11 avril 2018 3 11 /04 /avril /2018 07:07

 

 

Résistance du Copinh sous le modèle d’occupation continue

 

Par Roverto Barra

Maison d'amitié et de rencontre du Copinh

Maison d'amitié et de rencontre du Copinh

 

 

Le début des années 1990 a été marqué par le reflux des luttes révolutionnaires en Amérique Centrale. Ce reflux ne signifiait pas seulement ce changement de situation politique dans la région, alors que les forces guérilléras sont légalisées en tant que partis électoraux, il correspond aussi à l’ouverture des économies locales aux investissements du capital international dans des zones stratégiques, dans le contexte de l’élan néolibéral de privatisation des ressources des Etats et des biens de la nature.


 

Alors que pour les populations, la perte de référents politiques et idéologiques, à partir de la chute de la Révolution nicaraguayenne et du Bloc Socialiste de l’Europe de l’Est, provoque une démoralisation. Cela rendait chaque fois plus difficile l’articulation d’une unité et d’un travail conjoint. Les divers gouvernements néo-libéraux d’Amérique Centrale profitèrent habilement de la fragmentation des luttes sociales et de l’irruption d’une forte ONGisation des modèles d’organisation et de revendications sociales.

 

La recette néo-libérale, pour le Honduras, était fondée dans un « modèle d’occupation continue » qui permit, depuis les années 80, non seulement le pillage des ressources de l’Etat, mais entraîna aussi une perte continuée de souveraineté en faveur de l’Empire Nord-Américain, en échange de pouvoir et d’impunité pour les groupes de pouvoir.

Foto G. Trucchi | Rel-UITA

Foto G. Trucchi | Rel-UITA

La résurgence du peuple Lenca

 

Dans le cadre de ce scénario régional autant que national, la société hondurienne commença à souffrir de fortes attaques antipopulaires, avec le Décret 18/90, qui essayait de donner un caractère légal aux ajustements structurels de l’économie qui visaient à démanteler les entreprises publiques et à privatiser les ressources de l’état. Ainsi, le gouvernement néo-libéral de Rafael Callejas [1][i] impulsa {2][ii] vigoureusement une forte persécution contre les dirigeants syndicaux et un démantèlement progressif des politiques sociales et agraires dont bénéficiait la population la plus pauvre.

 

En 1992 -93, le paysan indigène hondurien ne figurait même pas (et ne figure toujours pas) dans les statistiques officielles. Parce que les nouvelles politiques agraires néo-libérales ne prennent absolument pas en considération les mesures qui répondraient à la grave crise rurale. Tout au contraire, en à peine 3 ans, plus de 50% des terres qui avaient été adjugées aux paysans dans le cadre du processus de Réforme Agraire de 1964 sont alors, à nouveau, retombées entre les mains du secteur privé.


Sans contrepoids politique ni social, le Gouvernement de Callejas a mis en œuvre (avec le soutien de la Banque Mondiale, du Fond Monétaire International et de l’Agence des EU pour le Développement International, USAID), un ambitieux plan d’ajustement, par lequel les meilleures terres paysannes et les territoires des peuples indigènes se retrouvaient au cœur de la transformation économique du pays. Les terres communautaires de l’Ouest du Honduras, historiquement oubliées, mais riches en forêts et ressources naturelles, se sont vu reconverties en un territoire disputé entre le grand capital national allié au transnationales, et les communautés rurales, dont le peuple Lenca organisé.

 

L'espérance est née à La Esperanza

 

Après la fin de la guerre au Salvador, des bataillons militaires honduriens vont être cantonnés dans la zone occidentale, en particulier dans la zone frontalière. Beaucoup de révolutionnaires internationalistes honduriens ont commencé à revenir au Honduras avec l’intention de soutenir les luttes sociales dans le pays. Ce qui a permis, après plusieurs essais et un lent travail d’organisation, que se génère une alliance, entre les leaders indigènes Lencas, les « predicadores de la palabra » (?NdT) et des ex-combattants révolutionnaires, afin de travailler ensemble à soutenir les requêtes historiques des communautés indigènes Lencas, et des organisations populaires de l’Ouest du Honduras.

