sujet comme cela s’était déjà produit durant l’occupation des Îles Galapagos pendant la seconde guerre mondiale et lors de l’installation de la base de Manta en 1999. Face à cela il est légitime de poser quelques questions. Quel est le contenu et la portée des accords de coopération avec les USA ? Combien de temps durera l’occupation non seulement de l’aéroport des Galapagos mais aussi de Guayaquil et Manta ? Quel est le statut légal du personnel militaire des USA ? (24)

Il incombe à l’Assemblée Nationale de prendre connaissance et approuver cette sorte d’accords internationaux. Quelques membres de l’Assemblé ont montré leur préoccupation quant à la présence militaire des USA dans les Îles Galapagos, mais il existe de sérieux doutes concernant ce qu’il est possible de faire avec l’Alliance de la droite qui dirige actuellement l’Assemblée Nationale, présidée par le moréniste César Litardo.

La balle est à nouveau sur le terrain du champ populaire, dont la première tâche sera d’exiger que soit donnés à connaître tous les accords signés par le gouvernement de Lenin Moreno avec les USA, et en second lieu il faudra déployer de nouvelles luttes, comme celles menées dans la première décennie de ce siècle qui ont permis d’expulser les militaires étasuniens de la base de Manta et d’Équateur. Cette fois la lutte est pour la défense des Îles Galapagos en tant que Patrimoine de l’Humanité et pour la souveraineté nationale, et pour un but de plus large portée celui de préserver l’Amérique Latine comme territoire de paix, tel que l’a déterminé la Communauté des États Latino-Américains et Caraïbes (CELAC).

Notes

1 El Comercio, Naves de EE.UU. ocuparán pista de aeropuerto de Galápagos una vez al mes, 9-06-2010, https://www.elcomercio.com/actualidad/naves-eeuu-pista-galapagos-control.html  (consulté le 02/07/2019)

 

2 La Hora, En FFAA y Policía: Cambios sorpresivos, 18-06-2003, https://lahora.com.ec/noticia/1000170756/el-jefe-del-comando-conjunto-de-las-ffaa-general-oswaldo-jarrc3adn-fue-reemplazado-ayer-por-octavio-romero-quien-era-comandante-general-del-ejc3a9rcito , (consulté le 02/07/2019)

 

3 El Universo, Jarrín habla de fuerza de paz para Ecuador, 22-02-2006 , https://www.eluniverso.com/2006/02/22/0001/12/9AC883B6E98F4936B034F32ED8145096.html?p (consulté le 29-06-2019)

 

4 Mayor Chris Mitchell, Porte Parole du Pentagone, cité par Gisell Tobías, Voz de América, Washington.

 

5 El Telégrafo, Un buque encalló en Galápagos sin que haya derrame de contaminantes, 28-01-2015, https://www.eltelegrafo.com.ec/noticias/informacion/1/coe-de-galapagos-se-instala-tras-encallamiento-de-buque (Consulté le 29-06-2019)

 

6 Entrevue avec le général (r) Carlos Moncayo, Radio Pichincha Universal, 25-06-2019, Quito, https://www.pichinchauniversal.com.ec/portaviones-en-galapagos-no-implican-entrega-de-soberania-segun-general-en-servicio-pasivo/ (consulté le 29-06-2019)

 

7 Nations Unies"Declaración Política y Plan de Acción sobre Cooperación Internacional hacia una Estrategia Integral y Equilibrada para contrarrestar el Problema Mundial de las Drogas", www.unodc.org

 

8  Revista Semana, Producción de cocaína crece en el mundo y Colombia aporta el 70%, 26-06-2019, 
https://www.semana.com/amp/produccion-de-coca-crece-en-el-mundo-y-colombia-aporta-el-70/621010?fbclid=iwar1ksnh8qmdjeb7bt97m2wbiltuybjkwwvbh_djrpu7rggjkpm0lc_o-xvm&__twitter_impression=true , Bogota, (consulté le 2/7/2019)

 

9 Vicky Peláez, El opio, ¿el pretexto real de la guerra en Afganistán?, 28-06-2017,

https://mundo.sputniknews.com/firmas/201706281070344882-asia-kabul-confrontacion-washington/ , consulté le 2/7/2019

 

10 James Patrick Jordan, Resistiendo las bases militares y las estrategias del Pentágono en Latinoamérica, 29/01/2018 https://www.alainet.org/es/articulo/190678 , (consulté le 2/7/2019).

 

11 Raúl Capote Fernández, Bases militares de EE.UU. en América Latina y el Caribe. El Plan Suramérica, 9 de agosto de 2018,

http://www.granma.cu/mundo/2018-08-09/bases-militares-de-eeuu-en-america-latina-y-el-caribe-el-plan-suramerica-09-08-2018-17-08-04, (consulté le 02/07/2019 )

 

12 Hugo Hidrovo, Baltra-Base Beta, Ministère de la Culture d’Équateur, Quito, 2008, p.31

 

13 Ibid, p.58

 

14 Octavio Latorre, Historia humana de Galápagos, Artes Gráficas Señal, Quito, 2011, pp. 182-183

 

15 Jorge W. Villacrés Moscoso, Las ambiciones internacionales por las Islas Galápagos, Maison de la Culture équatorienne, Guayaquil, 1985, p. 97

 

16 Alfredo Luna Tobar, Historia Política Internacional de las Islas Galápagos, Ediciones Abya Yala, AFESE, Quito, 1997, p. 269)

 

17 En Équateur on a pas accordé à l’occupation militaire des Galapagos l’importance qu’elle méritait, parce que l’attention était focalisée sur l’invasion militaire par le Pérou de l’Équateur qui a commencé le 5 juillet 1941 et se termina en janvier 1942 avec la signature du Protocole de Rio de Janeiro par lequel l’Équateur perdit 200 000 kilomètres carrés de son territoire. Dans le contexte de la seconde guerre mondiale, ce traité fut imposé à l’Équateur par la force. Un des pays garant du même fut les USA. Le gouvernement pro-étasunien et répressif de Arroyo del Rio qui signa ce document fut renversé par une insurrection populaire le 28 mai 1944.

18 Équipe de Haut Niveau d’Analyses, Enquêtes et Publications, Ministère de Relations Extérieures y Mobilité Humaine,  Bases Militares Norteamericanas en el Mundo, Capítulo Especial Ecuador, Quito, 2016, pp. 82-83

 

19 Op. Cit., Alfredo Luna Tobar, pp.274-275

 

20 Op. Cit. Hugo Idrovo, p. 128

 

21 Ibid.  p102

 

22 Ibid. p. 102

 

23 Op. Cit., Equipo de Alto Nivel…, p. 115

 

24 L’Accord sur la base de Manta publié le 25 novembre 1999 concède l’immunité diplomatique au « personnel étasunien  et personnel dépendant en Équateur » et détermine que « dans l’éventualité où les autorités équatoriennes détiendraient un membre du personnel étasunien ou du personnel dépendant, elles devraient le notifier aux autorités des USA afin de coordonner une rapide remise entre leurs mains [du détenu]. Sur base de ces articles, l’assassinat de Pablo Vincente Jamarillo commis à Quito supposément par Peter Kamilowicz, membre de la sécurité de l’ambassade des USA et celui de Victor Manuel Mieles, commerçant de Portoviejo dont l’auteur présumé est Damon Pyler, fonctionnaire de la base de Manta restèrent impunis. Ce passera-t-il la même chose aux Galapagos ? Voir : Coalition No Bases Ecuador, Base de Manta, ojos y oídos del Plan Colombia, Quito, 2007, pp. 19-44-45.


 

Source Alai

Traduction Anne Wolff

 

Note de traduction : j’ai choisi de traduire dans ce contexte « medio ambiante » par milieu ambiant plutôt que par environnement, en effet ces deux concepts supposent différentes manières d’être au monde, deux ontologies différentes. L’environnement comme cet extérieur qui nous entoure répond à une conception occidentale, le milieu ambiant dont on est partie suppose une autre manière de voir et percevoir le monde, comme celle développée en Amérique Latine depuis les cosmo-visions des Peuples Originaires.

 

Partager cet article
Repost0
5 juillet 2019 5 05 /07 /juillet /2019 11:53

 

Par Susana Albarrán pour El Salto, 3 juillet 2019

Víctor Fernández y Martín Fernández, militants du Movimiento Amplio por la Dignidad y la Justicia de Honduras

Víctor Fernández y Martín Fernández, militants du Movimiento Amplio por la Dignidad y la Justicia de Honduras

Martin et Victor Fernandez sont des militants du Movimiento Amplio por la Dignidad y la Justicia de Honduras. Tous deux ont également été avocats du COPINH [Conseil Civique des organisations populaires et indigènes du Honduras : 25 ans de luttes et de révolution ] lors du premier jugement pour l’assassinat de Berta Cáceres.


 

Le 28 juillet dernier s’accomplissaient 10 ans depuis le coup d'état au Honduras qui entraîné la destitution du président Manuel Zelaya et qui a été suivi par des mois de résistance et de répression. Depuis le peuple du Honduras traverse une crise continue alors que les mouvements sociaux luttent pour obtenir un changement de la situation politique. En mai dernier s'est levée une nouvelle opposition contre les plans de privatisation totale de l'éducation et de la santé élaborés par le Fond Monétaire International et le gouvernement de Juan Orlando Hernandez, réélu président pour un second mandat de manière inconstitutionnelle – la constitution du Honduras interdit la réélection présidentielle – en novembre 2017.

Au cours des dernières semaines se sont intensifiés les blocages de route, mobilisations, actions collectives, résistances pacifiques de divers secteurs de la société hondurienne dans différentes parties du pays rencontrant la répression comme réponse de la part de l’État, dont le mandataire a ordonné le déploiement des Forces Armées. A la fin juin les manifestations se soldaient par des morts et des blessés.

 

Pendant le mois d'avril de cette année, les avocats Martin Fernandez et Victor Fernandez ont parcouru plusieurs villes européennes, à l’occasion d’un voyage à Brême pour y recevoir le XVIème Prix Solidarité, qui leur était octroyé par cet État allemand en reconnaissance du travail qu'ils fournissent dans l'organisation Frente Amplio por la Dignidad y la Justicia (MADJ) à laquelle ils appartiennent tous les deux. Leur lutte poursuit l’approfondissement des espaces de participation de la société hondurienne pour le renforcement de la démocratie.

El Salto a conversé avec eux, au sujet de la reconnaissance de leur travail, mais surtout afin qu’ils nous informent du climat « défavorable » que rencontrent les mouvements sociaux , et la société hondurienne en général, pendant les jours de plus grande convulsion de la présidence de Juan Orlando Hernandez. Martin et Victor Fernandez sont coordinateurs exécutifs et coordinateurs politique de MADJ, ils sont avocats et ont travaillé avec le COPINH dans le premier des procès qui tentent de mettre en lumière la responsabilité intellectuelle de l'assassinat de Berta Caceres. Ils nous ont également parlé de la signification du jugement dans ce procès.


 

Qu'a signifié ce voyage en Europe si nous prenons en compte la délicate situation que vit votre pays ?

Martin Fernandez : Premièrement nous sommes venus pour recevoir le prix, ce qui nous a permis d'ouvrir des espaces de rencontre pour faire connaître la situation au Honduras, et en plus de créer des liens Il faut souligner que ce prix a un caractère politique en raison de toutes les implications qu'ont la défense des Droits Humains et du milieu ambiant menées par notre organisation, le Movimiento Amplio por la Dignidad y Justicia, de laquelle nous sommes cofondateurs et défenseurs, et de toute la problématique à laquelle sont confrontés les défenseurs et défenderesses dans notre pays. Actuellement nous sommes le pays, après le Brésil, où il est le plus dangereux d'exercer ce type de fonctions. Nous avons réussi à coordonner tous ces processus de lutte, et le prix n'est pas pour Victor ou pour moi, sinon pour une organisation qui forge collectivement un processus de résistance et d’exercice de souveraineté territoriale. Le prix est arrivé à un bon moment parce que le Honduras est un pays où est invisibilisé tout le travail fournit depuis les différents espaces [de participation et de lutte], pas seulement ceux que coordonne mouvement Amplio.

