21 mai 2018 1 21 /05 /mai /2018 09:14

Le déroulement des élections au Venezuela, hier, selon le point de vue de l’officialisme ou selon celui de l’opposition semblaient être la descriptions de deux évènements distincts.

L’officialisme a son habitude était triomphaliste : une grande fête de la démocratie, une journée historique, une participation qui promet d’être un record. Alors que cette journée de scrutin se serait déroulée sans incidents, dans la sérénité.

La droite par contre insistait sur les centres de votation déserts, le triomphe de l’abstentionnisme et les multiples manifestations de rejets de Maduro. Ainsi que sur toutes les infractions commises par l’officialisme à la Constitution, aux lois électorales et aux accords de campagne conclus avec les 3 autres candidats. Étaient dénoncés tous les incitants à voter, illégaux ou illégitimes, utilisés par le Frente Amplio.

 Rien de très original, puisque la vie politique du Venezuela est sans cesse décrite par ce double discours, et que à la question qui ment, on peut la plupart du temps répondre que les deux parties mentent.  Les deux appliquent avec constance la méthode Goebbels, un mensonge indéfiniment répété devient une vérité. Sauf que dans ce cas, se retrouvent, en général, en présence deux « vérités » antagoniques et qu’il n’est pas toujours facile de dégager la réalité qui se cache derrière ces deux narrations.

Pourtant cette fois la version de la droite se confirme :

Les résultats officiels de l’élection

 Nicolas Maduro Moros : 5.869.123  votes

Henri Falcon : 1.832.603

Javier Bertucci : 935.561

Reinaldo Quijada :34.836

Ceci est un cuisant échec pour Maduro qui annonçait une participation massive, et visait et annonçait un score de 10.000.000 de voix en sa faveur.

Or les quelques 8.672..123 participants représentent moins de 43% des 20 et quelques millions d’électeurs et Maduro est réélu avec moins de 30% de votes en sa faveur. C’est aussi 40% de moins que le nombre de votes qu’il avait obtenu en 2013.

Mais cela n’a en rien perturbé le triomphalisme des « gagnants » qui doivent avoir des crampes aux zygomatiques, à force d’avoir affiché tout au long de la journée d’hier un sourire forcé.

Qu’est-ce que cela augure pour l’avenir. Rien de bon.

Non seulement le manque de respect par le Frente Amplio de Maduro des accords signés avec les autres candidats a  déjà amené Henri Falcon à se joindre à tous ceux qui d’avance refusaient de reconnaître le résultat de cette élection. Les irrégularités dénoncées concerne tant la mise en œuvre du processus électoral  de la part du Conseil National Electoral que l’utilisation des moyens de l’état par Maduro pour mener sa campagne. A ce cela se sont ajoutées les irrégularités constatées au cours de la journée d’’hier :  la plus flagrante était la présence des « punto rojo » (plusieurs centaines) à proximité des centres électoraux, parfois même jusque dans leur enceinte, alors qu’il avait été décidé qu’ils ne pouvaient se trouver à moins de 200m de ces centres. Les « punto rojo’ sont les stands du PSUV, outils de propagande, considéré par l’opposition comme des moyens de pression, où les électeurs pouvaient faire enregistrer leur « Carnet de la Patrie », la carte magnétique qui donne accès aux programmes sociaux et recevoir leur récompense, le plus souvent sous forme de caisse Clap, précieux colis de nourriture pour un peuple qui a faim. Les autres dénonciations concernaient les pratiques douteuses d’incitation au vote : des électeurs harcelés, voir menacés par des soutiens de Maduro., qui venaient les chercher chez eux, avec des véhicules pour les transporter jusqu’aux centres de votation. Les dénonciations concernent également le « vote assistés », quand des membres su parti accompagne l’électeur jusque dans l’isoloir.

Autant de  pratiques  qui violent les accords sur les élections signés par les différents candidats, mais aussi la loi électorale et la  Constitution.

Mais la réponse du « Frente Amplio » est que cela présence des Punto Rojo, sont des incidents sans importance puisque cela n’aurait aucune incidence sur le choix du votant. Ce qui montre surtout la désinvolture avec laquelle ils trahissent leurs engagements.

Une question récurrente face au triomphalisme Maduriste, et a la conviction avec laquelle le clan au pouvoir refuse de reconnaître l’existence du moindre problème au Venezuela, alors que les pénuries, la corruptions, la contrebandes et autres prévarications sont une réalité flagrante, le quotidien des gens d’en-bas    «:Croient-ils à leur propres mensonges ? Il semble que oui. » Mais dans quelle sphère coupée du peuple vivent-ils ?

Une chose en tout cas est certaine, c’est que cette faible participation et Maduro qui est très loin des 10 millions de voix annoncé, décrédibilise compétemment ses prétentions et sa réélection.