 

Fruit de ces efforts, le 27 mars 1993, est né, à la Esperanza (Intibucá), le Conseil Civique des Organisations Populaires et Indigènes du Honduras – COPINH – avec pour objectif d’« améliorer les conditions de vie du Peuple Lenca et avoir une impact positif pour que dans notre pays, en Amérique Centrale et dans les Caraïbes, en Amérique Latine et dans le monde, puisse être implémenter un modèle de développement plus juste, plus digne, entre les êtres humains, en harmonie avec le milieu ambiant » [3][iii]

 

Le caractère urgent qu’avait la création du COPINH a été démontré par le cumul et la pertinence des actions menées pendant ses premières années d’existence. En peu de temps, l’organisation a réussi à paralyser l’industrie forestière dans le département d’Intibucá. Au moins 16 projets de scieries furent abandonnés grâce aux actions menées par les mobilisations. En juillet 1994, des dizaines de milliers d’indigènes Lencas descendirent des montagnes de Yamaranguila  et du département de Lempira, pour rejoindre la première et historique Marche Indigène et Noire Pour la Vie, la Justice et la Liberté. Cette mobilisation n’annonçait pas seulement l’émergence des requêtes des peuples originaires et noirs du Honduras, elle marquait également la différence entre un avant et un après dans les dynamiques organisationnelles et les luttes des mouvements populaires honduriens, avec un sujet social résurgent qui malgré son appauvrissement et son exclusion, a pris la parole et est devenu partie du protagonisme au Honduras et en Amérique Centrale.


Les requêtes présentées par la Marche connurent une victoire contondante. Le peuple lenca obtint la proclamation légale des deux premières municipalités indigènes du pays, San Francisco de Opalaca (Intibucá) et San Marcos de Caiquin (Lempira). En même temps plus de 50 accords furent signés entre la COPINH et le Gouvernement libéral de Carlos Roberto Reyna. Parmi ses accords figurent la construction d’écoles, l’ouverture de routes, centres de santé, etc… En plus un accord de révision de la Convention 169 (accord de l’ONT concernant les droits des populations indigènes NDT) finalement, fut ratifié le 28 mars 1995.

 

Depuis 1994, la société hondurienne a mené une forte lutte pour la démilitarisation nationale. Il faut rappeler que le pays souffrait une importante présence militaire (rééditée actuellement) dans tous les aspects de la vie nationale, le modèle de « l’occupation continue » impliquait non seulement la présence permanente des bases militaires des EU dans le pays, mais aussi l’omniprésence des militaires honduriens dans la conduite des institutions clés pour la sécurité de l’Etat, comme celles relatives aux migration, douanes, télécommunication, registre civil, etc)

 

Le Copinh, en Octobre de cette même année conjointement avec les afro descendants, les paysans, les membres de bases des églises, les femmes indigènes et les étudiants a mobilisé près de 20 000 personnes à la capitale pour exiger, entre autres requêtes, la dérogation au service militaire obligatoire, la fin de l’occupation nord-américaine et la démilitarisation du pays. Cela, et d’autres mobilisations dans le pays, a permis de déroger à la loi sur le Service Militaire et le retrait des militaires des institutions de l’état.

 

La Solidarité comme essence de la lutte et de la fraternité des peuples

 

L’insurrection indigène zapatiste au Chiapas et la demande de paix au Guatemala ont internationalisé les luttes du Copinh. En Avril 1995, une mobilisation a été organisée dans la capitale du Honduras, qui, parmi les diverses requêtes formulées, établit la solidarité avec les peuples indigènes et leur soulèvement militaire dans l’état des Chiapas (Mexique) et demande l’arrêt de la répression des peuples indigènes du Guatemala. Ce nouvel élan organisateur entrait en résonance avec les objectifs originaires du Copinh qui, en essence, recelait une nécessité de fraternité réciproque face à la terrible menace capitaliste impériale qui signifie une intensification de la domination et du pillage de l’Amérique Latine dans le cadre de l’imposition du modèle néolibéral.