Nous avons eu l'occasion de partager toute l'expérience du Honduras, tant de manière spécifique, à travers les cas au sujet desquels nous travaillons en tant qu'organisation, ainsi que d'autres expériences que nous partageons avec d'autres organisations. Depuis Brème, nous avons pu aller à Berlin, Valence et en Irlande. Victor a été à Genève parce que il y a peu s'est produit le crime de deux compagnons d'un village indigène appelé Tolupanes, et des réunions avec les Rapporteurs des Droits de l'Homme et des Peuples Originaires étaient prévues. Nous en avons profité pour dénoncer également toutes les atrocités auxquelles a donné lieu l’installation de cette narcodictature - comme nous l'appelons – de la part de la structure criminelle qui dirige le pays, sous les applaudissements des USA et tous les gouvernements d'Europe.


 

Quand nous parlons de Movimiento Amplio, de quelles organisations est-il question ? Qui le compose ?

V.F. : Le Mouvement est né comme un espace qui rassemble d'autres organisations. Au début, quand il est né, en 2008, il était formé par des organisations ayant un plus grand renom, mais par la suite s'est incorporée la participation d'organisations de base, coopératives de gestion de l'eau, des patronages, des conseils communaux... La structure du mouvement se fait au travers de noyaux de bases communautaires, autrement dit, de communautés rurales et de communautés urbaines, et à l'intérieur de cette structure participent des espaces qui existaient antérieurement.


 

Quelle est la situation actuelle au Honduras et comment le Movimiento Amplio y fait-il face ?

V.F. : Le Honduras a vécu 11 années de luttes soutenues et intenses. Nous situons l'origine en 2008 parce que ce fut le moment où se produisit la grève des procureurs qui a duré 38 jours, et a signifié l’ensemencement d'un mouvement culturel et citoyen qui affronte une structure de pouvoir qui se soutient sur la base de la corruption publique. En 2009, après que ce soit produit le coup d'état, le niveau de participation et d'articulation des différents espaces a fait un bond. Par la suite, un événement remarquable dans le pays est celui qui se produisit en 2015 [la Salle constitutionnelle violant la Constitution autorise la réélection présidentielle], entraînant un nouveau mouvement de lutte citoyenne contre la corruption, jusqu'au dernier événement clé qui est la lutte populaire contre la fraude électorale de 2017. [et depuis 2019, lutte de la Plateforme contre la Privatisation de la Santé et de l’Éducation qui fonctionne sur des principes de souveraineté populaire et implique des secteurs de la population qui ne s’étaient jamais mobilisés, jusque-là.]

Le Honduras se mobilise dans les champs de différents espaces et initiatives citoyennes populaires, et d'autres moins populaires, mais dont nous dirons qu’ils participent au mouvement d'opposition à la dictature. Le coup d'état continue à se dérouler sur le plan économique, par l’accaparement de la richesse du pays et c'est là qu'est le combat. C'est cela le Honduras que dans lequel nous vivions: un pays dirigé par une tendance officialiste conservatrice impliquée dans les pratiques de corruption. Nous devons considérer que l’état est pour eux un espace à saigner, le pays un territoire à piller, et qu’ils combinent cette pratique historique de corruption publique avec d'autres pratiques, plus spécifiques du crime organisé et violent.

Ainsi, plus que les gouvernements du Honduras des 11 dernières années, c'est la structure de pouvoir, manifestation des différentes formes d’expressions du pays - incluant les politiques partisanes et économiques - qui configurent le scénario de corruption [Le Président Zelaya qui veut changer cela se fera renverser par un coup d’état législatif et militaire]. Une structure de pouvoir qui jouit d'un soutien international, qui se maintient sur base d’une militarisation de la société, de la corruption et à laquelle le mouvement populaire hondurien fait contrepoids. Le movimiento a différents versants, dont un est composé d’avantage de la base, c’est celui auquel nous participons : l'organisation communautaire – qui a surmonté la léthargie et l’enlisement du mouvement ouvrier historique, qui a disparu de la scène. Ce versant, joint aux autres espaces du mouvement de Droit Humains, fait contrepoids. S'y ajoute une opposition politique de partis qui n'est sans doute pas si claire, alors que les gens du secteur populaire avancent dans leur recherche : entre la lutte sociale en soi et sa convergence avec les autres tendances politiques électorales qui peuvent être plus ou moins affines avec cet espace.

Le Honduras, dans ce contexte, se bat contre un gouvernement corrompu, narcotrafiquant, avec une bonne partie de son leadership expatrié aux USA. Nous vivons la phase post-fraude électorale avec la grande impunité, les morts violentes et la criminalisation des mouvements. Nous sommes cela, une citoyenneté en mouvement que nous revendiquons. De cela fait partie le Movimiento Amplio por la Dignidad Y la Justicia.


 

Cela c’est la situation du Honduras aujourd'hui, et en plus il y a toute la pression que subit actuellement la région dans son ensemble. Les USA font pression depuis la frontière Sud du Mexique pour pratiquer des politiques extractivistes auxquelles participent des entreprises et des gouvernements européens. Cela rend-il le contexte plus difficile pour s'organiser ?

V.F. : Oui, le modèle te propose des sorties faciles, immédiates, de survie. Les USA dirigent cette crise, soutiennent ces gouvernements, ce qui entraîne une expulsion des gens, c'est la cause des caravanes de migrants... et après, ils prétendent les contenir avec un discours raciste et fondamentaliste.

Beaucoup de gens n'ont pas la possibilité de quitter le pays. Nous avons un enracinement et des conditions qui nous obligent à rester. Dès que nous disposons d'un peu de conscience, nous n'avons pas d'autre option que d'assumer la défense du territoire. Que de penser que cette période d'adversité que nous traversons dans l'histoire du pays, nous devons la convertir en opportunité. Une opportunité qui te dit que ton pays ne t'a rien offert, que le monde ne t'a rien offert, que la vie ne t'a rien offert et que ce qui t'es offert, c'est une opportunité de construire [le pays]. Nous en sommes. C'est ce qui nous inspire, c'est la perspective de la dignité que nous développons. Là où on te la refuse tu dois la conquérir, en même temps que de configurer un entourage qui transcende la dignité individuelle pour rencontrer cette démarche de dignité collective, c’est ce qui rend possible un espace comme le nôtre, de diversité. Nous réunissons des professionnels, des paysans, des indigènes... une configuration qui reflète l'ensemble du pays.

Alors oui, le panorama est contraire, c'est la militarisation, c’est la violence dans ses différentes manifestations, parmi elles la violence structurelle – celle que pratique le système. Un système qui a conduit, à 200 ans de notre indépendance, à ce que presque 70% de personnes soient plongées dans la pauvreté, dans un pays comme le nôtre, avec toute la richesse qui est la sienne. Nous promouvons l'idée que la pire adversité te place dans la nécessité de lutter, de construire pour tous, dignité et justice.


 

Qu'est-ce qui va se passer dans les prochains mois en matière de résistance active ?

M.F. : Pour nous le scénario n'a pas changé, mais n'a pas non plus changé l’espérance que nous avons pour notre pays. Nous avons toujours dit : « Nous n'avons pas d'autre pays. [Reconstruire] le pays, c’est notre travail, notre engagement, notre contribution ». L’organisation a fêté ses 11 ans le 24 mai dernier, alors que nous étions dans un processus d’évaluation très critique et autocritique de notre gestion des 10 premières années pour évaluer si effectivement notre travail avait contribué au processus et répondu aux nécessités du pays . Pour ces 10 premières années nous nous étions fixé des objectifs ambitieux et très clairement le movimiento n’a pu s’étendre autant que nous le souhaitions. Pourtant les exercices [de pouvoir populaire] que nous avons mené dans les territoires sont très importants. Nous nous sommes constitués comme un mouvement de base territorial, après le pillage de toutes les institutions, nous continuons à miser sur un mouvement qui s'est forgé au cours du mouvement de résistance.

Actuellement nous pouvons dire que le projet de concessions du Honduras [aux transnationales minières, hydroélectriques, à leurs zones franches qui soustraient des fragments de territoire au gouvernement et à la juridiction du pays, en dépossèdent les habitants] est le fruit d'un travail qui a été effectué de manière systématique, et donc nous sommes confronté à un monstre. Et il nous a incombé de lutter, de résister à grand nombre de processus de concession que nous avons réussi à freiner [voir par exemple Le peuple Lenca du Honduras met la plus grosse entreprise de construction de barrages en déroute ]. On peut dire que nous n'avons pas facilité le travail d'implantation du modèle. Actuellement nous entamons une étape qui a pour slogan « Nous avons faim de justice et soif de dignité ! ». Dans les prochaines 10 années nous allons continuer à travailler, comme nous avons travaillé, à travers un processus de résistance qui nous a permis de bloquer le développement d'initiatives tant minières qu'hydroélectriques. Cela a contribué à mettre en lumière la manière dont se déroule le pillage du pays. Nous entrons dans une étape pour laquelle la revendication de tous ces processus est essentielle. En plus de cela nous avons besoin de créer un processus de souveraineté territoriale. C'est pour cela que nous avons construit ces processus de résistance après lesquels le modèle extractiviste ne pourra plus rester égal à lui-même. C'est une travail permanent, de chaque jour, et c'est un travail qui a du sens.


 

La dynamique fondamentale de l'organisation réside dans ses assemblées qui portent les voix de la population qui est impliquée et tissent la voix de notre organisation comme autorité [populaire] suprême. Nous devons approfondir les processus d'organisation et de formation ; nous devons augmenter les niveaux de diffusion et de connexion avec d'autres processus. C’est indispensable et pas seulement au Honduras, mais aussi à l'extérieur. Nous avons participé à différents mouvements comme celui qui réunit ceux qu'affectent des projets de barrages, qui est né en 2016 et regroupe 14 pays d'Amérique Latine. Cela permet de construire non seulement une résistance contre ce modèle, mais également de construire une alternative à toutes ces initiatives perverses du capital.

Et ce faisant, nous développons des capacités. Certainement ces processus d'articulation vont être importants pour pouvoir opérer les échanges nécessaires, nous avons besoin de partager des expériences, qui trop souvent restent occultées. Nous opérons toutes ses connexions des luttes, dans tous les territoires. Nous savons très clairement que c'est un processus qui demande une implication permanente. Contre le modèle qui veut nous dominer, nous devons inventer nos propre rébellions.

V.F. : Dans un point de vue cette fois macro, plus traditionnel de la vie politique du Honduras, les gens se demandent ceci : après les élections frauduleuses qui ont été avalisées par la communauté internationales, Juan Orlando va-t-il terminer ou non son mandat présidentiel ? C'est une question omniprésente dans une conjoncture qu’aucune société ne tolérerait : avec un président qui est fortement impliqué dans la corruption du secteur public - ses campagnes ont été financées par l'argent des principaux cas de corruption mis en cause dans le pays. Non seulement, sa famille et les structures de son parti apparaissent comme directement impliquées dans les plus scandaleux actes de corruption, en plus ils apparaissent comme étroitement liés au narcotrafic. Son frère Antonio Hernandez – c'est à dire un très proche - est jugé aux USA en ce moment à New York. Il a été prouvé qu'il était impliqué dans le narcotrafic à grande échelle, pas seulement au Honduras, mais dans toute l'Amérique Centrale. Et des informations concernant le capital qu'il a accumulé ont été révélées, par exemple les méthodes de son blanchiment, en passant pas le président et son épouse. [et Juan Orlando est actuellement la cible d’une enquête en cours menée par la DEA.]

N'importe quelle société penserait que c'est un gouvernement qui est tellement illégitime que le système même devrait avoir les ressources pour favoriser son auto-nettoyage de ce genre de sujet. Mais les acteurs décisifs, dans ce cas, ce sont les secteur des partis politique joints à l'ambassade du gouvernement des USA. Ils semblent définir la limite jusqu'à laquelle pourra aller le Honduras. Autrement dit, le maintien de ce gouvernement dépend de la manière dont il favorise ou non les intérêts des USA, à qui il convient d'extrader les narcos qui ne leurs servent plus à rien, quand ils sont usés. La question est donc : Jusqu'à quand Juan Orlado Hernandez va-t-il être utile au régime des USA ? A quel point lui serait bénéfique ou préjudiciable qu'il soit le prochain extradé ? Quand la Mission de Soutien contre la Corruption et l'Impunité au Honduras (Maccih) crée par l'OEA dans le cadre des plaintes de la population (nous-mêmes), va-t-elle porter des accusations ? Quand va-t-elle l’incriminer pour les cas de corruption desquels il est responsable ? Cela dépend de calculs politiques des acteurs qui sont actuellement décisifs. C'est de cela dont il est question.