Les gouvernements progressistes d’Amérique Latine ont forcé l’admiration en étant élus aux premiers tous des élections avec des taux de participation avoisinant les 80%. Lors du scrutin de décembre 2012, Hugo Chavez avait été réélu avec 56,07 % des voix alors que le taux de participation atteignait 80,56% des électeurs. Faut-il en dire plus pour mesurer le chemin parcouru ?

Maduro peut prétendre avec une grande arrogance, qu’aujourd’hui le leader maximo du Chavisme, c’est lui. La vérité, c’est qu’aujourd’hui le Grand Leader du chavisme, reste Chavez. Et que seul peut prétendre lui succéder un peuple entier, avec un pouvoir populaire devenu la première force politique du pays ; « Todos somos Chavez ». C’est tout le contraire qui s’est produit depuis que Maduro est au pouvoir puisque le pouvoir est toujours plus concentré dans les hautes sphères de l’état, et qu'un régime d’exception, indéfiniment prolongé, transformé en règle permet au Président de gouverner par décrets dans de nombreux domaines.

Je suis tout de même assez hallucinée, après avoir regardé plusieurs meetings de campagne de Maduro, lassants par leur répétitivité… les mêmes mises en scènes, les mêmes scénarios, les même textes, régurgités avec la fausse spontanéité d’un acteur consommé… tous cela à force finissait par me faire douter. Malgré les centaines d’articles, nouvelles, opinions, analyses, les dizaines de vidéos avec une grande majorité de sources chavistes qui confirmaient la grave crise dans le pays, à force d’entendre Maduro répéter, à grands frais, que tout allait pour le mieux dans le meilleur des pays, et que les problèmes qui subsistaient seraient résolus d’un coup de baguette magique quand il serait réélu avec 1O millions de votes, je finissais par douter. Non de la véracité de mes sources, mais de leur caractère significatif.  On peut dired e tout cas, que s’il avait dirigé le pays avec la même compétence et les mêmes moyens (démesurés) consacré à la propagande, le Venezuela serait effectivement le meilleur pays du monde.

Le rôle de la propagande en politique, cela ne concerne pas que le Venezuela. Et c’est vrai qu’elle peut avoir un pouvoir de manipulation redoutable. Si je ne lisais quotidiennement les témoignages de contributeurs d’Aporrea, chavistes fidèles et fiables qui décrivent une situation catastrophique, j’aurais pu, comme tant d’autres bien plus prestigieux que moi, me laisser prendre aux mensonges du régime, et prendre toutes les assertions de l’opposition pour les mensonges malveillants d’une opposition frustrée et malveillante. Or s'il y a mensonge de la part de l'opposition, ce n'est pas quant à la réalité de la catastrophe, qu'elle instrumentalise à souhait,lmais bien dans sa prétention d'être touché par un malheur du peuple qui la sert dans son projet de reconquête du pouvoir.

  La propagande officialiste, elle est envahissante,  omniprésente, elle utilise autant les deniers et moyens de l’état, que les outils du PSUV et de Somos Venezuela. Etat et parti apparaissent souvent comme une seule et même entité qui ne semble prendre en compte, comme « population du Venezuela », que la partie du peuple qui les soutient.  L’enjeu de l’élection pour Maduro, c’était de pouvoir perpétuer la version d'un soutien majoritaire, et c’est raté. Pourtant hier, le triomphalisme était toujours de rigueur dans les rangs de l’offiicialisme, pour qui le déni de réalité semble devenu un outil de propagande supplémentaire.

Il faut attendre de nouveaux développements pouvoir voir quel va être le scénario qui prendra le dessus, parmi ceux qui ont été proposés. Dans le cas où Maduro se maintiendrait au pouvoir, les solutions sont soit une ouverture à un gouvernement de coalisation avec la partie de l'opposition qui se prêterait au jeu, soit l’adoption de la main dure avec une féroce répression de l’opposition et de la dissidence. Les autres options envisagent tous les moyens de le dégager par la force. Alors que le candidat Henri Falcon qui refuse de reconnaître les résultats, appelle à l’organisation d’un nouveau scrutin pour le mois d’octobre.

Aujourd’hui sera donc un jour décisif. Ce soir à l’heure vénézuélienne, nous en saurons plus sur le tour que prennent les évènement, y compris la manière dont le nouveau régime va transformer ce cuisant échec en victoire éclatante. Nous en saurons également d’avantage sur les stratégies mises en œuvre par l'opposition dure et sa capacité de mobilisation, alors que d’ores et déjà une partie d’entre elle appelle à la rébellion et à l’intervention de ceux qui d’avance refusaient de reconnaître le résultat du scrutin, les USA, ll’UE, l’OEA et lune majorité de pays de la région réunis sous le nom de Groupe de Lima. Et bien sûr, ce  qui m'intéresse particulièrement, ce sont les réactions de la dissidence (chavistes, autres gauches et communalistes) et la faculté qu'elle aura de s'organiser en mouvement de résistance et d'autoconstruction de la Commune.

Bientôt le Venezuela va se réveiller et affronter cette nouvelle journée qui suscite bien des inquiétudes

Anne W

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