 

Pour le Copinh, la solidarité avec toutes les luttes sociales du Honduras, d’Amérique Latine et du monde devint fondamentale, puisqu’elle assume que toutes les luttes des peuples sont aussi des luttes du peuple Lenca et de son organisation. C’est comme cela que dès 1995 il devint évident que toutes les luttes du peuple hondurien et du monde sont assumées comme propres luttes de Copinh. Un des grands efforts en ce sens fut d’essayer d’articuler les luttes ouvrières, paysannes et indigènes du Honduras et du continent comme un front de lutte contre la sévère menace que signifiait l’appel des USA pour la constitution d’une aire de Libre Echange des Amériques (ALCA)


Cette vision stratégique, de toujours promouvoir l’unité et la solidarité des luttes populaires, a permis, au Honduras, que les paysans, les ouvriers, les indigènes créent des espaces communs de lutte face aux menaces et face à la terrible crise économique qui les affectaient. Il faut se rappeler qu’en 1998, l’ouragan Mitch avait affecté sévèrement l’économie communautaire. La perte des infrastructures productives et de récoltes de grains de café[4][iv] a entrainé la ruine de beaucoup de producteurs et a donné lieu à une prise de position opportuniste du gouvernement de Carlos Flores Facussé qui en a profité pour imposer la logique néolibérale du Plan Majeur de Reconstruction et Transformation Nationale (PMRTN signe en Espagnol) qui donnait priorité aux politiques d’ajustement structurel et dans l’appareil de l’Etat, il mit tout en œuvre pour réduire les droits laboraux et sociaux et favoriser l’investissement et les crédits aux grandes entreprises.



 

La menace de désemploi dans le secteur public, le gel des salaires et la perte d’acquis laboraux poussèrent les fédérations FUTH et la Fecesitlih ainsi que d’autres secteurs populaires, à créer le Bloc Populaire -BP, au cours de l’année 2000. Cette première tentative d’articulation ouvrière et populaire après la grave crise d’organisation des années 90, rendit possible le rapprochement entre les organisations qui cherchaient à mettre en déroute le modèle néolibéral dans le pays. Ce furent les premiers pas d’un rapprochement entre le Copinh et le mouvement ouvrier organisé.

 

En 2001, depuis le Sud du Mexique est mis en action le Plan Peuple Panama – PPP qui opère comme fer de lance pour le pillage et l’exploitation des ressources naturelles. Ce qui va susciter, en réponse, la lutte des organisations ouvrières, communautaires, paysannes, indigènes et urbaines contre ce plan. Le Copinh s’est immédiatement engagé dans le travail de coordination des espaces de débats et l’organisation du Forum Mésoaméricain des Peuples en opposition au PPP. Dans les années suivantes, ce sont ajoutés à ces efforts les revendications et luttes populaires dans les secteurs profondément affectés par l’implantation des politiques néolibérales, comme le secteur enseignant, avec lequel la Copinh avait une grande proximité et éprouvait de l’admiration. Le secteur enseignant fut des plus affectés pendant le gouvernement de Ricardo Maduro et le Copinh a été une organisation particulièrement solidaire avec la cause des enseignants, réalisant des marches, soutenant les assemblées et occupations dans différentes parties de la région occidentale.


 

C’est par la confluence de la crise agraire, de la résistance des enseignants, de la lutte contre l’ALCA et contre le PPP que la résistance ouvrière, indigène et afro-descendante a gagné de la force, grâce au regard visionnaire et stratégique de différents dirigeants populaire nationaux, y compris la direction du Copinh. Tous constituants de la Coordination Nationale de la résistance Populaire CNRP – en 2003. Ce fut une expression inouïe et historique de l’unité du mouvement populaire du Honduras.