En côté de cela, il y a ce qu'a planté Martin, les efforts des bases populaires au sens de processus plus que de conjoncture. Il faudra que nos processus, dans la prochaine conjoncture du pays aient atteint la hauteur suffisante, la force suffisante pour que nous ne soyons pas spectateurs de ceux qui ont toujours décidé, les acteurs de toujours comme les politiques-électoraux, comme la communauté internationale ou l'empire nord-américain, qui utilisent toujours les crises comme élément de renforcement de ce modèle. Voilà le défi.

Et aujourd'hui cela vaut d'avantage la peine que dans des occasions précédentes d'imaginer cela : le Honduras sans Juan Orlando et sa structure. Cela sera notre Honduras ou un Honduras plus favorable à l'empire nord-américain. Là est le combat. Et donc, face à une telle alternative, nous agissons dans la perspective de devenir toujours d'avantage protagonistes. Nous retrouvons ici les grands défis historiques des mouvements populaires : l'unité, et la proposition d'une alternative claire. C’est la question d’une démarche de la base, populaire, qui brise le système. Dans le cas contraire, nous entrons dans une logique de revitalisation ou de régénération du système.

Et nous en sommes là, il se peut que ces choses se réalisent, il se peut que nous soyons dans l’antichambre d'une nouvelle conjoncture - ce sera la cinquième ou la sixième des dix ou douze dernières années de l'histoire de notre pays – et nous sommes devenus des protagonistes. Cela n'évolue plus seulement à la convenance d'acteurs extérieurs, qui s’arrangent pour contenir les protestations populaires et trouvent toujours une réponse pour t’arrêter. Et nous espérons briser les processus qu’ils ont utilisés ces derniers temps. Cela traite de cela. Notre histoire est très circulaire, mais à un moment nous sortirons du cercle et nous pouvons changer cela. C'est notre espoir.

M.F. : Je crois que ce que décrit Victor se situe sur le plan interne, nous avons comme tâche fondamentale de convertir chaque espace en opportunité. Et actuellement nous serions complètement myopes si nous ne prenions pas en considération la situation que traverse le Honduras et ce que vivent beaucoup de gens hors du Honduras. Nous parlons en terme de citoyenneté de Honduriens qui ont été expulsés [par la violence, la misère]. De fait nous apprécions tout ce travail que nous faisons là, non seulement avec les honduriens mais aussi avec beaucoup de personnes qui participent à des processus de solidarité avec le Honduras. Nous devons aussi articuler le processus hondurien depuis les différents espaces [extérieurs], peu importe le lieu dans lequel se retrouvent nos compatriotes, là aussi nous devons créer ces processus de dénonciation, de résistance et de participation concernant la réalité du pays. Connectant les luttes, des luttes qui s’amplifient. Nous avons toujours d’avantage conscience et entendons mieux la nécessité que ce ne soit pas la lutte d’un seul pays sinon de toute une planète.

Le jugement de l’assassinat de Berta Cáceres était attendu comme un épisode dans lequel le pouvoir judiciaire hondurien était sommé de donner à la population une vérité indiscutable [concernant les auteurs intellectuels]. Une opportunité a-t-elle été perdue ?

V.F. : Une interprétation correcte de ce jugement doit nécessairement le considérer en tant que produit de la lutte populaire. Si vous vous en souvenez, le 3 mars 2016, la première déclaration officielle du ministre de la Sécurité du Honduras relative à l’assassinat de Berta Cáceres était que le crime avait eu comme mobile un conflit passionnel ou un conflit interne du COPINH. C’est le genre de vérité officielle qu’ils cherchent toujours à nous vendre. Puis, il y a tout ce qui s’est passé et qui est le résultat des luttes menées par des organisations comme le COPINH et nous en tant que Movimiento Amplio, nous nous sommes joints à cette cause, parce que comme tous le disent : «  Nous sommes tous Berta ! »

C’est très important de situer dans son contexte ce premier jugement [condamnation de 7 auteurs matériels et mise en cause d’un auteur intermédiaire], qui correspond à celui de la vérité matérielle de ce qui s’est passé le 2 mars 2016. Ces 7 personnes, oui, elles ont participé au crime, mais ces personnes étaient en relations avec des acteurs intermédiaires, eux-mêmes au service des auteurs intellectuels du crime. Sans ces mouvements, cette solidarité, jamais nous ne serions parvenu jusqu’à eux. De fait le premier à avoir été capturé n’était aucune de ces personnes. C’est une pratique historique au Honduras, où le taux d’impunité est de 95 % en ce qui concerne les morts violentes. Si on s’en tient aux statistiques il est fort probable que ce crime serait resté impuni et que les responsables désignés aient été le COPINH ou quelque proche de Berta. Dès lors nous pouvons dire que nous avons évité - par nos propres moyens, par la force de l’articulation nationale et internationale - qu’en plus d’avoir tué Berta, ils tuent l’effort politique, parce que c’est cela le scénario historique. Quand un dirigeant est tué, une dirigeante, ils attribuent le crime à un conflit interne. Le coup est non seulement directement humain, il est aussi politique.

C’est cela le résultat du premier jugement : Nous avons enlevé au loup un poil et maintenant nous allons vers les niveaux supérieurs. Il va y avoir le jugement de David Castillo Mejia, qui n’est toujours pas un auteur intellectuel, il était employé de l’entreprise Desarollos Energeticos S.A. (DESA), c’est un acteur intermédiaire, et au-dessus sont les auteurs intellectuels de ce crime. Et derrière il y a la structure qui pratique ce type de crimes et qui en plus participe d’autres crimes que subissent, pas seulement le Honduras, mais les différentes sociétés qui sont actuellement exposées au modèle extractiviste, qui est l’expression moderne du néo-colonialisme que nous vivons.

Là, nous nous attaquons aux entreprises, celles qui doivent nous rendre des comptes, celles qui doivent être - au moins - confrontées à la criminalité normalisée qui est leur mode d’action. Et derrière elles, il y a le système financier, et parfois ce sont les mêmes. Et cela n’implique pas seulement le secteur privé, il y a la banque multilatérale, autrement dit la Banque Mondiale, qui utilise l’argent des pays, l’argent des peuples, pour ce nouveau dépouillement au nom de la logique du prétendu développement. Ce sont les banques régionales comme la Banque Centre-américaine d’Intégration Économique (BCIE) qui est très proche de tout cela. C’est de cela dont il est question et que nous voulons obtenir, pas parce que cela viendrait du gouvernement ou de la structure x du pouvoir, mais parce que nous luttons , nous nous battons pour y parvenir.

Il faut comprendre cette logique, et mettre en lumière les clés de cette avance qualitative qui s’est produite dans quelques cas, pour que cela prenne un caractère emblématique, pour que cela apporte de la lumière aux autres processus. Nous, en tant d’organisation nous sommes confrontés à un grand nombre de procès de leaders assassinés. Nous en apprenons beaucoup concernant les manières de lutter, de se battre contre le système dans ses propres espaces. Nous allons à la police, et nous luttons pour cet espace ; nous allons face au ministère public et nous nous battons , dans les tribunaux, dans les médias, face à la communauté internationale, dans les systèmes de droits humains internationaux qui ont également un pouvoir. Ainsi nous balisons la route que doivent suivre les mouvements réellement alternatifs qui veulent briser ce système. C’est l’apport de Bertita, qui nous a enseigné tous les rouages du système que nous avons du affronter depuis son assassinat. Nous sommes plusieurs organisations qui travaillons sur son cas et c’est un enseignement pour tous le reste de nos actions.


 

Revenons au prix qui vous a été attribué à Brème…

V.F. : Le prix est un geste de solidarité politique pour deux enjeux, l’un est la défense des Droits Humains et l’autre – c’est dit explicitement - est une reconnaissance de la lutte menée par l’organisation contre la corruption publique. Et nous voulons montrer ce que cela signifie pour nous.

Premièrement, il est important que cela vienne d’une instance officielle. C’est un état, parmi les 16 qui composent la Fédération Allemande, qui prend position publiquement, et qui reconnaît qu’il y a des organisations - dans ce cas-ci la nôtre - qui luttent contre la corruption du secteur publique et pour les droits humains, dans un contexte difficile. C’est important aussi que cela vienne d’Allemagne qui est d’un grand poids dans les projets de « développement » pour nos peuples. Cela pose un contrepoids. Et ce qui était encore plus important, c’est que la Commune de Brême avait convoqué l’ambassade du Honduras à assister à cet événement, celle qui fait alliance avec le régime de Juan Orlando. C’est un message pour le gouvernement de Juan Orlando autant que pour la communauté internationale, celle qui ne se manifeste pas au Honduras, celle qui fait alliance avec le régime de Juan Orlando. C’est possible que Brême soit le plus petit état d’Allemagne mais pour nous cela ne retire rien à l’importance de cette reconnaissance.

En termes plus spécifiques, nous dirions que ce type de reconnaissance aide à protéger les processus et sauve des vies. Le niveau de danger est élevé au Honduras, nous ne voulons pas nous considérer comme des victimes de cela, mais il est certain que chacun d’entre nous peut devenir « une nouvelle », d’un moment à l’autre. Peut-être que ceci est notre dernier voyage de travail en Europe,… c’est cela la réalité du Honduras. Nous banalisons le thème du risque mais c’est à cela que nous sommes exposés dans une société et avec un régime comme celui du Honduras. Alors qu’apparaissent et nous parviennent ces messages, de toutes parts, c’est très important, et si en plus il viennent d’acteurs officiels, pour tout dire de gouvernements, c’est remarquable. Comme il était important pour nous de nous lier avec la société civile, qui elle a noué des alliances politiques,dans cette région, en particulier avec des parlementaires, des gens du ministère des investissements, de l’économie, des relations extérieure… afin qu’ils prennent conscience que quelque chose doit changer dans un pays comme le Honduras. Nous revendiquons sans aucun doute l’importance de cette reconnaissance.


 

M.F. : Nous avons parlé de la nécessité dans laquelle nous nous trouvons de mettre en évidence tout le processus qui se vit en Amérique Latine et en particulier dans notre pays. Nous disions aux Irlandais, par exemple, que peu importe les idéologies dans le thème de la corruption parce que la corruption est une pratique qui se retrouve dans tous les états, et qui d’une manière ou d’une autre, réduit de manière absolue la satisfaction des besoins basiques de l’être humain. La pratique de la corruption, depuis n’importe quelle structure de gouvernement, fait irruption et sape les possibilités de parvenir à des sociétés plus justes. Dans la mesure où vous êtes tolérants avec ce genre de pratiques, même si vous vivez dans un état de bien être, « à quel prix ? »

Si aujourd’hui vous accordez un pouvoir sans limite aux entreprises qui peuvent assassiner des gens sur d’autres territoires, certainement que ces entreprises vont devenir encore plus gigantesques et continuer à affaiblir les propres systèmes de vos pays. Nous avons besoin de mécanismes de contrôle. Ceci est un appel pour que vous réfléchissiez depuis ces sociétés. Transmettre ces processus de lutte c’est envoyer un message aux sociétés qui vivent la commodité, un appel à rompre avec cette commodité parce que au final nous sommes aux portes d’un modèle qui va tous nous écraser, et qui est capable d’en finir dans le plus court laps de temps y compris avec la vie de chacun des habitants [de la planète]. Il faut en finir avec la spéculation et la voracité qui caractérise ce modèle.

 

Source : El Salto

 

Traduction Anne Wolff

 

Partager cet article
Repost0
3 juillet 2019 3 03 /07 /juillet /2019 12:13

 

 

De la banalisation de l'horreur

La traversée du Rio Bravo par les migrants, une tragédie quotidienne indéfiniment répétée.

Rien ne me met plus en rage, une rage douloureuse, que de voir comment les médias utilisent l’arbre pour cacher la forêt. Aujourd’hui le monde s’indigne parce qu’une petite fille salvadorienne est morte dans les bras son papa qui lui aussi a perdu la vie en tentant de la sauver des eaux traîtres du Rio Bravo.