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Toutes les organisations coïncidèrent et soutinrent la proposition de « coordination tournante », qui donne la priorité aux régions (territoires), ainsi qu’à la délibération en assemblées et espaces de dialogue ainsi qu’au consensus à travers de ce qui s’appelle « conversatorios » depuis lesquels s’effectuent la concertation concernant des actions à échelles locale ou nationale. La première action relevante eut lieu en août 2003 avec la Marche de la Dignité, qui se concentra à Tegucigalpa regroupant des milliers de personnes de tout le pays pour exiger la fin de la répression contre les enseignants et des politiques néo-libérales du gouvernement de Ricardo Maduro.


Le Copinh a fourni un apport évident et notable  dans les différentes instances d’unités et d’articulations nationales comme régionales. Sur la plan national, l’apport portait sur de nouvelles formes d’articulation comme le CNRP, qui donnait priorité au dialogue sur la contrainte ou sur une démocratie sans consensus, ce qui représente une grande avancée pour le mouvement populaire hondurien puisque cela rend possible la formation de liens de solidarité entre les différents acteurs dans le respect de la diversité des points de vue, opinions et formes de lutte. L’apport du Copinh dans les luttes nationales a eu aussi un grand impact pour le projet de construction d’une société nouvelle des peuples originaires. Les peuples indigènes gagnèrent le respect et devinrent incontournables en tant qu’acteurs fondamentaux du changement. La capacité de mobilisation du Copinh mis en évidence le peuple Lenca, acteur fondamental pour penser et lutter pour le changement de société.


La lutte pour la libération de la femme

 

Au sein de ces revendications de droits au niveau national, les femmes du Copinh ont commencé un long chemin de croissance et posé les revendications de leurs propres droits. Un de leurs premiers combats importants a consisté à rendre visible les discriminations et violences au sein de l’organisation. Nombreux furent les agresseurs de femmes qui ont été expulsés de l’organisation grâce au courage et à la lutte chaque fois plus forte qu’ont impulsés les directions de Doňa Pascualita ou Berta Caceres. Ce ne fut pas facile de réaliser, par exemple, la première Assemblée de Femmes du Copinh, parce que certains redoutaient que cette instance divise l’organisation. Mais la pratique a mis en évidence tout le contraire, et donna lieu postérieurement à son institutionnalisation dans les statuts de l’organisation.


 

Pour Bertha, il n’était pas possible d’avancer dans la lutte anti-patriarcale et antiraciste si à l’intérieur même de l’organisation nous ne luttions pas contre les violences envers les femmes sous toutes leurs formes. Ses défis en ce sens ont conduit à l’intégration permanente des femmes dans les structures de direction de l’organisation, ainsi qu’à la formation des compagnonnes à tous les aspects de la lutte sociale afin de les intégrer au travail organisationnel du Copinh et de ses communautés.


Berta disait que “la lutte anti-patriarcale est une conception qui s’exprime dans tous les axes de travail du Copinh depuis ses principes fondateurs, dans les actions, dans les documents reprenant des paroles d’hommes et de femmes que consulte la base en particulier.[…] Cette vision anti-patriarcale traverse toutes les aires de l’organisation puisque ce que nous souhaitons, c’est un changement de la culture machiste, pour conquérir l’égalité des droits et une participation aux bénéfices du travail et à l’organisation, en prenant en compte que nous les femmes sommes des personnes différentes, avec des histoires différentes mais pas avec des droits inégaux.  Nous demandons par cette lutte que les décisions et modes de pensées des femmes pour la famille, l’économie, la politique, le développement organisé du pays et du monde soient valorisées. »



 

Pour Berta, la protection des femmes et des enfants victimes de violence, a toujours été une priorité. Son rêve était de pouvoir disposer d’un espace réservé pour les compagnonnes abusées ou agressées. Quelques années plus tard, ce rêve a commencé à prendre forme avec la proposition de construire une Maison Refuge pour les Femmes. En 2015, la Maison de Guérison et de Justice pour les femmes du Copinh a finalement été inaugurée. Beaucoup d’autres luttes et efforts ont été menés. Par exemple, le Copinh a mis en place, conjointement avec d’autres organisations de femmes, des Cours des Femmes, espaces où la violence pouvait être dénoncée et qui permettait de rendre visibles des stratégies de résistance face à ces violences,. Des espaces de rencontres entre femmes des peuples indigènes ont également été créés.


 

De pair avec Berta Caceres, les femmes du Copinh ont également mis en œuvre d’importantes luttes pour la défense du territoire. Un exemple important est la résistance des femmes de la communauté de San Antonio pour arrêter la construction du barrage El Tigre, sur la rivière Lempa, à la frontière avec le Salvador. Là, des milliers de femmes, ensembles, avec Berta et le Copinh ont marché d’innombrables fois pendant les années 2006 et 2007 pour la communauté, le visage couvert, la machette à la main, portant leurs enfants et exigeant le retrait du projet hydroélectrique qui, finalement, a été paralysé.



 

Luttes populaires unitaires et Refondation Nationale

 

Manuel Zelaya devient Président du Honduras en 2006. Il n’avait jamais entretenu de bonnes relations avec les organisations populaires, jusqu’après la dernière Grève Civique de 2008, impulsée par le CNRP. Dans ces années, le Gouvernement opérait déjà un virage vers les pays membres de l’Alliance Bolivarienne des Peuples de Notre Amérique - ALBA


Le Copinh, qui a toujours entretenu une bonne communication avec les représentants du Venezuela et de Cuba, put déceler l’importance de ce tournant pris par le gouvernement hondurien et a compris l’urgence de soutenir, dans la nouvelle conjoncture, la position courageuse du Gouvernement de Zelaya, qui commençait à affronter les groupes de pouvoir.


Ce processus de rapprochement du mouvement populaire grâce à la CNRP a débouché sur ce qu’on appelle la « candidature indépendante populaire » de Carlos H. Reyes, représentant ouvrier, Berta Caceres, leader indigène, Maribel Hernandez, dirigeante enseignante et Carlos Amaya, membre et dirigeant de la gauche hondurienne. Ils proposaient un programme en 12 points [5][v], des requêtes formulées à partir des accords conclus lors de la Rencontre des Organisations Ouvrières, Paysannes, Enseignantes, Communautaires et Populaires de l’année 2008

 

Le choix de Berta comme candidate, démontrait non seulement la maturité politique acquise par le mouvement populaire, mais aussi la reconnaissance de la direction de la meneuse indigène et du Copinh, lui-même. Ce fut à travers ce processus de rapprochement populaire que l’organisation réalisa la Rencontre Pour la Refondation de Honduras, à La Esperanza..


 

A partir de là, commence la tentative d’implantation d’un véritable Pouvoir Constituant, pour donner du pouvoir du peuple et refonder le pays à travers une nouvelle Constitution, populaire et originaire. C’est dans ce cadre de lutte pour le changement que se perpétua le Coup d’Etat de 2009. De ce fait, la « Candidature » a renoncé à se présenter aux élections (un geste de cohérence révolutionnaire) et elle a appelé à la résistance et à lutter dans les rues contre la dictature.


Le Golpe (coup d’état) et la lutte du Copinh

 

Le Copinh accompagnait l’initiative du gouvernement qui voulait consulter le peuple (au sujet de la tenue d’une assemblée constituante NdT), c’est pour cela que la répression militaire fut ressentie de manière dramatique. Dès les premiers moments, il apparut clairement que la lutte se mènerait principalement dans la capitale. Des milliers de membres du Copinh se mobilisèrent à Tegucigalpa. En plus de se mobiliser et d’accompagner les luttes pendant plus de 6 mois, ils constituèrent un détachement qui fut délégué pour défendre et protéger le périmètre de l’Ambassade du Venezuela pendant plus de trois mois.


Reconstruire le pouvoir populaire et la lutte communautaire

 

Une fois élu le gouvernement de Profirio Lobo, le Copinh a multiplié ses efforts pour accompagner les luttes des paysan(ne)s de l’Aguan, qui se faisaient massacrer pour demander le respect des Droits de la Terre.