 

Voici ce que vivent quotidiennement des centaines de familles qui se lancent dans la périlleuse traversée, alors même que la migra, déjà, veille sur l’autre bord, et cela dure depuis des années . Cette scène se reproduit tous les jours, plusieurs fois par jour, sans caméra pour témoigner, et nombreux sont ceux qui n’atteignent pas l’autre rive.

Et cela va continuer, cela se passe aujourd’hui, cela se passera demain,... mais les feux des médias éclaireront dorénavant d’autres sujets porteurs et les morts quotidiennes et atroces de milliers de migrants en route vers l’espoir, si ténu soit-il, sombrera à nouveau dans l’oubli.

 

 

Tout d’un coup toutes les caméras sont braquées sur les caravanes de migrants qui quittent massivement le Honduras, mais qui parle de ce goutte à goutte de migrants qui depuis des années, fuient le pays, et affrontent tous les risques d’un long voyage, dont aucun ne sortira indemne, comme en témoigne le récit de Maria Jose qui raconte l’enfer de son voyage depuis le Honduras jusqu’au USA, alors que bien plus tard, comme pour beaucoup d’autres migrants qui ont atteint le mythe étasunien, ses nuits sont hantées de cauchemars ?

Maria Jose : « […] les hôpitaux ce qu’ils font quand arrive un migrant, ils le tuent et ils vont l’enterrer comme x ou y dans les fosses pour ne pas subir d’enquête d’aucune sorte »

 

Combien de corps sans organes empilés dans des fosses resteront anonymes après avoir alimenté le trafic d’organes humains, devenu un des secteurs des plus lucratifs avec les trafics de drogues, d’armes et d’humains. Les pauvres devenant réserves d’organes pour les riches.

 

Des centaines de corps non identifiés s’accumulent dans les morgues des deux côtés de la frontière alors que des dizaines de milliers de familles du Honduras, du Salvador, du Guatemala cherchent, le plus souvent en vain, le proche qui a pris le chemin de l’exil et n’a plus jamais donné de nouvelles.

 

A l’époque j’écrivais :

Il y a aujourd’hui une sorte d’effet pervers de la normalité, comme quand à la fin de son récit Maria José dit que ces cauchemars et ces insomnies, finalement c’est normal, puisque la plupart des immigrants sans papier en souffrent. Normal est pris dans le sens d’acceptable puisque un grand nombre sont concernés. « Avoir des cauchemars après avoir traversé l’horreur, mais c’est normal ma p’tit dame, pas de quoi en faire un foin Tous les migrants vivent cela ». Banalisation et normalisation nous font à présent accepter l’inacceptable. J’ai remarqué cela en de multiples occasions. Il est devenu tout aussi anodin de dire, c’est normal, cela arrive tous les jours comme si la multiplication des faits les plus abominables, rendaient anodine, recevable, acceptable pour la conscience normale du citoyen lambda, une banalisation de l’horreur au quotidien.

 

Rien a changé.

 

Anne W

Partager cet article
Repost0
1 juillet 2019 1 01 /07 /juillet /2019 08:47

 

 

Aujourd’hui le Mexique joue un rôle important dans l’évolution de l’Amérique Centrale, alors que le président Andres Manuel Lopez Obrador, AMLO et le mouvement MORENA, Mouvement de Régénération Nationale se sont attelés simultanément redressement du pays et à celui de la région.

Le président des États Unis du Mexique Andres Manuel Lopez Obrador

Le président des États Unis du Mexique Andres Manuel Lopez Obrador

 

 

 

 

Mais qu’est-ce que MORENA ?

 

Morena est un parti qui a moins de 10 ans d’existence et se définit comme « parti et mouvement social de gauche nationaliste ». Le mouvement, lancé en 2010 a été reconnu comme parti officiellement le 28 juillet 2014. Il réunit tous groupes ou personnes qui désirent s’impliquer dans la vie sociale et politique du pays, couvrant un large spectre politique, la condition d’adhésion est le respect des principes énoncés dans sa déclaration.

Très vite le mouvement/parti a pris une grande ampleur et il domine actuellement la vie politique du pays. Pour la première fois depuis 24 un président dispose d’une majorité à la Chambre des Députés comme au Sénat et le président qui a été élu avec 53 % des voix, jouissait après 6 mois d’exercice du gouvernement d’un taux d’approbation supérieur à 60 %.

Pourtant la situation dont a hérité AMLO est catastrophique, vous trouverez ici un bref bilan de l’état dans lequel 30 ans de néolibéralisme brutal et corrompu ont laissé le pays.

 

 

Déclaration de Principes de MORENA

 

 

Il n’y a rien de plus noble et de plus beau que de se préoccuper des autres et de faire quelque chose pour eux, aussi peu que ce soit. Le bonheur peut aussi s’atteindre en agissant pour le bénéfice d’autrui, voisins, compagnons d’étude ou de travail, quand une action est menée pour le quartier, la collectivité, le peuple où le pays. Ces actions nous définissent comme genre humain, formant une communauté, construisant une citoyenneté et faisant de ce monde un endroit un peu meilleur.

 

Dans le Mexique actuel, la vie politique et institutionnelle est marquée par la corruption, les faux-semblants et l’autoritarisme. Malgré cela, des millions de mexicains travaillent chaque jour honnêtement et durement, pratiquant la solidarité et s’organisant pour en finir avec ce régime caduque.

C’est sous ces prémisses qu’est né en 2010 le Mouvement de Régénération National (MORENA) qui vise la transformation démocratique du pays. Un changement politique, économique, social, culturel. Ceci pourra se réaliser en en imprimant des principes éthiques dans notre mouvement et en défendant les droits humains, la liberté, la justice et la dignité de tous.

Le modèle néo-libéral appliqué au cours des 30 dernières années, n’a bénéficié qu’à une minorité au prix de la pauvreté de la majorité des mexicains. L’économie est aux mains de monopoles, la structure productive a été détruite, il y a des millions de jeunes qui n’ont aucune opportunité d’étude ou de travail, la campagne est à l’abandon et chaque jour des milliers de migrants traversent la frontière nord, malgré les risques et la persécution.

 

Ce régime de corruption, d’oppression et de privilège est un véritable état maffieux construit par la minorité qui concentre les pouvoirs économiques et politique du Mexique. Ce groupe dispose des budgets publiques et des institutions et utilise la télévision et les moyens de communication comme son principal outil de contrôle et de manipulation des citoyens.

 

Le Mouvement de Régénération National a surgit avec l’objectif d’en finir avec ce système ignominieux, et la conviction que seul le peuple peut sauver le peuple et que seul le peuple organisé peut sauver la nation. Cela sera possible avec la participation politique déterminée des citoyens, en la dotant d’une éthique démocratique et de la vocation de servir autrui. Démontrant ainsi qu’il y a plus de joie à donner qu’a recevoir.

 

Nous Membres de MORENA, nous régirons notre conduite personnelle et collective appliquant les principes éthiques suivants et les valeurs humaines défendues par notre organisation :

 

1.Le véritable changement du pays commence par changer la manière traditionnelle d’intervenir dans les affaires publiques. La politique n’est pas seulement une affaire de politiciens. Le Mouvement conçoit la politique comme une vocation de service, comme un travail en faveur de la collectivité, comme une manière de servir le Mexique. C’est une responsabilité et un engagement avec les aspirations démocratiques et les causes du peuple mexicain. Nous cherchons à récupérer la politique, aujourd’hui avilie, comme un instrument de transformation des citoyens, participant aux affaires publiques.

 

2.Le changement que propose MORENA est pacifique et démocratique. Il cherche la transformation par la voie électorale et sociale, ce qui suppose le respect de la liberté d’élection, d’expression, d’association et de manifestation des mexicains, de la Constitution Politique et des lois qui en émanent ; et un élément déterminant est la participation démocratique du peuple lui-même aux affaires publiques.

 

Nous ne sommes pas mus par la haine, mais bien par l’amour du prochain et de la patrie.

 

3.Dans MORENA, il n’y a pas de pensée unique mais bien des principes démocratiques orienté vers un objectif commun. Nous aspirons et nous travaillons pour que le Mexique se consolide comme une nation de diversité et pluriculturelle fondée dans la liberté de croyances et de cultes, dans l’équité des opportunités pour tous les mexicains, réduisant les inégalités entre ceux qui détiennent le plus et ceux qui possèdent le moins ; et pour en finir avec toute forme d’exploitation et d’oppression.

 

Nous promouvrons une authentique démocratie participative utilisant des figures comme la consultation citoyenne, l’initiative populaire, le référendum, le plébiscite et la révocation de mandats. Seule l’organisation des citoyens peut construire une société démocratique, déterminer les (affaires) publiques et faire contrepoids aux abus de pouvoir.

 

4.Les membres de MORENA s’inspirent de l’histoire de la lutte du peuple mexicain. Notre pays a vécu trois transformations principales : l’Indépendance, la Réforme et la Révolution. MORENA propose d’impulser la quatrième transformation sociale de l’histoire du Mexique.

 

5.Notre Mouvement est un espace ouvert, plural et incluant auquel participent des mexicains de toutes les classes sociales et de divers courants de pensées, religions et cultures. Dans MORENA participent des femmes et des hommes : des entrepreneurs, des producteurs et des consommateurs ; des étudiants et des professeurs ; des ouvriers, des paysans et des indigènes. Nous sommes convaincus que seul l’unité de tous les mexicains rendra possible la transformation du pays. Nous savons que pour conduire le Mexique de l’avant tous les secteurs de l’économie sont nécessaires : le secteur public, le secteur social et privé. Nous ne sommes pas contre les entrepreneurs, mais bien contre la richesse mal acquise, la corruption, les monopoles et l’exploitation inhumaine.

 

Étant un mouvement démocratique, MORENA promeut le débat ouvert et le respect entre (personnes) différentes. Dans nos relations internes nous nous comportons avec respect et fraternité, dans la joie de l’effort partagé en faveur du bien être collectif et la certitude que l’unité de nos différences la rend possible.

 

Les intégrants du Mouvement ont le droit d’exercer la plénitude de leur liberté et leur droit de dissidence, nous nous efforçons de nous exprimer en public avec respect pour les autres compagnons. Nous pouvons avoir des divergences, mais nous unit l’objectif supérieur de transformer le Mexique en une nation démocratique, juste et libre.

 

6.Notre Mouvement trouve son essence dans la pluralité. MORENA est respectueux de la diversité culturelle, religieuse et politique en son sein.

 

Notre action individuelle et collective est soutenue par des principes d’honnêteté, de patriotisme et de reconnaissance des différences pour forger une nouvelle forme de pratiques publiques, éloignées des vices et de la corruption des pratiques de l’actuel système culturel et économique.

 

Les intégrants du mouvement doivent garder présent à l’esprit dans leur pratique quotidienne, le fait qu’ils sont porteurs d’une nouvelle manière d’agir fondée dans des valeurs démocratiques et humanistes et non en recherche de la satisfaction d’intérêts égoïstes, de faction ou de groupes.

 

7.Les membres du Mouvement se nourrissent des luttes et des mouvements sociaux du Mexique ; des causes autour desquelles s’organisent les citoyens et promeuvent leurs droits d’exercer (de la démocratie).

 

C’est un engagement éthique : les intégrants de MORENA connaissent leurs propres droits et améliorent leur formation culturelle. Les débats publics servent d’instrument pour l’apprentissage collectif concernant les problèmes du pays et leurs possibles alternatives. La bataille des idées, la discussion ouverte et plurielle sont des outils qui aident à créer une conscience citoyenne et à construire entre tous le pays que nous désirons.

 

De même, nous considérons comme indispensable la formation des jeunes comme dirigeants sociaux et politiques dans toutes les régions du pays, pour mener à bien les tâches de transformation du pays.

 

Il faut contrecarrer de manière active toute la propagande manipulatrice et lutter pour faire valoir le droit à l’information véridique. Il est idéal que chaque femme et chaque homme de MORENA se convertissent en moyen de communication pour informer le peuple et obtenir la participation des citoyens. Dans cette tâche la démocratisation des moyen de communication et le développement de nos propres médias est fondamentale.

 

8.MORENA forme partie des luttes du peuple du Mexique, en défense de la souveraineté, du patrimoine collectif, de la dignité, de la justice, de la démocratie et du bien-être du peuple. Nous luttons pour notre indépendance et défendons la souveraineté nationale.