 

En plus, un front de lutte et de protestation s’est ouvert, au sein de Front National de Résistance Populaire -FNRP- récemment constitué. Ceci malgré la radicalisation des positions : entre ceux qui prônaient la constitution d’un référent politique électoral et ceux qui appelaient à renverser la dictature par l’insurrection populaire. La ligne électorale était défendue par ceux qui étaient proches du Bloc Populaire, et les alliés politiques de Manuel Zelaya ; la ligne insurrectionnelle, elle, étaient défendues par ceux qu’on appelait les « refondateurs », chapeautés par le Copinh, les organisations de gauche et autres des luttes territoriales.

La division dans le mouvement populaire était consommée et l’approfondissement des contradictions électorales aussi. La fraude électorale de 2013 renforça les différences et ruptures entre les leaders sociaux qui accompagnaient la ligne électorale, alors que la ligne refondatrice avait à sa tête, Berta et Miriam Miranda d’Ofraneh (organisation des afro-descendants du Honduras), organisation sœur du Copinh. Les deux meneuses mirent en pratique une nouvelle dynamique de lutte, plus territoriale, depuis les communautés et pour la défense du Biens Communs de la Nature, face à l’assaut extractiviste du gouvernement de Lobo.


 

La lutte pour la Terre et les territoires devint une principale priorité des organisations refondatrices. La Plateforme des Mouvements Sociaux et Populaires du Honduras fut créée en 2013, convoquée par Berta et Myriam qui en prirent la direction. C’est dans le cadre de cette lutte pour la défense des territoires que se déchaîna une chasse et une criminalisation des leaders sociaux. La lutte de Rio Blanco, pour la Rivière Gualcarque a conduit ultérieurement à l’assassinat de Berta en 2016, parmi tous et toutes les autres leaders communautaires qui ont donné leur vie pour défendre les biens communs de la nature.



 

Dans l’étape actuelle, le Copinh, malgré qu’il ait été sévèrement frappée par la répression de l’état et des grandes entreprises, maintient une lutte déterminée contre les centaines de projets extractivistes qui menacent les communautés et les territoires lencas.

C’est le défi actuel du Copinh : poursuivre la lutte. C’est pourquoi il reconstruit son pouvoir depuis les communautés indigènes, à partir de l’histoire de ses luttes de résistance. Ce n’est pas seulement un combat pour le Copinh, ce combat fait partie des luttes qui se mènent partout dans le monde, pour la mère nature et pour l’humanité parce que déjà, il n’y a plus le temps, comme disait Berta.

 

Source Lista Informativa Nicaragua y más: Copinh: 25 años de lucha y revolución

 

Traduction Anne Wolff

 

 

 


[i] [1] Mis actuellement en examen aux USA pour le retentissant cas FIFAgate par lequel furent découverts les payements de pots de vin et des corruptions à l’intérieur de la Fédération Internationale de football - FIFA –. Antérieurement Callejas avait été mis en examen au Honduras pour différents délits de corruption. Dans un processus à la légalité questionnable, qui se conclut par un acquittement mettant un terme définitif aux poursuites pénales à son égard.

 

[ii][2] Reformas Laborales y acción sindical en Centro América http://library.fes.de/pdf-files/bueros/fesamcentral/07612.pdf 

[iii] [3]-Documento constitutivo del Consejo Cívico de Organizaciones Populares e Indígenas de Honduras.

 

[iv] [4] Au Honduras, le café est produit par des centaines de milliers de familles pauvres dépendant de leurs petites récoltes pour disposer d’un revenu de base annuel. Les petits producteurs sont exploités par les entreprises exportatrices et intermédiaires qui leur imposent des prix d’achat dérisoires pour leurs récoltes. A partir de l’année 1999 le prix du café sur le marché international s’est effondré, ce qui a entrainé le pire désastre pour l’économie locale communautaire dans le pays. La zone Lenca, à l’Ouest du Honduras, est une des principales régions productrices de café du pays.

 

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