 

Nous sommes solidaires des luttes du peuple mexicain, en particulier avec celles des plus exclus, exploités, humiliés comme les migrants, les discriminés, les indigènes et les victimes de violence et d’injustice.

 

Nous rejetons toute forme d’oppression : la faim, la pauvreté, l’inégalité, l’exclusion sociale et l’exploitation. Nous nous opposons aux violations de droits humains et à la corruption gouvernementale. Nous luttons contre la violence faite aux femmes et contre toute forme de discrimination pour raison de sexe, de race ou d’origine ethnique, religieuse, de condition sociale, économique, politique ou culturelle.

 

MORENA promouvra et luttera pour l’égalité réelle entre hommes et femmes.

 

Nous sommes contre toute forme de domination et autoritarisme et n’importe quel acte qui prétend usurper la libre volonté du peuple mexicain.

 

9 .A MORENA nous travaillons pour générer une nouvelle culture et protéger la nature, préserver les eaux et les forêts, ainsi que toutes les formes de vies et de cultures qui ont rendu possible que le Mexique soit un grand pays doté d’une grande diversité. Nous nous organisons pour défendre le territoire et parvenir à la souveraineté alimentaire ; ainsi que pour protéger le patrimoine historique et culturel.

 

10.MORENA valorisent la connaissance et l’apprentissage par l’expérience, les traditions scientifiques et culturelles propres et d’autres peuples, en particulier ceux d’Amérique Latine et des Caraïbes. Notre mouvement est engagé dans la création et les libertés avec une éducation de qualité dans la liberté et pour la liberté.

L’art et la culture sont des territoires privilégiés pour rénover les espérances en un future meilleur, plus humain, plus égalitaire.

 

Sur le plan international, nous sommes régit par la maxime qui veut que « le respect de droit étranger est la paix » et nous sommes solidaires avec les peuples du monde dans leurs luttes pour la démocratie et l’égalité.

 

MORENO n’acceptera aucun pacte qui le subordonne à des organisations internationales, gouvernements ou des associations religieuses.

 

Le véritable changement consiste en ce que la société devienne capable de se gouverner démocratiquement, ce qui implique une révolution culturelle et morale.

 

Notre principal objectif est de construire une société libre, juste, solidaire, démocratique et fraternelle.

 

 

Traduction des Principes de MORENA : Anne Wolff

Partager cet article
Repost0
28 juin 2019 5 28 /06 /juin /2019 12:03

publié par le COPINH, Conseil Civique des Organisations Populaires et Indigènes du Honduras

Non à la présence de l'armée israélienne en territoire Lenca

Récemment le gouvernement de Juan Orlando Hernandez a annoncé l'arrivée de mille militaires israéliens au Honduras avec la mission présumée de sécuriser la frontière hondurienne face à la crise qui continue a expulser des milliers de personnes hors du pays vers le Mexique et les USA ; cette situation a été remise en question par la population du Honduras et les organisations sociales.

Plus récemment, les communautés de la municipalité de Colomoncagua ont appris qu'une partie des effectifs du contingent militaire israélien a été assignée à cette municipalité. Les habitants de la zone organisés dans le COPINH ont manifesté leur profond refus de cette décision qui est contraire à la volonté des peuples et ont voulu faire entendre cette dénonciation.

Les communautés déclarent que, avant tout, « notre pays n'est en guerre contre aucun autre pays et rien ne justifie que des militaires venus d'ailleurs se retrouvent au Honduras. En plus de cela, sachant qu'il n'y a pas de guerre contre un autre pays, c'est donc que la guerre, ils la mèneront contre le peuple hondurien selon la pratique habituelle de ce gouvernement répresseur. »


 

La population de Colomoncagua, municipalité située à la frontière avec le Salvador, après analyse, a conclu que cette situation aggraverait la violence et la répression dans cette région dans laquelle en plus se matérialise la construction d'une base militaire, un fait dont ils ont pris connaissance il y a moins de 8 mois. Le rôle de l'armée israélienne pour contenir une vague de migration est inexplicable, cette vague sera irrépressible tant que se poursuivent les conditions de violence, pauvreté, exclusion et militarisation de notre pays.

La jeunesse de Colomoncagua a avoué qu'elle avait terriblement peur parce que dans le passé proche deux jeunes actifs dans la lutte ont été assassinés par les militaires honduriens et ils considèrent la présence des armes et des militaires comme des ennemis de la jeunesse qui depuis longtemps essayent d'effrayer les jeunes qui ont le courage de manifester dans les rues.

Il faut se rappeler que plusieurs communautés sont menacées par la construction de barrages hydroélectriques dans la zone frontalière, les plus proches sont 4 barrages sur le Rio Negro ou ses affluents : les rios Cañas, Pichigua, Chinacla et el Puente, entre autres. A cela s'ajoutent les intérêts miniers dans le Cerro (colline) del Alumbrador. Il ne serait pas étonnant que cette augmentation de présence militaire face partie de la stratégie d'asservissement aux grands intérêts économique de populations qui ont une tradition de lutte.


 

Tout le COPINH, avec ces multiples communautés, se joint à ce rejet de la présence de l'armée israélienne qui depuis des années opprime le peuple frère de Palestine frappé par des expulsions qui se réalisent de manière similaire à celles que nous subissons en territoire Lenca.

Nous exigeons des autorités que cette décision soit reconsidérée car les peuples sont prêts à défendre l'autonomie de leurs territoires et à ne permettre ni les armes, ni la violence contre le peuple.

« Nous voulons des haricots, nous voulons du maïs, nous voulons des routes, mais nous ne voulons plus de l'armée ici »

 

Un habitant de Colomoncagua, Llano Grande, le 12 juin 2019

Source : No al ejército israelí en territorio Lenca.

Traduction Anne Wolff


 

 

Partager cet article
Repost0
27 juin 2019 4 27 /06 /juin /2019 14:47
Pour les Honduriens, le chemin de l'exil ?

Pour les Honduriens, le chemin de l'exil ?

Une hémorragie migratoire

La population du Honduras était évaluée à 9,2 millions d’habitants en 2017. Près de 70 % de la population est plongée dans la misère. Et la situation ne cesse d’empirer. Depuis le début de cette année 2019, jusqu’à fin mai 304 828 migrants honduriens – soit une moyenne de 1254 chaque jour et plus de 3,3 % de la population en 5 mois - ont été arrêtés par les Patrouilles Frontalières des USA, et il y a ceux qui ne se font pas prendre, ceux qui s’arrêtent ou disparaissent en chemin ou se rendent dans d’autres pays. Le flux migratoire vers l’Europe lui aussi s’intensifie (En Espagne, les habitants originaires du Honduras sont passé de 44 000 mi-2015 à 84 000 mi-2018, et le nombre des nouveaux arrivés suit une progression géométrique)… Si ce n’est pas une situation de crise qui demande un soutien de la communauté internationale et de l’opinion publique, je ne sais pas ce qu’il faudrait pour que se réveillent les consciences solidaires qui apporteraient leur appui à la transformation du pays, telle que la souhaite la population.

A l’échelle du Venezuela, cela ferait environ 1 millions de personnes qui auraient quitté le pays pendant la même période. Mais communauté internationale et opinion publique semblent plus sensibles aux exactions d’un « dictateur de gauche » qu’au régime de terreur imposé aux Honduriens depuis 10 ans par des dictateurs de droite, mis au pouvoir par un coup d’état organisé et pérennisé par les USA. Le Venezuela est omniprésent dans les médias, quoiqu’on pense par ailleurs de la situation au Venezuela, s’indigner pour ce qui s’y passe (ou non) et ne pas le faire, encore bien d’avantage, pour le calvaire que vivent les Honduriens dans leur pays, c’est soit de l’hypocrisie soit de la cécité politique.

La Doctora Figueroa actuelle figure de proue du mouvement

La Doctora Figueroa actuelle figure de proue du mouvement

« Nous n’avons pas peur, parce que en nous prenant tout, ils nous ont pris aussi la peur » Doctora Suyapa Figueroa

Depuis plusieurs semaines la population du Honduras est mobilisée, massivement, dans tout le pays. Encore une fois les médias montrent les quelques « fauteurs de troubles » qui pillent, agressent, incendient mais pas les milliers de mobilisation qui se multiplient dans les barrios des villes, dans les petites municipalités des campagnes jusque dans les fins fonds du pays… silence médiatique .

Pour vous donner une mesure de l’ampleur de ces mobilisations, une vidéo, d’une durée de 10 heures. Pendant que les caméras parcourent, un par un, les foyers de lutte qui se multiplient à travers le pays, le présentateur concentre et relaye les appels à rejoindre les points de concentration disséminés sur tout le territoire. Un général à la retraite propose de mettre son expérience au service du soulèvement et donne son numéro de téléphone pour que ses ex-collègues puissent se joindre à lui. Le Honduras compte 18 provinces, au fur et à mesure augmentent le nombre de celles dont les habitants rejoignent les mobilisations 11, 12...15 finalement, c’est la quasi totalité du pays qui se retrouve dans des concentrations de voisins, de collègues qui participent à la lutte.

Deux autres vidéos donnent une idée des formes que prennent ces manifestations, dans la première un orchestre s’est joint à la fête et les voisins dansent joyeusement, dans l’autre règne un climat d’inquiétude, alors qu’une partie de la police est en grève, quelques policiers tentent de faire ami-ami avec la population qui se méfie. A juste titre, les mêmes policiers qui viennent de tirer massivement des bombes lacrymogènes jusque dans les maisons où se trouvent aussi des enfants, veulent dialoguer matraque (vu l’instrument le mot est faible, cela ressemble à de grosses barres de fer de plus d’un mètre de long) à la main. Les voisins ont raison de se méfier, ces policiers tourneront plus tard à nouveau leurs armes contre le peuple. Le jeune homme qui a tourné cette vidéo, diffusée en direct, est un héros. Un parmi tant d’autres. Il a pris des risques immenses pour transmettre ces images, alors que les policiers le menacent de l’arrêter s’il n’efface pas celles où ils figurent. Heureusement, ils n’ont pas réalisé que ces images avaient déjà été diffusées. Il va continuer à tourner et à diffuser.

Plus tard des représentant des policiers signeront un accord avec le gouvernement, dans cet accord un article retient l’attention, c’est l’article 6 : Il garantit à la population hondurienne le respect des droits humains de toutes les personnes au niveau national, y compris celles qui exercent leur droit à la manifestation publique et pacifique. La police préventive, mais aussi les troupes d’élites Cobra (qui était aussi le nom d’un des escadrons de la mort qui sévissait dans le pays dans les années 80. Normal, ce sont les mêmes qui les ont créés) et Tigre ne veulent plus réprimer le peuple qui exerce ses droits. Leurs représentants se sont excusés auprès du peuple pour le mal qu’il lui ont fait. Ils ont ce jour-là un fort sentiment d’appartenance à ce peuple. La plupart sont de modeste origine, ceux qu’ils répriment au quotidien sont leurs frères, leurs cousines, leurs voisins, leurs parents… et de cela ils n’en veulent plus.

Le Président du Parti Libéral, Luis Zelaya manifeste. Il est inrviewé par Dick Emanuelsson

Le Président du Parti Libéral, Luis Zelaya manifeste. Il est inrviewé par Dick Emanuelsson

La lutte touche des strates de population qui ne s’étaient jamais mobilisées

Depuis 10 ans le peuple du Honduras est mobilisé, quotidiennement. Qu’est-ce qui a changé ? C’est que des strates de la population qui n’avaient jamais participé à ces mobilisations, ce sont à présent impliquées, comme l’entrepreneur Adolfo Facusse membre d’une des 7 familles qui concentrent la richesse du pays, comme le président du Parti Libéral d’opposition qui sont d’accord pour affirmer que le président doit démissionner. Des médecins, des professeurs, des membres des classes aisées qui n’avaient jamais manifesté descendent dans le rues pour se joindre à la lutte pour la récupération du pays. Tous sont d’accord, le pays doit se redresser et pour cela le Président doit démissionner. Il faut en finir avec la gangrène de la corruption.

 

« Il y a quelque chose d’important dans ce processus de lutte, dans ce processus de pouvoir et de souveraineté politique, la participation à ce processus insurrectionnel a permis aux membres des différents Collèges Universitaires de sortir de leur bulle d’élitisme et de s’identifier à la Cause du Peuple du Honduras, de se rappeler qu’ils font partie du Peuple." Professeur Hernandez, membre de la Plateforme pour la réforme de l’éducation.

 

Un phénomène nouveau : parmi les migrants qui fuient le pays, se retrouvent de plus en plus de membres des classes aisées, des professionnels qui ne trouvent plus de travail ou ne peuvent plus exercer leur métier dans des conditions dignes (médecins, professeurs...), des jeunes fraîchement émoulus des universités qui n’ont aucun espoir de trouver jamais un travail, des entrepreneurs parce que la misère galopante a réduit comme peau de chagrin les marchés du pays. Ceux-là partent le plus souvent avec des papiers en règle, nombre d’entre eux ont pour destinations privilégiées l’Espagne et l’Allemagne...

Ceux qui restent au pays se joignent à la lutte, pour eux aussi, c’est devenu une question de survie. Les politiques néo-libérales ont conduit le pays à la ruine. Il y a actuellement une catastrophe humanitaire au Honduras dont l’ampleur ne peut se mesurer qu’avec celle vécue par les Haïtiens. La tornade qui a frappé le Honduras a un nom, elle s’appelle coup d’état militaire, un coup d’état qui se perpétue depuis 10 ans.

Ici le Peuple commande et le Gouvernement obéit.

Ici le Peuple commande et le Gouvernement obéit.

 

Un exercice de souveraineté populaire contre la continuité des politiques étasuniennes dans le pays

Les luttes se sont cristallisées autour de celles menées contre les programmes de privatisation et de l’enseignement et de la médecine qui parachèveraient le génocide de la population. Elles ont pris la forme d’un grand exercice collectif de souveraineté populaire. Alors que la Plateforme contre la privatisation de la médecine et de l’éducation a entamé son dialogue alternatif, d’autres Plateforme se créent dans d’autres secteurs. La méthode : diagnostiquer cm² par cm², les maux dont souffre le pays, formuler des propositions pour y remédier avec la participation de professionnels compétents, nationaux et internationaux. Lors de l’inauguration du dialogue alternatif de la Plateforme, plusieurs ont répondu présents. Ils sont là pour faciliter la formulation technique, pratique des propositions de solutions, sans oublier jamais que dans une démocratie, le dépositaire du pouvoir est le peuple dont les représentants doivent gouverner en lui obéissant.

Gouverner en obéissant, depuis longtemps les zapatistes font valoir ce principe. Aujourd’hui Andres Manuel Lopez Obrador président des États-Unis du Mexique l’a repris comme principe fondateur de sa manière de gouverner le pays. Un anachronisme, puisque c’est ce que depuis toujours la démocratie représentative prétend être : un système dans lequel les élus doivent exécuter le programme sur base duquel ils ont été élu par le peuple et qui a force de mandat. Et qu’ils doivent consulter la population quand surgissent des imprévus, pour modifier leur mandat en fonction des nouvelles exigences des électeurs. Un principe que la réalité dément en permanence, jusque dans la « plus grande démocratie du monde ». A titre illustratif voici ce qu’en a dit Obama : « Les hommes et les femmes communs, courants ont une mentalité trop étriquée pour gouverner leur propres affaires. LOrdre et le Progrès peuvent seulement survenir quand les individus renoncent et délèguent leurs droits à un souverain tout puissant »

 

C’est sans doute pour cela que le premier acte significatif de politique d’étrangère de l’administration Obama a été de permettre que se perpétue au Honduras un coup d’état militaire, condamné à l’unanimité par la communauté internationale. Lorsque Manuel Zelaya, président renversé en exil du Honduras, se rendra à l’ONU, 192 délégués se lèveront pour lui rendre hommage et l’acclamer. Et pourtant très vite, cette même « communauté internationale » acceptera de se laisser gagner par la cécité qui règne depuis , alors le Honduras agonise dans le silence complice de ceux qui sont tellement prompts pourtant à s’indigner, mais seulement pour les thèmes qui leurs sont désignés par les mises en scène de la propagande médiatique.

Si je parle ici d’Obama, du tandem Obama-Clinton en fait, c’est pour mettre l’accent sur cette continuité des politiques de déstabilisation de l’Amérique Latine. Le coup d’état élaboré sous l’administration Bush est réalisé sous celle d’Obama, et le dernier épisode de sa perpétuation à lieu, depuis les élections présidentielles de 2017. A présent, c’est l’administration Trump qui veille au maintien au pouvoir d’un président élu par une élection anti-constitutionnelle (aucun président ne peut exercer deux mandats) et frauduleuses. La fraude était tellement flagrante, que même le président de l’OEA Luis Almagro (le même qui veut la peau de Maduro et dirige le très contesté groupe de Lima) avait à l’époque demandé leur annulation immédiate et l’organisation de nouvelles élections, transparentes.

Cette notion de continuité des politiques des USA en Amérique Latine est importante. Negroponte qui avait été ambassadeur des USA au Honduras pendant les sinistres années 80, qui y avait patronné la création des escadrons de la mort (une pratique qu’il réitérera plus tard en Irak), s’est rendu en juin 2008 au Honduras afin de poser les prémisses de ce coup d’état avec les conspirateurs locaux. Deux autres importantes figures de l’époque joueront un rôle majeur dans la conception, la réalisation et la poursuite de ce coup d’état Le Général Romeo Vasquez Velasquez et le Lieutenant Billy Joya, les deux ont sévit au Honduras dans les années 80, mais pas seulement. On les retrouve au service de Pinochet ou de la dictature argentine. Après le Coup, Billy Joya, se présentera même à la télévision avec un gros dossier, pour expliquer comment ce nouveau coup d’état militaire a été conçu en se fondant sur celui qui avait conduit au renversement de Salvador Allende le 11 septembre 1973, et pourquoi Mel Zelaya devait être renversé pour les même raisons qu’Allende. Le spectre du communisme, selon lui, plane sur le Honduras. Après le coup d’état, le président de fait, Micheletti, fera de Billy Joya son principal conseiller militaire (et en méthodes de répression). Joya réinvente les escadrons Cobra, du nom d’un des escadrons de la mort dont il avait été membre pendant les 80. Quand à Vasco Velasquez qui a dépassé depuis longtemps l’âge de la retraite, j’ai appris récemment qu’il s’accroche et refuse toujours d’abandonner la passionnante activité qui consiste à organiser la répression d’un peuple rebelle, c’est le sens de sa sinistre vie. Il y a de nombreux exemples de cette persévérante continuité, ce qui est important à retenir : Alors qu’une lueur d’espoir se dessine au Honduras, pour qu’elle puisse illuminer le pays, il ne faut jamais oublier que l’ennemi réel se cache derrière les apparences, c’est celui qu’il faut combattre et abattre de telle manière que son retour cette fois devienne impossible.

Aux commandes de la guerre nucléaire, un caractériel narcissique entouré de faucons et/ou de fanatiques religieux

Aux commandes de la guerre nucléaire, un caractériel narcissique entouré de faucons et/ou de fanatiques religieux

Un puzzle mondial évolutif au dessin encore indéfini

Tout cela se déroule à un moment où cet ennemi est affaiblit mondialement. La réorganisation des pouvoirs géopolitiques mondiaux, la maladresse de Trump dont il est plus rapide de citer les amis internationaux que tous les ennemis qu’il s’est créé sur toute la planète - qui nouent chaque jour entre eux de nouvelles alliances - menace les USA d’avoir à se battre en même temps sur tous les fronts. La menace d’une guerre avec l’Iran est réelle, alors que l’Iran a noué des alliances avec l’Irak, la Syrie, le Hezbollah, soutient au Yemen des « rebelles » qui se montrent de plus en plus efficaces pour contrer l’immense pouvoir militaire de la dynastie des Saoud, avec des armes de fabrication « maison ». La Chine, la Russie, l’Inde ont signé un Traité de collaboration en matière de défense, l’Union Européenne pour la première fois depuis sa création, comme annexe de Washington et de ses lobbys, montre quelque velléité d’indépendance dans sa diplomatie mais aussi en matière de défense. Je ne suis pas une spécialiste de la géopolitique internationale, mais il me semble évident que si les USA peuvent encore se prétendre première puissance mondiale dans le domaine militaire, leur suprématie est remise en question. Quand j’écoute les évaluations de puissance selon les critères en vigueur, il me semble qu’ils mettent l’accent sur le pouvoir de destruction massive de chaque armée mais ne prennent pas suffisamment en compte la créativité dont peuvent faire preuve les résistances locales, Vietnam-Yemen même ennemi, même résistance acharnée. Les USA sont talonnés de prés, sinon dépassés, par la Chine et la Russie. Et donc, c’est pure logique, de penser que face à l’alliance militaire de ces deux pays, les forces militaires étasuniennes seraient en très en mauvaise posture. Surtout s’ils avaient à combattre en même temps l’armée Iranienne et ses alliés , la résistance du peuple du Venezuela, et sur tous les autres fronts de guerre et champs de bataille sur lesquels sont présentes les troupes étasuniennes. Ce serait la fin des USA et celle de notre monde.

La tension monte, le comportement erratique de Trump, dominé par ses émotions le rend difficile à gérer pour son équipe de faucons qui veulent mettre le feu aux poudres, l’horizon temporel de Liaponov, durée pendant laquelle peut être prévue l’évolution d’un système, est au raz des pâquerettes, nous sentons que le dénouement se rapproche sans savoir avec certitude ni quand ni comment il se produira, s’il nous conduirat vers le chaos ou si de nouveaux équilibres se dessineront en faisant l’économie de la force brutale.

 28 juin 2009. Depuis ce jour le peuple du Honduras affronte la répression

28 juin 2009. Depuis ce jour le peuple du Honduras affronte la répression

Le Honduras a besoin de soutien

Le Honduras a besoin d’un soutien International que ce rééquilibrage des rapports de force pourrait favoriser. En période d’imprévisibilité, le conditionnel est de rigueur. Ce sont aussi des moments qui favorisent l’amplification des battements d’ailes de papillon, des phénomènes de résonance qui peuvent faire de l’improbable une nouvelle réalité, pourvu que les résonances soient bien relayées. L’improbable en l’occurrence, c’est ce gouvernement de Souveraineté Populaire, que le peuple du Honduras, comme d’autres, aspire à mettre en place, et dont il pose en ce moment même les prémisses, des Plateformes de lutte qui formulent des propositions dans les différents domaines de gouvernement d’un pays, des Plateformes qui devraient être réunies sous égide d’une Plateforme Commune, posant les fondations d’une Assemblée Constituante qui se déroulerait sous un gouvernement de transition, mis en place avec l’aide et la supervision de la Communauté Internationale. C’est une option, celle que présente, la porte-parole du mouvement, la Doctora Suyapa Almagro, qui a été plébiscitée comme leader de la Plateforme de Lutte contre la privatisation de la santé et de l’enseignement. La création et la mise en œuvre de nouvelles plateformes, sous omniprésente menace de la terreur d’état, est l’étape de cette option qui se déroule en ce moment. Le but est un pays de bien vivre pour chacun et pour tous, un rêve rendu possible parce que la population a pris en main son destin, diagnostique des maux et formule des besoins et souhaits concrets, et s’apprête, ensemble avec tous les talents du pays, et tous ces soutiens extérieurs de compétente bonne volonté qui se manifestent, a concevoir les meilleures solutions pour y parvenir.

Pour pouvoir constituer un gouvernement transitoire qui permette le déroulement d’une Assemblée Constituante Originaire (dirigée par le peuple) le Honduras a besoin su soutien de la communauté internationale. Et l’opinion publique peut faire pression en rendant visible le Honduras, et manifeste sa sympathie pour le projet.

 

Demain, sera le sinistre anniversaire de 10 ans de coup d’état indéfiniment perpétué qui ont conduit le pays au désastre et plongé les habitants dans un tsunami de misère. Et après demain… ?

 

 

Anne Wolff

 

Pour de meilleurs lendemains

Pour de meilleurs lendemains

Partager cet article
Repost0
26 juin 2019 3 26 /06 /juin /2019 02:15
La docteure Figueroa, présidente du Collège des Médecins et leader incontestable et appréciée de la plateforme

La docteure Figueroa, présidente du Collège des Médecins et leader incontestable et appréciée de la plateforme

L’actuel soulèvement qui se poursuit jour après jour au Honduras est catalysé par la privatisation des systèmes de santé et de l’éducation que veut mettre en place le « gouvernement ». Déjà la situation actuelle est gravissime, la majorité des enfants qui terminent l’école primaire n’accèdent pas à l’enseignement secondaire. Les hôpitaux manquent de matériel médical, de fournitures et de médicaments. Les patients ne peuvent se procurer les médicaments qui leurs sont prescrits... La privatisation achèverait de consacrer ce qui ressemble de plus en plus au génocide du peuple du Honduras, alors que plus de 60 % de la population vit dans la misère, et que l’exode est devenu le chemin obligé de ceux qui veulent avoir une chance de survie. Le soulèvement du peuple du Honduras, c’est le cri d’un peuple en colère qui veut en finir une fois pour toute avec la dictature et participer à la reconstruction du pays. Un pays où il ferait bon vivre pour tous.

Il y a quelques jours a été lancée le Dialogue Alternatif de la Plateforme contre la privatisation de la santé et de l’éducation. Il illustre parfaitement le sens de cette lutte et la manière dont la conduisent, au risque de leurs vies, des personnes éminemment respectables.

Ce moment est le passage d’un seuil dans cette lutte, passage de la protestation à l’action constructive, qui a été rendu possible par la massive mobilisation d’un peuple déterminé à prendre son destin en main. Ce dialogue, c’est le point de départ d’une transformation totale du mode de gouvernement du pays, de la dictature à la souveraineté populaire. C’est un moment d’histoire écrit par le Peuple.

 

Le but de ce dialogue alternatif est de réaliser un plan de santé et d’éducation COHÉRENT qui permette à chaque habitant(e) d’accéder tant à une bonne éducation qu’aux soins médicaux dont il ou elle aurait besoin pour conserver une bonne santé. Si des techniciens de haut niveau technique du pays et des invités expérimentés participent à la conception de ce plan, les populations des diverses régions du pays jusqu'aux plus petites municipalités, des divers secteurs d'étude et de travail, sont invitées à former leur propres tables de dialogues pour participer à son élaboration. « Con mucho alegria », avec cette joie contagieuse et cette chaleur humaine qui toujours refont surface, chez le peuple résistant du Honduras, jusque dans les pires moments  de douleur, d’affrontement et de répression.

La capacité d’auto-organisation du peuple du Honduras, sa détermination sont exemplaires.

L’Assemblée se lève pour une minute de silence et de recueillement offerte à ceux qui ont perdu la vie depuis les débuts de cette lutte. La première réunion de la plateforme a eu lieu le 12 avril en cette même salle du collège médical. On se s’engage pas dans une lutte contre l’état au Honduras sans mettre sa vie en danger.

L’Assemblée entonne ensuite en cœur l’hymne national. Parce qu'il est question ici d'un projet de patrie.

Le but de dialogue est d’établir une radiographie cm² par cm², de la situation dans l’ensemble du pays et des besoins de toute la population en matière de santé et d’éducation, afin de formuler un projet en adéquation avec les besoin réels des habitants. La proposition d’un modèle alternatif, incluant, respectueux des droits humains et tous sont appelés à participer.

Ce jour-là sont présent les coordinateurs de la plateforme, les professionnels de la santé et de l’enseignement, le peuple militant. Il y a aussi quelques invités de marque, observateurs, rapporteurs et professionnels venus apporter une aide technique. Le Représentant de l’Union Européenne, un représentant de l’Ambassade de France, un représentant de l’Ambassade du Canada, un représentant de l’Ambassade de Costa Rica, un représentant du Programme des Nations Unies pour le développement et la représentante de la haute commission des Nations Unies pour les Droits Humains. Et cela est remarquable, puisque ces mêmes instances soutiennent le projet de développement pour la région initié par Andres Manuel Lopez Obrador et élaboré par la CEPAL (Commission de l’ONU pour le développement économique de l'Amérique Latine) qui ne pourra malheureusement être mis en pratique au Honduras que lorsque le pays sera débarrassé de la corruption. Des représentants du gouvernement sont également présents : le vice-ministre de l’éducation et un membre du ministère de gouvernement et justice. Accueillis entre huées et applaudissements, la présentatrice leur rappelle que pour participer à cette plateforme, ils doivent en respecter les principes comme l’égalité entre participants.

[Pendant ce temps, les USA, Israël et quelques pays d’Amérique Latine envoient au Honduras des armes et des contingents de militaires « pour faire face aux situations d’urgence », entendre  « réprimer le peuple en résistance »]

Cet engagement est aussi engagement politique, une lutte contre les politiques néo-libérales imposées depuis plus de trente ans dans le pays, dans la région et dans le monde. Leur échec à assurer le bien-être des populations, le développement des pays est amplement consommé, il est temps de changer de modèle. C’est aussi une lutte contre la corruption qui gangrène tous les rouages de l’état sur tout le territoire.

Le dialogue alternatif est issu de l’échec du dialogue tenté avec le gouvernement, spécialiste en Consultations biaisées, dont il décide par avance des résultats auquel devrait parvenir le simulacre de dialogue. Les conditions d’un nouveau dialogue avec le gouvernement : il devra intégrer la Plateforme comme interlocuteur à part entière, alors que l’entièreté des débats devra être transmise en direct par les médias, un médiateur international spécialisé dans les politiques publiques devra être présent garantissant le respect des droits humains et de l’impartialité des débats. Des conditions inacceptables pour le gouvernement et donc la plateforme se met au travail sans lui, commençant à écrire l’histoire d’un nouveau système de santé et d’éducation pour le pays, une nouvelle histoire du Honduras. Sachant que le lutte pour faire respecter la Constitution qui accorde à tous le droit à la santé, à l’éducation – actuellement un fiction de droits - se gagne dans la rue. Et que le slogan que tous reprennent à présent : "Fuera JOH !" qui appelle à la démission du président Juan Orlando Hernandez, est à présent dans toutes les bouches, comme la condition de possibilité d'une régénération du pays.

La docteure Figueroa, présidente du Conseil des Médecins et leader incontestée et aimée du mouvement prononce alors quelques mots. Elle remercie les présents mais aussi tous ceux, innombrables, qui dans tous le pays se sont mobilisé pacifiquement pour défendre les droits de tous. En particulier la jeunesse, les étudiants qui se sont dédiés de tout cœur à cette lutte. Elle remercie aussi les patients qui sont leur raison d’être et leur inspire une vocation de service. « Le peuple s’est mobilisé pour un meilleur avenir face à un gouvernement qui non seulement utilise le pouvoir à son propre profit mais qui aussi oublie que le véritable pouvoir repose dans le peuple et non dans les charges qu’il occupe de manière transitoire. La forme du pouvoir établie par l’article 4 de la constitution est représentative, le pouvoir n’est pas exercé directement par le peuple sinon par des personnes élues pour agir en tant que ses représentants, en son nom et pour son bénéfice et non le contraire comme cela se produit aujourd’hui. Le dialogue citoyen alternatif sera un exercice de participation - incluant, objectif, formulant des propositions - entre différentes personnes, groupes, secteurs de la société hondurienne, incluant des représentants de l’état et d’organisations internationales et coopération qui convergent en fonction de l’Intérêt Général de la société pour concevoir un Plan pour l’amélioration intégrale du système de santé et d’éducation publique. Ce plan entend récupérer les système de santé et d’éducation publique du pays - qui aujourd’hui sont externalisés selon un modèle de gestion de services –  qui, finalement, puisse parvenir à ce que l’éducation et la santé soient garanties et reconnues comme des droits fondamentaux et non comme des biens du Marché, comme c’est le cas en ce moment ». Elle fait valoir que ces fonctions de l’état doivent être à charges de professionnels compétents et expérimentés de la santé et de l’éducation à l’écoute des besoins de chacun(e) et non remis entre les mains de gestionnaires de marchés.

Différentes Tables de Travail vont être mises en action, les premières concernent le secteur de la santé. 1)Une étude du cadre législatif et normatif en vigueur. 2)Une étude de l’affectation efficiente et rationnelle des budgets. 3) Une étude du rôle du secrétariat de l’éducation et de celui de la santé, de leurs attributions constitutionnelles et légale. 4)Modèle d’attention au système de santé. 5) décentralisation pour rendre accessibles santé et éducation dans tous le pays 6) Bilan de l’état des système de santé et d’éducation et de ses ressources humaines dans tout le pays. Afin d’ouvrir des espaces pour tous ceux qui jusqu’ici ont été exclus 7)Une table d’administration, contrôle et gestion des ressources et d’identification des situation d’urgence.  8)Une autre table sera plus spécifiquement orientée vers l’enfance et la jeunesse, leurs besoins spécifiques en matière d’éducation et de santé. 9)Une table fondamentale est celle qui sera chargée de la lutte contre la corruption. Celle sans quoi rien n'est possible.

Parallèlement des tables spécifiques seront consacrées aux différents aspects du système d’éducation. Et le processus est ouvert à la création de nouvelles tables en fonctions d’autres thématiques spécifiques qui seraient identifiées.

Chaque Table aura à sa disposition un coordinateur et un rapporteur et sera composée d’au moins 10 personnes reconnues pour leurs compétences, pour leur intégrité et leur compromission social, ils seront assistés par une équipe technique qui facilitera les processus internes de travail de chacune des différentes tables. Chacune comptera aussi la présence d’observateurs nationaux et internationaux ayant les mêmes qualités d’intégrité et d’engagement social. Ceux-ci seront présents afin de rendre compte du sérieux du travail effectué, de sa transparence, de son objectivité et de sa rigueur technique.

Après que soit posé un diagnostique des forces et faiblesses des deux systèmes, des propositions stratégiques et opératives seront formulées et présentées publiquement et officiellement aux autorités à charge de ces domaines. La plateforme, représentée par des membres des échelles nationales, régionales et municipale, des hôpitaux, des écoles et universités, des organisations populaires et de travailleurs, etc. et des personnes qui s’impliquent individuellement, accompagnera la création et contrôlera la mise en œuvre du Plan afin que celui-ci ait un visage humain, le visage et l’empreinte d’un peuple qui a été historiquement exclu des décisions pour le pays et qui aujourd’hui réclame un espace pour l’exercice de la participation et qui par dessus tout réclame ce qu’on lui a pris : « Non à la privatisation ! », conclu la docteure Figueroa

 

J’ai entendu beaucoup de discours qui résonnent comme le bla bla bla des pieux souhaits et de manifestations de bonne intention dont on sait à l’avance qu’ils ne déboucheront jamais sur quoi que ce soit de concret, comme j’ai participé à ces réunions et tables de travail dont on réalise très vite que les conclusions dirigées ont été décidées à l’avance par quelque instance « supérieure ». Ici chaque mot résonne de la réalité concrète de ces millions de personnes mobilisées, impliquée, actives dans la réalisation de cette transformation du pays, chaque mot est chargé de l’intégrité, la rigueur, la compétence, la force de travail de ceux qui conduisent ce Projet. Et dans la salle le public enthousiaste est gonflé de l’espoir qui s’est en ce moment substitué à la colère.

A ce moment la présentatrice de cet événement nous apprend que 7 militants de la plateforme viennent d’être arrêtées dans un autre département du pays. L’ombre de la répression plane omniprésente.

Le prochain intervenant est le professeur Hernandez qui va expliquer comment la Plateforme a identifié les personnes qui seront observatrices et conseillères du processus. « Il y a quelque chose d’important dans ce processus de lutte, dans ce processus de pouvoir et de souveraineté politique » fait-il remarquer ,  "la participation à ce processus insurrectionnel à permis aux membres des différents Collèges Universitaires de sortir de leur bulle d’élitisme et de s’identifier à la Cause du Peuple du Honduras, de se rappeler qu’ils font partie du Peuple."

Il va alors présenter les différents observateurs et conseillers choisis pour accompagner ce travail. Il y a des conseillers du Honduras au parcours de lutteurs sociaux éprouvés et d’autres venus de pays, Costa Rica, Bolivie et même États-Unis et du Canada qui ont participé dans leurs pays respectifs à des luttes similaires.

Le prochain intervenant (dont le nom m’échappe) est le président du Conseil d’infirmerie du Honduras. Il y a 37 ans dans les années 80, synonyme de dictature au Honduras, il était un étudiant en médecine et se retrouvait avec un de ces professeurs (présent dans la salle) et un autre médecin à discuter des conditions de possibilité de l’autonomie universitaire alors légalement limitée. Ils étaient trois, aujourd’hui ce sont des millions de personnes qui se sont mobilisées, le peuple s’est organisé. S’il évoque la sinistre mémoire des 80, trop semblable à la dictature actuelle, c’est pour rappeler que : « Tout se qui est légal n’est pas correct. A une époque, l’esclavage était légal et ce n’était pas correcte. Des peuples ont été soumis à la souffrance de manière légale et ce n’est pas correct. Or les humains doivent toujours agir en fonction de ce qui est moralement correct. »

Article 3 de la Constitution du Honduras : Nul ne doit obéissance à un gouvernement usurpateur ni à qui assume des fonctions ou des emplois publics par la force des armes ou par des procédés qui contreviennent ou méconnaissent ce que cette Constitution et les lois établissent. Les actes validés par de telles autorités sont nuls. Le peuple à le droit de recourir à l’insurrection en défense de l’ordre constitutionnel

Cette inauguration va se poursuivre pendant encore plus d’une heure, et confirmer la qualité des intervenants, de leur expérience,  du travail entrepris et du soutien qu’ils veulent apporter à la résistance du Honduras. Les gens qui sont venus sont tellement nombreux que beaucoup d’entre eux n’ont pu trouver place dans la salle, une mobilisation se déroule dans la rue aux environs du Collège de Médecine. A la fin de cette présentation, tous vont aller les rejoindre pour constituer ensemble une marche pacifique qui se rendra à l’Université Nationale pour soutenir les étudiants et professeurs qui y sont en lutte. Symbiose et interaction de ceux qui ensemble forment un peuple uni.

Ce sont là les délinquants qui sèment le chaos au Honduras selon ce que diffusent les médias de propagande.

 

Anne Wolff

Partager cet article
Repost0
24 juin 2019 1 24 /06 /juin /2019 12:30
Le Honduras résiste (image alainet)

Le Honduras résiste (image alainet)

 

Alerte ! Désinformation éhontée sur la situation au Honduras !

 

 

Comme vous le lirez par la suite, le Honduras est au bord du précipice et la désinformation médiatique atteint des proportions ignominieuses. La narration qu’elle nous impose est celle d’un chaos que sèment dans le pays desbandes de délinquants qui pillent et incendient des bâtiments et manifestent violemment contre les forces de l’Ordre.

La réalité est tout autre. Pour l’immense majorité de la population, le pays est un enfer dans lequel les habitants sont soumis au règne de la terreur. La violence ciblée - contre tous ceux qui s’opposent aux exactions et aux pillages d’un narco-gouvernement, qui se confond avec le crime organisé et à ceux que pratiquent les Corporations auxquelles ce gouvernement à littéralement livré le pays - s’accompagne d’une violence aveugle, arbitraire, terreur sur fond de désolation, de ruine et d’une profonde misère.

C’est la cause de l’exode massif des honduriens, les nombreux enfants qui partent seuls inclus. Des personnes entament cette longue et dure marche avec l’infime espoir que, peut-être, avec beaucoup de chance, ils feront partie des quelques rares qui parviennent au but, la terre promise du mieux vivre, le mythe étasunien. Pour beaucoup partir, c’est fuir sans se retourner, parce que de toute façon, quoiqu’il arrive, cela ne pourrait être pire… pas même le grand risque de mourir, de disparaître en chemin. Un pas après l’autre pendant des milliers de kilomètres de privations et de dangers permanents, où comme victime de traite humaine, si pour ces migrants le Honduras est un enfer, le chemin ne l’est pas moins, la différence c’est qu’au bout du chemin il y a la faible lueur d’espoir qui n’existe plus dans leur pays.

J’ai entendu beaucoup d’appels venus du Honduras, au cours des derniers jours, ils viennent des voisins du plus pauvres des barrios écartés du fin fond du pays, ils viennent des paysans, des populations indigènes et garifunas, il viennent du corps médical, de celui des professeurs, d’autres corporations professionnelles et syndicats et autres associations, ils viennent aussi de membres de Partis politiques Traditionnels comme le Parti Libéral ou d’entrepreneur, de membres des corps de police et des groupes d’élites, de militaires actifs ou retraités,... ils disent à l’unisson : « Le pays est au bord du précipice, nous ne sommes ni des délinquants ni des terroristes, nous somme le peuple du Honduras qui d’une seule voix demande d’être entendu par la communauté internationale : le Président Juan Orlando Hernandez doit partir. Le pays doit avoir une chance de se reconstruire en mettant un terme à la corruption, au narcotrafic, à l’infiltration du crime organisé dans tous les rouages de l’état. Le pays doit avoir une chance de se reconstruire en consacrant les sommes démesurées qui ont été consacrées à la militarisation de la sécurité à des projets d’espoir, des projet de travail, d’éducation, de santé, de culture. »

La dégradation elle n’est pas neuve, alors que Manuel Zelaya, élu président en 2006 sur les listes du Parti Libéral avait entamé un redressement du pays, avec l’accent posé sur la justice sociale, le 28 juin 2009, il est renversé par un coup d’état militaire. Alors que l’ONU condamne le coup d’état à l’unanimité -tous les délégués se lèveront pour lui rendre hommage, quand Zelaya en exil s’y présentera - le tandem Clinton-Obama manœuvrera pour que ce pérennise le coup d’état. Cette fois encore ils seront aidé par la « communauté médiatique de propagande » qui désinformera massivement dans une opération éhontée de manipulation des inconscients collectifs : « Manuel Zelaya, le président déchu du Honduras » est matraqué de toute part, alors qu’officiellement sont toujours en cours les négociations qui devraient lui permettre de rentrer dans la légitimité de sa fonction de président. L’administration Obama contribuera activement à la réalisation des fraudes électorales qui permettront que le coup d’état se perpétue pendant 10 ans. Ce sont les mêmes qui construiront les cages où sont encore enfermés les enfants (et les adultes) du Honduras qui depuis fuient le pays, arrivent épuisés aux USA et se font capturer par la « Migra » ou les « bons citoyens » qui lui viennent en aide.

Les même ce ne sont pas tant les présidents que ces structures inamovibles du pouvoir qui à travers les alternances présidentielles poursuivent depuis des décennies les politiques impérialistes des USA en Amérique Latine (et dans le monde). Mais cela n’excuse en rien, ceux qui assumant des fonctions officielles de gouvernements contribuent à rendre cela possible. En ce qui concerne le Honduras, activement Hillary Clinton, et Obama par sa passivité son discret retrait depuis le coup d’état.

Où je veux en venir, ici spécifiquement : Est-il possible de renverser cela ?

Le premier acte de politique étrangère du Président des États-Unis du Mexique, Andres Manuel Lopez Obrador a été d’initier un programme de lutte contre la migration forcée qui prétend attaquer le mal à la racine sous forme d’un plan commun de développement pour les pays d’Amérique Centrale (Guatemala, Salvador et Honduras) et le Sud du Mexique. Pourquoi le Sud, parce que le Mexique est un pays balkanisé. Schématiquement : alors que les états du nord ont des croissances économiques positives qui peuvent atteindre un taux de +11 %, ceux du Nord subissent des croissances négatives qui peuvent être de l’ordre de -11 %. Ils sont donc eux aussi un des lieux d’origine de la migration qui « affecte » les USA.

Et ce plan prétend être un modèle pour le monde : Arrêter de lutter contre la migration forcée en luttant contre les migrants avec des mesures coercitives, prendre le mal à la racine, permettre à des personne qui n’ont aucune envie de partir de chez elles d’habiter leur pays dans des conditions de bien vivre.

 

(Cela vous semble évident ? Je ne sais combien de fois, j’ai posé la question à des militants des droits des immigrés « Que faites-vous pour que dans leur pays existent des conditions de vie décente ? » Pas un(e) n’a pu répondre à ma question de manière convaincante. Et pourtant c’est la vraie question et c’est une question d’équité. )

 

Ce plan a été conçu sous égide de la CEPAL (la Commission Économique pour l’Amérique Latine et les Caraïbes de l’ONU), en faisant appel aux pays concernés, à toute organisations, associations, nations et organisations de nations prêts à le soutenir. Il a été présenté au mois de mai dernier. J’y reviendrai certainement. Ce que je veux mettre en évidence ici, c’est que la mise en œuvre de ce plan au Honduras sera impossible tant que ce pays sera soumis à la dictature d’un narco-gouvernement corrompu. C’est clair, net, sans appel. Pas un dollar, un lempira qui serait accordé au gouvernement du Honduras où à ses représentants qui contrôlent les rouages de l’état (la corruption et le crime organisé infiltrent jusqu’aux municipalités et leur forces de répressions), n’a aucune chance de parvenir à ses destinataires.

 

La semaine dernière les prémisses de la mise en pratique du plan ont été initiées, par un accord de coopération signé entre le présidents des EU du Mexique et celui du Salvador. « Sembrando vida » consiste en l’ensemencement et la culture de 200 000 mille hectares au Sud du Mexique et 50 000 au Salvador avec des arbres fruitiers et d’autres fournisseurs de bois. Ce plan, qui donnera du travail productif dans la durée à des centaines de milliers de personnes, est aussi un plan de lutte contre le réchauffement climatique qui affecte sévèrement les agriculteurs de la région. Le Mexique accordera une aide de 30 millions de dollars au Salvador pour la réalisation de ce projet. J’ai appris depuis que déjà la Communauté Européenne a décidé d’apporter son soutien à ce projet, elle ne sera certainement pas la seule.

Bukele a dit de AMLO : « Il veut vraiment le bien de son pays ». Je le pense aussi. Je ne peux pas me prononcer en ce qui concerne Bukele qui vient d’accéder au pouvoir et est le président qui a le meilleur taux d’approbation d’Amérique Latine, Lopez Obrador en tout cas a choisi de lui faire confiance.

 

Il existe au Honduras une volonté majoritaire de réunir les forces pour concevoir et mettre en place un projet d’union nationale pour la régénération du pays comme celui qui se met en place au Mexique. Mais ces forces potentielles de transformation ont besoin du soutien de la communauté internationale et des personnes de bonnes volonté.

 

Ce que chacun peut faire, c’est chercher à s’informer sur la réalité de l’enfer que traverse le pays et sur la vitalité d’une résistance qui puise toujours au plus profond de la terreur, de la douleur, la force de chanter et de rire face aux armures des militaires. Le monde a laissé tomber le Honduras en 2009. L’enfoncera-t-il d’avantage encore par son silence et sa passivité en 2019 ?

 

Anne W

Partager cet article
Repost0

Présentation

  • : Le blog de Anne Wolff
  • : Comprendre la globalisation, apprendre à y résister
  • Contact

Profil

  • Anne Wolff
  • Amoureuse de la vie, d'une fleur, d'un papillon, d'un arbre, du sourire d'un enfant, je m'oppose à tout ce qui conduit à la destruction systématique de ce que la nature a créé, de la vie, de la beauté du monde, de la tendresse et de la dignité
  • Amoureuse de la vie, d'une fleur, d'un papillon, d'un arbre, du sourire d'un enfant, je m'oppose à tout ce qui conduit à la destruction systématique de ce que la nature a créé, de la vie, de la beauté du monde, de la tendresse et de la dignité

No Pub

Malgré les publicités imposées dans sa nouvelles versions qui apparaissent sur ce blog,celui-ci reste un acte gratuit.

Recherche

Nouvelles formes du fascisme

"Le vieux fascisme si actuel et puissant qu’il soit dans beaucoup de pays, n’est pas le nouveau problème actuel. On nous prépare d’autres fascismes. Tout un néo-fascisme s’installe par rapport auquel l’ancien fascisme fait figure de folklore […].

Au lieu d’être une politique et une économie de guerre, le néo-fascisme est une entente mondiale pour la sécurité, pour la gestion d’une « paix » non moins terrible, avec organisation concertée de toutes les petites peurs, de toutes les petites angoisses qui font de nous autant de microfascistes, chargés d’étouffer chaque chose, chaque visage, chaque parole un peu forte, dans sa rue, son quartier, sa salle de cinéma."

 

Gilles Deleuze, février 1977.

Toutes Dernières Archives